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Citations sur La femme de hasard (66)

Rien n’est plus misérable que le souvenir du bonheur, position qu’on peut occuper de divers points de vue, comme nous le verrons dans certains des chapitres suivants. Dans le même ordre d’idées, à moins qu’il ne s’agisse d’un ordre d’idées opposée, rien n’est plus plaisant que la perspective du bonheur, et quand je dis « rien, je n’emploie pas ce mot à la légère. Car le bonheur en soi, se disait Maria, n’avait guère de poids comparé au temps passé soit dans sa perspective, soit dans son souvenir. En outre, l’expérience immédiate du bonheur paraissait complètement détachée de l’expérience de son attente ou de son souvenir. Jamais elle ne le disait, quand elle était heureuse : « C’est ça, le bonheur », et jamais donc elle ne l’identifiait comme tel au moment où elle le vivait. Ce qui ne l’empêchait pas de penser, quand elle ne le vivait pas, qu’elle avait une idée très claire de ce qu’il recouvrait. La vérité, c’est que Maria n’était vraiment heureuse que lorsqu’elle pensait au bonheur à venir, et je crois qu’elle n’était pas seule à adopter cette attitude absurde. Il est plus agréable, allez savoir pourquoi, d’éprouver de l’ennui, ou de l’indifférence, ou de la torpeur, en se disant : dans quelques minutes, quelques jours, quelques semaines, je serai heureux, que d’être heureux en sachant, fût-ce inconsciemment, que le prochain sursaut intérieur nous éloignera du bonheur. L’idée du bonheur, qu’il soit prospectif ou rétrospectif, éveille en nous des émotions beaucoup plus fortes que la seule émotion du bonheur. Fin de l’analyse.
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Sur ses cinq voisines, quatre étaient comme d’habitude des folles inoffensives, mais la cinquième était une fille nommée Sarah en laquelle Maria trouva une sorte de sœur spirituelle, et pour laquelle, à vrai dire, elle éprouvait quelque chose qui ressemblait foutrement à de l’amitié.
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— Qu’est-ce qu’il a dit à propos d’hier soir ? »
Maria écoutait.
« Eh bien, il a dit qu’il trouvait que ton comportement exigeait une explication.
— Ah bon ? Et en quoi ?
— Il trouvait que tu avais laissé entendre qu’il avait donné l’impression d’avoir pensé que tu étais désagréable.
— Il a dit que j’avais été désagréable ?
— Eh bien, il a laissé entendre que tu avais été implicitement désagréable.
— Et comment j’aurais pu être implicitement désagréable, alors que par définition si j’avais essayé d’être plus explicite cela aurait été blessant ? Est-ce qu’il voulait dire que si j’avais dit ce qu’il voulait me faire dire, au lieu que ça reste non dit, il n’aurait pas su quoi dire ? C’est ça qu’il a dit ?
— Eh bien, c’est ce qu’il insinuait. »
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L’amour de Charlotte pour Philip suivit d’abord un cours assez harmonieux, mais Maria n’y crut pas un instant. Au bout de quelques mois, ils rencontrèrent des problèmes. Maria, se fondant comme d’habitude sur des fragments, crut comprendre que Charlotte avait appris à une soirée que lors d’une autre soirée Philip avait parlé d’elle de façon irrespectueuse à une tierce personne, laquelle avait relayé l’information à une quarte personne à une tierce soirée, canal par lequel Charlotte en avait eu vent.
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Maria n’avait rien pour ou contre le téléphone en tant que tel, mais en l’occurrence en avoir un la contrariait, car cela donnait à Ronny un nouveau moyen de la contacter. Ronny était inscrit à Balliol College. Avant l’installation du téléphone, il s’était contenté de rendre visite à Maria tous les jours, ou simplement de lui envoyer un cadeau, des fleurs par exemple, qu’elle disposait dans le salon, ou bien des chocolats, qu’elle donnait à Charlotte, ou bien l’assurance de son amour, qui ne pouvait servir à personne.
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Quelques semaines passèrent, car les semaines passent, qu’on le veuille ou non.
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Quand Maria repensait à ses années à Oxford – ce qui, soyons juste, était très rare –, elle les revoyait constamment baignées de soleil. Nous pouvons affirmer, je crois, que la réalité fut tout autre, mais la réalité n’est pas notre problème, ni le sien d’ailleurs. Puisque Maria se souvient d’un Oxford ensoleillé, autant respecter ses souvenirs, sauf peut-être dans certains passages du troisième chapitre, dont l’ambiance sera quelque peu automnale. Je ne dis cela que pour vous donner une idée de la tournure probable des événements.
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Maria jalousait Sefton pour trois choses. Et la troisième était que personne n’attendait de lui qu’il exprime le moindre intérêt ou la moindre satisfaction pour les affaires humaines. Ainsi était-il en mesure d’exhiber une indifférence stupéfiante et parfaitement légitime. À ce titre, le simple spectacle de Sefton faisait un bien fou à Maria. Visiblement, il n’en avait rien à cirer du sort de la famille, tant qu’il n’affectait pas le sien. Il était complètement égocentrique et pourtant dénué de tout égoïsme : une qualité que Maria savait, et elle le déplorait déjà, hors de sa portée. Cela n’en faisait pas moins de lui son confident préféré. Elle pouvait par exemple lui parler sans gêne de sa réussite à l’examen, puisqu’il n’y avait aucun risque qu’il manifeste la moindre excitation. Nombreux étaient les secrets que Maria avait confiés à Sefton, sachant qu’ils ne signifieraient rien pour lui, et nombreuses étaient les petites révélations qu’elle avait testées sur lui, pour puiser de la force dans l’incroyable nonchalance avec laquelle il les entendait et les ignorait. Voilà pourquoi chaque famille devrait avoir un chat.
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Oui, elle aurait eu un certain goût pour les hommes, peut-être même aurait-elle pu se cantonner à un homme en particulier, si seulement elle avait pu en trouver un qui penserait comme elle que l’intimité entre deux personnes en valait la peine, même si elle ne conduisait pas à une communion poisseuse.
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Cette créature, un petit matou marron et blanc nommé Sefton, n’avait que deux ans, mais son attitude et sa philosophie de la vie contredisaient son jeune âge. Maria l’aimait sincèrement, d’un amour fondé, comme il se doit, sur un profond respect. Sefton lui semblait avoir tout compris à la vie, sur tous les plans. Les buts de son existence étaient peu nombreux, et tous admirables : se nourrir, rester propre, et par-dessus tout dormir. Maria se disait parfois qu’elle aussi pourrait être heureuse, si seulement on lui permettait de se restreindre à ces trois sphères d’activité.
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