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sur 177 notes
J'ai été tentée par ce livre parce qu'il était présenté par Babelio dans les nouveautés poche à lire. Comme d'habitude, j'ai lu les deux premières lignes du résumé éditeur, et je me suis dit que j'allais lire un roman qui lève un peu le tabou de l'amour maternel. Comme d'autres l'ont fait dans des essais, Elisabeth Badinter avec « L'amour en plus » en 1980, et Philippe Ariès, historien et sociologue, avec « L'enfant et la famille sous l'Ancien Régime », des livres qui étaient dans la bibliothèque de l'école d'éducateurs de Jeunes Enfants où j'ai fait mes études. Livres que j'ai dévorés. Inutile de dire que ces sujets touchant à l'enfant, et les rapports mère-enfant m'ont toujours passionnée, la psycho-socio étant l'un de mes intérêts majeurs.

Ici, dans ce livre, écrit dans un style très entraînant, les mots et associations d'idées rendent le roman vraiment très agréable à lire.

Cette jeune maman, la narratrice, passe la visite du 5e mois chez le pédiatre pour son bébé, Alban. Et lors de la visite le pédiatre remarque des taches brunes dans le cou de l'enfant. Puis dans son dos. L'explication du pédiatre est toute simple : l'enfant est métis. La jeune mère manque s'étouffer, et comme si ce n'était pas assez, il rajoute qu'elle devrait rechercher dans sa famille s'il y a des noirs, parce que parfois « ça » saute une génération. le pédiatre dit qu'à moins qu'elle ait trompé Vincent, son mari, qu'il connait pour avoir suivi ses neveux et nièces, et leur ainée Esther également, l'explication la plus probable est qu'elle soit elle-même métisse. Cette révélation est une bombe pour elle. C'est tout simplement impossible. Pas de noirs dans sa famille. le pédiatre lui a dit que les enfants métis sont blancs a la naissance, et foncent ensuite.

Rentrée chez elle, elle ne dit rien mais sa fille Esther, bientôt huit ans, comprend qu'il y a un loup quelque part. Sa mère prétend que tout va bien, et pourtant tout est bouleversé. Elle est devenue quasi muette, décide qu'Esther ne prendra plus son bain avec son petit frère qu'elle adore. Au fil des jours la peau d'Alban fonce. La mère va acheter un nuancier Leroy Merlin sur les conseils d'un forum internet de mères d'enfants métis. Il peut foncer très vite.

Elle est dégoûtée par cet enfant, regarde cette transformation comme La Métamorphose de Kafka, compare Alban à un cafard, essaie de ne pas trop le toucher. Après avoir parlé de ce que le pédiatre a découvert avec son mari, rien n'a changé pour lui, mais tout a changé pour elle. Elle ne veut pas le regarder, sauf pour étudier sa peau au nuancier. Laisse Alban des heures sans manger. Sans le changer. Il la dégoûte. Elle ne veut pas d'un enfant noir. Ni d'un ado ébène. Quant à elle, ça veut dire qu'elle est noire ? Elle ne serait pas elle-même alors ? Elle reste enfermée chez elle, ne sort que pour aller chercher Esther à l'école, et pour que personne ne voie cet enfant trop foncé, elle lui met des moufles par tous les temps, lui a tricoté une cagoule qui cache son visage, et va même jusqu'à lui mettre du fond de teint éclaircissant. Et après ce long moment de repli et de rejet, elle prend les deux enfants et part dans le Sud, chez son père, pour lui demander des explications.
Bon. L'ensemble du livre, malgré le style enlevé, est on ne peut plus dérangeant. le fait qu'elle se réfère constamment au cafard de Kafka en parlant de son fils. Dérangeant dans ses incohérences : au début l'enfant a cinq mois, et rentrée de chez le pédiatre, l'enfant est né il y a quelques semaines, trois au grand maximum. Et là, la narratrice professe qu'elle n'a jamais aimé ce bébé. Jamais. Moi je suis interloquée, si c'était la visite des cinq mois, elle l'a donc détesté dès qu'elle a compris qu'il devenait noir. Et donc aimé avant. C'est plein de contradictions. La fin également, est peu convaincante. Elle ne fait aucune recherche sur ses vraies racines, et moi ça m'interpelle. Comme dans « Trancher » en 2018, les incohérences et les invraisemblances sont nombreuses. Et elles diminuent énormément l'intérêt du livre, qui serait plutôt un thriller, dont la fin nous laisserait sur notre faim.

Alors pour moi, mon avis est donc très mitigé, une fois le livre refermé. Bon sujet, bon style, mais incohérences et invraisemblances, explications de fin loupées.
Lien : https://melieetleslivres.fr/..
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Un récit dérangeant et pourtant profondément humain sur le désamour d'une mère envers son enfant. L'estampille « Livre Coup de Poing » n'est pas exagérée: le sujet de ce livre ainsi que le style surprenant de l'auteure sont remarquables.

La protagoniste, dont on ne connait pas le prénom, est une professeure d'une trentaine d'années, mariée, qui profite d'un congés parental pour s'occuper de son bébé de cinq mois et de sa fillette de huit ans. En faisant la toilette d'Alban, elle découvre d'intrigantes taches brunes sur le corps de son bébé. Une visite chez le pédiatre lui apprend que son fils, sans aucun doute possible, est métis… Un choc pour la jeune femme dont l'incompréhension est totale. Il lui faudra enquêter avant de comprendre la raison de cette « différence », mais cela entraine avant tout un rejet, un dégoût profond pour son enfant, avec le besoin de le « recommencer » car forcément il y a un loup quelque part… Mais voilà, on ne peut pas retourner, comme un achat défectueux, un bébé à la maternité sous prétexte qu'il ne convient pas… Il faut au lecteur ou lectrice (mère de famille ou pas) se mettre à la place de cette femme que rien ne prépare à découvrir le changement progressif de couleur de peau de son enfant : le bébé tout blanc se métamorphose sous ses yeux en petit métis, comme Grégor Samsa, le personnage de Franz Kafka devenu un beau jour cloporte… Non qu'elle soit raciste, cette jeune femme s'en défend d'emblée, mais tout de même que va t-elle dire aux autres ? Et puis cela touche à son histoire personnelle, à ses racines. Ce roman évoque un sujet jusqu'à récemment encore tabou, et pour lequel les langues commencent seulement à se délier, par des témoignages courageux : ces femmes qui n'éprouvent pas l'amour tant attendu envers leur nouveau-né, vivant un « déni d'amour » culpabilisant et mal perçu par la société. Ces situations existent et engendrent de la souffrance tant du côté des parents que des enfants et la seule attitude valable pour les personnes qui gravitent autour de ces familles en souffrance est de ne surtout pas juger mais d'apporter écoute et soutien. Cela dérange peut-être mais voilà, c'est un fait, les relations parents-enfants peuvent parfois se révéler très complexes.

Le style d'Amélie Cordonnier (et là j'arbore un grand sourire), m'a d'abord déroutée. Totalement. Au point qu'après avoir lu quelques courts chapitres je me suis demandée comment j'allais venir à bout du roman (j'ai honte!). Direct, saccadé, incisif, de prime abord je n'aime pas. Et puis, c'est un peu comme écouter pour la première fois Alors on danse, le tout premier tube de Stromae, au début ça tape sur les nerfs et puis se dégage quelque chose de profondément séduisant. Entre références littéraires et musicales actuelles, on se laisse surprendre par des associations d'idées venues d'on ne sait où, mais tellement évidentes, des rimes inattendues, une poésie moderne, sombre et intimiste qui prend aux tripes. Alors là, oui bien sûr que oui. Une belle surprise que ce roman!

Je remercie Babelio de m'avoir sélectionnée pour découvrir ce titre lors d'une opération Masse Critique.
Lien : https://loeilnoir.wordpress...
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Un roman puissant qui laisse sans voix. Une histoire qui semble sans issue pour les personnages. Mais un roman qui prend des chemins de traverses, les plus escarpés. Un roman casse-gueule où il n'y a pas de gueules d'ange.
Un roman moderne, sulfureux parfois dans ses propos. Rien n'est vraiment blanc. Rien n'est vraiment noir. Entre ces deux couleurs un petit garçon Alban. Et une tonne de questions qui alourdissent le coeur. L'avenir est sombre. On broie du noir. le teint est blafard.
*

Amélie Cordonnier et son originalité.
Amélie et son « Trancher ». Haché petit. Haché menu.
Amélie et son « Pas ce soir ». Pas envie. Peux plus supporter ta tête de gland ! Retour à l'hôtel « des culs tournés. »

Au loup ! Un loup !
Un défaut de fabrication ? Un ouvrage mal exécuté ? Une erreur génétique ? Une punition divine ?
Le bébé est laid et il est en mue.

Amélie qui ose. Là où d'autres boguent doucement, balbutient et enrobent les mots de peur de faire fuir leurs lectrices et leurs lecteurs.
Amélie comme une guerrière dégoupille une grenade. le récit est explosif. La différence est toujours un sujet tabou, un sujet épineux. Une arête qui se met à travers la gorge. Une croute de pain qui se coince dans l'oesophage. On toussote. On fait de grands « Rhââ ! ». Pour finir par recracher, écarlate.

La différence sur la couleur prend cette fois-ci toutes les couleurs du désespoir.
*

La belle plume d'Amélie zigzague, crisse sur le papier. Elle s'emballe, fait des embardées irrégulières. Elle aligne quelques mots. Elle distribue en rafale des phrases courtes.
L'encre noire crachote sur les feuilles blanches. Apparaissent des taches aux figures fantasmagoriques.
Je suffoque. J'invoque les esprits que l'auteure n'ait pas perdu les siens.
Mais non elle a toute sa tête. Alouette !

C'est parce que l'auteure est narratrice.
D'une mère sans prénom, qui semble sans identité propre. Une naissance celle d'Alban, une tâche, pas un grain de beauté. Une petite tâche intrigante. Qui n'a pas sa place là où elle se trouve. Un grain de peau importun jugé « contre nature ».
Et qui va bientôt entacher le bonheur immaculé de cette maman.
*
La mère qui perd pied. Cette prof de français en perd son latin. Elle sombre et ses journées s'assombrissent.
La mère est ravagée, abattue, brisée devant ce phénomène. Une erreur de distribution dans les gènes. Une injustice. Une trahison de Dame nature.
Mais qui lui aurait menti ?


C'est Alban qui pleure. Il veut boire. C'est Alban qui sent mauvais. Il a fait caca et en a mis plein ses couches. Maman est dégoutée. C'est le rejet, la négation. Maman n'ose plus toucher son petit garçon.
Pire, maman ne peut plus le voir en peinture. Trop de coups de pinceaux bariolés.
Un petit corps avec des zones couleurs cuivre, pain grillé, croissant doré, café au lait. Mais sans « olé ! ». Pas de jeu de mots joyeux pour une situation trop grave.
*

La situation est désespérée et désespérante. Peur des jugements. Peur de la colère et l'incompréhension du mari.
Cacher l'enfant, dissimuler Alban, l'emmitoufler, le cagouler, le maquiller. Peut-être le faire disparaitre...
Une pensée horrible. Une pensée hideuse. Et le rouge de la honte qui monte au visage de la mère.
*

Elle appelle son papa.
Lui demande d'arrêter de faire ses grimaces hypocrites. Lui demande de remonter dans son arbre et de grimper aux branches généalogiques bien sûr.
T'es sûr ! Pas de cracheurs de feu ?
Pas de réducteurs de tête ?
Pas de marabouts africains parmi nos ancêtres ?

Aller papa t'es sûr ? Crache ta Valda !
Ou as-tu trompé maman ?
As-tu fauté ? Avec Lucienne la mauricienne ou avec Thérèse la congolaise.

Je suis TA fille, j'exige la vérité ! Rien que la vérité ! Toute la vérité ! Tu le jures !

Le pauvre père est accablé. Tant d'années de culpabilité. Tant d'années à dissimuler ses secrets de famille. Tant d'années à aimer sa fille et à lui mentir. Finir avec la tromperie. Finir avec ce mensonge permanent.
Alors il parle. le père parle, dit tout ce qu'il a tu trop longtemps, par lâcheté peut-être. Lâche le morceau, d'une seule traite, avec toute l'acidité qui suinte dans ses mots.
Soulagement ! Délivrance !

Le père crache alors La vérité. Celle qu'il a cachée. Comme une multitude de bastos qui mitraille le coeur de sa fille.
*

La femme, la mère, la fille vacille. La dernière torpille arrive et explose tout son être.
Elle est anéantie. Elle ferme les yeux.
Pour elle la longue nuit commence.
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On se sait comment elle s'appelle peut-être pour la rendre plus anonyme ou parce que c'est un phénomène qui peut survenir à toute femme (et pourquoi pas à un homme). Elle est mariée et mère de deux enfants : Esther 8 ans et Alban, le plus jeune, âgé de quelques mois et lors d'une visite chez le pédiatre le doute s'installe, s'insinue et se confirme. Et ce qu'elle croyait inébranlable, son couple parfait,  son amour maternel, sa famille, vacillent et sombrent dans un cycle infernal.

J'avais déjà entendu parler de cette auteure pour son premier roman Trancher (que je n'ai pas encore lu)  qui abordait déjà des thèmes durs, violents axés sur le couple et la famille et elle le fait à nouveau ici avec une écriture très particulière et c'est ce qui m'a le plus marqué dans ce roman. Une prose rythmée et sonore tellement les phrases, les mots se répondent les uns aux autres, comme une longue tirade qui résonne comme un poème sombre, noir, des phrases sèches comme les pensées qui se succèdent et qui tournent en rond, s'accumulent et qui reflètent l'angoisse d'une mère qui perd pied. Ce rythme, ces mots qui riment m'ont parfois gênée, ils étaient parfois trop présents et au bout d'un moment presque attendus, recherchés mais qui donnent à l'écriture et au rendu une identité particulière et surtout un son.

C'est un roman très marqué par les couleurs, de la maternité heureuse ébranlée à la propre enfance de l'héroïne, ayant perdu à double titre l'image maternelle, de la filiation, la sienne mais aussi celle vis-à-vis d'Alban, aux non-dits, aux questionnements qui resteront sans réponse. J'ai trouvé habile la façon dont l'auteure a choisi la manière dont son héroïne focalise sa propre blessure sur son enfant.

Amélie Cordonnier évite tous les stéréotypes qui peuvent mener une femme à cette sorte de "folie", rien ne la prédestinait à y sombrer peu à peu, à s'isoler mais le trouble est là, qu'elle ne peut s'empêcher de s'identifier à Gregor Samsa, le personnage central de la métamorphose de Kafka, elle hallucine, elle est obsédée par cet enfant qu'elle a sous les yeux, dont elle observe la mutation en un être qu'elle ne reconnaît pas comme fruit de ses entrailles.

Comme pour Chanson douce de Leïla Slimani, on ne comprend pas l'aveuglement de l'entourage qui ne voit pas la détresse, la lente descente aux enfers de cette femme mais également celle de l'enfant car parfois le trait est tellement forcé, va à l'extrême que cela semble incroyable et pourtant combien d'exemples dans l'actualité de cas semblables. Mais passons, c'est un roman et il faut accepter le deal car à l'évidence ce qu'il en ressort c'est le cheminement des pensées, le processus de lamination, son mécanisme et toutes les ruses mises en place pour tenir.

Alors ai-je aimé ? Oui malgré le sujet difficile, oui parce qu'il y a un travail d'écriture singulier et original, oui parce qu'elle évite de sombrer dans le glauque même s'il est présent et effleuré et oui parce qu'elle évite un final qu'il aurait été facile d'imaginer..... Cela se lit d'un trait, on retient presque sa respiration, à chaque page tournée on espère que le pire n'est pas arrivé, on secoue Vincent, Elsa pour qu'ils ouvrent les yeux mais nous-mêmes est-on à même de voir un proche qui sombre ?
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Je ne sais comment commencer la chronique de ce roman, qui a soulevé en moi des émotions contradictoires. Ecrit de toute évidence pour faire réagir, j'y ai senti quelque chose d'artificiel qui m'a empêchée d'adhérer complètement à cette lecture : il y a comme un parti pris de froideur et de distance parfois, qui me semble loin de ce que ressent une mère dans une telle situation, même si la culpabilité et les tourments sont bien présents à d'autres moments. Autre détail qui m'a gênée : la mise à l'écart du père qui pourtant accueille avec bienveillance cette annonce "coup de tonnerre" d'avoir un enfant noir, et malgré ça ne reçoit aucune confidence de la mère en détresse, alors que l'on perçoit bien qu'elle n'arrive pas à gérer seule cette situation. On n'arrive d'ailleurs pas à savoir si son drame réside dans la couleur de son enfant ou dans l'annonce de son adoption à elle, et bien que les deux évènements soient liés, leur mise en relation n'est pas vraiment exploitée. Enfin, côte forme, l'emploi systématique d'allitérations et de métaphores filées à l'extrême alourdit quelquefois le texte. Ce qui ne m'empêche pas d'avoir lu ce roman sans m'ennuyer, et d'y avoir trouvé, quelquefois, un certain plaisir.
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La vie de était un long fleuve tranquille pour le personnage principal, jusqu'à ce que des révélations viennent bouleverser cette quiétude. Son petit univers équilibré s'effondre alors. Toutes ses convictions sont mises à rude épreuve. Bien qu'elle ait un entourage bienveillant avec un mari prévenant, une fille adorable, un père aimant, une amie attentive, elle perd complètement pied.

Le lecteur assiste au dialogue intérieur de cette femme paniquée. Plongé dans son quotidien, on ressent l'ensemble de ses émotions, de plus en plus angoissantes. Ce qui semble n'être qu'au départ qu'un caillou dans la chaussure, devient très vite une obsession maladive. Son comportement s'aggrave dangereusement. En tant que témoin, on est plus en plus mal à l'aise. Sous nos yeux, elle perd sa bienveillance et dégage une instabilité inquiétante.

Ce texte apporte une nouvelle vision de la maternité. En complément des derniers livres de Carole Fives et Sylvie le Bihan, il met en lumière la difficulté pour une mère d'appréhender une situation maternelle qui lui échappe. Cela appuie aussi l'idée que l'instinct maternel n'est pas forcément inné et qu'il peut être ébranlé par les incidents de la vie. Les mamans apparaissent souvent comme inébranlables et finalement, cette histoire sans fard leur redonne une certaine humanité, en nous dévoilant leurs failles.

Ne vous fiez pas à ses airs innocents (je l'ai rencontré, elle est aussi très sympathique), Amélie Cordonnier est assez diabolique. Dans le choix de ses thèmes et dans sa manière de les traiter de l'intérieur, elle vous immergera dans une expérience réaliste et oppressante. Elle sait affronter les drames de front et mettre le lecteur dans les conditions du réel, sans filtre. Avec ce deuxième roman, elle confirme son talent d'écrivaine de l'intime. Je vous recommande donc vivement cette lecture et je serai bien sûr à l'affût de son prochain livre.
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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Il est né, le deuxième enfant de ce couple uni et aimant. Ils sont déjà parents d'une petite Esther adorable et sans histoire, voilà qu'arrive un fils aimé et choyé. Enfin jusqu'au jour de cette visite chez le pédiatre, lorsque sa mère découvre une tache bizarre sur le petit corps d'Alban. Et jour après jour, les marques se font plus nombreuses, la couleur de sa peau change. Car Alban s'avère être un bébé surprise, un bébé métis. Mais pourquoi, et comment ?
Les découvertes et les révélations sont violentes et déstabilisantes pour cette maman complétement perdue dans le silence de ses origines, dans ce secret enfin dévoilé qui bouleverse sa vie. Qui est-elle et d'où vient-elle ? Une fillette adoptée par des parents aimants. Par ce père devenu veuf qui se mure dans le silence et n'ose révéler ce lourd secret à sa fille au décès de son épouse.
Le silence est fracassant, la révélation déstabilisante, elle est face à cet enfant qu'elle ne reconnait pas, qu'elle hésite à aimer, à prendre dans ses bras, à accepter. La voilà plongée dans un immense désarroi, celui de réaliser qu'elle a été abandonnée à la naissance, puis le silence de son père, enfin la couleur de l'enfant, comment peut-elle vivre avec ça ? Mais elle a en même temps une réaction totalement démesurée, celle de "cacher cet enfant que je ne saurais voir"par tous les moyens, même les plus invraisemblables. Un peu trop peut-être, on a un peu de mal à y croire à ces accessoires, mais dans la réalité, on sait bien hélas que la maltraitance n'a pas de limite… surtout dans une famille un peu trop aveugle confrontée à cette mère désespérée.
Un roman qui a le mérite de poser de bonnes questions sur la maternité, l'instinct maternel, la filiation et la connaissance de soi.
Chronique complète à lire sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2020/08/01/un-loup-quelque-part-amelie-cordonnier/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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Amélie Cordonnier a fait une entrée remarquée en littérature avec son premier roman, Trancher, qui faisait entrer le lecteur dans la tête de son héroïne aux prises avec la violence de son conjoint et incapable de prendre une décision. Roman convaincant, surprenant par sa tonalité très cash mais jamais familière et surtout marquant. Presque autant que la personnalité enjouée et solaire de son auteure qui a illuminé de sa bonne humeur plusieurs rencontres dans le cadre des 68 premières fois. Autant dire que je l'attendais au tournant, curieuse de voir ce qu'elle allait nous offrir après ce premier coup d'éclat. Pas de doute, on retrouve ce ton, cette envie de regarder les problèmes en face, ce rythme qui tient en haleine. Mais le style s'enrichit, le propos s'épaissit, la douceur s'immisce parfois au détour d'une page. L'écriture se libère, comme si l'auteure s'autorisait à franchir une barrière. Ce qui donne à son roman une force nouvelle, au-delà de son sujet.

Un sujet fort, bien sûr. Encore. Au plus près de l'héroïne dont on ne connait pas le prénom mais dont on découvre en temps réel toutes les pensées. Et c'est un cataclysme. Un truc qui balaye toutes les certitudes, simplement parce que cela touche à l'identité. Lors d'une visite chez le pédiatre, parce qu'elle s'inquiète de voir apparaître des tâches sur la peau de son bébé de cinq mois, la jeune femme apprend qu'Alban est métis. Son fils et celui de Vincent, blancs tous les deux, comme leur fille aînée, Esther. Elle n'a pas été infidèle, comment cela est-il possible ? Un cataclysme, donc, qui l'amène à questionner sa relation avec ce bébé qu'elle rejette, dont elle a honte mais également à douter de son histoire personnelle. Il y a en effet de quoi bouleverser l'ensemble de ses relations aux autres...

"Le noir, pour elle, jusqu'à présent c'était la couleur des nuages menaçants, du chocolat, des pneus du tracteur de son père et des traces de goudron sur l'asphalte. Rien de plus."

Amélie Cordonnier ne nous épargne rien de la violence ni de la détresse qui s'emparent de l'esprit de son héroïne. Des sentiments que l'on n'imagine même pas de la part d'une mère pour son fils, innocent poupon. C'est cash, sans fard, parfois aux limites de la folie, comme ce parallèle avec La métamorphose de Kafka. Pourtant, elle trouve le moyen de glisser dans la narration de vraies bouffées de tendresse, des touches de couleur qui viennent adoucir peu à peu le tableau. La couleur est omniprésente. Par le jeu du nuancier avec lequel la jeune femme "prend" la couleur de son enfant au fur et à mesure de la mue (oui, on apprend la façon dont les enfants métis évoluent pendant quelques mois vers leur couleur définitive), par le jeu des expressions auquel se livrent les membres de la famille, par le regard porté sur la nature lors d'un périple dans le sud de la France. Une référence qui renvoie à la façon dont notre apparence forge notre identité à nos yeux et à ceux des autres. Des touches de couleur qui jalonnent le parcours de la jeune mère vers la lumière. D'ailleurs, nous étions passé rapidement sur cette expression toute faite qui démarre le roman : "La salle d'attente est noire de monde"...

Si l'amour maternel est ainsi soumis au crash test, ce qui m'a le plus émue c'est la beauté de la relation entre la jeune femme et son père qui se trouve au coeur de l'intrigue, ce père qui a cumulé les fonctions après la mort de sa femme alors que leur fille n'avait que dix ans. "Un père pareil, ça colle la pression. Si l'instinct maternel existe, lui il l'a" et c'est logiquement auprès de lui qu'elle va se remettre l'esprit à l'endroit. Je trouve qu'Amélie Cordonnier a des mots magnifiques pour évoquer ce couple père-fille à tous les âges de leur vie. C'est la force de cet amour qui fournit à son héroïne le socle qui la maintient en équilibre et lui permet de trouver les ressources pour surmonter ses angoisses, son dégoût et son désarroi. Pour oublier le noir du début et se dire que "Souchon a raison, l'amour c'est bleu difficile, les caresses rouges fragiles".

Un roman haut en couleurs, donc. Mais surtout très réussi et qui ne laissera personne indifférent.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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L'amour maternel est inconditionnel, paraît-il. Ou du moins, c'est ce que la société veut nous faire croire, à coups d'héroïnes-mères invincibles. Amélie Cordonnier questionne dans son dernier roman ce mythe de l'instinct maternel plus fort que tout, en le confrontant à la différence physique. Quand votre enfant ne vous ressemble pas, quand vous n'arrivez pas à assumer son apparence auprès de votre entourage, est-il si simple d'aimer ? Il n'y a pas à dire, c'est sacrément violent comme question.

Amélie Cordonnier n'y va pas par le dos de la cuillère pour traiter de ce thème domestique, elle qui avait déjà surpris avec son premier livre sur les violences conjugales, Trancher. Elle a un sacré sens de la phrase, jouant sur les rimes, le rythme et les expressions françaises colorées pour créer une narration saccadée, hachée, totalement suffocante. Chaque mot est recherché, acéré, pesé, et nous saute à la figure pour mieux nous confronter à la réalité de ce qui est en train de se dérouler entre les pages. Non, cette mère n'aime pas son enfant, elle n'en veut plus, elle veut le rendre, elle ne s'en occupe pas, elle a même tellement peur de le noyer qu'elle achète un siège spécial pour ne pas avoir à le tenir pendant son bain. Sujet dérangeant, malsain, tabou, mais tellement vrai pour toutes les femmes souffrant d'une dépression post-partum ou ayant des enfants « différents » selon l'euphémisme consacré.

Si cette lecture m'a été difficile sur une bonne partie du livre, celle de la descente aux enfers de cette femme en train de perdre les pédales, la fin m'a totalement bouleversée. Sans tout vous révéler, j'ai été très touchée par la relation fusionnelle du personnage principal avec son père, la dévotion de ce même père pendant son enfance pour être tout à la fois père et mère, et l'amour inconditionnel qu'ils se portent sans avoir besoin de l'exprimer vraiment. Choix habile de l'auteur qui termine un livre traitant de l'amour maternel en montrant l'immensité d'un amour paternel.
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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J'avais beaucoup aimé le premier roman d'Amélie Cordonnier. C'est donc avec hâte que j'entamai Un loup quelque part.
La narratrice est mariée et a une petite fille de 8 ans. Tout semble parfait et lorsque le couple attend un second enfant, ils sont contents. Alban vient au monde dans une famille unie et équilibrée.
Mais un matin, elle fait une drôle de découverte chez le pédiatre. le petit Alban a un petit grain de beauté de couleur marron dans le dos. Rien de grave, bien sûr. Mais la mère s'inquiète et sombre dans la névrose quand elle comprend que son bébé est métis et qu'il va devenir noir.
On ne connaît pas le nom de cette mère, rien d'elle, mais l'histoire est racontée depuis son point de vue. On est dans sa tête et ça mouline : envie de meurtres, rejet total de cet enfant, parano, incompréhension... Malgré la honte et la culpabilité, elle n'arrive pas à dépasser sa haine et cherche des réponses, seule, auprès de forums de mamans métisses.
Certaines scènes m'ont vraiment gênée et l'on se prend d'empathie pour ce petit qui n'a rien demandé.
C'est un roman qui dérange et qui met mal à l'aise, questionnant l'instinct maternel et nous donnant à voir la négligence d'une mère sur son bébé de 5 mois.
C'est une lecture haletante, tant on est captivé par le sort de ce bébé, un peu à la manière d'un thriller. On sent pointer le drame.
Le roman traite avec intelligence de certains thèmes - l'amour maternel, la question raciale - mais l'ensemble manque un peu de vraisemblance. Cette femme ne communique pas avec son mari, l'entourage semble aveugle à ce qui se trame et le dénouement arrive un peu comme un cheveu sur la soupe.
Des maladresses dignes d'un premier roman que, paradoxalement, je n'ai pas trouvées dans son premier opus, que j'ai préféré.
J'en recommande quand même la lecture, faites-vous votre propre opinion...




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