Plate-forme Epsilon

On démarre sur une histoire entre fantastique et polar, le style d'écriture est teinté de références aux auteurs du XIXe siècle, Edgar Poe en particulier, mais Dickens et Conan Doyle ne sont pas très loin non plus, c'est bien écrit, avec des caractères bien travaillés, un rythme efficace, même si l'auteur abuse un peu des cliffhangers en fins de chapitres. Perle est une petite fille, orpheline, élevée pauvrement par sa grande soeur Angie, ça se passe à Londres, le récit n'est pas clairement ancré dans le temps. Un jour elle ramasse des roses semées dans la neige, cet acte va avoir d'étranges et dramatiques conséquences, en parallèle, deux vieilles soeurs se font sauvagement assassinées chez elles. le suspense est bien amené, crescendo, le récit m'a bien accroché. Dans la deuxième partie on change radicalement de style et d'orientation, nous voilà dans un roman frisant avec la hard-science, avec de nouveaux personnages, Nos deux jeunes filles se retrouve en observation dans une base scientifique secrète cachée dans les landes britanniques. J'ai bien apprécié aussi cette partie, même si certaines idées peuvent paraître fumeuses (on n'est jamais à l'abri quand on rentre dans le domaine du psychique…) mais ça tient toujours la route, et le final ne m'a pas déçu, dans le contenu. J'ai trouvé intéressant aussi ce rythme en ruptures qui accentue l'ambiance mystérieuse. Un détail m'a agacé tout de même, cela concerne le style d'écriture, on passe d'Edgar Poe dans la première partie à Lovecraft dans la partie finale, c'est à dire d'un style précis et élégant à une accumulation de termes redondants, superlatifs mais totalement subjectifs: “La Chose apparaît au milieu des marais, gigantesque, formidable, pleine d'une menace terrifiante et d'une nature incommensurable”. Ce genre de phrase a le don de m'énerver, je n'arrive pas à lire Lovecraft et j'ai été un peu déçu que le style de qualité de la première partie disparaisse au dépend d'un style spectaculaire mais nettement plus creux. le passage de tension aurait mérité un peu plus de finesse. Mais l'ensemble est tout de même de bonne tenue, c'est un auteur de la collection Fleuve Noir Anticipation que je n'avais encore jamais lu (ou il y a trop longtemps pour m'en souvenir) et je n'hésiterai pas à en ouvrir un second si l'occasion se présente.

Ce livre est à découpé en deux parties (voir trois) et ça tombe bien c'est ce qu'à fait son auteur.

Dans la première partie on suit la petite Perle, 9 ans, une sorte de Cosette des temps modernes, ayant perdue ces parents et donc élevée par sa grande soeur tout juste adulte, et un policier qui va tomber sous le charme de toutes les deux au cours d'une étrange affaire de meurtre et de roses à l'odeur entêtant volées par un étrange être qui ne ressemble à rien de connu.
J'ai beaucoup apprécié cette partie pleine d'émotions. C'est bien écrit et il y a même des passages poétiques.

Dans la seconde partie, on se retrouve dans un laboratoire secret, toujours avec nos trois protagonistes, mais plein d'autres aussi. Là j'ai beaucoup moins aimé. C'est toujours aussi bien écrit, mais y a plus de poésie, par contre plein de termes scientifiques, trop même. Puis y a cette remise en question de théories scientifiques telle la relativité d'Einstein. Bon il abuse pas non plus, mais ça fait bizarre et se poser des questions sur quel est son but en écrivant cela.

Puis, il y a la troisième, celle qui conclue cette histoire, qui ressemble plus à la première, mais avec une grosse touche de fantastique en plus. C'est la partie que j'ai préférée, tant dans sa construction narrative que dans son originalité scénaristique. Jusqu'à la dernière phrase il a réussit à me surprendre. Souvent, la résolution et la conclusion ne sont pas aussi puissantes l'une que l'autre, là si.

A part cela, il y a bien quelques points qui m'ont dérangé : le plus léger c'est le fait qu'une petite fille de 9 ans croit encore au Père Noël ; le plus lourd étant qu'il fini quasis tous ces chapitres (quand ce n'est pas aussi présent au milieu) de phrases expliquant, en gros, que le pire est à venir, que l'on n'a pas encore vu "l'abominable" dans tout ce qu'il a de plus abominable (et je n'invente rien, une phrase du genre ce trouve bien dans ce livre). le problème, c'est que d'abomination y en a pas vraiment à l'arrivée, juste une grosse frayeur et incompréhension.

En conclusion, un bon petit roman, pas exempt de défauts (dont des assez désagréables), mais avec une chute plutôt originale (l'histoire et sa construction le sont aussi, d'ailleurs) et une très intéressante conclusion, pour pas dire jubilatoire, qui font que cela serait dommage de se priver de ça lecture qui est, pour rien gâcher, assez courte et rapide.