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EAN : 9782809714456
132 pages
Editions Philippe Picquier (03/10/2019)
3.52/5   125 notes
Résumé :
Un écrivain est interrompu dans son travail par un ami qui lui propose d'assister à un meurtre. Dans un bas-fond de Tokyo, ils assistent à ce qu'ils croient être un assassinat sordide orchestré par une femme démoniaque, dont son ami va devenir fou amoureux. Enfermé dans sa passion, il se rend compte qu'il est destiné à être sa prochaine proie. Bientôt, il demande à son ami d'être témoin de sa propre mise à mort. Mais le lendemain, de retour chez son ami, l'écrivain ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (33) Voir plus Ajouter une critique
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Dans l'oeil du démon. Quel démon?
Un ami vous propose d'assister à un meurtre en direct... N'y allez pas!
C'est peut-être un "Aonyōbō (青女房?, ») un fantôme féminin du folklore japonais. Elle a la peau blanche d'une noble, avec des sourcils tracés au feutre fin et est vêtue de kimonos magnifiques...

Un "Baku", créature qui se nourrit des rêves ou des cauchemars.
Ou un Amanojaku 天邪鬼?, mauvais esprit céleste: un yōkai du folklore japonais. Il est habituellement représenté sous la forme d'une sorte de petit "oni ."On lui attribue le pouvoir de provoquer chez une personne ses désirs les plus sombres et, par conséquent, l'inciter à perpétrer des actes répréhensibles...

Takahashi va accompagner son ami Sonomura, jeune héritier désoeuvré dont la fragilité mentale l'inquiète, assister à un meurtre... Il nous décrit des images troubles, mais où s'exercent des forces.. maléfiques.

Un érotisme troublant habite le roman : "La courbe gracieuse des épaules de la femme, la nuque fine... La présence d'une telle beauté dans ce lieu sordide". Elle semble se livrer à une danse macabre pour maintenir sur ses genoux la tête de l'homme qu'elle vient... d'étrangler, rabattre ses bras ballants ou le traîner jusqu'à la bassine où l'acide va le dissoudre, tandis que son complice prend posément des photos.
'Tout ce qui est dangereux est beau, le diable possède l'auguste beauté d'un Dieu ."

Dans les légendes du Japon, le démon "Aonyōbō" se nourrit de moisissures et de nourriture pourries, si ce n'est d'êtres humains. Mais, la suite du livre est surprenante... Car Sonomura veut connaître la vérité et s'est rapproché de la belle inconnue...
"L'homme en s'inventant des Dieux, s'est inventé aussi des Démons." Zhang Xiangliang .
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Sa peau était blanche comme la neige, ses lèvres étaient rouges comme le sang, ses cheveux d'ébène relevés à la shimada en un chignon parfait laissaient entrevoir une nuque gracile qu'on avait aussitôt qu'une envie c'est de caresser ou alors... de serrer, de serrer si fort jusqu'à ce qu'on ne perçoive plus qu'un râle sinistre et rauque, dernier souffle de vie. Mais qui est-elle ? Une geisha ? Une de ces femmes troublantes du karyukai, du monde des fleurs et des saules ? Est-ce elle qui est dans l'oeil du démon ? Il vous faudra lire ce roman pour le savoir.

"Dans l'oeil du démon", "Hakuchû kigo" a paru au japon en 1918, il aura fallu attendre 2019 pour sa parution en France. C'est le deuxième ouvrage que je lis de l'auteur et j'en ressors une fois de plus agréablement troublée.

Avez-vous déjà ressenti cette sensation singulière que vous êtes en train d'assister à quelque chose que vous ne devriez pas voir et que le spectacle qui s'offre à vous est si dangereusement fascinant que vous ne pouvez vous arrêter car c'est plus fort que vous il faut que vous continuiez de regarder encore et encore à travers l'oeil de judas ?

Si demain on me mettait dans le secret qu'un crime affreux va être commis et que l'on me conviait à y assister, forcément que je n'irais pas, froussarde et saine d'esprit que je suis et vous non plus d'ailleurs. Et pourtant Takahashi qui est le narrateur de ce récit, va y aller lui. Cet écrivain qui a tout d'une personne sensée et réfléchie va accompagner son fidèle et excentrique ami Sonomura, mu par quelques forces mystérieuses et intrigué par le hasard et les circonstances qui auront fait que son jeune ami aura eu connaissance de ce projet funeste en se rendant à une projection cinématographique au Théâtre de l'Asakusa Kôen Club de Tokyo, projection durant laquelle il aura surpris une conversation codée en signes katakana entre un homme et une femme fascinante de beauté, tous deux installés devant lui, projetant de supprimer le compagnon de celle-ci.
De cette conservation Sonomura aura conservé un bout de papier froissé jeté à la hâte derrière un fauteuil et faisant écho à la nouvelle d'Edgar Allan Poe : "Le Scarabée d'or" sur lequel est écrit ceci :

"La nuit de la mort du Bouddha
À l'heure de la mort de Diane
Il y a une écaille au nord de Neptune
C'est là que cela doit être exécuté de nos mains."

C'est donc fébrile et la peur au ventre que notre narrateur s'en va dans la nuit en direction du sanctuaire de Suitengû à Mukojima en compagnie de Sonomura qui a brillamment décodé l'énigme. Ensemble il vont assister à une scène qu'il ne sont pas près d'oublier : à travers le noeud d'un volet disjoint et fendu du petit sanctuaire de Suitengû il vont voir ce que personne ne devrait jamais voir : le visage de la mort. La mort figée dans sa lente agonie, la mort saisissante de beauté dans les yeux de la femme au visage couleur d'albâtre qui porte un kimono fumé au calambac, la mort qui vous regarde en face et vous laisse un sentiment d'effroi mêlé à une délicieuse sensation de vertige aussi intolérable soit-elle.

En 90 pages seulement, Jun'ichirô Tanizaki nous fait progresser dans un Tokyo nocturne et spirituel du début du vingtième siècle, il joue avec notre perception de l'histoire, il aiguise nos sens désorientés dans le noir à la manière de ces photographies qui recèlent d'images cachées, je n'ai pas souvenir d'avoir lu plus belle scène de crime. Ici il n'existe pas une mais plusieurs vérités, la réalité n'est pas toujours celle qu'on croit et pourrait bien devenir notre pire cauchemar car vous pensez bien on ne peut pas regarder impunément à travers le trou de la serrure sans se retrouver complice quels que soient les actes qui se jouent devant nos yeux ébahis, et vous savez pourquoi ? Parce qu'il y aura toujours un rôle qui sera attribué "au voyeur" que nous sommes ...

Un roman noir certes mais écrit avec beaucoup de finesse et d'élégance dans lequel la mort est douce comme une caresse et glisse tel un serpent venimeux dans chacune des pages de ce récit. L'oeil du démon c'est le poison qui se cache dans l'ombre mais c'est aussi la lumière de l'amour.


* La magnifique photographie en couverture est signée Martina Matencio : "la lovenenoso".
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Après avoir publié un premier inédit de Tanizaki en 2018, Noir sur blanc, les éditions Philippe Picquier ont proposé en 2019 un deuxième roman jusqu'alors inédit en français, Dans l'oeil du démon. le narrateur est invité par son ami Sonomura à assister le soir même de leur conversation, un peu après minuit dans un lieu précis du grand Tokyo à un assassinat. Il sait même que cela se fera avec une corde ou des lacets. Comment est-ce possible ? Sonomura a surpris dans une salle de cinéma le jeu d'un homme et d'une femme échangeant des messages codés dans le dos d'un troisième homme placé entre eux. Avec son goût pour les mystères ésotériques et leur décryptage, il a déchiffré le papier ramassé derrière eux, qui emploierait le procédé de la nouvelle d'Edgar Poe, le scarabée d'or. le narrateur est assez incrédule, et nous dit régulièrement que son Sonomura est en train de virer barjot. Il va néanmoins l'accompagner…Et à travers les fines ouvertures extérieures de la maison, leur oeil va être témoin d'une scène étrange, et bel et bien de crime : les deux comploteurs sont là. L'homme photographie la femme…l'oeil collé à la fenêtre est aussi quasi collé sur sa peau de lait…nous pouvons presque sentir son parfum…Telle une geisha, elle s'avère d'une beauté remarquable...mais il y a aussi ce léger geste de tension, comme si elle tirait sur quelque chose…couché sur ses genoux ? On ne voit pas tout…mais là-bas, dans l'angle de la pièce, que fait cette petite baignoire ?! On entend bientôt les conversations, nos amis voyeurs sont si près ! C'est notre homme du cinéma, il a été liquidé ! Et la belle dame s'apprête à dissoudre le corps vite fait bien fait…C'est qu'il est lourd le bonhomme, plus que la dernière fois dit-elle !!! Nos deux amis se carapatent pour ne pas se faire surprendre et fuir cette scène de crime. Notre narrateur a comme l'intuition que quelque chose cloche, cette scène parfaitement ordonnancée a-t-elle bien eu lieu ?! Mais Sonomura est excité. Il ne compte pas en rester là…C'est qu'il est tombé amoureux de la Belle ! Il lui faut absolument l'approcher, gagner sa confiance. C'est risquer sa vie, tant cette femme semble redoutable ! Il va y parvenir…Un temps sans nouvelles de Sonomura, le narrateur reçoit une lettre inquiétante…l'invitant à récupérer à un lieu indiqué un leg de Sonomura…Mais il n'est pas au bout de ses surprises…

Dans un format qui ressemble davantage à une longue nouvelle qu'à un roman, on retrouve le goût de Tanizaki pour la perversion et le jeu, son regard malin et humoristique sur la psychologie et les stratégies de ses personnages, faisant ainsi travailler du même coup les méninges de son lecteur. Pourtant, dès le départ, il fait planer le doute sur la santé mentale de Sonomura, et instille un doute tout aussi fort au fil des pages sur la matérialité de ce que nous allons lire, et voir à travers les yeux du narrateur. de sorte que finalement, et avec l'aide malvenue de la quatrième de couverture, on devine assez rapidement les tenants et aboutissants de l'intrigue. Les traducteurs ont privilégié semble-t-il la fluidité, la simplicité, en modernisant l'expression de ce roman qui a désormais quasi un siècle. Bien ou mal, je ne me prononcerai pas catégoriquement, chacun jugera.

Pour ma part, j'ai le sentiment que Tanizaki a produit dans cette oeuvre de jeunesse une sorte de divertissement qui n'a pas des prétentions démesurées. Ma note qui aurait pu être plus moyenne est cependant relevée par la scène centrale de l'observation du crime, un véritable morceau d'anthologie en termes de finesse de description des détails, comme un scénariste de cinéma qui prend soin de fournir toutes les indications de jeu, d'attitude et posture des acteurs, des décors. C'est très réussi, on sent naître ce qui deviendra un des points forts de l'écriture de Tanizaki. Au final, Dans l'oeil du démon est un livre honnête, qui n'entre cependant pas dans les essentiels du maître japonais.
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Ce court roman de jeunesse du grand Tanizaki publié en 1918 est délectable.
L'histoire est perverse à souhait et pleine de rebondissements. Elle parodie Conan Doyle et propose une variation très japonaise sur le fameux thème du démon de la perversité cher à Edgar Allan Poe. On y suit, voyeurs que nous sommes, les investigations d'un couple d'amis assez décadents. le narrateur est un écrivain surmené apparemment raisonnable. Son ami Sonomura est un riche oisif passionné de romans policiers et de cinématographe en proie soi-disant à des troubles mentaux. Ce dernier prétend au téléphone qu'un crime sera commis le soir même. Il s'en est convaincu en décryptant au théâtre un message chiffré avec le code exposé par Edgar Poe dans le Scarabée d'or. Nous voilà entraînés dans les bas-fonds de Tokyo où nous assisterons par le judas d'une porte à une scène incroyable mais vraie, dont la principale protagoniste est une beauté glaciale et vénéneuse, à la longue chevelure noire serpentant sur sa peau laiteuse…
Si vous voulez en savoir plus sur cette histoire grotesque et extraordinaire, je vous engage à lire la critique magistrale de Sachka, la Ténébreuse.
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Qu'il s'agisse de récits contemplatifs comme le coupeur de roseaux, d'histoires familiales comme Quatre soeurs, de triangle amoureux comme dans le chat, son maître et ses deux maîtresses ou d'essais sur l'esthétique japonaise comme dans Éloge de l'ombre, Tanizaki Junichiro ne cesse de me surprendre par la diversité de thèmes et de tons qui défilent sous sa plume.

L'inédit nouvellement paru chez l'excellente maison d'édition Picquier, Dans l'oeil du démon, ne déroge pas à cette règle. le récit original date de 1918. le narrateur, écrivain, est appelé de toute urgence par son ami Sonomura, héritier d'une fortune, oisif, excentrique et plus ou moins dépravé. Et, surtout, sujet à la neurasthénie et à des crises qui ressemblent aux prémices de la folie. D'où une attitude protectrice du narrateur. Sonomura lui conte une abracadabrantesque histoire de meurtre à venir cette nuit-même, sur fond d'énigme à la Edgar Allan Poe. Histoire de pouvoir le circonvenir sans le brusquer, le narrateur joue le jeu de son ami, sans plus d'enthousiasme et persuadé qu'il s'agit d'une élucubration de son esprit en surchauffe.

Ainsi débute un récit original et prenant comme un thriller, où l'on se faufile nuitamment dans de sordides ruelles de la capitale pour assister à ce fameux meurtre. Il y est question d'une femme à la beauté aussi fabuleuse que dangereuse, de produits à base d'acides, de maison secrète où il se passe de drôles de choses... le narrateur n'en croit pas ses yeux.

Tanizaki nous convie avec une féroce amoralité dans une histoire ombreuse où vérités et apparences se mêlent dans un jeu de miroir à y perdre son japonais.

Étrange, inquiétant et écrit dans un style dynamique, ce court roman se lit d'une traite avec un frisson de plaisir devant tant de manipulation.
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critiques presse (2)
LeJournaldeQuebec
13 janvier 2020
Installant rapidement une atmosphère pleine de mystères, ce court roman signé Jun’ichiro Tanizaki permet de passer une très agréable soirée.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Bibliobs
07 janvier 2020
« La beauté incontestable de cette femme, soulignée par son caractère maladif, la fait apparaître comme un esprit démoniaque. » Dans le fascinant théâtre où, telles des marionnettes, les personnages de Tanizaki semblent obéir aux seules lois du désir, le mal existe, et c’est une femme.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Sonomura avait parlé d'un ton étrangement calme et tranquille.
Son flegme, voilà qui me faisait douter de l'état mental du bonhomme. Il en était encore au milieu de ses explications quand je fus pris de palpitations d'effroi. Non, mais tu n'es pas un peu malade de parler sérieusement de ce genre de choses ? Tu es devenu fou ou quoi ? J'étais si inquiet pour lui, j'avais si peur que cela lui arrive un jour, que dans un instant de panique le mot avait tout à fait pu franchir mes lèvres.
Sonomura vivait en décadent, ce que lui permettaient sa fortune et son oisiveté. Ces derniers temps, lassé des loisirs ordinaires, il montrait une passion coupable pour le cinéma et les romans policiers, ce qui l'amenait à passer le plus clair de son temps dans son imagination, dans un état de mutisme proche de l'hébétude. Nous voilà bien, me dis-je alors que se dressaient tous les poils de mon corps, à force de tirer sur la corde de son imagination, sa démence s'est déclenchée.
J'étais son seul véritable ami, ses parents n'étaient plus de ce monde, il n'avait ni femme ni enfant. Riche à centaines de milliers, sa vie était solitaire au point que, s'il devenait fou pour de bon, il ne se trouverait personne d'autre que moi pour le prendre en charge. Éviter autant que possible de le froisser et donc achever mon travail le plus vite possible pour me rendre auprès de lui, c'était la moindre des choses que je pouvais faire pour lui.
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La femme restait dans la même position, les yeux baissés. Et l'homme, debout comme un piquet, le regard fixé sur elle. Dans le silence nocturne, lourd comme une eau au repos, les prunelles de l'homme semblaient la seule chose vivante. Ces prunelles dévoraient la zone autour de la poitrine et des genoux de la femme et rien d'autre. Des mouvements d'yeux pour le moins étranges, comme s'il était en train de réfléchir à l'endroit où positionner son appareil. Pour en avoir le coeur net, je revérifiai le point exact sur lequel le regard de l'homme déversait son poison brûlant.
Mais j'eus beau vérifier, j'eus beau conjecturer, ce regard ne cessait de divaguer entre la poitrine et les genoux de la femme. Ce n'est pas tout. Alanguie sur le tatami, la femme avait conscience de ce regard sur son corps. Cela du moins expliquait l'apparition d'une certaine tension au niveau des coudes, et de ses mains qu'elle avait déplacées sur ses genoux comme pour effectuer un travail de couture, car elle tripotait quelque chose entre ses doigts. En effet, je remarquais maintenant quelque chose sur ses genoux, quelque chose de noir qui avait commencé à prendre de l'importance et semblait s'étendre devant elle, dans son ombre, une chose qui débordait maintenant jusque sur le tatami...
Mais... n'était-ce pas un homme, là, la tête posée sur les genoux de la femme ?
À peine m'étais-je fait cette réflexion... Soudain, avec la vibration tellurique qui accompagne l'action de traîner un corps excessivement massif, la femme se retourna face à l'appareil photographique. Sur ses genoux était posée la tête d'un homme, couché sur le dos, mort.
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Sonomura ne faisait pas mystère des troubles mentaux qui se transmettaient dans sa famille et je savais depuis longtemps la véritable mesure de raison et de folie qu’il y avait en lui. Son degré de « je fais ce qui me plaît », aussi. C’était donc en parfaite connaissance de cause que je le fréquentais. Mais ce matin-là, comment ne pas être effaré au coup de téléphone que je reçus de sa part. Cette fois, il était devenu fou, cela ne faisait plus aucun doute. La montée de sève de ce mois de juin maussade et étouffant – et l’on dit que c’est la période de l’année où se déclarent le plus grand nombre de maladies psychiatriques – avait dû lui porter au cerveau. Il fallait au moins cela pour expliquer ce coup de fil, et je le pris pour un fait acquis.
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Jour après jour, la relation entre Sonomura et Eiko ─ tel était le nom qu'elle se donnait ─ avait donc pris de l'ampleur et de la profondeur. Quand je passais chez lui à l'improviste, il était généralement absent. Mais je les vis à plusieurs reprises ensemble dans une voiture, dans une loge au théâtre, ou se promenant main dans la main à Ginza. Chaque fois, elle portait une tenue différente, un jour en yukata tissé-teint, manteau haori sur les épaules, un autre jour les cheveux noués comme une actrice avec une capeline, une autre fois encore en chemisier occidental de lin blanc et bottes à talons hauts. Sa beauté restait inchangée, mais selon les jours, l'expression de son visage pouvait être à ce point différente qu'on aurait pu croire une autre personne.
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C'est au milieu des secousses du tramway qu'une idée pour le moins étrange se fit jour en moi. Cette histoire que Sonomura m'avait contée au téléphone n'était-elle pas un mensonge pur et simple ? Ce soi-disant assassinat qui devait être perpétré cette nuit en un lieu de la ville, il pouvait l'avoir imaginé lui-même. Auquel cas, s'il avait besoin que je l'accompagne jusqu'au lieu du crime, c'était précisément pour que son idée se réalise. Autrement dit, n'était-ce pas tout bonnement moi, oui, moi, que Sonomura projetait d'assassiner, cette nuit, dans un endroit quelconque ? "Je vais te montrer un assassinat", avait-il dit pour m'attirer. Et pour cause, c'était mon assassinat de ses propres mains qu'il comptait me montrer ! Certes, j'y allais peut-être un peu fort, c'était totalement farfelu, mais je ne parvenais pas à repousser ma présomption comme une pure fiction. Bien entendu, je ne pensais pas avoir mérité de devenir la victime de cette mauvaise pièce de grand-guignol. Je n'avais jamais rien fait pour m'attirer sa haine, fût-ce sur un malentendu. Et il aurait beau chercher, en toute rationalité, il ne trouverait pas la moindre justification pour m'assassiner. Sauf que s'il était effectivement devenu dément, qui pouvait prétendre que ma présomption était infondée ? Qui trouverait inconcevable qu'un homme rendu fou par la lecture d'absurdes romans dont les héros sont des criminels ou des détectives ait soudain la lubie d'assassiner son meilleur ami ? Loin d'être inconcevable, c'était même tout à fait à prévoir.
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