AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,74

sur 451 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Sortez les sous-pulls.
Tant pis pour la tête de prépuce mais Crépuscule fait partie de ces romans dont la lecture vous donne l'impression de participer à l'effort collectif d'économie d'énergie.
Y'a pas à dire, Philippe Claudel pourrait faire passer Frank Bouysse pour un Géo du Club Med à Agadir. Prix Mister Freeze 2023. Avec eux, pas de réchauffement climatique.
Ambiance gothico-austéro et gelado dans un bourg isolé d'un Empire d'Europe Centrale. L'époque est non datée mais le récit évoque le temps des archiducs des Balkans, moustaches au balcon, et prénoms avec trait d'union.
Comme si la météo pourrie et les paysages tristes ne suffisaient pas, le curé est retrouvé le crâne fracassé aux abords de l'église. Difficile de faire plus près du seigneur pour un voyage sans escale mais ce fait… d'hiver va rompre l'équilibre fragile qui régnait au sein de la petite ville perdue au milieu de nulle part.
L'enquête est menée par un policier ambitieux et opportuniste qui est dévoré par des pulsions lolitiennes assez nauséabondes et par son adjoint, Baraj, gentil géant qui n'a pas la lumière à tous les étages mais dont l'innocence et la candeur réchauffent le roman. Très rapidement, les autorités locales instrumentalisent le meurtre et attisent les rumeurs qui accablent la petite communauté musulmane du bourg. le bénéfice du doute ne s'applique pas aux étrangers.
Derrière la noirceur policière, le recherche du coupable est presque secondaire. Les fans d'Agatha Christie peuvent continuer leur partie de Cluedo et ignorer ce roman. La force de ce récit ne repose donc pas sur son intrigue mais sur son atmosphère onirique et sur le déchainement de passions que le crime va déclencher au sein de la population. J'ai lu ce livre comme on observe un vivarium, fasciné par la sauvagerie qui s'empare des hommes dans un espace clos. Derrière les apparences de la civilisation, surgissent les démons, comme un tableau animé de Jérôme Bosch. Sacré coup de peinture pour un vendeur de perceuses.
Philippe Claudel ambiance son roman comme un conte lugubre, qui donne l'impression au lecteur de partager un songe cotonneux… ou un lendemain de cuite mais c'est beaucoup moins poétique.
Inutile également d'être pourvu d'un master en voyance option charlatan pour lire entre ces lignes les outrances de notre temps. La morale, c'est qu'il n'y pas de morale dès que les temps se gâtent. Un pour tous et chacun pour soi. Les fantômes du passé sont toujours à l'affût et prêts à s'aérer les draps dès que le sang coule.
Les personnages féminins sauvent un peu la face de l'humanité dans ce roman alors que l'auteur ne désigne les hommes que par un métier ou un titre pour les désincarner ou les emprisonner dans des caricatures.
Si je suis un peu avare d'étoiles, c'est que malgré la précocité du crime, l'installation des personnages traine en longueur et frise la langueur. Il faut attendre les funérailles du curé, déneigeuses du récit, pour que l'intrigue s'anime vraiment, et autorise le lecteur à se passionner pour ces destins oniriques.
Autre petite réserve, les répétitions. Autre petite réserve, les répétitions. Autre petite réserve, les répétitions. C'est pénible non ? Bon, un obsédé, par définition, ressasse ses lubies et a tendance à se répéter mais les montées de sève du policier dégoutent autant qu'elles lassent au fil des pages.
La prose de Philippe Claudel reste très visuelle, les paysages sont raccords avec les personnages, âmes grises au coeur lourd et cet auteur parvient une nouvelle fois à créer une dimension parallèle qui délivre les passions les plus sombres.
La lecture de certaines critiques de presse évoque une dimension cathartique et un imaginaire qui magnifie la profondeur de propos. Mouais, je sais qu'il ne faut pas trop froisser un juré du Goncourt mais pour ma pomme, le sol était trop froid pour que je réussisse à creuser la profondeur du propos.
Bon, on va rallumer la cheminée.
Commenter  J’apprécie          12612
Crépusculaire, c'est peu dire, c'est d'un outre-noir qu'il s'agit, toutes les nuances sombres de l'âme humaine sont ici réunies, on a dépassé les âmes grises.
Dans une petite ville de l'Empire, bien à l'Est , où l'on s'éclaire encore à la bougie, Lémia, une frêle gamine d'à peine 13 ans et son petit frère découvrent un cadavre dans la neige, c'est celui du curé. Quelques familles musulmanes vivent là aussi près de la mosquée.
Commence alors une enquête menée par un triste sire, imbécile de surcroît , l'inspecteur Nourio et son adjoint Baraj, un pauvre colosse attardé que seuls ses deux grands chiens roux chérissent.
Cette enquête qui traîne sans résultat durant tout le livre est prétexte pour l'auteur à explorer une fois de plus l'âme humaine à travers une histoire et l'Histoire afin de démontrer que des puissants peuvent fabriquer une vérité qui les arrangent. P.Claudel en profite pour nous asséner également en passant sa bien -pensance.
J'ai failli(et c'est extrêmement rare) refermer ce livre au premier tiers glauque et gluant de ce roman. Que Nourio soit obsédé par le sexe, pourquoi pas, que les multiples assauts quotidiens que subit sa femme soient repris ad nauseam aussi souvent et que la jeune Lémia sera sa prochaine proie,et de quelle manière, c'était plus que libidineux. J'ai quand même continué , l'auteur reprenant ses esprits, et l'écriture de P.Claudel a su me garder, elle est très belle dans son exploration de l'âme humaine.La couverture est superbe, mais un des dessins les plus horribles de Jérôme Bosch aurait tout aussi pu y figurer.
Etat dépressif s'abstenir.
Commenter  J’apprécie          244
Comme souvent, Philippe Claudel sait peindre des tableaux de contrées lointaines saisies de givre et de vent, cartographier les territoires de viles manigances, tout en charriant à pleines brassées les noirceurs de l'âme humaine. Car les humains dans ses histoires sont toujours gouvernés par leurs bas instincts, qu'il s'agisse de stupre, d'avidité ou de vain ego. de petits puissants se débattent dans leurs minables existences, avec leurs secrets, leurs pulsions et leurs mensonges, n'épargnant ni la vérité ni les innocents. L'écriture est belle, tantôt charnelle tantôt minérale, apte à décrire d'orgiaques ripailles ou de viriles expéditions chasseresses, tout comme la simple poésie du vivant ou des coeurs sincères. Au charme des descriptions s'ajoute le contrepoint d'une réflexion sur la nature humaine et les malfaçons de l'Histoire.

Dans une province reculée de l'Empire existe une petite communauté où les Mahométans vivent en bonne entente avec les Chrétiens, où l'église jouxte la mosquée sans que quiconque ait à se plaindre. Mais lorsque le Curé est retrouvé gisant, le crâne fracassé à coups de pierre, les soupçons se portent sans tarder sur la communauté musulmane. Nourio le Policier, tout autant malmené par ses appétits sexuels que par son ambition de petit fonctionnaire aspirant à davantage de reconnaissance, doit mener l'enquête avec son Adjoint Baraj, doux colosse taiseux et solitaire goûtant le bonheur des choses simples. Si le meurtre du Curé réveille des haines endormies au sein de la petite ville anesthésiée par le froid, il produit aussi des remous en forme d'aubaine dans certains esprits ignobles et manipulateurs. Peut-être l'Empire a-t-il une carte à jouer dans ce jeu de dupes…

Les personnages de cette histoire sont habilement croqués. le trait est épais et noir, les contrastes savamment portés, notamment chez le Policier à la personnalité complexe dont on se demande jusqu'à la fin s'il parviendra à lutter contre ses pulsions abominables pour faire éclater la vérité. Mais lui-même reconnaît l'idée d'une vérité efficiente en ce monde, dont souvent s'accommodent les puissants et ceux qui écrivent L Histoire.
Commenter  J’apprécie          168
Une bien belle histoire contée avec une imagination parfois délirante, qui, mine de rien aborde frontalement des thèmes sociétaux actuels portés par quelques personnages bien campés et dont on suit les pérégrinations avec intérêt. La versatilité du policier Nourio, la constance de son adjoint Baraj et la lumineuse Lémia, vivent dans un pays où il vaut mieux ne pas appartenir à la minorité musulmane ! L'assassinat du curé est le détonateur de bouleversements de plus en plus graves étonnamment ressemblants à ce que produit une dictature en propageant un « vérité efficiente » On pourrait s'étonner, voire s'offusquer de la crudité de certains comportement sexuels déviants, mais la liberté d'écriture de l'écrivain dans une fiction ne doit pas être remise en cause, et le plaisir de lecture est au rendez-vous, comme dans beaucoup d'autres romans de Philippe Claudel.
Commenter  J’apprécie          160
Un crime a été commis un soir d'hiver sur la personne du curé d'une petite ville perdue aux confins d'un empire. Cet homme y officiait depuis 40 ans, il était peu aimé mais on ne lui connaissait pas d'ennemis.
Ce meurtre, bientôt suivi par d'autres graves évènements, sert de toile de fond à ce roman, et l'enquête est naturellement confiée au chef de la police locale aidé de son adjoint.
"L'Empire" en question n'est jamais nommé, mais les quelques informations glissées ici et là au fil des 500 pages du roman laissent à penser qu'il s'agit du vaste empire austro-hongrois dans la période qui précède la 1ère guerre mondiale. Peu importe d'ailleurs, car il pourrait s'agir de n'importe quel empire, du passé ou du présent. le récit a en effet une résonnance intemporelle en traitant de thèmes tels que l'injustice, le sectarisme, la stigmatisation des minorités, le piétinement sans scrupules des règles normales de vie en société, la réécriture des faits au service de l'intérêt de quelques uns, ainsi que la disparition progressive d'un monde pour un autre.
En mettant en scène un panel de personnages variés, évoquant les autorités locales jusqu'au plus humble des citoyens, Philippe Claudel fait un portrait sans concession de la nature humaine, allant parfois jusqu'à forcer le trait, une peinture qui fait ressortir la noirceur des uns et la sagesse ou la luminosité des autres.
Le titre du livre est bien choisi, dans le sens 1er du terme d'abord, puisque les évènements racontés ici se sont tous déroulés à la tombée du jour, mais surtout dans la signification plus vaste de "crépuscule" d'un monde", celui que vit un empire qui voit à sa périphérie s'effriter soudainement un équilibre d'apparence qui n'attend qu'une étincelle pour s'enflammer.
La narration, un peu longue parfois, est de structure classique; elle décrit minutieusement les lieux, les paysages, la posture des personnages, et en parvenant à maintenir le suspense jusqu'à la fin, elle imagine un épilogue qui ne manquera pas de surprendre.
Commenter  J’apprécie          140
Nouveau roman de Philippe Claudel annoncé pour cette rentrée, et d'emblée me voici attirée. Seulement, comme son titre l'indique, ce roman est crépusculaire et sa lecture fut moins aisée que prévue.

Dans un coin perdu du côté de l'Europe centrale, à une époque qu'on situe au début du siècle, un crime va bouleversé la petite tranquillité de ce lieu indéfini. Crépuscule commence comme une enquête. Il s'agit de retrouver pour la brigade policière locale l'assassin du curé du bourg. Seulement, ceci n'est qu'un prétexte à Philippe Claudel pour décrire un monde qui va se déliter jusqu'à en devenir effroyable, et pour moi insupportable !

Le policier du cru, Nourio, pense pouvoir trouver enfin une possibilité de sortir de son ennui habituel en actionnant les marionnettes qui l'entourent. Et, en effet, il y arrive très bien ! Car, la tension de son sexe ne lui suffit plus pour éprouver sa puissance !

Baraj, son adjoint, qualifié de bêta par son supérieur est en fait un poète sous une carapace de géant. Sauf, qu'une enfant, trop jeune et trop fragile, tombe dans les griffes du pervers.

L'instruction est sensée révéler la vérité. Sauf que Philippe Claudel permet à son personnage de la pervertir, la falsifier, la tordre dans le sens qui convient à son héros. Une vérité qui n'a rien de véritable, c'est un peu de notre monde d'aujourd'hui qu'il décrit là, exacerbant les bassesses humaines, les petits coups qui entraînent la mise en abîme d'une société jusque là paisible.

Seulement, Philippe Clauderl sait toujours si ben écrire même s'il raconte des horreurs qui ressemblent à notre modernité. J'ai mis du temps à m'apercevoir que ce malaise, l'écrivain le voulait, s'en délectait même pour servir sa démonstration. Seulement, je m'y suis perdue et j'ai préféré croire encore que rien n'est tout à fait fini !
Lien : https://vagabondageautourdes..
Commenter  J’apprécie          140
Nourio mène l'enquête sur la mort du curé dans un petit village aux confins d'un Empire fictif où les religions, les ethnies cohabitent cahin caha. Il y a quelque chose de très classique dans la langue et dans la façon dont est menée cette histoire. On finit par se prendre au jeu, lorsque la grande et la petite histoire des turpitudes humaines se rejoignent à travers ses personnages principaux : Nourio, policier déçu et frustré, Baraj, le simplet poète, Lemia la fée, ou tout comme. L'embrasement entre communautés est inéluctable semble dire ce roman et l'homme n'y peut rien. le cours de l'Histoire lui échappe, le plus souvent dans le tragique.
Commenter  J’apprécie          100
J'ai eu un peu de mal avec le Policier, atteint de priapisme, dont la femme subit les assauts nuits et jours.

J'ai aimé l'Adjoint, qui vit seul avec ses deux chiens, Mes Beaux, qui aime fendre du bois et compose de courts poèmes dont il ne se souvient pas.

J'ai aimé l'Imam qui tente d'apaiser les tensions et de rassurer sa communauté.

J'ai eu de la peine pour Lémia, la fille su Sabotier, que le Policier convoite. J'ai eu peur pour elle jusqu'à ce qu'elle rencontre l'Adjoint qu'elle surnomme le Bon Géant.

J'ai souri jaune à l'apparition dans le récit des jumeaux Kouechi, dont le nom, à une voyelle près, rappelle de mauvais souvenirs.

Un roman qui parle de notre société sur le déclin sous couvert de fiction.

Toutefois, j'ai fini le roman en diagonale à partir de la scène de chasse car le récit ne me passionnait plus. Mais j'ai aimé la fin du Policier.

L'image que je retiendrai :

Celle de la neige sur laquelle glisse les traineaux et des samovars pas toujours chauds.
Lien : https://alexmotamots.fr/crep..
Commenter  J’apprécie          100
Sous des airs de roman policier, voici un roman qui explore les noirceurs de l'âme humaine. C'est d'autant plus fort que l'auteur choisit un point de vue uniquement descriptif, sans morale et sans explication justificative. Un roman bien plus intelligent et bien plus fin, donc, que le laisse supposer le résumé de la quatrième de couverture. Je recommande vivement cette lecture qui appelle à la réflexion.
Commenter  J’apprécie          80

« Naturellement personne ne disait la vérité vraie ; ceux qui auraient pu la savoir, la jugeaient trop simple et pas assez intéressante. » Zola, l'Assommoir.

Et voilà qu'en 2023 Ph. Claudel fait de ce thème éternel le sujet central de son dernier roman. Il y a d'un côté, la vérité étayée par des preuves, conforme à la réalité et la vérité officielle, efficiente, celle qui arrange tout le monde et que les autorités construisent à leur convenance pour protéger les intérêts supérieurs - et surtout les leurs.
L'autre thème, en corollaire, est l'ostracisme dont sont victimes les minorités, en l'occurrence les musulmans, exacerbant les égoïsmes et les passions jusqu'à la solution finale. Il va y avoir un crime et c'est toute une communauté qui va être accusée sans la moindre preuve, servir de bouc émissaire car ce coupable là, tout trouvé, est bien commode ...peu importe la vérité vraie.
Et Ph. Claudel de nous montrer comment le mal prospère et comment il est alimenté par un pouvoir qui a tout intérêt à travestir la réalité.

Pour accrocher le lecteur et le mener là où il veut Claudel bâtit son récit comme un roman policier et, en effet, on est d'emblée captivé et par la trame et par le style. Comme dans le Rapport Brodeck, il situe son roman à une époque relativement lointaine et dans un pays et « une province de nulle part » au fin fond de l'Europe de l'Est et dans des paysages aussi sombres que les âmes qui les habitent.
Comment ne pas faire le rapprochement entre ce qui se passe dans ce lointain Empire et ce que nous vivons aujourd'hui : ostracisme, discriminations, racisme mais aussi, information officielle faite de contre-vérités grossières énoncées par le gouvernement, réécriture de l'histoire, établissement d'une vérité d'état comme en Russie actuellement. « Le grand mensonge » sous Trump et ses « vérités alternatives » etc.
Bref, une sorte de parabole de notre histoire récente.

Comme dans le Rapport Brodeck, Claudel ausculte l'âme humaine et en fait ressortir, de son écriture fluide, précise et d'une grande puissance évocatrice, toute la noirceur.
Un rayon de ciel bleu cependant, dans cet univers glauque et glacé , l'amour tout platonique, pur, désincarné qui naît peu à peu entre la toute jeune Lémia symbole de pureté et de dévouement et l'Adjoint, géant débonnaire et innocent, perdu dans le monde qui l'entoure, féru de poésie et adorant ses chiens.
Et, comme un clin d'oeil, Claudel- le poète termine son récit par ces mots p.460 : « Le Policier se dit que…. la poésie qu'il avait tant aimée dans sa jeunesse et dont la mesure n'était ni la vie ni le temps des hommes, pouvait par son seul miracle, porter dans les siècles à venir la seule vérité de ce qui était advenu. »
Bel hommage à la poésie en ces temps difficiles qu'il nous est donné de vivre.
Commenter  J’apprécie          72




Lecteurs (1005) Voir plus



Quiz Voir plus

Philippe Claudel

Philippe Claudel est professeur. Auprès de quel public particulier a-t-il enseigné ?

des aveugles
des prisonniers
des immigrés

5 questions
147 lecteurs ont répondu
Thème : Philippe ClaudelCréer un quiz sur ce livre

{* *}