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Belle initiative des éditions Gallimard que de publier ces Tracts, qui offrent une tribune à des écrivains de tous horizons.
Le numéro 2 donne la parole à un homme qui veut mettre le feu aux esprits, illuminer les ténèbres, éclairer les abysses où tant de naufragés ont sombré.

Lui, l'homme de lettres, nous dit que seuls les poètes peuvent crier la souffrance et l'horreur qui accablent les proscrits, les exilés, les martyrisés, tous ceux qui ont faim et soif de justice.

Lui, le Napolitain, né au carrefour des civilisations, se réclame de ces peuples métissés, aux sangs mélangés, marins, marchands, voyageurs, nomades, oiseaux migrateurs.

Lui, l'Européen, se sent un devoir d'ingérence vis à vis de ceux qui construisent des murs et clament "on est chez nous! Dehors les métèques, les parias, repoussons les Sarrazins, rejetons-les à la mer, comme des ennemis!"

Il en appelle à la conscience de chacun de nous. Quelles valeurs voulons nous défendre ? Allons nous bientôt ressembler à des gardiens de musée dans un continent vieillissant et sclérosé ?

Ou retrouver l'élan des fondateurs de cette Utopie, une Europe de paix, d'abondance pour tous, de Lumière ?
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Je ne connaissais pas Erri de Lucca. On m'a offert ce numéro 2 de "Tracts", collection qui accueille, selon Antoine Gallimard himself, "des essais en prise avec leur temps mais riches de la distance propre à leur singularité". Objectif atteint, pour celui-là au moins. Erri de Lucca a une plume originale, une culture qu'il étale à bon escient et des réflexions proches du cynisme qui vous réveillent. Comme des embruns glacés réveilleraient deux amoureux contemplant l'océan.
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Dans les trente pages de ce recueil de la nouvelle collection "Tracts", Erri de Luca nous offre un texte inédit et quatre textes plus anciens.
Le plus vieux date de 2003, mais malheureusement depuis ce temps-là la situation ne s'est pas améliorée ! Je vais les relater par ordre chronologique en inversant néanmoins les deux derniers. En 2003, "la nouvelle Europe" s'éloigne de la Méditerranée où se noient les premiers migrants.
En septembre 2015, de Luca relate un voyage à Lampedusa pour rendre hommage à tous les migrants morts noyés. Dans quel monde sommes-nous si nous ne sommes pas capables de passer du droit d'asile au devoir de le donner à nos frères humains ?
En octobre de cette même année, de Luca présente l'Europe comme le terrain de lutte de deux jumeaux, l'un introverti qui se rassure avec des barbelés, l'autre extraverti. Mais cette Europe ne voit pas que son seul avenir serait dans une union plus solide entre ses membres et dans une alliance avec la Méditerranée.
Le texte de mars 2019 est le plus long, avec ses quatorze pages, et c'est lui qui ouvre le recueil. De Luca présente la littérature et la musique comme des moyens pour dépasser les frontières. Dans cette Europe qui est une "zone franche de la liberté d'expression", les livres l'ont ouvert à une fraternité européenne, avec des auteurs aussi divers que Celan, Strindberg, Borges ou Camus
Le texte qui m'a le plus touché est de 2015, sans date précise, et s'intitule "Une forêt de gens." Il fait référence à un épisode de l'évangile dans lequel Jésus guérit un aveugle à Bethsaïde. Cette images des hommes comme des arbres qui marchent est pour de Luca "la plus noble image associée à la figure humaine". Il l'associe aux buissons, aux branches qui s'élèvent vers le ciel, à l'arbre généalogique, à des hommes qui viennent de loin et s'enracinent comme des arbres. Une belle méditation.
Quand j'ai refermé ce cahier, j'étais vraiment séduit par le style de l'auteur. Mais au-delà de l'émotion et de l'indignation que faire réellement de tout cela ? Quelles implications dans ma vie quotidienne, dans ce monde en mouvement, face à des hommes qui cherchent une vie meilleure et bravent tous les dangers pour venir ? Je pense qu'il faut accepter de s'ouvrir à l'autre en nous "nourrissant" de ce qu'il peut nous apporter et surtout garder des utopies pour vivre !
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J'adore Erri de Luca.
C'est un auteur à la plume singulière, limpide, claire, belle.
Il s'illustre ici sur un sujet difficile au possible, l'Europe.
Lui, l'Italien du Sud, le napolitain, lecteur et traducteur de la bible, lecteur de l'hébreu, du russe, langue à la fois très européennes mais aux confins de notre organisation économique.
L'UE n'est pas l'Europe culturelle, et les dirigeants ne parlent pas tous les jours de Dante et d'Erasme.
De Luca ne parle d'ailleurs pas de ces auteurs.
Hölderlin, une poétesse russe, un écrivain Yiddish, voilà qui convoque l'auteur. Des survivants, des morts du dernier conflit, celui qui a poussé le vieux continent à s'entendre. Ces guerres auxquelles l'auteur a participé (en Yougoslavie) et qui l'ont marquées. Il n'en veut plus, on le sens. Il ne veut plus non plus d'africain mourant de soif et de faim et de noyade en Méditerranée. Et il le dit, clair, fort, et bien. Sans grandes théories, sans ambages, juste avec de l'humain.
Rien de plus simple et logique.
Superbe.
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« Europe, mes mises à feu » Erri de Luca (30 pages, Tracts Gallimard)
Cinq courts textes, en fait une recension d'articles (sans doute des articles de presse, mais l'éditeur ne précise pas) écrits entre 2003 et 2019, qui ont pour point commun un regard sur l'Europe, celle qui s'ancre dans la Méditerranée, cette Mare Nostrum qui depuis plusieurs millénaires nous habite et nous relie. C'est un regard certes amoureux, mais aussi très critique sur cette Europe des marchands et des replis, cette Europe qui continue à brider la parole contraire, à bombarder, à refouler, à noyer. Cette Europe si multiculturelle qui nous irrigue, qu'on le veuille ou non, dont la diversité fait la richesse. C'est une analyse sans concession des nationalismes et du racisme, un acte de foi en la culture (« Racisme et nationalisme sont des pathologies, avant d'être des porteurs de paradoxes politiques (…) le remède obligatoire et immunitaire reste la lecture des livres du monde »). Les mots de saine révolte sont parfois très durs («Aujourd'hui, la Méditerranée est le laboratoire le plus intensif de transformation de corps humains en plancton»), l'argumentation implacable, les métaphores saisissantes, mais indiscutables. Le tout exprimé dans la langue « habituelle » de l'auteur, si poétique et si pure. A lire et à faire circuler.
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Gallimard ressuscite la collection "Tracts"crée dans les années 30 avant le basculement de l'Europe dans l'horreur, espérons n'y voir là que la nécessité d'un rappel à débattre de notre histoire et non pas "comme un horrible pressentiment" à l'heure où les nationalistes de tous poils bombent de nouveau le torse.
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