Mais non ! Trop bon client celui-là, toujours à faire des commentaires dithyrambiques où tout le monde est beau et écrit bien.
Pas ma faute, si grâce aux Babeliotes j'ai pu trier, sérier mes lectures, à tel point que tout ce que j'ai lu dernièrement est purement remarquable et me convient parfaitement.
Et, ce n'est pas «
Les Ames grises » qui me feront écrire le contraire. Si celui-là n'est pas un bon roman, j'avoue que je n'ai rien compris à la littérature.
Notez bien qu'en plus, je suis toujours en décalage. Les livres que je découvre, vous les avez digérés il y a cent ans. Non pas que vous soyez vieux, c'est une image.
Ce roman en regorge, de biens plus fortes d'ailleurs, de celles qui collent à la peau, qu'on se demande comment les mots des autres peuvent traduire notre intime perception.
Après 227 critiques, je ne vais pas vous faire l'affront de résumer l'histoire, quoique...ça me démange bien de vous dire qu'il y a une tripotée de refoulés parmi une myriade de gentils riquiquis, une paire de suffisants méprisants, des gens qui adorent détester les autres rien que parce qu'ils sont les autres et qu'ils sont rien.
Je déteste les gens qui disent « grande musique ». Pourquoi, il y en a une petite ? Il y a des symphonies et des chansonnettes, les deux peuvent plaire sans considération de taille.
Le rapport avec ce livre ? Simple.
Philippe Claudel aligne les mots comme des notes et ça fait chanter le coeur comme une mélodie à faire vibrer à chaque page la corde de notre sensibilité. Basique.
Cet ensemble, chapitre après chapitre, crée une symphonie de mots avec ses allégros, ses moderatos et ses ristrettos. Non, ça c'est Nespresso ! Blagounette, juste pour exorciser l'injustice, l'assassinat abject de la petite, la guerre dégueulasse, tout ce qui jonche ce roman.
Requiem étincelant, dégoûtant.
Ajoutons une parenthèse lourde, d'actualité :
Gilles est jaune. Crise de foi des politiques de son pays depuis tout petit.
Lui et sa « souris » verte de rage, couraient dans l'herbe du rond-point depuis plus d'un mois.
A tourner en rond, point de repos à attraper par la queue les véhicules de ces messieurs.
Ces messieurs aux âmes grises de pollution leur disent qu'ils roulent comme des escargots tout chauds bloqués par leurs copains. 21 qu'ils étaient. Ils sont passés à 24 mais ça n'avait rien changé. Il fallait tout augmenter.
De froid, ils buvaient comme des polonais et à la barbe des députés qui essayaient de leur donner le change par des macrons mesures qui ne suffisaient pas à calmer leur désespoir pour la soif.
Quel rapport avec ce livre ? Quelle question ! : La rupture, les classes sociales, les devoirs, les droits, le respect, l'incompréhension, l'amour propre, la bêtise humaine, la vie, la mort.
Y'a tout ça qu'est dedans. Simple. Basique.
« On dirait que l'homme est un de ces petits cailloux posés sur les routes, qui reste des jours entiers à la même place, et que le coup de pied d'un trimardeur parfois bouscule et lance dans les airs, sans raison. Et qu'est ce que peut un caillou. »