S'il est un livre à lire dans le silence de vos nuits, c'est celui-ci. S'il est un livre qui borde le coeur de tendresse, dans l'amplitude d'une aube nouvelle, le voici, «
Château-charbon » de
Yasha Breen. Citadin, contemporain, ce récit est le papier calque d'une émotion qui s'échappe par la porte des existences à peine nées. Marceau est le protagoniste majeur d'une histoire déchirante. Sociologique, psychologique, elle fait la part belle à de jeunes adultes. Plus que cela, acide, vive, tourmentée, urbaine, imprévisible elle est un aimant. On ne lâche rien. « Nouveau monde, grande joie, petite effraction. « le Nouveau Monde, la lumière, Schwartz, plein de pigeons et moi. » Dans cet immeuble, vide, gris, angoissant, Marceau est avec Schwartz, défiant les interdits, usine agonisante. Affronter ses démons. Marceau, fragile, vulnérable, dont le petit frère est décédé sous ses yeux sans qu'il n'ait bougé d'un cil, et pour cause. Marceau est en proie à la souffrance. Habitacle rugueux, mélancolique. Un père parti, une mère dépressive, Marceau a un tuteur, de l'argent chaque mois donné par ce dernier. Il ne travaille pas ; il passe ses nuits à suivre les autres dans les rues. Il cherche à savoir leurs tracés de vie, boussole rassurante, pieds sur terre. Qui est Marceau ? Un jeune homme, ombre, regard insistant, main tendu, rivages d'incertitudes. La trame est belle. Si belle, qu'elle octroie la pleine lune dans les turbulences âcres d'une ville anonyme, incertaine, fluide. Marceau est là, dompteur des êtres qui déambulent dans Paris. le filet se resserre. Marceau attire les vents contraires, cette jeunesse en proie à la délinquance : Schwartz, fil d'Ariane qui mène au
Château Charbon, lieu cosmopolite où règnent les associations musicales, de Yoga, de sports, etc. « le
Château Charbon » est le lieu des retrouvailles apaisées, un château, auberge espagnole. « le vieux radiateur pouvait tomber en rade, les machines à laver pouvaient s'arrêter de tourner. Velly était là….Il veillait au grain. Il était garant de lien, porteur d'histoire, de douceur, de mélancolie. » « La presse, les infos, l'actualité, en général n'avaient pas de cité au château. On estimait qu'on méritait mieux, ça ne collait pas à notre féérie. » L'écriture est soudée dans l'histoire, honorable, elle apaise, octroie cette intelligence de modestie, de magnanimité. Ce roman est l'empreinte même, fossilisée, des profondeurs d'une ville avec Marceau en toile de fond. Tout est parfaitement digne, orchestré, réfléchi. On ressent les frissonnements de Marceau, de Schwartz, de Ruben. Ce roman est à l'instar d'une rivière gorgée de courants, de suspens. C'est une ode aux déracinés des coeurs, des meurtris, des solitaires, des enfermés de l'intérieur. On aime Marceau de toutes nos forces. Les existences s'entrelacent, s'interpellent. «
Château Charbon » est bouleversant, profond. C'est une véritable surprise littéraire. Un livre atypique, formidable, loyal et tragique. Publié par les majeures
Editions Slatkine & Cie.