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EAN : 9782705665838
311 pages
Hermann (21/09/2006)
5/5   2 notes
Résumé :
Sans prétendre à l'exhaustivité impassible, mais avec une précision et une clarté rares, Jacques Darras nous fait découvrir les contrées inconnues des littératures anglaises, écossaises, américaines.
L'ouvrage se présente comme un parcours dont les guides sont des écrivains, surtout des poètes, parfois méconnus, que l'auteur choisit d'aborder comme des îles, des îlots. On en arpente les phrases, les vers et les textes à marches enthousiastes. Ils ont pour no... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un exceptionnel parcours en écriture et poésie britanniques, du coeur caché îlien et écossais aux ramifications américaines.

Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2016/12/04/note-de-lecture-les-iles-gardent-lhorizon-marches-poetiques-dans-la-litterature-de-langue-anglaise-jacques-darras/

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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
C’est pourquoi de tous les grands poètes du vingtième siècle,, Hugh MacDiarmid est sans conteste l’un des plus estimables. L’homme frappe par l’angularité de son parcours. Engagements puis ruptures, dans la vie affective personnelle comme dans les contrats politiques, jalonnent sa route. La philosophie qu’il en donna dans son plus étonnant poème, L’Homme ivre regarde le chardon (A Drunkman Looks at the Thistle) porte le nom barbare d’antisyzygy, c’est-à-dire une danse dialectique où sont co-présents les contraires. Au siècle des totalitarismes, on ne pouvait concevoir vision plus ample du pacte démocratique. Car si MacDiarmid porte au fond de lui l’héritage révolutionnaire d’un Robert Burns avec son impatience des conventions politiques et religieuses, il n’est pas moins l’héritier des dissidents puritains, ces « non-conformistes » qui ne cessaient d’interroger la Bible et le Ciel pour connaître leur destin. Par son histoire, l’Écosse est individualiste jusqu’à l’anarchisme, tout au moins farouchement anti-catholique. Marie Stuart, c’est-à-dire Marie de Guise, en sut quelque chose qui croyait trouver un appui solidaire contre la reine Élisabeth parmi ses sujets. Dans cette alliance des contraires – cette antisyzygie – il n’y a pas place pour une souveraineté traditionnelle. Au fond de son ivresse pleinement due au whisky, le héros de MacDiarmid rejoint l’ivresse métaphysique et les spéculations les plus tourbillonnantes. Rien de semblable ni d’approchant dans la sage poésie anglaise. Il faut cheminer jusqu’aux landes de King Lear pour trouver dans la personne du vieux souverain gallois un délire aussi vertigineux que celui de l’Écossais. Cela explique sans doute pourquoi ce poème de près de quatre-vingt pages, dont le rythme change sans cesse d’allure, dont la langue passe tour à tour de l’apostrophe alcoolisée à la prose la plus lucide puis au lyrisme le plus tendre, est resté inexploité et inexploré par la tradition britannique contemporaine. Comparez cette écriture avec celle de T.S. Eliot ou de W.H. Auden ! Une fois que vous aurez franchi l’enchardonnement de la langue dialectale, vous vous retrouverez en paysage totalement inconnu. L’Homme ivre est une espèce de saga norvégienne d’un seul, Eric le Rouge attardé qui aurait manqué les côtes du Vinland – l’Amérique – pour continuer dans une navigation boréale au-delà des frontières humaines connues.
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La géographie passe pour être une science exacte et l’est assurément tant qu’elle se maintient sur la terre ferme. Quand elle arrive au bord de la mer et contemple le large, son assurance change. La mutabilité de l’eau n’est pas seule en cause, la géographie ayant depuis longtemps appris à avoir le pied marin. Non, ce qui la bat en brèche, ce sont les îles. Son pouvoir de dénombrer vacille à leur contact. Et là où la science balbutie, reviennent indéfectiblement le mythe et la légende. (…) Les îles se tiennent à l’horizon. Les îles gardent notre horizon. Et c’est par l’horizon des îles que l’Écosse s’aborde. Toujours au fond du paysage se dessine tel contour, telle forme de puy aux pentes vertes, tel profil de cimes bleutées. Et l’on ne sait jamais, tant que la route n’aura pas conduit jusqu’au pied de ce puy, de cette cime, de ce contour, si la réalité géographique était encore du continent ou bien de la haute mer, s’il n’y avait pas quelque détroit secret, quelque goulet de sable blanc et de vagues courtes pour l’en détacher de la terre. (…) La poésie est naturelle dans cet espace auquel elle est congénitale. Seul mode d’appropriation d’un lieu qui ne se donne qu’en se dérobant, elle crée un lien souple, rythmé, empruntant au clapot de la mer en même temps qu’à la rugosité des montagnes. Gneiss et eau, granite et machait, pluie et feu. Rien n’est plus déstabilisant que d’aborder sur cette plate-forme des lointains, Uist par exemple, où le cheminement des vagues se prolonge parfois par l’écho intime, proche, imprégnant, d’un loch dans la bruyère, de sorte que l’on se prend à rêver de légendes d’îles balayées par une vague un peu plus forte.
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ALIEN, TOLKIEN & Co
Le fantastique tient en effet de l’étranger neutre, alien, qui ne prend pas en compte le partage des sexes. Cela procède, d’ailleurs, d’un reliquat d’animisme comme de l’opération la plus abstraite. Lorsque l’expressionniste Kandinsky entame ses Compositions ou ses Improvisations, il articule à la fois la légèreté de l’abstrait et la force du neutre qui laissent le spectateur français sans mots et sans voix pour dire l’efficacité de sa démarche. Dans cet « autre » communiquent et s’échangent les ordres matériels et spirituels. L’hybride est alors incarnation de l’incertain que les philosophes de la transcendance projettent en âme du monde ou oversoul. Cette nomination du neutre dans la langue et par la langue, à laquelle les catégories féériques nordiques et celtiques prêtent toutes les tailles de corps d’elfes, de leprechauns, de nains ou de gremlins, comporte des vertus sémantiques de reproduction, de multiplication, d’hybridation et d’exploration. On ne doit pas s’étonner que le plus grand phénomène contemporain de la littérature anglaise, Tolkien, ait conçu une microcosmogonie héritière du merveilleux ancestral, des poèmes héroïques médiévaux, de la légende arthurienne, de l’ironie relativiste d’un Swift tout à la fois. Les composantes de l’imaginaire s’offrant, en Angleterre, dans la superposition et la continuité, conservent leurs vertus interagissantes. Point besoin, par conséquent, d’invoquer l’archaïque sous forme de la lenteur. L’Angleterre ne possède pas ce que procurerait aussi bien la Chine confucéenne, mais dispose au contraire d’une espèce de folie d’autant plus trompeuse qu’elle donne les apparences de la domesticité. Le fantastique, ainsi que le montre l’un des plus beaux et des plus denses textes de Freud (« L’inquiétante étrangeté »)), commence en effet aux seuils. Rien ne ferme jamais si étroitement dans l’hermétisme anglais qu’une invasion de signes ne puisse tout à coup faire exploser.
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Je me faisais cette réflexion l’autre semaine à Londres, vaquant sur les traces de David Jones et vérifiant en somme ce que la fréquentation, déjà, de Basil Bunting et de son œuvre précédemment traduite, dans la même collection, m’avaient enseigné. Certes, Basil, si longtemps hors d’Angleterre et qui n’avait regagné ses latitudes Nord au déclin de son âge que pour mieux moquer les Sudistes ou Southrons, avait lui-même mis son point d’honneur à marquer ses distances. L’Angleterre, pardon, la Grande-Bretagne se découpe en effet suivant un réseau d’invisibles parallèles qui font comme un escalier géographique et spirituel. N’y montent que les courages bien trempés, les amateurs de murs romains, les géologues ou alpinistes qui rêvent un jour de se retrouver sur le toit de l’Everest, les scotophiles monomaniaques, les tasteurs de whisky par la racine, bref, en un seul mot : les poètes. Tenir là-haut, sur une pente, pendant les mois d’hiver, dans le moutonnement sombre des collines et le blanc de zinc des nuages, requiert un sens de la solitude assez aiguisé, quasiment militaire pour tout dire. La poésie de langue anglaise est faite de cet affrontement par celtisme interposé avec les éléments simples. Le roi Lear sur sa lande, depuis toujours, propose le modèle archétypal, poète-roi régnant à Londres, de loin, par une sorte de royauté mythique qui est comme le double de l’autre, l’officielle, faite au contraire de confort et de domesticité hanovrienne-saxonne reposée. Il sera à ce titre intéressant de suivre la gloire posthume des deux poètes Seamus Heaney, l’Irlandais, et Ted Hughes, le lauréat des confins et des moors. Sans doute, leur temps de servitude arthurienne écoulé, regagneront-ils les ombres de leur peuple, s’éloignant d’autant du centre qui gère subtilement les légendes.
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Ici, tout ou presque est réservé au silence, qui se confond avec la grande débauche d’espace inutile. Que peut-on dire qui importe, qui compte ? La communauté a ses rites, son pittoresque, sa langue dont les nouvelles et les romans traduisent la texture mais le poète est aussi celui dont la fenêtre regarde sur le large, sans crainte. Il est difficile, cependant de veiller la mer, d’inventer des berceuses qui l’endorment. On ne parle sans doute le mieux d’elle qu’avec des rochers, des amers. Les poèmes de Mackay Brown sont des pierres levées, jointes maladroitement, en apparence, l’une à l’autre. La vie moyenne d’un homme ne compte pas plus de cinq pierres, cinq vers qui la résument :
Il est rentré de la ville
Avec la nouvelle
Qu’on se battait en Russie
Des espèces de patates rouges
Des lunettes à deux sous –
Il avait des yeux gros comme ceux d’un bœuf.
Le Japon n’est désormais plus très loin dirait Kenneth White mais ce haïku nordique de Mackay Brown recèle une sérénité ironiquement gagnée sur l’information qu’elle comporte.
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Videos de Jacques Darras (14) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jacques Darras
Avec Rim Battal, Vanille Bouyagui, Jacques Darras, Guillaume Decourt, Chloé Delaume, Arthur H, Paloma Hermina Hidalgo, Abellatif Laâbi, Christophe Manon, Virginie Poitrasson, Jean Portante, Omar Youssef Souleimane, Milène Tournier… Accompagnés par Lola Malique (violoncelle) et Pierre Demange (percussions)
Cette anthologie du Printemps des Poètes 2024 rassemble 116 poètes contemporains et des textes pour la plupart inédits. Tous partagent notre quotidien autour de la thématique de la grâce. Leurs écrits sont d'une diversité et d'une richesse stimulantes. Ils offrent un large panorama de la poésie francophone de notre époque. Pour en donner un aperçu ce soir, douze poètes en lecture, accompagnés de musique.
À lire – Ces instants de grâce dans l'éternité, Anthologie de poésie réunie et présentée par Jean-Yves Reuzeau, Castor Astral, 2024.
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