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EAN : 9782917246047
48 pages
La Première Heure (01/01/1900)
4.25/5   2 notes
Résumé :
Les noms de Charles Baudelaire et d'Edgar Allan Poe sont en France intimement liés. C'est que s'il ne fut pas le premier à traduire Poe pour le public français (certains contes avaient déjà été publiés dans des revues), Charles Baudelaire entreprit ce travail avec l'intention résolue de faire de l'auteur américain "un grand homme pour la France" (lettre de Baudelaire à Sainte-Beuve du 19 mars 1856). "Edgar Poe, sa vie et ses oeuvres", paru pour la première fois en 1... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Baudelaire livre ici une sorte de biographie d'un écrivain américain alors peu connu en France, Edgar Allan Poe, qui doit servir de préface à la publication de ses oeuvres. Il veut donc faire connaître celui dont il admire l'écriture.
Ce n'est pas une biographie classique : certes, il y a les quelques mentions attendues de date, d'origine sociale, de première formation. Il y a quelques éléments sur les principaux textes publiés par Poe. Mais Baudelaire n'est ni un critique littéraire, ni un biographe. Il n'expose pas des faits bruts, il écrit lui-même en poète, sur un poète. C'est en cela que ce n'est pas une oeuvre froide, objective, mais bien une oeuvre poétique sur la poésie et sur un poète.
Et Baudelaire présente un « poète maudit » ; l'expression est postérieure, ce sera celle de Verlaine, mais c'est la même idée. Pour Baudelaire, Poe fait partie du petit nombre d'élus marqués par « le quignon », des génies non reconnus par la société, méprisés et incapables de trouver leur place dans le monde – au sens du XIX ème siècle, c'est-à-dire la bonne bourgeoisie, les gens respectables et aisés financièrement, dont la vie est malheureuse, mais dont l'oeuvre rayonne et rayonnera surtout après leur mort. Et ce portrait peut apparaître comme un autoportrait en creux.
Poe est ainsi décrit quasiment comme un misérable qui doit chercher son pain, n'ayant pas les moyens de subsistance. Sa femme est malade et souffre beaucoup et longtemps. Et lui, boit – mais boit beaucoup. Il boit en partie pour oublier, mais pas seulement, et Baudelaire présente cette ivresse comme une forme de long suicide, mais aussi un moyen pour rejoindre le monde de son imagination, pour recréer les visions de son esprit ; Baudelaire écrira sur les Paradis artificiels... Il n'est pas compris ni reconnu à la mesure de son talent, certains mettant en avant sa vie dissolue pour nier son génie, d'autres trouvant qu'il est trop original et fantasque, ne faisant pas assez d'oeuvres commerciales. Poe est américain, et, pour Baudelaire, c'est la société capitaliste dans toute son horreur. Il ne l'exprime pas totalement ainsi, mais il oppose le génie qui travaille pour exprimer ses visions, et le mercantilisme et l'appât du gain des autres écrivains qui ne pensent qu'à l'argent, à ce qu'un livre va rapporter.
Et si Baudelaire admire tant Poe, ce qui le distingue des autres – à sa propre image, c'est son goût pour le Beau : il admire la beauté en toute chose.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
De tous les documents que j’ai lus est résultée pour moi la conviction que les États-Unis ne furent pour Poe qu’une vaste prison qu’il parcourait avec l’agitation fiévreuse d’un être fait pour respirer dans un monde plus aromal, — qu’une grande barbarie éclairée au gaz, — et que sa vie intérieure, spirituelle de poëte ou même d’ivrogne, n’était qu’un effort perpétuel pour échapper à l’influence de cette atmosphère antipathique. Impitoyable dictature que celle de l’opinion dans les sociétés démocratiques ; n’implorez d’elle ni charité ni indulgence, ni élasticité quelconque dans l’application de ses lois aux cas multiples et complexes de la vie morale. On dirait que de l’amour impie de la liberté est née une tyrannie nouvelle, la tyrannie des bêtes, ou zoocratie, qui par son insensibilité féroce ressemble à l’idole de Jaggernaut. — Un biographe nous dira gravement — il est bien intentionné, le brave homme — que Poe, s’il avait voulu régulariser son génie et appliquer ses facultés créatrices d’une manière plus appropriée au sol américain, aurait pu devenir un auteur à argent, a money making author ; — un autre, — un naïf cynique, celui-là, — que, quelque beau que soit le génie de Poe, il eût mieux valu pour lui n’avoir que du talent, le talent s’escomptant toujours plus facilement que le génie. Un autre, qui a dirigé des journaux et des revues, un ami du poëte, avoue qu’il était difficile de l’employer et qu’on était obligé de le payer moins que d’autres, parce qu’il écrivait dans un style trop au-dessus de vulgaire. Quelle odeur de magasin ! comme disait Joseph de Maistre.
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Dans ces derniers temps, un malheureux fut amené devant nos tribunaux, dont le front était illustré d’un rare et singulier tatouage : Pas de chance ! Il portait ainsi au-dessus de ses yeux l’étiquette de sa vie, comme un livre son titre, et l’interrogatoire prouva que ce bizarre écriteau était cruellement véridique. Il y a, dans l’histoire littéraire, des destinées analogues, de vraies damnations, — des hommes qui portent le mot guignon écrit en caractères mystérieux dans les plis sinueux de leur front. L’Ange aveugle de l’expiation s’est emparé d’eux et les fouette à tour de bras pour l’édification des autres. En vain leur vie montre-t-elle des talents, des vertus, de la grâce ; la Société a pour eux un anathème spécial, et accuse en eux les infirmités que sa persécution leur a données. — Que ne fit pas Hoffmann pour désarmer la destinée, et que n’entreprit pas Balzac pour conjurer la fortune ? — Existe-t-il donc une Providence diabolique qui prépare le malheur dès le berceau, — qui jette avec préméditation des natures spirituelles et angéliques dans des milieux hostiles, comme des martyrs dans les cirques ? Y a-t-il donc des âmes sacrées, vouées à l’autel, condamnées à marcher à la mort et à la gloire à travers leurs propres ruines ? Le cauchemar des Ténèbres assiégera-t-il éternellement ces âmes de choix ? Vainement elles se débattent, vainement elles se forment au monde, à ses prévoyances, à ses ruses ; elles perfectionneront la prudence, boucheront toutes les issues, matelasseront les fenêtres contre les projectiles du hasard ; mais le Diable entrera par une serrure ; une perfection sera le défaut de leur cuirasse, et une qualité superlative le germe de leur damnation.
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