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EAN : 9782917689981
225 pages
Editions ActuSF (06/11/2015)
3.71/5   28 notes
Résumé :
"Je suis une Victoire, ma chérie... Si tu préfères, un soldat, engagé dans une lutte dont l'origine se perd dans la nuit des temps."

L'Orvet a fait de l'humanité son terrain de chasse, causant famines, guerres et destructions. De la Rome antique jusqu'aux étoiles les plus lointaines, ce roman retrace le combat et les sacrifices des Victoires, ces femmes qui luttent dans l'ombre pour nous protéger.
Lettrées, guerrières ou amantes, voici huit p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Quel livre singulier. On tombe tout de suite sous le charme de ces femmes guerrières qui, à travers le temps, combattent avec une énergie farouche le même ennemi commun.
Ugo Bellagamba nous offre ainsi quelques superbes portraits de femmes. Vous les trouverez flamboyantes, envoûtantes, lettrées, dangereusement manipulatrices, et prêtes au sacrifice suprême pour contrer cet ennemi insaisissable, impalpable, venu du fin fond des étoiles.
Étrange livre où les hommes plastronnent, font la Grande Histoire, mais sont protégés par les femmes en coulisse, dans l'arrière-cour, de ce monstrueux dévoreur d'âmes. Gustave Effel, l'empereur Auguste, Saint Thomas d'Aquin, tant d'autres encore, doivent une fière chandelle à celles que l'on nomme en secret les Victoires.
Superbes vigies qui empêchent ce vampire suceur d'esprits de plonger notre monde dans un éternel chaos.
Interminable partie de go qui débute à l'aube de l'humanité pour se poursuivre plus loin que les étoiles, sans que l'on sache qui du monstre ou des Victoires finira par l'emporter.
Suivez les vies brèves mais radieuses de Natacha, d'Euphoria, de Patrizia, de Gloria, d'Égéria, de Nadia, de Coppelia qui va peut-être parvenir à renvoyer notre démon dans les profondeurs noires de l'espace, de Oruah enfin, la toute première à l'avoir baffé de si belle manière.
Quel beau livre qui nous montre le dessous des cartes, le sens caché de l'histoire. Quelle immoralité de faire, au travers des siècles, de nos misères et de nos grandeurs un simple terrain de jeu pour notre démon incorporel.
À lire absolument.
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En voilà bien un nom pompeux : L'Origine des Victoires ! Derrière cette belle couverture de Casimir Lee, se cache le vibrant hommage aux femmes dans l'Histoire proposé par Ugo Bellagamba (auteur notamment de Tancrède, une uchronie, du Double corps du roi avec Thomas Day, et accessoirement, ancien directeur artistique des Utopiales de Nantes et actuel conseiller de l'organisation de Nice Fictions, ville où il est également enseignant-chercheur, bref, ça vous pose un auteur !).

Huit moments de l'histoire de l'humanité, voilà ce que nous propose Ugo Bellagamba ; huit moments pour découvrir un combat ancestral et diachronique où l'engagement des femmes n'en est pas réduit au féminisme tant décrié aujourd'hui. Passant de 1973 à 1932, en passant par 31 av. J.-C. et l'an 2032, l'auteur se permet de jumeler huit récits qu'on pourrait prendre comme huit nouvelles mais qui sont étonnamment liés sans jamais mettre en scène les mêmes personnages. Ainsi, nous suivons dans une forme de mouvement d'inexorable balancier entre les époques le destin de combattants contre l'influence toujours plus grande et dangereuse de l'étrange Orvet, puissance mystique qui a la possibilité de posséder l'esprit et le corps d'une certaine catégorie de la population et d'en faire ses orvets, ses jouets en somme. Face à lui, la résistance s'organise au fil des temps sous de multiples façons, et c'est l'occasion pour l'auteur de mettre en scène des résistances improvisées, des sociétés secrètes, des voyageurs solitaires, tout comme des vengeresses impitoyables. Elles s'appellent Euphoria, Nathacha, Patrizia et quantité d'autres prénoms possibles, et elles sont les Victoires qui nous ont défendu, nous défendent et nous défendront encore devant la puissance destructrice de l'Orvet.
Avec ce roman qu'ActuSF a bien fait de rééditer dans sa collection Hélios (bientôt La 8e colline de Rome du même auteur ?), nous ne pouvons pas dire qu'Ugo Bellagamba, avec ses références antiques méditerranéennes et son nom qui chante, se facilite la tâche. le fait même de tenter l'aventure du diachronisme n'est déjà pas une mince affaire : comment lier efficacement une intrigue de roman se déroulant sur plusieurs dizaines de milliers d'années qui n'a aucune unité de lieu ou de temps ? Bien sûr, nous pourrions supposer que le thème, nouvelle variation du traditionnel « Ordre face au Chaos », suffit pour unifier le tout, ce combat épique et ancestral étant largement porteur ; nous pourrions aussi nous dire que finalement le véritable protagoniste est l'Ennemi, cet Orvet quasi imbattable, antagoniste pervers et vicieux qui traque ses adversaires jusque dans les recoins les plus intimes, et de fait l'auteur a choisi de le mettre en scène aussi directement en exposant ses pensées dans des paragraphes entiers en italique.
Pourtant, le véritable héros, ou plutôt héroïne, c'est le concept même de Victoire ; en effet, ces allégories antiques, largement réutilisées et adaptées depuis l'époque romaine, équivalaient quasiment aux Nikê grecques, symbolisant une victoire souvent militaire, parfois sportive, toujours politique et étant tout à la fois porteuses de trophées et trophées elles-mêmes. Ce sont ces victoires discrètes remportées au cours de l'Histoire que l'auteur a voulu mettre en valeur en usant très subtilement de ressorts de l'histoire cachée (le chapitre sur Thomas d'Aquin est sûrement le meilleur exemple), tout en se permettant de toucher lors de chaque nouveau récit à un genre supplémentaire. Ainsi, le lecteur en est-il pour son argent quand il découvre qu'il va agréablement parcourir un récit de type thriller où la course-poursuite ne peut mener qu'à des pertes humaines, un récit réaliste qui vire au cauchemar au sein d'une société secrète, un récit médiéval façon « le Nom de la Rose » où les moines se demandent bien si la Gloria chrétienne les sauvera, un peu de cyberpunk futuriste, pour finir encore plus loin dans le space opera et la fantasy préhistorique. Je n'ai pas dit un seul mot du décor utilisé par l'auteur, il est vrai qu'il s'appuie largement sur sa connaissance de la Côte d'Azur en nous prenant par la main pour visiter Marseille, Digne, Nice et compagnie ; je n'en ferais pas un argument de vente, mais c'est toujours agréable de changer un peu des villes surpeuplées habituelles, des New York, Paris et Londres, ou des plans cinématographies les plus connus.

Dans L'Origine des Victoires, Ugo Bellagamba fait donc à la fois de la fantasy et de la science-fiction d'une façon peu classique, mais en y apportant un certain côté académique propre à dérouter autant qu'à éblouir.

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Marre des superhéros, ces nouveaux veilleurs autoproclamés issus de la culture pop ?
Alors, rappelez-vous les Victoires de la culture antique. Et si comme moi, inculte, ça ne vous dit rien, pas de problème : Ugo Bellagamba a eu la bonne idée d'orchestrer une session de rattrapage. J'y étais, et j'ai tellement aimé que j'y suis retourné !


Pour autant, point d'essai historique ici. L'auteur — « l'une des plus belles plumes de l'imaginaire », ce que je ne contredirai pas — revisite la figure divine en lui donnant une portée universaliste et en la mêlant à des enjeux plus élevés encore.
Car dans ce roman, il n'est pas question de batailles ou de guerres entre les peuples, mais bien d'une lutte sans merci, pratiquement éternelle, entre les humains et un esprit prédateur venu du fond des âges et de l'espace : l'Orvet. Celui-ci se nourrit de la douleur et de la perversion des âmes. Les Victoires, bien réelles, sont les hussardes de ce combat à mort. Les hommes, eux, n'ont pas conscience de cette guerre de chaque instant. Ils SONT le terrain de la guerre.
L'origine lointaine de l'Orvet, son "background", ainsi qu'un chapitre situé dans un avenir plus ou moins lointain, donnent la touche S.F. à ce roman.

Derrière cet Orvet, monstre de puissance et d'avidité, on lit sans difficulté la figure du diable. Un diable plus cosmique que sous-terrestre, mais un diable qui reste très classique, avec ses pouvoirs de corruption et de possession, son goût pour le jeu et son sens du raffinement.
L'auteur joue donc sur deux tableaux, avec d'une part la figure de la Victoire, d'autre part celle du diable.


Le récit est une succession d'épisodes racontant cette guerre invisible (du point de vue des hommes). Huit récits, huit moments historiques ou à venir, huit Victoires, huit passes d'armes.
L'écriture est très belle, évocatrice. Rendre l'intemporalité et la globalisation du combat n'était pas évident. L'auteur a fait le choix de couvrir largement les époques tout en se concentrant sur une région donnée. C'est un excellent choix à mon avis, qui écarte le risque d'éparpillement, et on n'a aucune peine à imaginer le conflit à une échelle globale. Géographiquement, l'action reste centrée sur le sud-est de la France et ravira les amoureux de cette région, car les descriptions sont très belles. Un choix qui fait sens compte tenu des origines latines du mythe des Vicoires. Les affinités personnelles de l'auteur n'y sont sans doute pas non plus étrangères : son admiration pour les paysages de la Provence et son histoire est palpable, et c'est peut-être là que réside le secret du charme envoutant de ces récits.

L'écriture est très belle donc, avec un style évocateur mais sachant rester simple, avec une pointe d'érudition quand il le faut. Chaque époque a son atmosphère propre. Surtout, il y a une très grande maitrise de la scène. Les chapitres sont construits autour d'une scène principale, très visuelle, bien amenée et percutante à la fin. Il y a de l'enrobage, parfois avant, parfois après, mais en gros tout tient dans ces scènes isolées, et cela est rendu possible par la forme du roman. Des scènes mémorables, où la suggestion fait tout, comme cette image des deux hommes qui descendent — lentement — le chemin menant à la calanque de Morgiou. Où encore, le curé qui pénètre dans le compartiment du train.


Les époques visitées nous font d'abord remonter le temps (1973, 1932, 1881, 1270...) puis oscillent entre futur et passé en gagnant de l'amplitude. J'ai trouvé le procédé habile, en ce qu'il permet une rentrée dans l'univers en douceur : on découvre l'intrigue et le schéma dans un cadre relativement familier.

Le schéma récurrent (un chapitre, une époque, une Victoire, un combat) pourrait lasser, mais il n'en est rien : l'auteur distille progressivement les éléments de mystère entourant les Victoires, et varie suffisamment les points de vue au cours des chapitres pour maintenir l'intérêt. On aura ainsi, tour à tour, la vision des Victoires, celles des "jouets" de l'Orvet (humains possédés, affectueusement nommés "orvets" par l'intéressé), et celle de l'Orvet lui-même.
L'issue varie également, ce qui tempère quelque peu l'impression de combat inégal.
Les Victoires elles-mêmes, si elles partagent des traits de caractère fort, ont leur caractère propre et ne sont pas exemptes de défauts.

Enfin, chaque histoire est nettement isolée des autres, ce qui pourrait donner l'impression confuse d'un recueil de textes apparentés. Cet aspect est largement compensé par l'unité de lieu choisie par l'auteur, par l'unité de l'Orvet - esprit surpuissant qui traverse les époques, et surtout par la poursuite assidue du but de ce dernier au fil de l'histoire, avec une issue finale en ligne de mire.
Il existe aussi quelques fils ténus (parfois de simples références comme les Métamorphoses, d'Ovide) reliant les histoires les unes aux autres.


Sur le plan des idées, il faut noter que le roman de Bellagamba, en donnant le premier rôle à des femmes particulièrement courageuses, s'accorde bien à notre époque.

Surtout, la figure de l'Orvet — un diable à peine déguisé — offre à l'auteur un levier simple et efficace pour distiller une critique de la nature humaine.
C.S. Lewis utilise le même procédé dans Tactique du diable, mais sous une forme qui m'a laissé de marbre. En effet, la narration, l'intrigue et l'immersion sont inexistantes dans le roman de Lewis. En un mot, le divertissement s'efface au profit exclusif d'une critique de la morale et de la société. Une critique argumentée, ironique et érudite, mais une critique tout de même, exclusivement.
Je ne pense pas que l'approche de Bellagamba soit fondamentalement meilleure, mais elle correspond davantage à mon idéal en la matière : une belle histoire (plusieurs en l'occurrence), un talent de conteur certain, une immersion réussie, le tout au service d'un message. Ce dernier n'atteint sans doute pas les développements et la finesse de celui de Lewis, mais il s'entend aussi bien, voire mieux. En prime, une réflexion tout actuelle sur l'éthique sociale à l'ère des biotechnologies, préfigurant de dix ans les dérives observées lors de la gestion du covid).


Allez, pour finir une petite citation qui m'a fait penser aux Jedi de la guerre des étoiles :)
« Chérie, c'est moi qui ai formé ta mère. Une Victoire très douée, elle était. »
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Les Victoires évoquent pour moi la Rome Antique, les combats épiques, les Dieux penchés sur les êtres humains et amusés par leurs choix. Ainsi, lorsque j'ai vu ce titre proposé lors d'une des dernières Masse Critique de Babelio, je n'ai pas beaucoup hésité à le sélectionner et il est bien vite arrivé chez moi.
A mi-chemin entre le roman et le recueil de nouvelles, L'Origine des Victoires propose huit portraits féminins riches en couleurs, en Histoire (de l'Antiquité à un futur indéterminé) et en réflexion. de quoi offrir quelques belles heures de lecture.

Les Victoires, c'est une « société secrète » composée de femmes sélectionnées et entraînées depuis la nuit des temps à combattre leur grand ennemi L'Orvet, ni dieu ni démon mais pire que les deux réunis car il se nourrit des passions humaines. Combat ancestral entre hommes et femmes, ces dernières ont le beau rôle chez Ugo Bellagamba qui les présente tour à tour comme élèves déterminées, guerrières, sages et finalement sauveuses de l'humanité. Pour autant, les hommes ne sont pas non plus tout noirs ; le conflit n'est pas si manichéen et on le comprend petit à petit, en rencontrant chacun des personnages évoluant entre les pages de L'Origine des Victoires.
Le lecteur suit huit femmes à travers huit portraits qui prennent place dans des époques et des endroits différents. La première que l'on rencontre est une petite fille dans les années 70, les suivants sont ses ancêtres, de plus en plus éloignées, jusqu'au XIIe siècle par exemple. Un saut dans le futur nous amène auprès de deux nouvelles Victoires faisant face à des technologies nouvelles et enfin, un dernier bond en arrière nous entraîne à l'origine de l'histoire (ou Histoire ?) et nous permet de mieux comprendre les motivations de L'Orvet et sa rencontre avec la toute première femme combattante.

J'ai aimé ce voyage à travers le Temps et l'espace, les différents tableaux proposés, tous très bien menés et maîtrisés. Ugo Bellagamba ne possède à chaque fois qu'une trentaine de pages (voire moins) pour planter un décor et une mini-intrigue et il y parvient sans difficulté, avec beaucoup de fluidité et de naturel. Je n'ai jamais eu aucun mal à m'immerger dans le récit et me suis toujours très vite retrouvée auprès des personnages, prise par l'intrigue.
J'ai vraiment beaucoup beaucoup beaucoup aimé le dernier « chapitre » dédié à la Préhistoire, 19 000 ans avant J.-C., qui m'a rappelé ma récente lecture du Premier de Nadia Coste ou encore ma découverte de Dark Eden de Chris Beckett, deux titres que j'avais vraiment adorés. Se retrouver plongé dans les grottes, auprès d'hommes et de femmes tout « neufs », commençant tout juste à appréhender ce qui nous paraît à nous parfaitement évident, je trouve ça passionnant et très enrichissant. D'ailleurs, ce dernier portrait permet de mieux comprendre la nature de L'Orvet et sa « mission »… et si ce n'est pas un « personnage » auquel on peut s'attacher, on se surprend tout de même à le comprendre et finalement, on ne parvient pas à le détester.
En revanche, le portrait mettant en scène Coppélia dans un avenir indéterminé, m'a un peu moins séduite, en tout cas au début. Il relève plus de la science-fiction, c'est un genre que j'ai moins l'habitude de lire et que je maîtrise moins donc j'ai toujours plus de mal à m'immerger dans les intrigues qui s'y déroulent, d'autant plus quand on part dans l'espace. Malgré tout, j'ai tout de même apprécié le développement et la chute.

Ugo Bellagamba pioche dans différents genres, le fantastique, la science-fiction mais aussi l'Histoire avec un grand -H puisque le lecteur aura l'occasion de croiser Gustave Eiffel – je ne vous en dis pas plus pour vous laisser la surprise – et même Thomas d'Aquin, le récit versant alors vers la théologie. L'auteur est féru de nombreuses choses et les références ne manquent pas.
C'est agréable de parcourir un texte brillant mais parfois un peu frustrant lorsqu'on se rend compte que l'on ne possède pas toutes les clefs de compréhension. Pas besoin d'avoir un doctorat en histoire antique pour se distraire avec ce court roman mais la lecture sera peut-être un peu superficielle si l'on se contente seulement du divertissement.
Je pense donc relire L'Origine des Victoires d'ici quelques années, lorsque j'aurai un peu plus de bouteille et donc plus de connaissances et références.

L'Origine des Victoires aborde plusieurs thèmes, à travers plusieurs genres. le combat entre les Victoires (les femmes) et L'Orvet et ses sbires (les hommes) est au centre du récit mais il entraîne bien d'autres questions et réflexions. Bourrés de références historiques, mythologiques ou encore théologiques, ces huit portraits hauts en couleurs peuvent être lus à la simple lumière du divertissement… mais ce serait dommage de se contenter de cette seule lecture en surface. A conseiller à tous les lecteurs donc, mais peut-être encore plus à ceux qui ont déjà quelques connaissances du thème ?

PS : Un grand bravo à Casimir Lee pour sa magnifique illustration de couverture !
Lien : http://bazardelalitterature...
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En huit chapitres, Ugo Bellagamba dépeint huit portraits de femmes à huit époques différentes. Toutes sont liées par la même cause : défaire l'Orvet, une entité maléfique qui prend possession du coeur des hommes et leur fait écouter leurs pires penchants. Elles sont ce qu'on appelle des Victoires.
Ce qui est assez ironique, quand on réalise qu'elles n'ont jamais gagné. Elles sont à peine un divertissement, pour leur ennemi. Un moyen de corser le jeu.

Sortant de la lecture de la Servante écarlate, j'ai eu du mal à rentrer dans le texte. Les deux premières histoires (Natacha et Euphoria) ne m'ont pas convaincue – moi qui attendais un peu plus d'action. Toutes deux sont assez similaires, puisqu'elles décrivent la jeunesse de deux Victoires qui ne connaissent pas leur nature et sont menacées par l'Orvet. Pourquoi les avoir mises côte à côte ?
C'est à partir de la troisième (Patrizia) que les choses se corsent. Enfin, les héroïnes prennent les choses en main ! Elles cessent d'être des victimes et on comprend comment elles font pour lutter. Ce n'est pas, comme on pourrait le croire, à coups de tatanes dans la figure. Mais à coups d'influences, auprès de la bonne personne et au bon moment. À coups d'écrits philosophiques, de débats. Leur but : éduquer la population. La tirer hors de son animalité.
Celle qui m'a le plus amusée est celle de Gloria. C'est également la plus motivante, puisque son parcours prouve qu'il est possible de lutter frontalement contre l'Orvet – la religion poussée aux extrêmes possède aussi des avantages.
Mais ma préférée, clairement, est Nadia. Non seulement parce qu'Ugo Bellagamba nous livre des scènes d'action fort bien ficelées, mais aussi par son changement de ton. L'humour y est plus grinçant, plus noir. Au fur et à mesure que l'histoire avance, cette gamine crâneuse qu'est la protagoniste gagne en profondeur. La commissaire qui l'interroge aussi – c'est une véritable partie d'échec qui se joue entre ces deux esprits. Et la conclusion, glaçante à souhait, nous la fait prendre en pitié.

Comme on pouvait s'y attendre avec ce style de roman, mon intérêt fut fluctuant en fonction des contextes. La qualité d'écriture était également excellente d'une histoire à l'autre – ça fait tellement plaisir d'avoir un vocabulaire si recherché –, malheureusement, les chapitres étant similaires à des nouvelles, on n'a pas le temps de s'attacher aux personnages, de se faire aux situations. J'ai eu l'impression de n'avoir fait qu'effleurer le sujet.

Mais, sous couvert d'écrire du fantastique, Ugo Bellagamba revient sur plusieurs drames historiques – que ce soient des guerres ou des massacres. Les Croisades ont maintenant une explication. le charnier qu'est devenue la Terre Sainte aussi. L'esclavagisme. le racisme. le nazisme. La xénophobie. Toutes ces horreurs ont la même origine. Qui n'est pas humaine.
Ça a quelque chose de rassurant et consolateur.
De déculpabilisant.

Une bonne lecture. Mais pas spécialement marquante. L'idée d'une société secrète luttant contre une entité diabolique a déjà été éculée.
J'ai cependant découvert une plume très intéressante – auteur à suivre...
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critiques presse (1)
Elbakin.net
16 mars 2016
Hommage à la femme à travers ces figures poursuivant un même but à travers les âges, l’origine des victoires est une lecture plaisante et rapide.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Ce n'est pas difficile, son fauteuil ergonomique la maintient dans une position semi-allongée qui ne lui laisse que peu de choix : soit les dalles grises du faux plafond, soit le ciel qui se déroule lentement, comme un papier cadeau à l'azur froissé, à travers les grandes fenêtres du salon de la maison de retraite. Elle en est venue, avec le temps, à préférer lorsqu'il pleut, lorsqu'il tonne, là-bas, de l'autre côté du double vitrage mal nettoyé, et que le ciel descend si bas qu'il pourrait presque l'emporter loin de cette vie d'attente, d'éclats de voix perdues, de raclements de gorges flétries. Et puis, le ciel gris lui rappelle celui de l'aube de l'humanité, quand il fallait courir pour survivre. Dans ses souvenirs les plus lointains qui ont gagné en puissance au point d'occulter tout ce qui se passe autour d'elle, le ciel a déjà été d'une autre couleur que bleu ou gris. Une fois, elle s'en souvient comme si c'était hier, il a été blanc, noyé d'une lumière si pure qu'elle en devenait douloureuse.
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Je dois l'admettre, quelle surprise !
J'ai dévoré des communautés composées d'êtres massifs et aveugles, qui écumaient le fond d'océans circumplanétaires, j'ai eu raison de sociétés de papillons aux ailes iridescentes planant dans les couches supérieures de l'atmosphère d'une planète gazeuse. J'ai digéré des matriarcats, des patriarcats, des oligarchies de télépathes, des guildes capitalistes maîtrisant le voyage spatial, des empires de milliers de mondes, des sociétés théocratiques dominées par une foi vibrante, ou à l'inverse, des démocraties guidées par un rationalisme glacé, qui m'ont assimilé, tantôt à un Dieu Créateur, tantôt à une intelligence artificielle, qui m'ont traqué, ou adulé, parfois les deux simultanément.
Et pourtant...
La colère passée, quelle exaltation monte en moi ! Quel exhausteur de goût est le risque. Quel divertissement raffiné les femelles de cette espèce me proposent !
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Jamais un homme de son rang n'avait dû s'afficher, en ces lieux, avec une femme plus belle, plus désirable. A l'instant où les lampes de la salle commencèrent à s'éteindre annonçant le début du spectacle, nombreux étaient les regards posés sur elle plutôt que sur la scène. Telle une princesse d'un pays lointain, arrachée à des temps immémoriaux et promise à une éternelle jeunesse, elle les ignora.
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" La nature lui a donné tant de patience, tant de minutie. Malgré tous nos savoirs architecturaux, la structure de nos mains, l'harmonie de nos créations, votre abbaye elle-même n'est rien face à la perfection d'une toile d'araignée. "
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Je confesse ma nostalgie des siècles où les femmes n'étaient bien souvent que bêtise et soumission ; telles que je les avais voulues à l'origine, en somme. En ces temps anciens, les Victoires, vives, éduquées et brillantes, étaient rares, aussi facile à repérer qu'une rose dans un champ de blé. Et les combattre était un amusement, un jeu qui me détendait, et que je gagnais facilement. Enfin, le plus souvent.
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Réalisme magique vs merveilleux scientifique
Le réalisme magique comme la science-fiction repoussent les limites de la fiction comme miroir du réel en puisant dans le corpus infini et mystérieux des fables et mythes de l'humanité. de l'imaginaire technologique prétendument cartésien à la peinture d'un quotidien magnifié, c'est une une réalité plus vive et plus féroce qui surgit des textes. Rencontre au sommet entre deux genres.
Moderateur : Simon Bréan Intervenants : Ugo Bellagamba, Pierre Bordage, Ayavi Lake, Floriane Soulas
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