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Michelle Ortuno (Traducteur)
EAN : 9782376650645
270 pages
Contre Allée (09/04/2021)
4.05/5   59 notes
Résumé :
Dans le Madrid des années 1930, Matilde cherche un emploi. La jeune femme enchaîne les entretiens infructueux : le travail se fait rare et elles sont nombreuses, comme elle, à essayer de joindre les deux bouts. C’est dans un salon de thé-pâtisserie que Matilde trouve finalement une place. Elle y est confrontée à la hiérarchie, aux bas salaires, à la peur de perdre son poste, mais aussi aux préoccupations, discussions politiques et conversations frivoles entre vendeu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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En composant ma liste « le monde ouvrier dans la littérature », je me suis souvenue que Tea rooms végétait dans ma pal depuis trop longtemps et l'en ai sorti.
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Ici, pas d'usine au sens strict mais, d'une certaine manière, c'est l'usine quand même pour les ouvriers de tous métiers dans ce Madrid des années 1930, ayant à peine de quoi se nourrir, exploités par leurs patrons et encore trop peu défendus par les syndicats balbutiants.
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« - Nous, dit Mathilde, on passe notre temps à ronchonner à cause de notre salaire de misère, mais on ne fait rien pour gagner davantage. Et parler par derrière ça ne fait pas avancer les choses. Il faut être solidaires.
- Moi, ce que je dis, ajoute Antonia, c'est que les porte-parole sont toujours perdants.
- On est d'accord, dit Mathilde, mais s'ils se syndiquaient tous, s'ils s'unissaient, alors ils pourraient exiger.
- Et les chefs n'admettraient pas les syndiqués, intervient Laurita.
- Oui, c'est ce que je crois aussi. Mais imagine que tous, absolument tous les travailleurs de tous les corps de métiers soient syndiqués ; les patrons feraient quoi dans ce cas-là ? »
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Mathilde est une jeune femme issue de ces milieux modestes où la place de la femme est, dans le même temps, en plein bouleversement.
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« Dans les pays capitalistes, et en particulier en Espagne, il existe un dilemme, un dilemme difficile à résoudre : choisir le foyer, par l'intermédiaire du mariage, ou l'usine, l'atelier et le bureau. L'obligation de contribuer à vie au plaisir de l'autre, ou la soumission absolue au patron ou au supérieur immédiat. D'une façon ou d'une autre, l'humiliation, la soumission au mari ou au maître spoliateur. Est-ce que cela ne revient pas exactement au même? »
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Mathilde a très vite compris que le monde est divisé en deux sortes de gens : les gens qui prennent l'ascenseur, avec leurs souliers cirés, et ceux à qui l'on enjoint avec mépris d'emprunter l'escalier de service. Faisant partie de ces derniers, elle s'estime heureuse lorsqu'elle parvient enfin à se faire embaucher comme vendeuse dans un salon de thé : malgré le salaire de misère et l'absence de jours de repos, elle n'a pas le choix si elle veut pouvoir manger, faire manger ses parents, sa soeur et sa nièce, ou encore s'habiller avec autre chose que des collants troués.
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La plume de Luisa Carnes fait pénétrer le lecteur avec douceur et vivacité d'esprit dans la vie de Mathilde, à qui l'on pourrait attribuer ces qualificatifs et grâce à qui nous percevrons les deux faces d'une même médaille au salon de thé : les coulisses des petites mains dont elle fait partie, et l'apparat des clients devant qui il faut faire bonne figure en ayant faim.
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L'ambiance est plaisante car le récit étant composé de faits, réflexions, dialogues d'une légèreté surprenante au vu du thème. Mais ne nous y trompons pas : la révolte gronde dans les estomacs et les esprits. Bientôt, la grève, les vols, les licenciements et leurs conséquences désastreuses se feront sentir, en particulier sur ces femmes qui tentent de s'émanciper de la coupe de leur famille et du mariage pour se retrouver sous celle de l'employeur. Alors, à situation désespérée solutions désespérées : tant qu'elles font espérer un avenir meilleur tant pis pour la chute, qui n'en sera que plus rude dans une société qui peine à suivre l'évolution des moeurs.
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Je suis agréablement surprise par la consistance que l'auteure donne à son texte, ses lieux et personnages, en ayant pourtant la main plus légère qu'une plume sur les descriptions esquissées autant que sur les théories débattues par ses personnages en cachette, dans la cabine où les vendeuses se changent, entre deux services de client, ou dans un murmure en douce de la Responsable qui les surveille. C'est qu'elle est si juste qu'en peu de mots, tout est dit, et le message est compris. Mathilde et ses collègues finiront-ils par oser faire grève ? Revendiquer une hausse de salaire ? Trouveront-elles un mari ou succomberont-elles à l'argent facile quitte à sacrifier leur réputation pour être LIBRE ? Entrez à votre tour dans ces tea rooms pour le savoir !

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A Madrid au début des années 30, la crise économique se fait durement ressentir. le travail est rare et la situation est particulièrement critique pour les jeunes femmes pauvres au faible niveau d'éducation. Pour le moindre emploi disponible, elles sont des centaines de postulantes. Pour économiser les quelques pesetas du tramway, elles traversent la grande ville à pied dans leurs vieilles savates éculées pour répondre aux petites annonces du journal, courant d'un bureau comptable à une boulangerie en passant par un atelier de confection, avant de rentrer bredouilles, épuisées et affamées, retrouver leurs parents et la ribambelle de leurs frères et soeurs, tout aussi épuisés et/ou affamés qu'elles.

Matilde est l'une de ces jeunes femmes. La chance lui a enfin souri, puisqu'elle vient d'être embauchée dans un respectable salon de thé. Ce qu'elle va y gagner ne va pas la rendre riche pour autant, juste un peu moins misérable. Parce que les employeurs exploitent sans vergogne leurs employés : dix heures par jour, 6,5 jours par semaine, un salaire miteux et la crainte permanente d'être renvoyée à tout moment. Mais pour les femmes de cette classe sociale à cette époque, le dilemme se résume à choisir entre être exploitée par un patron, ou trouver un mari, se soumettre au patriarcat et devenir une esclave domestique. Matilde, un peu plus instruite et informée que ses collègues, pense qu'une troisième voie est possible : l'émancipation des femmes par la culture, qui passe par la révolution communiste. Déjà en marche en Russie, la lutte contre le capitalisme commence à arriver en Espagne, avec les premières grèves et la création des syndicats.

Depuis le comptoir du salon de thé, Matilde et ses collègues observent les événements sans trop savoir quoi en penser, conscientes de l'injustice sociale mais craignant la perte de leur emploi et la répression policière s'il leur prenait l'idée de rejoindre le mouvement. Entre-temps, le train-train du salon continue : pendant que les livreurs et les clients défilent, le temps s'écoule entre conversations légères, secrets plus ou moins bien gardés, et petites et grandes misères.

Paru en 1934 avant de se perdre dans les soubresauts de l'Histoire et les oubliettes de la censure franquiste, "Tea rooms" est aujourd'hui publié pour la première fois en français. A l'image de son livre, Luisa Carnés (1905-1964) a elle aussi été "invisibilisée" à l'aube de la guerre civile avant d'être redécouverte il y a seulement quelques années en Espagne même. Issue d'un milieu ouvrier, journaliste autodidacte, c'est son travail dans un salon de thé qui lui a inspiré ce roman. Un roman qui m'a fait penser à Zola, en plus fluide et plus concis, direct, avec un style qui m'a semblé très moderne pour son époque avec ses phrases courtes, parfois hachées, sans verbe, et qui multiplie les points de vue en donnant la parole à chaque protagoniste.

Charge virulente contre la condition du prolétariat féminin et plaidoyer pour l'émancipation des femmes et l'égalité, ce roman – écrit à un moment où on croyait encore au Grand Soir – est remarquable par sa construction et sa qualité littéraire.

Et presque 100 ans après, il est, sur bien des aspects, toujours d'actualité.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Découverte captivante, imprévue de cette auteure espagnole, Luisa Carnès [1905-1964 ] autodidacte, ainsi que cette maison d'édition, en cherchant dans les rayonnages et présentoirs de la Bibliothèque Buffon [Près du Jardin des Plantes ] où je vais travailler régulièrement !

Marine Landrot définit fort bien la singularité et la force de ce texte à forte consonance autobiographique…- [cf. Télérama du 1 juillet 2021 ]

« Roman social, grand reportage, manifeste politique, journal intime ?
Difficile de qualifier avec précision ce texte surgi de l'oubli, qui nous parvient 88 ans après sa rédaction par une espagnole au parcours singulier, longtemps censurée dans son pays pour ses prises de position antifranquistes et aujourd'hui encensée pour sa modernité d'écriture et la multiplicité de ses combats (...) « Tea Rooms » est un livre en acier trempé, solide, imposant, qui brille du feu de ses différentes expériences. Il raconte méticuleusement l'oppression, puis la conscientisation d'employées d'un salon de thé madrilène des années 1930, dont l'autrice fit partie du personnel. »

Une sorte de journal de bord relatant le quotidien du travail dans un salon de thé, pour « gens biens sous tous rapports » ...décrivant les rapports entre les serveuses, serveurs, caissière-responsable, le patron, surnommé « L'Ogre » , les clients, les livreurs, tout un monde que , l'héroïne, Matilde divise en deux classes : celle qui prend l'escalier de service et l '» Autre »… ayant tous les privilèges« ..!

Une chronique réaliste… qui dépeint une société espagnole, dans les années 1930, en forte crise économique… et bien sûr, les premières sacrifiées sont les femmes… subissant, dans leur écrasante majorité un sort doublement peu enviable : la misère, des salaires inférieurs aux hommes et la dépendance souvent pesante à un mari… Ce texte, étonnamment, garde une actualité certaine, toutes proportions gardées...

« Mais il y a aussi des femmes qui prennent leur indépendance, qui vivent de leurs efforts, sans avoir besoin de "supporter des types". Mais ça, c'est dans d'autres pays, où la culture a fait un pas de géant; où la femme a cessé d'être un objet de plaisir et d'exploitation; où les universités ouvrent leurs portes aux ouvrières et aux paysannes les plus modestes. Ici, les seules femmes qui pourraient s'émanciper grâce à la culture ce sont les filles des grands propriétaires, des banquiers, des commerçants prospères; et ce sont précisément les seules femmes qui se moquent complètement de leur émancipation, parce qu'elles n'ont jamais porté de souliers usés, n'ont jamais connu la faim qui engendre des rebelles. (p. 153)”

Description et dialogues très vivants au sein de ce salon de thé-pâtisserie , où on s'attache à chaque personnage… même si Matilde peut être notre préférée, étant comme le « porte-parole » de l'auteure… elle nous est plus proche dans ses rebellions, et refus de rentrer dans le moule « fataliste » que l'on octroie aux femmes depuis « la nuit des temps » , d'autant plus dans des sociétés économiquement fragiles…!

Une lecture singulière, et d'une force de persuasion, certaine ! Un grand MERCI à cette petite maison d' édition indépendante, La Contre-allée, de nous faire découvrir cette auteure espagnole…ivre de justice sociale et de démocratie… Un parcours de journaliste engagée…qu'elle vivra à fond, au fil de sa carrière.

Vraiment très heureuse de cette lecture et de cette « rencontre » !

« Avant, on croyait que la femme ne servait qu'à prier et à repriser les chaussettes de son mari. Nous savons maintenant que les pleurs et les prières ne mènent à rien. les larmes provoquent des migraines et la religion nous abrutit, nous rend superstitieuses et incultes. Nous pensions aussi que notre seule mission dans la vie, c'était de chercher un mari, et depuis toutes petites on ne nous préparait pas à autre chose; même si nous ne savions pas lire, ça n'avait pas d'importance: si nous savions nous faire belles, c'était suffisant. Mais aujourd'hui nous savons que les femmes ne sont pas seulement faites pour raccommoder des vieux habits, pour le lit ou pour se frapper la poitrine; la femme vaut autant que l'homme pour la vie politique et sociale. (p. 242)”


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Les éditions "La contre-allée "aiment mettre à l'honneur des écrivains méconnus, des parcours singuliers et des mouvements sociaux. J'avais déjà été impressionnée par " le ravin" de Nivaria Tejera. Ici, une romancière espagnole engagée de la première moitié du XXe siècle est sortie de l'ombre où ses convictions politiques l'avaient laissée. Exilée sous Franco au Mexique, journaliste et femme de lettres de premier ordre , elle retrouve la lumière. Et on s'en réjouit.

C'est ce livre, publié en 1934, qui la fait connaître. Autour de la vie de femmes exploitées et malmenées, trimant dans un salon de thė madrilène, l'auteure évoque les soubresauts d'une colère ouvrière qui gronde.

Ce qui frappe, dès le début du livre, c'est la modernité de l'écriture. Des phrases courtes, souvent nominales, comme autant d'instantanés de vie. Des descriptions dans un style original, nerveux.

L'histoire de ces femmes, toujours debout à s'activer et qui, affamées, ne sont même pas autorisées à profiter des restes que l'on jette, ne peut qu'interpeller et indigner le lecteur. Elles doivent se taire et tout supporter pour ne pas être licenciées , durant cette crise économique, même si elles ont un salaire de misère. Certaines auront un destin tragique.

le personnage principal, Mathilde, est un peu le double de l'auteure, qui, elle aussi, très pauvre, a travaillé dans ce genre d'établissement. Elle commence à prendre conscience que des changements sociaux sont indispensables, au moment où les ouvriers se révoltent dans Madrid et ailleurs.

J'ai beaucoup apprécié ce livre, la manière dont il est écrit, et ses personnages attachants, le regard juste et acéré de l'auteure.. J'ai une seule réserve: le discours politique, essentiellement féministe et communiste, prend trop le pas, souvent, sur l'aspect romanesque, ce qui casse un peu le rythme, je trouve.

Une oeuvre, en tout cas, forte et poignante, qui touche le coeur et l'esprit. Et une belle redécouverte de Luisa Carnés.
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Matilde, Marta, Laurita... Toutes de jeunes madrilènes des années 1930 sans le sou, vivant avec leur famille dans un certain dénuement, se retrouvant à travailler dans un salon de thé, au rayon pâtisseries, pour une bouchée de pain, prenant le risque, si elles suivent les ouvriers syndiqués des autres magasins de la rue dans leur grève, de se faire renvoyer, et de devoir, derniers saluts pour survivre, se prostituer, ou se marier avec le premier venu, quitte à perdre toute liberté - qui dit grève dit difficultés à se faire embaucher ailleurs, en effet.

C'est ce quotidien, principalement féminin, qui nous est, dans Tea Rooms, proposé par Luisa Carnés, à la manière d'un reportage la plupart du temps, au style très clair, très circonstancié, parfois via des pointes plus vindicatives et révoltées, foncièrement plus poétiques, et de fait plus touchantes. Car derrière ce quotidien, l'autrice dénonce bien entendu les conditions de travail du prolétariat, mais plus encore celles du prolétariat féminin, bien souvent oublié dans les diverses revendications, comme dans tout le reste.

Un roman engagé, mais qui n'en oublie pas pour autant de s'incarner dans une plume singulière, la plus à même de faire sentir cet engagement. Un roman exactement comme je les aime en somme. Je vais désormais essayer de lire davantage d'oeuvres de Luisa Carnés, quitte à plonger dans des versions originales espagnoles non encore traduites !
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critiques presse (1)
LesInrocks
20 avril 2021
Publié en 1934, ce roman vivant, enfin traduit, révèle une romancière de haut vol et de grand style. Portraits de femmes prolétaires, entre aliénation et révolte, plus que jamais d’actualité.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Les préoccupations d'ordre social n'existent pas encore assez pour le prolétariat espagnol féminin. L'ouvrière espagnole, capable de rares incursions vers l'émancipation et vers la culture, continue à prendre un vif plaisir dans la lecture des vers de Campoamor, à cultiver la religion et à rêver de ce qu'elle appelle sa "carrière" : un hypothétique mari. Ses colères, si par hasard elle en éprouve, ne sont que des ardeurs momentanées sans conséquences. Son expérience de la misère ne fait pas naître la réflexion. Si un jour son manque de moyens économiques la contraint à un jeûne forcé, lorsqu'elle peut manger à nouveau elle le fait jusqu'à satiété. Dans la plus parfaite inconscience. La religion la rend fataliste. Nuit et jour. Eté comme hiver. Nord et sud. Riches et pauvres. Toujours deux contraires. Bon ! Parfois - rarement - elle sent que sa vie est trop monotone et trop dure ; mais son esprit contient suffisamment d'aphorismes traditionnels qui sont chargés de la convaincre de son erreur et de l'immuabilité de la société jusqu'à la fin des temps. Ces proverbes lui ont appris qu'elle ne possédait rien d'autres sur Terre que ses larmes, et c'est pourquoi elle les verse sans compter.
Matilde est l'une de ces rares et précieuses insoumises, capables de renier cet héritage commun.
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- (...) Les dames allaient chez elles tous les mois et elles fouinaient dans tous les coins, pour voir si c'était suffisamment propre, et elles posaient plein de questions aux enfants: à savoir s'ils étaient obéissants, s'ils communiaient tous les mois, énormément de choses; eh bien elles lui ont rempli la maison de calendriers religieux et elles lui en ont même donné un pour sa cuisine, où il était indiqué les jours de jeûne obligatoire. Quand le mari l'a appris, il a arraché tous les almanachs et même celui de la cuisine; parce que tu vois, dans cette maison-là on jeûnait souvent sans avoir besoin de ces foutus almanachs.
-Il a eu bien raison cet homme ! s'exclame Antonia.
-Eh bien, quand "les dames" ont constaté la disparition des calendriers, elles se sont fâchées très fort, mais le pire c'est quand elles ont trouvé dans la chambre un livre du mari; alors elles ont dit qu'elles ne pouvaient pas aider des personnes qui arrachaient de leurs murs les calendriers religieux et qui lisaient des livres "interdits" (p. 145)
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[cf. Marine Landrot- Télérama du 1 juillet 2021 ]

Roman social, grand reportage, manifeste politique, journal intime ?
Difficile de qualifier avec précision ce texte surgi de l'oubli, qui nous parvient 88 ans après sa rédaction par une espagnole au parcours singulier, longtemps censurée dans son pays pour ses prises de position antifranquistes et aujourd'hui encensée pour sa modernité d'écriture et la multiplicité de ses combats (...) Tea Rooms est un livre en acier trempé, solide, imposant, qui brille du feu de ses différentes expériences. Il raconte méticuleusement l'oppression, puis la conscientisation d'employées d'un salon de thé madrilène des années 1930, dont l'autrice fit partie du personnel.
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Avant, on croyait que la femme ne servait qu'à prier et à repriser les chaussettes de son mari. Nous savons maintenant que les pleurs et les prières ne mènent à rien. les larmes provoquent des migraines et la religion nous abrutit, nous rend superstitieuses et incultes. Nous pensions aussi que notre seule mission dans la vie, c'était de chercher un mari, et depuis toutes petites on ne nous préparait pas à autre chose; même si nous ne savions pas lire, ça n'avait pas d'importance: si nous savions nous faire belles, c'était suffisant. Mais aujourd'hui nous savons que les femmes ne sont pas seulement faites pour raccommoder des vieux habits, pour le lit ou pour se frapper la poitrine; la femme vaut autant que l'homme pour la vie politique et sociale. (p. 242)
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Mais il y a aussi des femmes qui prennent leur indépendance, qui vivent de leurs efforts, sans avoir besoin de "supporter des types". Mais ça, c'est dans d'autres pays, où la culture a fait un pas de géant; où la femme a cessé d'être un objet de plaisir et d'exploitation; où les universités ouvrent leurs portes aux ouvrières et aux paysannes les plus modestes. Ici, les seules femmes qui pourraient s'émanciper grâce à la culture ce sont les filles des grands propriétaires, des banquiers, des commerçants prospères; et ce sont précisément les seules femmes qui se moquent complètement de leur émancipation, parce qu'elles n'ont jamais porté de souliers usés, n'ont jamais connu la faim qui engendre des rebelles. (p. 153)
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