Un crime a été commis un soir d'hiver sur la personne du curé d'une petite ville perdue aux confins d'un empire. Cet homme y officiait depuis 40 ans, il était peu aimé mais on ne lui connaissait pas d'ennemis.
Ce meurtre, bientôt suivi par d'autres graves évènements, sert de toile de fond à ce roman, et
l'enquête est naturellement confiée au chef de la police locale aidé de son adjoint.
"L'Empire" en question n'est jamais nommé, mais les quelques informations glissées ici et là au fil des 500 pages du roman laissent à penser qu'il s'agit du vaste empire austro-hongrois dans la période qui précède la 1ère guerre mondiale. Peu importe d'ailleurs, car il pourrait s'agir de n'importe quel empire, du passé ou du présent. le récit a en effet une résonnance intemporelle en traitant de thèmes tels que l'injustice, le sectarisme, la stigmatisation des minorités, le piétinement sans scrupules des règles normales de vie en société, la réécriture des faits au service de l'intérêt de quelques uns, ainsi que la disparition progressive d'un monde pour un autre.
En mettant en scène un panel de personnages variés, évoquant les autorités locales jusqu'au plus humble des citoyens,
Philippe Claudel fait un portrait sans concession de la nature humaine, allant parfois jusqu'à forcer le trait, une peinture qui fait ressortir la noirceur des uns et la sagesse ou la luminosité des autres.
Le titre du livre est bien choisi, dans le sens 1er du terme d'abord, puisque les évènements racontés ici se sont tous déroulés à la tombée du jour, mais surtout dans la signification plus vaste de "
crépuscule" d'un monde", celui que vit un empire qui voit à sa périphérie s'effriter soudainement un équilibre d'apparence qui n'attend qu'une étincelle pour s'enflammer.
La narration, un peu longue parfois, est de structure classique; elle décrit minutieusement les lieux, les paysages, la posture des personnages, et en parvenant à maintenir le suspense jusqu'à la fin, elle imagine un épilogue qui ne manquera pas de surprendre.