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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Milan Kundera énonce, dans L'Art du roman : « Vivant Denon, l'un des plus grands stylistes français. » Moi, je tique un brin : « Quoi ? Vivant Denon ? le plus grand styliste ? Jamais entendu parler ? Comment ça se fait ? »

Pourtant ça se fait… Première raison, Dominique Vivant Denon n'a pas écrit beaucoup, et moins encore dans le registre de la fiction (il est surtout connu pour ses dessins et en tant qu'administrateur du Louvre). Pour ainsi dire, dans ce domaine, on lui doit une nouvelle, intitulée Point de lendemain, et c'est tout.

Comment quelqu'un, qui n'a écrit, en tout et pour tout, qu'une nouvelle — qui plus est, une nouvelle libertine, genre qu'on peut qualifier de mineur dans la littérature (un peu comme le péplum au cinéma) —, une malheureuse nouvelle, donc, comment un tel auteur pourrait-il être estampillé du sobriquet flatteur de « plus grand styliste français » ?

Eh bien, au risque de vous surprendre, après avoir lu cette nouvelle, je partage totalement le jugement de Milan Kundera : c'est un français exceptionnel, un français comme on le rêve, mais surtout, une musicalité, une syntaxe, un emploi de la ponctuation qui est un vrai bonheur. Sans oublier une ironie, un double fond sous chaque mot, une tenue, une profondeur (bon, là, je sens qu'on va me taxer de grivoiserie, certes, il y a un peu de ça), une pétillance dans le propos : j'adore !

Ce qui me frappe dans le style de Vivant Denon, c'est d'abord, la cadence, le rythme : vous lisez de la prose, et pourtant, vous jureriez parfois qu'il s'agit de poésie. Ensuite, il y a l'emploi — très novateur pour son temps (peut-être fut-ce le premier ?) — des points de suspension à répétition. On sait que ceci sera popularisé par Colette puis repris jusqu'à l'overdose et institué comme marque de fabrique par Céline. (Notons également qu'Emily Dickinson, quelques années après Vivant Denon, utilise abondamment le tiret, ce qui, en syntaxe anglosaxonne, correspond à du point de suspension.)

Je n'ai pas l'impression d'avoir lu auparavant dans l'histoire littéraire un usage comparable de cette marque de ponctuation. Il y a aussi l'épiphore, la répétition volontaire, euphonique, l'écho musical de certains mots, qui marquent le rythme, en plus des virgules. Là encore, c'est magnifique. (D. H. Lawrence reprendra ce principe dans son écriture.)

Donc, vous l'aurez compris, Point de lendemain, c'est d'abord et avant tout un style, incroyablement raffiné, ça, c'est acquis. Mais c'est aussi, la relation d'un épisode, c'est aussi remarquablement bien observé, ces relations sans lendemain, ces étreintes sexuelles d'un soir, ces parenthèses dans nos vies, ces bouffées de sensualité auxquelles nous nous adonnons, une ou deux fois dans nos vies de jeunes adultes (un peu plus, un peu moins, selon les personnes, un peu plus jeune ou un peu plus vieille, selon le caractère ou les opportunités).

C'est exactement ça, et là encore, comme c'est bien observé, comme c'est bien dit, comme il suscite ou ressuscite ces sentiments en nous. Bon, je vous avoue tout de même qu'à elle seule, Point de lendemain n'irait tout de même pas, selon mes critères, jusqu'aux cinq étoiles, car j'ai déjà lu des nouvelles plus marquantes, plus impressionnantes, mais quatre, sans hésitation.

Toutefois, ce livre est un recueil de deux nouvelles. L'autre est l'oeuvre de Jean-François de Bastide et s'intitule : La petite Maison. On y retrouve un thème commun, ouvertement libertin, mais un traitement plus conventionnel. le style est agréable mais, à mon goût, un peu trop chargé sur les descriptions, qui deviennent parfois pléthoriques.

Le propos est également plus commun : en gros, comment un aristo en met plein la vue à une aristo, au travers d'un pavillon somptueux, véritable déclencheur de désirs, dans le but clair et évident de la trousser sur des coussins de soie, entourés de naïades et de dorures en tout genre. La femme savait pourtant à quoi s'attendre, mais… c'est là tout le charme de la petite maison…

Cette nouvelle, selon moi, est nettement inférieure à la précédente, même si elle se lit sans déplaisir. Ma note finale de l'ouvrage est donc une combinaison de ces deux ressentis. En tout cas, un petit livre qui vaut le coup d'être lu : c'est très rapide à survoler, ça n'engage pas à grand-chose, on en retire, au pire de l'indifférence, au mieux, une belle émotion littéraire. D'ailleurs ceci n'est que mon avis sans lendemain, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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« Va, crois-moi, le plaisir est toujours légitime ! » écrivait le poète libertin du XVIIIe siècle, Evariste de Parny. Cette courte nouvelle parait à la fin du XVIIIe siècle, époque contemporaine à la naissance d'une littérature sentimentale assez différente outre-Rhin : le romantisme du jeune Werther de Goethe.

Le plaisir va au-delà de la sexualité qui en réalité n'est pas décrite. Il y a un code de conduite libertin, des règles de séduction.
La séduction est un combat car il faut « triompher » de la vertu, et « vaincre » l'objet du désir. La séduction est imposée, on ne libertine pas sans se séduire, on ne donne pas sa chair avant ses voluptueuses et langoureuses joutes verbales, c'est à la fois une escrime et une danse enivrante, faite de chassé-croisé, voltiges, jeux de chats et de souris, d'embuscades et d'escarmouches que les partenaires doivent mener jusqu'à son terme.

« Propos gauches qu'il faut passer à deux êtres qui s'efforcent de prononcer, tant bien que mal, tout autre chose que ce qu'ils ont à dire. » Comme l'écrivait Roland Barthes, dans Fragments d'un discours amoureux, le langage des amants est comme une seconde peau, et dans le libertinage, je frotte mon langage contre l'autre. Alors parfois, il y a des formules maladroites, des excès de voix, des contresens qui aiguisent le fleuret de la conversation.

« La discrétion est ma vertu favorite ; on lui doit bien des instants de bonheur. » La discrétion est ambivalente dans le libertinage. Il faut être assez discret pour ne point risquer scandale de réputation et conséquences judiciaires mais pas trop non plus afin de pouvoir jouir de la jalousie d'autrui…il faut que les liaisons soient (un peu) dangereuses.

« La lune se couchait, et le dernier de ses rayons emporta bientôt le voile d'une pudeur qui, je crois, devenait importune. » A la faveur de la nuit, on ne distingue plus ni vertu, ni pudeur, ni morale, reste la beauté de la langue… dans toute la polysémie du terme.

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Vivant Denon, auteur du XVIIIème siècle écrit « Point de lendemain » en 1777. Il s'agit d'un court récit, une nouvelle d'une vingtaine de pages.
Un jeune homme de vingt ans se trouve au centre d'amours tumultueuses et de tromperies savamment manigancées par ses deux maitresses.
L'écriture de ce siècle est précise, poétique, elle enjolive les frasques libertines d'adultes consentants sans jamais basculer dans l'inconvenable.
Un plaisir de lecture immense, dommage que le récit soit si bref, on en redemanderait …
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Unique roman écrit par Vivant Denon, Point de Lendemain fait partie des oeuvres incontournables de la littérature libertine du XVIIIème siècle.

Dans ce conte (c'est ainsi que le désigne son auteur), un jeune ingénu de 20 ans, introduit dans les loisirs de la société aristocratique, fait un soir la rencontre de Madame de T.... Celle-ci pour, dit-elle "que je vous sauve le ridicule d'une pareille solitude", lui offre de passer la nuit... à ses côtés.

C'est ici, dans un style délicat et chatoyant (celui du XVIIIème siècle), que l'auteur va déployer toute la subtile intrigue du récit, évoquant tous les recoins des lieux et du temps, jusqu'à l'étonnant jeu de faux-semblants de ses personnages. Comme un désenchantement, le récit se termine par cet aveu du jeune ingénu : "Je cherchai bien la morale de toute cette aventure, et... je n'en trouvai pas".

Oeuvre brève, autographiée MDGODR (pour Monsieur Denon, gentilhomme ordinaire du roi), Point de Lendemain est un récit léger, distrayant, des plus plaisants à lire.
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Point de lendemain de Vivant Denon est un petit roman que l'on savoure au coin du feu, dans une nuit étoilée sans fin. Un petit jeu du chat et de la souris en amour dans un autre temps ! J'ai beaucoup aimé lire ces pages, ça change de mes lectures habituelles ! Je vous confie que je préfère la version de 1812 mais quelle que soit la version, la plume de Denon est inimitable.
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Comment devenir libertin? Telle est la question qui va rythmer l'oeuvre.
Les personnages ne sont pas identifiés par leur nom ou prénom mais par leur fonctions sociales.
Mais comme l'indique le livre "Point de lendemain", l'histoire se déroule sur une très courte durée. La relation que vont entretenir les deux amants n'aura pas de continuité, elle est éphémère.
Je conseille ce livre pour une lecture de chevet.
C'est une oeuvre qui peut possiblement se lier à:
Justine ou les malheurs de la vertu, Sade
Les égarements du coeur et de l'esprit, Crébillon
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