Un roman court et vif. Une langue brute pour sortir de l'ombre une vérité dissimulée, celle de la maltraitance dans l'intimité d'un couple. Une histoire qui vous souffle par le malaise qu'elle provoque.
Le narrateur qui est aussi le personnage subit au quotidien un enfermement psychologique, une manipulation mentale quotidienne et insidieuse de la part de son épouse. On étouffe littéralement à la lecture de son témoignage, celui d'une victime d'un harcèlement conjugal pervers.
En cela, l'histoire est originale car c'est un homme qui est touché et dont on raconte l'histoire. de leur rencontre à leur mariage, en passant par leur vie commune et la naissance de leur fille, se déroulent ainsi des années où la haine s'installe inexorablement jusqu'au drame. le lecteur devenu voyeur assiste impuissant à cette longue descente aux enfers, frôlant souvent le dégoût et la colère, jusqu'au point final.
Commenter  J’apprécie         275
Ailleurs, t’étais ma femme. Ma grande, c’était la nuit. Et la nuit était rare. Sauf le jour, ça oui. Avec toi, il faisait noir. Y a rien pour commencer. Juste toi. T’es plus là. Je peux pas dire ton nom, ni les dates, les endroits. Faut masquer tu comprends, tout est prémédité. Disons que c’était couru qu’un jour j’allais quelque chose. Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais. Ça change rien à l’histoire ni à la vérité. Je t’ai tuée, ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà. Je t’ai cherché un prénom parce que je veux raconter. Je suis tombé sur Irène mais je peux rien en faire. Des prénoms qui s’amenaient comme pour être choisis. Ça t’aurait rendue folle ces filles sur le bout de ma langue. Après Irène, Eva. Plein de prénoms comme plein de femmes. Mettre pas le tien, c’est bidon. J’ai besoin de vérité. J’ai pas besoin de t’appeler. Je vais parler et tu te tais. Je vais dire Tu.
Ailleurs, t’étais ma femme. Ma grande, c’était la nuit. Et la nuit était rare. Sauf le jour, ça oui. Avec toi, il faisait noir. Y a rien pour commencer. Juste toi. T’es plus là. Je peux pas dire ton nom, ni les dates, les endroits. Faut masquer tu comprends, tout est prémédité. Disons que c’était couru qu’un jour j’allais quelque chose. Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais. Ça change rien à l’histoire ni à la vérité. Je t’ai tuée, ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà. Je t’ai cherché un prénom parce que je veux raconter. Je suis tombé sur Irène mais je peux rien en faire. Des prénoms qui s’amenaient comme pour être choisis. Ça t’aurait rendue folle ces filles sur le bout de ma langue. Après Irène, Eva. Plein de prénoms comme plein de femmes. Mettre pas le tien, c’est bidon. J’ai besoin de vérité. J’ai pas besoin de t’appeler. Je vais parler et tu te tais.
Je vais dire Tu. J’ai déjà lu des livres où on s’arrange comme ça, et au bout d’un moment, le Tu ça devient toi. Enfin ça devient soi. Donc ça deviendra moi. Même si la tuée, c’est toi. Me taire, c’est très facile, parce que je contiens tout et je me fais confiance, ça reste toujours dedans. Pas de fuite. Sauf dans le sommeil. Un mot par-ci par-là. Un cri qui me réveille. De toute façon, je dors pas. Et je dors avec personne. Écrire ce qui s’est passé, ce serait comme une archive pour me prouver que c’est vrai quand j’aurai oublié. Je vais oublier après, quand j’aurai tout écrit. J’ai pas besoin d’oublier pour mieux vivre. La vérité bouge pas, c’est ça que je veux inscrire : je suis mieux depuis que t’es pas là. Mais je sais que j’avais pas le droit.
Noircir la feuille pour m’éloigner. On fait bien des avions avec du papier.
Tu te prends pour Picasso ? C’est ça que tu me balançais quand tu me voyais écrire. Picasso. Même Brel tu l’as dit, une fois. Je me prenais pas pour un artiste mais j’avais un hobby, sans toi. Et ça, tu pouvais pas le supporter. Exclusive, amoureuse, tu disais pour te qualifier Je vais dire Tu. J’ai déjà lu des livres où on s’arrange comme ça, et au bout d’un moment, le Tu ça devient toi. Enfin ça devient soi. Donc ça deviendra moi. Même si la tuée, c’est toi. Me taire, c’est très facile, parce que je contiens tout et je me fais confiance, ça reste toujours dedans. Pas de fuite. Sauf dans le sommeil. Un mot par-ci par-là. Un cri qui me réveille. De toute façon, je dors pas. Et je dors avec personne. Écrire ce qui s’est passé, ce serait comme une archive pour me prouver que c’est vrai quand j’aurai oublié. Je vais oublier après, quand j’aurai tout écrit. J’ai pas besoin d’oublier pour mieux vivre. La vérité bouge pas, c’est ça que je veux inscrire : je suis mieux depuis que t’es pas là. Mais je sais que j’avais pas le droit.
Noircir la feuille pour m’éloigner. On fait bien des avions avec du papier.
Tu te prends pour Picasso ? C’est ça que tu me balançais quand tu me voyais écrire. Picasso. Même Brel tu l’as dit, une fois. Je me prenais pas pour un artiste mais j’avais un hobby, sans toi. Et ça, tu pouvais pas le supporter. Exclusive, amoureuse, tu disais pour te qualifier toi-même. Possessive, jalouse, envieuse, égoïste. Je le dis maintenant. De toi.
Avant toi, j’écrivais. L’ambiance dans l’évasion, j’aimais bien. D’abord des poèmes, à quinze ans, pour une cousine, mais tu sais pas. Je te l’ai pas dit. Tu aurais jamais supporté ça. Mon père, lui, il croyait en moi. Quand j’ai eu le prix d’un magazine, pas le premier mais un prix quand même, il m’a dit Persévère, un jour tu feras peut-être un vrai livre. Il y a de la musique dans tes phrases, disait ma mère qui regrette quand même pour le piano. J’ai arrêté trop tôt. J’ai toujours préféré écrire. J’ai gagné un stylo un jour. C’était le deuxième prix pour un autre concours. C’est idiot mais j’étais content.
Quand on s’est rencontrés, toi, moi, je t’ai montré mes poèmes, mes histoires, mes débuts, tu les as un peu lus. Et puis le stylo. Tu as dit Ah. Plus tard, tu as dit que tu n’aimais pas. Lent. Pas drôle. Tu cherchais toujours une intrigue. Tu trouvais pas de rebondissement. Je sais qu’ils t’échappaient, mes textes. Même quand j’en écrivais pour toi. Tu te mettais à la place du crayon, de la feuille, tu supportais pas que j’aie autre chose que toi sous mes doigts. Quand tu étais folle, tu déchirais. Mes journaux surtout. Je tenais un journal depuis que j’étais ado. Mais j’ai arrêté d’écrire dans des cahiers pour que tu me lâches. J’ai arrêté d’aller à mon club d’écriture aussi. Je me suis mis à écrire dans mon coin. Quand je m’asseyais devant mon écran, il y avait ton menton qui avançait et la pré-gueule qui se déclarait. Tu sortais n’importe quelle demande pour que je me consacre qu’à toi et que j’aille pas dans le pays des rêves. Mais c’est pas ça non plus, écrire. C’est pas rêver. Juste vivre ailleurs un petit moment. Ailleurs où t’étais pas, c’est vrai.
Écrire, je le fais juste quand je le fais, parce que je m’entends parler, vraiment, et que personne m’interrompt pour me dire que je suis con. Avec toi, je pouvais plus. Tu m’avais coupé la plume aussi. Je voulais partir dans mon voyage mais t’étais tout le temps au péage à me dire Contrôle, stop, tes papiers. Tu me fouillais. Je me retrouvais à poil. Je pouvais plus aligner deux mots quand tu te mettais à gueuler trop. Je perdais les verbes comme faire, penser. Être, je l’ai perdu pendant des années. Un jour, j’ai écrit un poème avec que des noms. J’avais plus I
Ailleurs, t’étais ma femme. Ma grande, c’était la nuit. Et la nuit était rare. Sauf le jour, ça oui. Avec toi, il faisait noir. Y a rien pour commencer. Juste toi. T’es plus là. Je peux pas dire ton nom, ni les dates, les endroits. Faut masquer tu comprends, tout est prémédité. Disons que c’était couru qu’un jour j’allais quelque chose. Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais. Ça change rien à l’histoire ni à la vérité. Je t’ai tuée, ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà. Je t’ai cherché un prénom parce que je veux raconter. Je suis tombé sur Irène mais je peux rien en faire. Des prénoms qui s’amenaient comme pour être choisis. Ça t’aurait rendue folle ces filles sur le bout de ma langue. Après Irène, Eva. Plein de prénoms comme plein de femmes. Mettre pas le tien, c’est bidon. J’ai besoin de vérité. J’ai pas besoin de t’appeler. Je vais parler et tu te tais.
Je vais dire Tu. J’ai déjà lu des livres où on s’arrange comme ça, et au bout d’un moment, le Tu ça devient toi. Enfin ça devient soi. Donc ça deviendra moi. Même si la tuée, c’est toi. Me taire, c’est très facile, parce que je contiens tout et je me fais confiance, ça reste toujours dedans. Pas de fuite. Sauf dans le sommeil. Un mot par-ci par-là. Un cri qui me réveille. De toute façon, je dors pas. Et je dors avec personne. Écrire ce qui s’est passé, ce serait comme une archive pour me prouver que c’est vrai quand j’aurai oublié. Je vais oublier après, quand j’aurai tout écrit. J’ai pas besoin d’oublier pour mieux vivre. La vérité bouge pas, c’est ça que je veux inscrire : je suis mieux depuis que t’es pas là. Mais je sais que j’avais pas le droit.
Noircir la feuille pour m’éloigner. On fait bien des avions avec du papier.
Tu te prends pour Picasso ? C’est ça que tu me balançais quand tu me voyais écrire. Picasso. Même Brel tu l’as dit, une fois. Je me prenais pas pour un artiste mais j’avais un hobby, sans toi. Et ça, tu pouvais pas le supporter. Exclusive, amoureuse, tu disais pour te qualifier toi-même. Possessive, jalouse, envieuse, égoïste. Je le dis maintenant. De toi.
Avant toi, j’écrivais. L’ambiance dans l’évasion, j’aimais bien. D’abord des poèmes, à quinze ans, pour une cousine, mais tu sais pas. Je te l’ai pas dit. Tu aurais jamais supporté ça. Mon père, lui, il croyait en moi. Quand j’ai eu le prix d’un magazine, pas le premier mais un prix quand même, il m’a dit Persévère, un jour tu feras peut-être un vrai livre. Il y a de la musique dans tes phrases, disait ma mère qui regrette quand même pour le piano. J’ai arrêté trop tôt. J’ai toujours préféré écrire. J’ai gagné un stylo un jour. C’était le deuxième prix pour un autre concours. C’est idiot mais j’étais content.
Quand on s’est rencontrés, toi, moi, je t’ai montré mes poèmes, mes histoires, mes débuts, tu les as un peu lus. Et puis le stylo. Tu as dit Ah. Plus tard, tu as dit que tu n’aimais pas. Lent. Pas drôle. Tu cherchais toujours une intrigue. Tu trouvais pas de rebondissement. Je sais qu’ils t’échappaient, mes textes. Même quand j’en écrivais pour toi. Tu te mettais à la place du crayon, de la feuille, tu supportais pas que j’aie autre chose que toi sous mes doigts. Quand tu étais folle, tu déchirais. Mes journaux surtout. Je tenais un journal depuis que j’étais ado. Mais j’ai arrêté d’écrire dans des cahiers pour que tu me lâches. J’ai arrêté d’aller à mon club d’écriture aussi. Je me suis mis à écrire dans mon coin. Quand je m’asseyais devant mon écran, il y avait ton menton qui avançait et la pré-gueule qui se déclarait. Tu sortais n’importe quelle demande pour que je me consacre qu’à toi et que j’aille pas dans le pays des rêves. Mais c’est pas ça non plus, écrire. C’est pas rêver. Juste vivre ailleurs un petit moment. Ailleurs où t’étais pas, c’est vrai.
Écrire, je le fais juste quand je le fais, parce que je m’entends parler, vraiment, et que personne m’interrompt pour me dire que je suis con. Avec toi, je pouvais plus. Tu m’avais coupé la plume aussi. Je voulais partir dans mon voyage mais t’étais tout le temps au péage à me dire Contrôle, stop, tes papiers. Tu me fouillais. Je me retrouvais à poil. Je pouvais plus aligner deux mots quand tu te mettais à gueuler trop. Je perdais les verbes comme faire, penser. Être, je l’ai perdu pendant des années. Un jour, j’ai écrit un poème avec que des noms. J’avais plus rien. Le seul verbe qui venait c’était Meurt.
Quand on s’est rencontrés, toi, moi, je t’ai montré mes poèmes, mes histoires, mes débuts, tu les as un peu lus. Et puis le stylo. Tu as dit Ah. Plus tard, tu as dit que tu n’aimais pas. Lent. Pas drôle. Tu cherchais toujours une intrigue. Tu trouvais pas de rebondissement. Je sais qu’ils t’échappaient, mes textes. Même quand j’en écrivais pour toi. Tu te mettais à la place du crayon, de la feuille, tu supportais pas que j’aie autre chose que toi sous mes doigts. Quand tu étais folle, tu déchirais. Mes journaux surtout. Je tenais un journal depuis que j’étais ado. Mais j’ai arrêté d’écrire dans des cahiers pour que tu me lâches.
Quand je te disais Ma grande, tu me souriais vraiment. Ça durait juste le temps de redescendre de là-haut, là-haut où ça te mettait, l’amour dans nos draps froids. Tu avais lu quelque part que grelotter fait brûler. Les calories, je parle. Si toi tu avais froid, il fallait que nous aussi. Tu arrêtais le chauffage. La petite contre son lion. Je me pelais contre toi et tu supportais pas. C’était femmelette. Tu aimais bien les vrais hommes. Je te sentais traversée par un grand courant chaud quand un colonel des armées disait Mes hommes à la télé. Moi, j’étais pas jaloux.
Prix des collégiens - Gallimard Jeunesse - 4ème-3ème
Rencontre avec François Place, Isabelle Pandazopoulos, Claire Castillon et Charlotte Erlih. Entretien animé par Manon Fargetton.
Retrouvez les livres :
https://www.mollat.com/livres/2586613/francois-place-la-reine-sous-la-neige
https://www.mollat.com/livres/2586610/isabelle-pandazopoulos-demandez-leur-la-lune
https://www.mollat.com/livres/2563111/claire-castillon-river
https://www.mollat.com/livres/2457390/charlotte-erlih-bacha-posh
Note de musique : © mollat
Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
Visitez le site : http://www.mollat.com/
Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux :
Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/
Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts
Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat
Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/
Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat
Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/
Vimeo : https://vimeo.com/mollat
+ Lire la suite