Elle venait de revoir Myron et ça avait réveillé en elle tout un tas de souvenirs. Et si on n'avait pas... Et si on avait... Une foule de "Et si" qui auraient pu changer la face du monde. Le cours de sa vie, en tout cas.
La plupart du temps, ça marche comme ça : il y a un petit gars très doué au lycée, l'entraîneur le remarque. Il obtient une bourse à l'université, tout baigne. Mais il n'est pas aussi brillant qu'on le croyait et tout s'écroule. Car ce monde est impitoyable. T'es le meilleur ou t'es rien du tout. Quelques-uns, bien sûr, sortiront du lot. Mais à quel prix ?
Manipulés, exploités, dopés, ils oseront regarder le soleil dans les yeux... et se retrouveront aveugles.
Les autres, qui ont suivi leur petit bonhomme de chemin, resteront à l'arrière du peloton, passant d'amateur à pro, mais sans grand espoir. Quel monde étrange et cruel, songeait Jessica. Quelle bande de masochistes !
Une des filles, vint vers Myron et lui sourit de toutes ses dents aussi bien rangées qu'un jeu de mikado déployé.
Au sein de la Mafia, les règles n'ont que deux buts : contourner impunément la loi et préserver les apparences. L'éthique est à un mafieux ce que l'honnêteté est à un politicien.
- Vous venez de prononcer le mot " éthique " et la foudre ne vous est pas tombée sur la tête ! Dieu vieillit, comme nous tous.
Esperanza apparut à la porte, l'air toujours aussi renfrognée.
— Otto Burke est en conférence, annonça-t-elle.
— Alors, essayez Larry Hanson.
Elle tendit un café à Jessica, se fendit d'un sourire crispé et sortit de la pièce. Jessica considéra son gobelet d'un œil méfiant.
— Tu crois qu'elle a craché dedans ?
— Probablement.
Elle posa le gobelet sur une table basse.
— J'avais l'intention de réduire la caféine, de toute façon.
Le kiosque à journaux ! Win se payait une petite crise de nostalgie. L'expression évoquait pour lui l'époque où toutes les rues, tous les carrefours de toutes les petites villes se ressemblaient. L'époque où les gens s'inventaient des histoires d'extraterrestres pour échapper à l'ennui de l'Amérique profonde. Le kiosque était le point de ralliement de la vie communautaire. On y trouvait des barres chocolatées, des quotidiens, des cartes postales- et des revues de cul. Les adolescents boutonneux pouvaient s'acheter un Mars et se rincer l'oeil en douce.Aujourd'hui, la pornographie était devenue une spécialité du pays. D'un genre qui faisait passer Penthouse pour une publication pour jeunes filles.
Il appela sa mère pour la rassurer. Laquelle lui dit d'appeler son père: c'était lui qui s'inquiétait. Il appela son père, lequel lui dit d'appeler sa mère: c'était elle qui s'inquiétait. Ah, la communication ! Le secret d'un mariage heureux.
Ricky arrêta la musique. Le silence qui s’ensuivit fut assourdissant.
Jessica se retourna vers sa mère qui sanglotait toujours, avec autant de discrétion qu’un chœur de vierges dans une tragédie grecque.