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EAN : 9782072786259
160 pages
Gallimard (05/04/2018)
3.87/5   154 notes
Résumé :
"La vérité, c'est : je t'ai tuée et c'est tout. J'ai sans doute pas raison. Je regrette rien, et c'est mal." Ils se sont rencontrés à la piscine. Ils se sont aimés pas longtemps. Ils se sont acheté une maison. Il n'a jamais cessé de subir et malgré tout un enfant est né. Il n'était pas vraiment un homme battu : pas de bleus, rien de visible. Et pourtant des coups il y en a eu. Alors on se demande pourquoi il est resté.
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Critiques, Analyses et Avis (55) Voir plus Ajouter une critique
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Ma grande, c'est le surnom que donne... tiens  c'est vrai,  comment s'appelle le narrateur ?
Narrateur sans nom pour nous raconter son histoire, sa vie, sa vie d'homme, sa vie d'homme marié.
Marié à... pas de nom, la non plus. Parce que la nommer,  il ne peut pas. Pas parce qu'il l'a tué, non, ça il assume, mais parce qu'il préfère l'oublier. Oublier ce qu'elle lui a fait vivre. Ces années "d'inbonheur" partagé. J'invente un mot, bien sûr,  mais comment parlé de l'enfer dans le couple.
Un homme, une femme,  ils se mariérent et eurent...une enfant, mais...pas de Bonheur, enfin si, quelques minutes.
Alors pour raconter, ce sera "tu" ou "toi". Anonyme.
C'est par petites phrases, un seul mot parfois, que Claire Castillon nous dresse le portrait au vitriol d'une femme jalouse, possessive, égoïste, perverse, cruelle.
Oh ! elle ne frappe pas, non, pas au sens physique,  mais c'est du venin qui coule dans ses veines et c'est par ses mots, ses gestes, ses attitudes qu'elle blesse.
Et lui, cet homme, ce père, poussé à bout. Victime consentante. Lâche.
Dès les premières lignes, il l'annonce, mais en lisant son récit,  je me posais cette question : L'a-t-il réellement tuée ?
Ce qui surprend dans ce roman que, pour ma part, je trouve très bien écrit, (n'en déplaise à ce lecteur qui, dans un  commentaire, ose dire que l'auteure bafoue la langue française... et je préfère ne pas commenter ce genre de propos), ce qui surprend donc, c'est que c'est une femme qui a choisi d'aborder ce sujet difficile et de donner le mauvais rôle à une femme.
C'est acide avec parfois une pointe d'humour, histoire d'alléger et de laisser respirer le lecteur.
En tout cas ça ne m'a pas laissé indifférent. Ça m'a touché même.
Et dire que....ça existe.

 Si la vertu ne suffit pas à assurer le bonheur, la méchanceté suffit à rendre malheureux. (Aristote)
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« Il te fallait un tatoué ma grande qui t'aurait claqué la gueule rien que pour un regard en biais. Il t'aurait matée comme jamais. Sans ceinture. Avec la pupille. »

C'est l'histoire d'une violence conjugale… vécue par un homme. Une violence psychologique, impossible à dénoncer. Pas non plus une violence perverse, plutôt l'histoire d'une femme très chiante, insupportable, sotte, médiocre, que l'on a tous envie de claquer… ou de tuer.

Un mariage qui aura duré quinze ans, une maison avec piscine, une petite fille née très vite. Et un quotidien atroce. Une épouse-mégère folle de jalousie, qui pique des crises démesurées, capable de tout, supprimant petit à petit carte bleue, amis, famille du narrateur. Lui, doux, diplomate, trop sans doute, il s'écrasera, malgré lui, il fera toujours en sorte de tempérer, pour leur fille, pour éviter les cris, les larmes, il restera pour cette petite qu'il ne peut pas abandonner à sa folle de mère, peut-être aussi parce qu'il a cru longtemps au schéma de ses rêves, parce qu'il ne voulait plus se rendre seul aux dîners de couple…

De la moindre petite fantaisie à sa plus grande passion, elle lui interdira tout, commandera le moindre de ses faits et gestes, même dans quel sens comment tondre le gazon. Elle lui interdira de pleurer son père défunt, de voir ses amis, aller à la piscine, écrire des poèmes. Car oui il écrivait avant, avant elle, avant qu'elle lui ôte la poésie de la vie. Et même après elle —car il y aura un après— parviendra-t-il à revivre à nouveau, lorsque l'on a été ainsi traqué, chaque seconde, jour et nuit, les poches fouillées, privé d'avis, de parole, de projets personnels ?

Mon avis
En écrivant ces lignes, j'ai l'impression que l'histoire paraît absurde, qu'elle manque de crédibilité. Comment un homme peut-il supporter cela, si longtemps ? Est-ce seulement envisageable de tenir une minute, mais quinze ans? Quel genre d'homme était-il ? Comment l'auteure a-t-elle réussi ce challenge incroyable ?

Tout se tient dans le roman, la possession se fait de manière insidieuse, le piège se referme progressivement, les traits de caractère sont bien dosés, l'espoir guette toujours, les années défilent et la situation s'enlise. On lit ce livre en apnée et c'est magique. Parfois, il dérange aussi, car il révèle des traits féminins qui nous appartiennent à toutes, bien que l'on refuse de se reconnaître dans le personnage de l'épouse. Qui n'a pas été sournoise, mesquine, intéressée, jalouse à en crever ?

La fin du roman est à elle-seule très intéressante, cette épouse toujours présente malgré sa disparition continue à l'envahir, à l'empêcher d'avancer... est-ce que malgré tout cela il n'y aurait pas eu un peu d'amour dans cette histoire..?

Un gros coup de coeur pour le sujet et la façon dont il a été traité, un roman que je recommande. Merci aux Editions Gallimard pour cette lecture !

Lien : https://agathethebook.com/20..
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Un roman court et vif. Une langue brute pour sortir de l'ombre une vérité dissimulée, celle de la maltraitance dans l'intimité d'un couple. Une histoire qui vous souffle par le malaise qu'elle provoque.

Le narrateur qui est aussi le personnage subit au quotidien un enfermement psychologique, une manipulation mentale quotidienne et insidieuse de la part de son épouse. On étouffe littéralement à la lecture de son témoignage, celui d'une victime d'un harcèlement conjugal pervers.

En cela, l'histoire est originale car c'est un homme qui est touché et dont on raconte l'histoire. de leur rencontre à leur mariage, en passant par leur vie commune et la naissance de leur fille, se déroulent ainsi des années où la haine s'installe inexorablement jusqu'au drame. le lecteur devenu voyeur assiste impuissant à cette longue descente aux enfers, frôlant souvent le dégoût et la colère, jusqu'au point final.
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C.Castillon est jolie comme un coeur, l'air toujours serein malgré les pages désenchantées qu'elle nous envoie depuis bientôt 20 ans.
Un peu de perversité, un zeste bien acide de citron, et nous voilà dans les tréfonds de l'âme humaine.
Je la trouve fascinante et regrette de ne l'avoir jamais rencontrée.
Cette fois c'est la mort d'un couple qui est le centre de son attention, et pour ne pas abonder dans la vague actuelle des femmes victimes, c'est un homme qui est l'acteur principal de ce roman, acteur peu actif certes mais tout de même .
Ce fils unique à l'adolescence heureuse, poète à ses heures, tombe amoureux en deux minutes d'une jolie jeune fille rencontrée à la piscine.
Ce qui sera un enfer va vite se développer, et ni le mariage ni la venue d'une petite fille ne pourra freiner la descente.
Celle que dans l'intimité il appelle « ma grande » est déroutante, violente dans les mots, jalouse, envieuse, le coupe de sa famille et de ses amis au point d'exiger un mariage , seuls en Californie sans prévenir quiconque.
Perverse l'épouse, pas vraiment, immature sûrement, quant au jeune homme il finira par accepter cette vie débilitante pour lui, pas de carte bleue, rendre des comptes pour chaque acte qui lui est permis, au fait, il se prend une gifle quand même ; lâche c'est sur, mais avec toujours l'espoir que les choses s'arrangeront.
Heureusement ça finira mal si j'ose dire, et enfin l'amoureux des mots pourra à travers ce texte raconter incognito son calvaire qui dure quand même une quinzaine d'années, et pourtant la sérénité et l'envie d'être heureux ne reviennent pas: il y avait peut-être encore un peu d'amour qui résistait...
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C'est la chronique d'une explosion de couple annoncée. C'est un véritable réquisitoire contre " ma grande".
Et pour une fois la perversion, la jalousie, le mensonge, le chantage, c'est Madame qui les exerce!

Ce texte court est ensorcelant.
Ni avec toi, ni sans toi.
Ils se marient à Las Vegas comme au cinéma. Elle est déjà enceinte...

Leurs acrobaties conjugales et familiales les perdent. Ce quotidien pourri tiendra l'affiche 14 ans durant, comme au cirque!.

Il n'en peut plus ,il souffre , il s'en veut, il s'en va mais ..
revient pour "la petite".
Leur fille au fil du temps devient le clone de sa mère, et ajoute ainsi un effet stéréo aux récriminations .

Elle,elle l'isole de ses amis ,de sa famille, l'espionne, l'humilie, gueule à tout va.Tyran domestique labellisé , elle est hantée par la peur qu'il la quitte..

Claire Castillon sert ce texte glaçant et captivant avec une plume incisive .
Pas de rupture de rythme .Un humour corrosif.
Ce type de virago existe, bien sûr mais il a peu d'écrits sur le sujet.

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critiques presse (3)
Chatelaine
07 août 2018
Pourquoi le lire ? Parce que ça bouscule, cet homme victime, cette femme fielleuse qui use des mots comme des coups de poing.
Lire la critique sur le site : Chatelaine
LeJournaldeQuebec
19 juin 2018
Fidèle à elle-même, l’écrivaine française Claire Castillon continue à fouiller les tréfonds de l’âme humaine pour raconter le calvaire d’un homme mal marié.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Bibliobs
29 mai 2018
La stratégie de subversion de Claire Castillon est à son comble quand arrive le moment où l'on ne peut s'empêcher d'être soulagé de voir disparaître une telle harpie.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Ailleurs, t’étais ma femme. Ma grande, c’était la nuit. Et la nuit était rare. Sauf le jour, ça oui. Avec toi, il faisait noir. Y a rien pour commencer. Juste toi. T’es plus là. Je peux pas dire ton nom, ni les dates, les endroits. Faut masquer tu comprends, tout est prémédité. Disons que c’était couru qu’un jour j’allais quelque chose. Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais. Ça change rien à l’histoire ni à la vérité. Je t’ai tuée, ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà. Je t’ai cherché un prénom parce que je veux raconter. Je suis tombé sur Irène mais je peux rien en faire. Des prénoms qui s’amenaient comme pour être choisis. Ça t’aurait rendue folle ces filles sur le bout de ma langue. Après Irène, Eva. Plein de prénoms comme plein de femmes. Mettre pas le tien, c’est bidon. J’ai besoin de vérité. J’ai pas besoin de t’appeler. Je vais parler et tu te tais. Je vais dire Tu.
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Ailleurs, t’étais ma femme. Ma grande, c’était la nuit. Et la nuit était rare. Sauf le jour, ça oui. Avec toi, il faisait noir. Y a rien pour commencer. Juste toi. T’es plus là. Je peux pas dire ton nom, ni les dates, les endroits. Faut masquer tu comprends, tout est prémédité. Disons que c’était couru qu’un jour j’allais quelque chose. Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais. Ça change rien à l’histoire ni à la vérité. Je t’ai tuée, ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà. Je t’ai cherché un prénom parce que je veux raconter. Je suis tombé sur Irène mais je peux rien en faire. Des prénoms qui s’amenaient comme pour être choisis. Ça t’aurait rendue folle ces filles sur le bout de ma langue. Après Irène, Eva. Plein de prénoms comme plein de femmes. Mettre pas le tien, c’est bidon. J’ai besoin de vérité. J’ai pas besoin de t’appeler. Je vais parler et tu te tais.

Je vais dire Tu. J’ai déjà lu des livres où on s’arrange comme ça, et au bout d’un moment, le Tu ça devient toi. Enfin ça devient soi. Donc ça deviendra moi. Même si la tuée, c’est toi. Me taire, c’est très facile, parce que je contiens tout et je me fais confiance, ça reste toujours dedans. Pas de fuite. Sauf dans le sommeil. Un mot par-ci par-là. Un cri qui me réveille. De toute façon, je dors pas. Et je dors avec personne. Écrire ce qui s’est passé, ce serait comme une archive pour me prouver que c’est vrai quand j’aurai oublié. Je vais oublier après, quand j’aurai tout écrit. J’ai pas besoin d’oublier pour mieux vivre. La vérité bouge pas, c’est ça que je veux inscrire : je suis mieux depuis que t’es pas là. Mais je sais que j’avais pas le droit.

Noircir la feuille pour m’éloigner. On fait bien des avions avec du papier.

Tu te prends pour Picasso ? C’est ça que tu me balançais quand tu me voyais écrire. Picasso. Même Brel tu l’as dit, une fois. Je me prenais pas pour un artiste mais j’avais un hobby, sans toi. Et ça, tu pouvais pas le supporter. Exclusive, amoureuse, tu disais pour te qualifier Je vais dire Tu. J’ai déjà lu des livres où on s’arrange comme ça, et au bout d’un moment, le Tu ça devient toi. Enfin ça devient soi. Donc ça deviendra moi. Même si la tuée, c’est toi. Me taire, c’est très facile, parce que je contiens tout et je me fais confiance, ça reste toujours dedans. Pas de fuite. Sauf dans le sommeil. Un mot par-ci par-là. Un cri qui me réveille. De toute façon, je dors pas. Et je dors avec personne. Écrire ce qui s’est passé, ce serait comme une archive pour me prouver que c’est vrai quand j’aurai oublié. Je vais oublier après, quand j’aurai tout écrit. J’ai pas besoin d’oublier pour mieux vivre. La vérité bouge pas, c’est ça que je veux inscrire : je suis mieux depuis que t’es pas là. Mais je sais que j’avais pas le droit.



Noircir la feuille pour m’éloigner. On fait bien des avions avec du papier.

Tu te prends pour Picasso ? C’est ça que tu me balançais quand tu me voyais écrire. Picasso. Même Brel tu l’as dit, une fois. Je me prenais pas pour un artiste mais j’avais un hobby, sans toi. Et ça, tu pouvais pas le supporter. Exclusive, amoureuse, tu disais pour te qualifier toi-même. Possessive, jalouse, envieuse, égoïste. Je le dis maintenant. De toi.

Avant toi, j’écrivais. L’ambiance dans l’évasion, j’aimais bien. D’abord des poèmes, à quinze ans, pour une cousine, mais tu sais pas. Je te l’ai pas dit. Tu aurais jamais supporté ça. Mon père, lui, il croyait en moi. Quand j’ai eu le prix d’un magazine, pas le premier mais un prix quand même, il m’a dit Persévère, un jour tu feras peut-être un vrai livre. Il y a de la musique dans tes phrases, disait ma mère qui regrette quand même pour le piano. J’ai arrêté trop tôt. J’ai toujours préféré écrire. J’ai gagné un stylo un jour. C’était le deuxième prix pour un autre concours. C’est idiot mais j’étais content.

Quand on s’est rencontrés, toi, moi, je t’ai montré mes poèmes, mes histoires, mes débuts, tu les as un peu lus. Et puis le stylo. Tu as dit Ah. Plus tard, tu as dit que tu n’aimais pas. Lent. Pas drôle. Tu cherchais toujours une intrigue. Tu trouvais pas de rebondissement. Je sais qu’ils t’échappaient, mes textes. Même quand j’en écrivais pour toi. Tu te mettais à la place du crayon, de la feuille, tu supportais pas que j’aie autre chose que toi sous mes doigts. Quand tu étais folle, tu déchirais. Mes journaux surtout. Je tenais un journal depuis que j’étais ado. Mais j’ai arrêté d’écrire dans des cahiers pour que tu me lâches. J’ai arrêté d’aller à mon club d’écriture aussi. Je me suis mis à écrire dans mon coin. Quand je m’asseyais devant mon écran, il y avait ton menton qui avançait et la pré-gueule qui se déclarait. Tu sortais n’importe quelle demande pour que je me consacre qu’à toi et que j’aille pas dans le pays des rêves. Mais c’est pas ça non plus, écrire. C’est pas rêver. Juste vivre ailleurs un petit moment. Ailleurs où t’étais pas, c’est vrai.

Écrire, je le fais juste quand je le fais, parce que je m’entends parler, vraiment, et que personne m’interrompt pour me dire que je suis con. Avec toi, je pouvais plus. Tu m’avais coupé la plume aussi. Je voulais partir dans mon voyage mais t’étais tout le temps au péage à me dire Contrôle, stop, tes papiers. Tu me fouillais. Je me retrouvais à poil. Je pouvais plus aligner deux mots quand tu te mettais à gueuler trop. Je perdais les verbes comme faire, penser. Être, je l’ai perdu pendant des années. Un jour, j’ai écrit un poème avec que des noms. J’avais plus I

Ailleurs, t’étais ma femme. Ma grande, c’était la nuit. Et la nuit était rare. Sauf le jour, ça oui. Avec toi, il faisait noir. Y a rien pour commencer. Juste toi. T’es plus là. Je peux pas dire ton nom, ni les dates, les endroits. Faut masquer tu comprends, tout est prémédité. Disons que c’était couru qu’un jour j’allais quelque chose. Tu me faisais des brûlures et je débrûlais jamais. Ça change rien à l’histoire ni à la vérité. Je t’ai tuée, ça se fait pas. Je vais l’écrire et voilà. Je t’ai cherché un prénom parce que je veux raconter. Je suis tombé sur Irène mais je peux rien en faire. Des prénoms qui s’amenaient comme pour être choisis. Ça t’aurait rendue folle ces filles sur le bout de ma langue. Après Irène, Eva. Plein de prénoms comme plein de femmes. Mettre pas le tien, c’est bidon. J’ai besoin de vérité. J’ai pas besoin de t’appeler. Je vais parler et tu te tais.

Je vais dire Tu. J’ai déjà lu des livres où on s’arrange comme ça, et au bout d’un moment, le Tu ça devient toi. Enfin ça devient soi. Donc ça deviendra moi. Même si la tuée, c’est toi. Me taire, c’est très facile, parce que je contiens tout et je me fais confiance, ça reste toujours dedans. Pas de fuite. Sauf dans le sommeil. Un mot par-ci par-là. Un cri qui me réveille. De toute façon, je dors pas. Et je dors avec personne. Écrire ce qui s’est passé, ce serait comme une archive pour me prouver que c’est vrai quand j’aurai oublié. Je vais oublier après, quand j’aurai tout écrit. J’ai pas besoin d’oublier pour mieux vivre. La vérité bouge pas, c’est ça que je veux inscrire : je suis mieux depuis que t’es pas là. Mais je sais que j’avais pas le droit.



Noircir la feuille pour m’éloigner. On fait bien des avions avec du papier.

Tu te prends pour Picasso ? C’est ça que tu me balançais quand tu me voyais écrire. Picasso. Même Brel tu l’as dit, une fois. Je me prenais pas pour un artiste mais j’avais un hobby, sans toi. Et ça, tu pouvais pas le supporter. Exclusive, amoureuse, tu disais pour te qualifier toi-même. Possessive, jalouse, envieuse, égoïste. Je le dis maintenant. De toi.

Avant toi, j’écrivais. L’ambiance dans l’évasion, j’aimais bien. D’abord des poèmes, à quinze ans, pour une cousine, mais tu sais pas. Je te l’ai pas dit. Tu aurais jamais supporté ça. Mon père, lui, il croyait en moi. Quand j’ai eu le prix d’un magazine, pas le premier mais un prix quand même, il m’a dit Persévère, un jour tu feras peut-être un vrai livre. Il y a de la musique dans tes phrases, disait ma mère qui regrette quand même pour le piano. J’ai arrêté trop tôt. J’ai toujours préféré écrire. J’ai gagné un stylo un jour. C’était le deuxième prix pour un autre concours. C’est idiot mais j’étais content.



Quand on s’est rencontrés, toi, moi, je t’ai montré mes poèmes, mes histoires, mes débuts, tu les as un peu lus. Et puis le stylo. Tu as dit Ah. Plus tard, tu as dit que tu n’aimais pas. Lent. Pas drôle. Tu cherchais toujours une intrigue. Tu trouvais pas de rebondissement. Je sais qu’ils t’échappaient, mes textes. Même quand j’en écrivais pour toi. Tu te mettais à la place du crayon, de la feuille, tu supportais pas que j’aie autre chose que toi sous mes doigts. Quand tu étais folle, tu déchirais. Mes journaux surtout. Je tenais un journal depuis que j’étais ado. Mais j’ai arrêté d’écrire dans des cahiers pour que tu me lâches. J’ai arrêté d’aller à mon club d’écriture aussi. Je me suis mis à écrire dans mon coin. Quand je m’asseyais devant mon écran, il y avait ton menton qui avançait et la pré-gueule qui se déclarait. Tu sortais n’importe quelle demande pour que je me consacre qu’à toi et que j’aille pas dans le pays des rêves. Mais c’est pas ça non plus, écrire. C’est pas rêver. Juste vivre ailleurs un petit moment. Ailleurs où t’étais pas, c’est vrai.



Écrire, je le fais juste quand je le fais, parce que je m’entends parler, vraiment, et que personne m’interrompt pour me dire que je suis con. Avec toi, je pouvais plus. Tu m’avais coupé la plume aussi. Je voulais partir dans mon voyage mais t’étais tout le temps au péage à me dire Contrôle, stop, tes papiers. Tu me fouillais. Je me retrouvais à poil. Je pouvais plus aligner deux mots quand tu te mettais à gueuler trop. Je perdais les verbes comme faire, penser. Être, je l’ai perdu pendant des années. Un jour, j’ai écrit un poème avec que des noms. J’avais plus rien. Le seul verbe qui venait c’était Meurt.
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Quand on s’est rencontrés, toi, moi, je t’ai montré mes poèmes, mes histoires, mes débuts, tu les as un peu lus. Et puis le stylo. Tu as dit Ah. Plus tard, tu as dit que tu n’aimais pas. Lent. Pas drôle. Tu cherchais toujours une intrigue. Tu trouvais pas de rebondissement. Je sais qu’ils t’échappaient, mes textes. Même quand j’en écrivais pour toi. Tu te mettais à la place du crayon, de la feuille, tu supportais pas que j’aie autre chose que toi sous mes doigts. Quand tu étais folle, tu déchirais. Mes journaux surtout. Je tenais un journal depuis que j’étais ado. Mais j’ai arrêté d’écrire dans des cahiers pour que tu me lâches.
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Il y a un truc que j'ai jamais fait mais qui me faisait rêver. Te réveiller avec un grand seau d'eau froide dans la gueule.
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Quand je te disais Ma grande, tu me souriais vraiment. Ça durait juste le temps de redescendre de là-haut, là-haut où ça te mettait, l’amour dans nos draps froids. Tu avais lu quelque part que grelotter fait brûler. Les calories, je parle. Si toi tu avais froid, il fallait que nous aussi. Tu arrêtais le chauffage. La petite contre son lion. Je me pelais contre toi et tu supportais pas. C’était femmelette. Tu aimais bien les vrais hommes. Je te sentais traversée par un grand courant chaud quand un colonel des armées disait Mes hommes à la télé. Moi, j’étais pas jaloux.
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Vidéo de Claire Castillon
Prix des collégiens - Gallimard Jeunesse - 4ème-3ème
Rencontre avec François Place, Isabelle Pandazopoulos, Claire Castillon et Charlotte Erlih. Entretien animé par Manon Fargetton.
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