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3,74

sur 400 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Après deux lectures plutôt éprouvantes, j'ai pensé trouver un peu de légèreté en me rendant à Marseille et plus précisément dans le quartier du Panier , dans les années 90 . Là , j'ai fait la connaissance d'une belle petite bande de sauvageons et je me suis laissé emporter par Stress et ses amis d'enfance ,Ichem , Kassim , Djamel , et ...Ange ( !!! ) .J'ai vécu avec eux , partagé les " conneries " , fumé , bu , bref , fait les 400 coups dans un quartier où chaque bande défendait son espace ....
Et là , vraiment , j'ai plongé, je me suis vautré dans l'ambiance . Il faut dire que , pour un premier "roman" , sur un sujet pas si facile qu'il n'y paraît, l'auteur fait preuve d'une étonnante maîtrise, tant sur le plan de la connaissance du contexte que sur la façon de le traiter . Un style " gouleyant " , adapté en permanence à la situation qui donne à ce récit une grande profondeur , sans en dire ni trop ni trop peu . On passe par de nombreuses phases émotionnelles et l 'on observe , d'un oeil indulgent et avec gourmandise , les tribulations pas toujours " recommandables " de ces gamins des rues .
Et puis le temps passe pour tout le monde et tout change , les êtres comme les choses ou les lieux et le quartier du Panier se transforme en lieu " chic " tandis que ses anciens habitants abandonnent leurs souvenirs pour gagner les non moins " réputés " aujourd'hui , " Quartiers Nord " .Le Vieux Port , le Panier , le Mucem , les bourgeois , les " Venants " comme on dit là-bas , occupent desormais l'espace et c'est le monde de l'enfance qui , pour certains, disparaît à jamais ....
J'ai adoré ce livre pour sa bande de petits gamins , "titis des rues " livrés à leur propre destin , l'ambiance , si bien rendue par l'auteur qu'on croirait entendre les cris , sentir les odeurs et puis j'ai ressenti cet accent de nostalgie dû à ce nouveau déracinement qui séparait ces gamins , les privant une nouvelle fois de leur domaine , les séparant une fois de plus , les isolant de ci , de là, pour permettre une " réhabilitation urbaine " ne profitant qu'à certains .
C'est un petit livre de " tranches de vie " , la peinture d'un cadre de vie rendu " plus présentable " , mais dans lequel flottera à jamais , pour Stress et ses copains , le goût amer du paradis perdu qu'est l'enfance .
Je cherchais un livre plus léger, je l'ai trouvé mais n'ai pu éviter la nostalgie , la mélancolie qui envahissent les mémoires....Et oui , l'enfance , elle est comme " l'eau vive , elle court comme un ruisseau que les enfants poursuivent ..."
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«  Marseille , moi , je la trouve belle comme ça. Avec ses mots simples et ses manières de fille des rues.Mais elle s'en fout de moi. Elle a pas le temps d'écouter mes «  :c'était mieux avant ».
«  Elle veut vivre, se casser la gueule et se relever, toute seule .
Danser et rire avec ces tchatcheurs et ces mythos qui l'embarquent dans de grosses bagnoles et lui racontent des histoires pleines de promesses .
Elle se rêve ma ville . »

Deux extraits de cette chronique marseillaise colorée, pétrie de langues , de cultures et de parfums mêlés , visage d'une ville , riche de ses différences. «  La politique ici, c'est comme les lasagnes , on recouvre de sauce bien épaisse »....
Voilà un auteur qui joue de belle manière avec les mots , une langue parlée , imagée , brute , et séduisante à la fois.
C'est l'histoire d'une bande de potes , des années 90 à nos jours contée par Nordine dit Stress, «  un petit blanc » qui vit avec sa mère Fred, professeure des beaux - arts .
A travers son regard tendre et acéré , se déroule le quotidien de ces jeunes qui fument des joints ,aiment se dorer au soleil , les jolies filles, la drague, trempent dans quelques petites combines , zonent , s'amusent à tuer le temps ....dans le quartier populaire du «  Panier » , ils enchaînent virées à la plage, bagarres parfois, quatre cent coups , soirées en boites de nuit afros ....
Tous sont venus d'ailleurs : Ichem , Kassim''Djamel et Ange ....du Maghreb ...
ou d'ailleurs ...
Sur la photo seul Stress tranche avec sa peau rose.

On suit leurs histoires d'amitié , amours, différences, diversité à travers le quotidien de Marseille, ses habitants , ses habitudes et ses travers.

On retrouve Stress adulte , il tente de dénicher un financement pour tourner un documentaire sur son quartier d'enfance et la «  gentrification » .

Aujourd'hui les bobos dits «  Les Venants » rénovent les taudis d'une partie de la ville ,plutôt le centre - ville, les potes d'hier sont devenus dealers , chauffeurs de bus, agent de sécurité ....

L'auteur aborde le sujet du sida, les immeubles insalubres qui se sont effondrés , la drogue et la délinquance, le déterminisme social et les replis communautaires..
Séduisante et drôle, violent et changeante , Marseille : son côté haut en couleurs , un livre au franc parler salutaire . ....
Nostalgie du Marseille de l'adolescence du narrateur , véritable déclaration d'amour à sa ville , insolente , mordante ,tout en dérision , humour et poésie . Vrai regard sur cette France d'aujourd'hui !
«  En dehors du quartier , on n'était plus personne » .
«  Sur la photo de classe ,au milieu des Comoriens , des Arabes et des Portugais , avec ma figure rose, j'étais facile à repérer » ...
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Ce que j'ai ressenti:

Je tenais à faire une chronique à chaud pour ce livre. Comme si je ne pouvais pas attendre cinq minutes. Ce n'est pas que j'avais rien à faire, c'est parce que je suis Marseille. Cette ville, elle est puissante, elle te reste dans l'ADN, elle est le sang, l'amour, la vie, l'énergie. Alors, ce roman de Hadrien Bels, je le voulais. Je savais qu'il était Marseille. Je présageais que nos souvenirs seraient intrinsèques, authentiques et étrangement similaires. Alors, puisque nous sommes tant Marseille, j'ai lu d'une traite, cet ouvrage qui jette sur ces pages toute la force et le réalisme social de cette ville, semblable à nulle autre pareille…

Bienvenue à Marseille! Faisons ensemble un petit tour, d'abord direction le Panier. (Oui, après on ira voir la mer, ça va, le sang, oh reste tranquille un peu!). le Panier, c'était un quartier populaire, multiculturel, vivant. C'était le Marseille melting-pot, bruyant et sauvage, beau et pauvre aussi, mais véritable. Mais avec les Venants, là -gestuelle agacée des mains- ils ont tout changé. Ils ont arraché le coeur, une partie de son essence, la couleur qui les dérangeait. En toute impunité. Sur l'autel de leurs fausses valeurs, la gentrification a transformé un quartier. Et c'est tout le problème que soulève cet auteur. Parce qu'il aime ces rues, ces habitants, ces imperfections, ces rythmes, ces expressions…Avec les deux temporalités, on ressent toute sa tristesse de constater une telle mutation. Ses souvenirs sont invoqués mais ils ne seront plus visibles tellement le quartier a changé de forme, de mentalité, de visage…

J'ai toujours détesté la nostalgie. Je trouve que c'est un sentiment qui retient, qui empêche. Mais dans ces pages, c'est important. Parce que le Panier des années 90 qu'il raconte, le Marseille que j'ai arpenté aussi sur la même période, notre jeunesse, est définitivement envolée. Ça fait mal, j'étais prise dans une sorte de mélancolie et de colère, je suis marquée aussi au fer rouge, mais je n'en avais pas pris conscience avant cette lecture, tellement mon amour pour cette ville, est grand et idéaliste…Je ne serai jamais celle, qui dira « C'était mieux avant », mais je comprends parfaitement et j'acquiesce à la démarche de cet auteur, qui se pose justement, la question. Dans ses yeux, il n'y a pas que cette main levée contre le mauvais oeil, mais sans doute, plus d'intelligence et de perspicacité qu'il n'y parait au premier abord. Il s'exprime avec les mots et la verve qui caractérise Marseille, mais au fond, on sent bien, que c'est une déclaration d'amour sincère et pudique, pour la plus belle ville du monde.

Bon, alors t'attends quoi pour aller à la mer? Tu crois que j'ai que ça à faire, sans dec'?! J'ai pas le temps moi, je suis Marseille, je te rappelle…Bon, si tu viens pas, j'irai boire un thé avec Fred et Stress, pour parler de poésie et de souvenirs égarés, me mobiliser pour les jeunes, leur remettre ce livre entre les mains, faire quelque chose aussi, pour Marseille…Et dans mes yeux, deux étoiles, et, seule, je ris et je danse dans ces rues…


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Depuis Jean-Claude Izzo, difficile de s'attaquer à Marseille sans tomber dans les clichés. On comprend que l'auteur a la ferme intention de dézinguer tout ce qui sonne faux dans sa ville, à commencer par les venants, ces bourgeois descendus du nord de la Loire qui trouvent à Marseille un exotisme à moindre frais. le Panier, le quartier où « Stress » a passé son enfance dans les années 90, s'est ramolli à coup de gentrification : « Pratiquement plus aucun Arabe ou noir. C'est comme si on avait effacé un écosystème, tranquille, en silence ». Stress était ce minot blanc en minorité et sa mère, une poétesse de la rue qui utilise la culture comme arme d'instruction massive. le panier a changé. Beaucoup trop calme. Stress est nostalgique de ce temps où la drogue et le kebab se payaient en francs. Nostalgique mais lucide : « La nostalgie ça emmerde tout le monde, sauf celui qui raconte, ça lui file un coup de jeune ».
Ce roman est une ballade dans le temps et dans Marseille. Il n'y a pas vraiment d'histoire si ce n'est celle de Stress, vidéaste raté, loser attachant, qui se souvient du Panier et de ses copains. On pourrait en faire un genre, le « District book », le livre de quartier.
Hadrien Bels met tout ce qu'il a dans son bouquin, de rages et d'anecdotes. C'est vif et inventif. Monsieur pratique les figures de style avec maestria. Il est fort en métaphores ((« le 83, le bus des plages. L'été, à l'intérieur, c'était une paëlla », virtuose du zeugma (« j'étais plein de promesses et de morve au nez » et mage de l'image (« La colère, il faut l'accepter et la bercer, comme un enfant quand a fait dans le dos »). Et les dialogues sont remplis de punch-lines, aussi savoureuses les unes que les autres : « C'est quand même curieux, ces jeunes qui ne font rien de leur vie mais peuvent pas attendre cinq minutes ».
Un livre qui pétille, une déclaration d'amour à Marseille (« une ville trop propre ne me dit rien, elle me fait peur, à cacher ses névroses ») qui m'a donné envie de retourner dans la cité phocéenne, avec ma dégaine de venant. Pas grave.
Bilan : 🌹🌹
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Nous voilà plongés dans le quartier du Panier, à Marseille, auprès d'une bande de potes, dans les années 90. le Mia et Iam ne sont pas loin !
À travers le regard de «Stress», on assiste au quotidien de ses jeunes qui zonent, fument des joints, trempent dans des petites combines, rien de grave.
Ils sont 5, toujours ensemble, à la plage, dans les bus bondés, à traîner dans les rues... et Stress se souvient avec nostalgie de cette époque, quand le Panier était encore un quartier populaire.
Il voudrait faire un film sur les 5 lascars qu'ils étaient à l'époque et qui expliquerait comment c'était Marseille avant et comment leur quartier a changé au fil des années, avec l'arrivée des «Venants», Parisiens ou bobos ayant gentrifié le Panier.
Il y a donc le Marseille des années 90 et le Marseille de maintenant qui se donnent la parole, d'un chapitre à l'autre. Maintenant, Stress se retrouve à traîner dans les lieux hypes, dans le monde artistique du cinéma. Il n'est pas à sa place dans ce milieu mais il tient à son projet de film.
Ses potes, il ne les voit plus beaucoup, peu s'en sont sortis.
Un roman comme un film, très vif, incisif. On est à Marseille, dans ses rues cosmopolites. La ville a le premier rôle, dans ce premier roman.
Il y a de la nostalgie, de l'humanité et un grand attachement à ses racines. Les personnages sont très touchants, que ce soient ses amis ou même sa mère et sonnent juste. Ça sent le vécu !
Un texte inventif et surprenant qui vaut pour les atmosphères décrites et m'a apportée un réel plaisir de lecture !
Attention ! Hadrien Bels est un jeune auteur à suivre.

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Cinq dans tes yeux, un geste apotropaïque pour conjuguer le mauvais sort  « khamsa fi
ainek », khamsa, cinq, en référence aux cinq doigts de la main, celle de Fatima, une amulette que l'on porte autour du cou ou du poignet pour se protéger des mauvais coups, des dangers .
Oui, il faut en avoir des grigris, talismans, fétiches, et autres porte-bonheurs quand on vit dans le quartier du Panier avant qu'il ne soit envahi par les « Venants » ces bobos aliens, qui restaurent le quartier et chassent, peu à peu les autochtones ou ceux installés depuis longtemps dans ce qui fut une terre d' asile, qu'on se prénomme Djamel, Kassim, Ichim, Ange et même Stress , que la poisse colle aux talons comme l'haleine chargée de certains quartiers marseillais souffle aux visages.
Un roman qui évoque Marseille à l'heure actuelle et avec de nombreuses analepses dans la décennie 90, celle où oeuvrait Fabio Montale. (Lecture pour compléter la trilogie marseillaise)
Un roman qui dit souvent la vie du jeune Hadrian Belsl'auteur de cette autofiction.
J'ai eu quelques difficultés à m'adapter et à comprendre le langage, le style, les expressions employées par ces jeunes, et puis je me suis laissée guidée par cette bande organisée, souvent désorganisée, joyeuse et solidaire, au travers De Marseille personnifiée. Marseille d'hier, Marseille d'aujourd'hui aussi complexe, aimée et haïe, dénigrée, décriée, cosmopolite, avec ses codes, toujours en mouvement, mais si belle sous le ciel bleu et la mer comme horizon.
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Hadrien Bels écrit son premier roman « Cinq dans tes yeux » où il situe l'action à Marseille dans le quartier du Panier. Une ville qu'il connait bien car il est marseillais. A travers un groupe de copains, ils nous racontent la vie dans ce quartier dans les années 90 puis ce qu'il est devenu aujourd'hui, un quartier où les pauvres ont été expulsés et où les bobos ont pris la place. On suit leurs histoires d'amitiés, d'amours, les quatre cents coups qu'ils ont réalisés, leurs différences, reflet de la diversité de la ville. Stress va rester celui qui va être le plus nostalgique, le plus rêveur de cette vie d'avant. Il a un projet pour lui rendre hommage.
On sent que l'auteur aime sa ville de Marseille. Son style est bien particulier, singulier. Je dois dire que j'ai eu du mal dans les premières pages car il est bien différent de ce que l'on peut trouver habituellement. Il m'a fait sortir de ma zone de confort. C'est risqué, mais c'est original et ça permet aussi de faire la différence avec tous les autres auteurs de la rentrée littéraire. La deuxième difficulté du début c'est aussi d'arriver à suivre dans tous les personnages. Une fois tout ça acquis, on peut mieux apprécier la suite et apprécier cette visite guidée du quartier et de l'époque des années 90. Je dirais que ce livre ne peut que créer des échanges intéressants sur la ville et sur le style de l'auteur…
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Il y a des livres qu'on aime pour la poésie des mots, pour le style, pour le rêve qu'il nous apporte et il y a ceux qu'on adore parce qu'il parle comme nous, avec nos mots, nos expressions, sans tabous ni calcul.
Cinq dans tes yeux, (formule magique dont je ne dévoilerai  pas le secret), c'est ça.
Hadrien Bels nous emmène dans son Marseille.
Ses quartiers, ses habitants, ses habitudes, ses qualités et ses travers.
Il nous fait entrer chez l'habitant.
Bon, là faut reconnaître qu'on n'est pas dans les quartiers huppés de la capitale.
Déjà, on va faire la présentation.
C'est Stress qui raconte.
Stress c'est son surnom, c'est son pote Nordine qui lui a donné (rien qu'au surnom, on imagine le personnage).
Stress, il vous présente sa bande, Nordine, bien sûr, Ichem, Kassim, Djamel et un autre cul blanc comme lui, un Corse, Ange.
Des horizons différents, mais une même religion (là je ne parle pas de conviction), Marseille.
Si t'es pas d'Marseille t'es un venant. (Je précise, c'est pas une faute, c'est comme ça qu'ils appellent ceux qui viennent d'ailleurs).
Des années 90 à  nos jours, il l'a vu se transformer sa ville Stress. Il les a vus changer aussi ses copains, jadis inséparables.
Hadrien Bels ne vous dessine pas une image d'Épinal.
Il ne maquille pas, n'enjolive pas, ne cache rien.
Il sait bien que la réputation de cette ville est faite.
Pensez ce que vous voulez.
Stress et ses potes ne sont pas des anges ? (Hormis le corse, qui le sera toujours, lui, quoi qu'il arrive)
Oui, et c'est comme ça.
Ils sont nés ou la vie les y a amenés.
Ils viennent du Maghreb, ils en gardent des traditions, des excès, des couleurs ou des douleurs, qu'importe.
Ils aiment le soleil, le farniente, la plage, les jolies filles, les boîtes de nuit, l'alcool et le shoot, la drague, la frime,  la baston, la vie...
On aime, ou on n'aime pas.
J'ai retrouvé, dans ce livre, l'atmosphère d'une ville que j'ai visitée plusieurs fois. Une ville particulière, envoûtante.
Un mélange, de couleurs,  de cultures, de langues, de parfums.
Il y des villes qui font peur (à tort ou à raison), à Marseille, je n'ai jamais eu peur.
Encore une fois, ce que l'auteur décrit ici, c'est le portrait d'une ville immense et riche de ses différences, c'est aussi l'histoire de ces hommes caméléons qui s'adapte à leur milieu, leurs joies, leurs peines.
Stress, par ailleurs caméraman à ses heures, jette le regard nostalgique d'un adolescent sur l'homme qu'il est devenu, parce qu'il s'est construit là et parce que..... il était une fois une bande de potes....
Laissez Hadrien Bels vous prendre par la main et vous guider à travers sa ville.








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Connaissez-vous Marseille ?
Perso je n'y suis jamais allée et ne connais la ville qu'à travers mes lectures
- Sur les toits, de Frédéric Verger
- Corniche Kennedy, de Maylis de Kerangal
- et Cinq dans tes yeux, d'Hadrien Bels

Trois voix, trois ambiances.
Deux époques : la deuxième guerre mondiale pour le premier roman, une période plus proche de nous pour les autres.
Mais dans les trois romans, un territoire occupé par des enfants ou des adolescents.
Ses toits.
Ses calanques.
Ici, les rues et les places de ses quartiers populaires.

Le narrateur, Stress, « cameraman de mariages », rêve de tourner un « docu-fiction » sur son adolescence dans les années 90 dans le quartier du Panier, au-dessus du Vieux-Port.
L'insalubrité crasse et la plage, la drague et les bagarres, les joints et les larcins, le recel et le marché aux Puces, les fausses Rolex, les sandwichs « mayo-harissa » et les Heineken tièdes.
Stress est le seul « petit blanc » de sa bande de potes, tous sont « nés quelque part » et ont « atterri ici », avant que la vie ne se charge de les séparer.
Les chapitres alternent des scènes de l'époque et le moment présent, deux décennies plus tard, donnant à voir l'arrivée des « venants » et le processus de gentrification qui à coups de rénovations repousse les classes populaires en périphérie.
Pas désagréable de se perdre un peu dans cette déambulation sentimentale entre passé et présent, entre les venelles sombres et les places écrasées de soleil.

La plume est tendre, souvent drôle avec d'étonnantes comparaisons et métaphores et de réjouissantes punchlines. Elle est aussi indubitablement nostalgique : on sent les racines marseillaises de l'auteur et son amour pour sa ville et son quartier, laissant entrevoir une (large ?) part d'auto-biographie.

Pssstttt : Tibi la blanche, le nouveau roman de l'auteur sera en librairie le 18 août ;-)
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Cinq dans tes yeux, c'est l'expression d'Ichem pour combattre le mauvais oeil. Utilisée à outrance, cette maxime n'aura pourtant pas empêché Marseille de se transformer complètement sous l'influence des « Venants », ces bobos venus d'ailleurs, reléguant la diversité culturelle dans les quartiers nord inaccessibles. C'est cette transformation radicale que raconte Hadrien Bels dans ce roman décapant et désillusionné, où le Marseille d'aujourd'hui apparaît colonisé par les clichés, ceux des bobos parisiens qui squatte à la Friche de la Belle de Mai, et ceux des familles arabes aux mariages orientaux convenus. Au milieu de tout ça, Stress ne s'y retrouve pas, lui qui a grandi dans le quartier et usé les bancs de la Place des Moulins avec sa bande de potes.

Hadrien Bels nous refait la géographie de Marseille à coups de souvenirs d'enfance et d'errances cocaïnées d'adulte en perdition, avec une langue amère et acérée. Son style au vitriol n'épargne personne, s'en prenant avec rage à tous les Venants, à tous ceux qui lui ont volé son enfance et sa ville, à lui-même aussi parfois, un raté accroché au passé. Difficile de faire la part des choses entre l'auteur et son personnage, Stress semble très autobiographique, même si on sait bien peu de choses de l'auteur de ce premier roman. Cette histoire décousue, sans logique, basée uniquement sur des ressentis et des anecdotes, semble raconter une vérité personnelle, un petit drame à l'échelle d'une ville, un deuil inachevé.

C'est un premier roman qui se lit d'une traite, comme un rêve éveillé, sans qu'aucune intrigue ne vienne franchement éclairer la lecture – c'est avant tout une ambiance, un monde à part, à découvrir. Finalement, on ne sait pas tellement pourquoi l'auteur écrit : veut-il nous faire partager son monde perdu ou cherche-t-il à comprendre comment il s'est perdu lui-même au milieu de la transformation de sa ville ?
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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