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3,87

sur 313 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'émerge à l'instant de la boue du bout du monde, de la fange du Gange où doit éclore une déesse à Bénares pour étancher la bassesse des hommes.
Chinti, dix ans sera la fille de Kali, c'est Shivnath l'homme de Dieu qui le veut et qui pour ça, l'emporte. « Son corps est si léger et si lourd de promesses… »

Ananda Devi avouait à la grande librairie que la genèse de ce livre est due à un choc ressenti lorsqu'elle a vu des myriades de prostituées suivre les pèlerinages religieux afin de satisfaire les pulsions sexuelles des pèlerins bien plus conséquentes pour parfaire la purification et mieux se concentrer sur la dévotion.
« Imaginez que leur sexe les trahisse au milieu de la prière, parmi tous les pèlerins. »
Pauvres petits hommes asservis au rigide lingam inassouvi !

Dès les premières lignes le ton est donné, ma zone de confort a été bien vite dépassée lorsque je me suis retrouvé projeté dans la Ruelle suffocante de puanteur et de misère où Veena se donne chaque nuit, juste pour survivre avec sa fille Chinti confinée, abandonnée sans amour derrière un morceau de contreplaqué.
« Survivre ne vous donne guère le temps de vous préoccuper d'amour. »
De cette même Ruelle, Sadhana, une hijra offrira à Chinti sa tendre affection, véritable bouffée d'oxygène dans cette atmosphère crasseuse et corrompue. Ces femmes qui naissent dans un corps d'homme, constituent le troisième sexe présent depuis 4000 ans en Inde.
Elles obtiennent leur divinité dans l'émasculation au couteau qui leurs confèrent la possibilité de donner la bénédiction aux mariages et aux naissances.
Cependant, la majorité des hommes leurs crachent dessus et les agressent.
« Notre aura semble à certains un pouvoir obscur, d'autres y voient une barrière insupportable. »
Toutes ces femmes de riens vont se liguer pour faire exploser les desseins de Shivnath, bouffi de son outrageuse sainteté.

De cette glaise de fatalité putride Ananda Devi extirpe la noirceur de l'inhumanité pour façonner un roman de colère et d'exaspération qui tel un Golem doit ravager l'ignorance, bannir la pédophilie, éradiquer les viols et faire germer des sentiments plus sages, des existences plus équilibrées dans ce pays où la religion excuse tout aux hommes.

De cette histoire vous en connaissez maintenant l'essentiel mais vous n'en avez toujours pas les mots qui cisaillent, qui percutent, qui fouillent et surpassent la haine, l'amour et la mort.

N'hésitez pas.




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Passionnée de littérature indienne ou toutes oeuvres se rapportant à l'Inde, j'ai de suite souhaité livre ce roman d'Ananda Devi.

Veena, une jeune femme qui " porte sa rage en bannière ", prostituée au coeur de la Ruelle, est mère de la petite Chinti. Chinti c'est elle même qui s'est donnée son prénom, sa mère n'avait jamais senti le besoin de l'appeler autrement que l'enfant. Car elle n'avait pas souhaité, désiré cette enfant. Ainsi pensait-elle quand ne lui donnant aucun nom, elle disparaitrait facilement.

Mais le destin a été tout autre.

Chinti découvre le monde proche d'elle avec des yeux et une âme d'enfant. Elle devient le soleil de toutes ces femmes, et surtout de Sadhana, la hijra de la maison d'à côté.

Ainsi Chinti " vogue sur un nuage d'illusions " quand un jour elle ressent un amour particulier pour le swani Shivnath, le maître, un homme aux apparences saintes. Toute sa confiance va vers lui. Cette petite fille en manque de tendresse et d'amour certain, s'abandonne en toute innocence aux bras de celui qui lui promet une vie meilleure : " Tu seras traitée comme une princesse. Tu ne seras plus jamais pauvre. "

En effet et si Chinti était déesse, fille de Kali ?

Le rire des déesses est un roman puissant mettant en scène les femmes abusées, maltraitées, esclaves par des hommes guidés seulement par leur lingam ! Cette histoire racontée se déroule en Inde, mais sachons bien que les Indiens ne sont pas plus hommes-bestiaux qu'ailleurs dans le monde. C'est universel cette idée que certains hommes profitent de la faiblesse des femmes, des jeunes filles, des enfants même. Comme le souligne le Swani, agissant en pleine conscience, l'hypocrisie règne partout autant en Occident qu'en Orient ....

Enfin l'auteure nous mènent dans une danse folle à la fois décadente et qui a force de volonté prend un tout autre sens. Un chemin nouveau peut s'ouvrir pour entendre le rire des déesses !

Merci infiniment à la plateforme NetGalley et à la fidèle confiance des Éditions Grasset

#Leriredesdéesses #NetGalleyFrance
#universelicec
#rentreelitteraire2021
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L'écriture d'Ananda Devi entaille les chairs et retourne l'âme. Avec ce dernier je retrouve ce goût de la lecture intense qui collent à la peau, découvert avec le sari vert.
Justesse de ton de langue.

Ananda Devi capte la noirceur du monde avec entêtement.
Ce monde qui « manque terriblement d'imagination pour rendre misérable les plus faibles ».

Merci pour ces fictions qui n'entachent pas la souffrance par de belles déclarations.
Ces récits qui ne cherchent pas à fuir la réalité mais l'enrobe de mots pour imprégner les yeux de lecteurs qui n'ont qu'à se saisir. Ce qu'il faut pour résister. de la littérature fine poétique qui dénonce sans dentelles mais le fait avec beauté. Pour que ça compte qu'elles comptent, qu'elles restent vivantes, au moins en songe.
Les femmes ne sont pas des corps sans âmes. le désir ne devrait pas trouver à se monnayer par le prisme d'un autre.
Des mots pour que l'impuissance attrape l'altérité. Que l'on sache.

Merci pour ce rappel : Les femmes sont des déesses peu importe leurs conditions et quand la vie se chargent de leur faire croire le contraire, reste encore le rire et les fleurs pour adoucir la sauvagerie.

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Un livre finement écrit qui nous plonge dans la bassesse et la violence d'une société indienne qui repose sur une hiérarchie des individus et des croyances qui permettent les pires atrocités et avilissements. Heureusement l'amour sincère d'une mère peut se révéler plus fort et sauver la vie d'une petite fille qui ne se perçoit que comme une insignifiante fourmi.
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Être née dans la fange nous condamne-t-il à y rester toute notre vie ? Malgré sa rage contre le monde entier et son peu d'espoir pour sa propre destinée, Veena veut croire qu'un avenir meilleur attend sa fille, Chinti, la petite « fourmi ». Lorsqu'un prêtre véreux la lui enlève pour la faire soi-disant diviniser dans son sanctuaire, le sang de Veena ne fait qu'un tour : réunissant les femmes de la Ruelle, prostituées et hijras, toutes plus attachées les unes que les autres à la petite, elle se lance à ses trousses pour la récupérer.

Véritable plongée dans les bas-fonds de la société indienne, le rire des déesses explore la vie de ceux que la société a rejeté, dont l'existence se limite à une rue, d'un côté celles qui vendent leur corps pour survivre, de l'autre celles qui ont renoncé à une partie de leur corps pour devenir ce qu'elles sont, incomprises et pourtant mystiques. Comment grandir là-dedans, une fente dans le mur pour tout horizon, les cris des coïts pour toute bande-son, les fleurs des marchands ambulants comme seule joie ? Et pourtant, de ce contexte délétère émerge une jolie petite fille, innocente malgré tout, ramenant le sourire dans les coeurs de celles qui n'y ont pas le droit.

C'est un roman incroyablement sensible et poétique que celui-ci, un roman sur l'amour filial et des différentes formes, un roman sur l'espoir qui subsiste même quand tout semble perdu, un roman sur les femmes et leurs différents visages, leur force et leur résilience face à l'adversité. Ananda Devi nous ouvre une porte sur une Inde méconnue, où la crédulité des hommes permet l'impunité de quelques uns – au détriment de celles qui sont ici nos héroïnes, les femmes et les hijras.
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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Alerte coup de coeur !

Le rire des déesses est un ouvrage féministe, dure, percutant et déroutant. L'autrice s'intéresse aux personnes oubliées de la société indienne : les femmes (en particulier les prostituées) et les hijras (ce terme désigne la caste regroupant des hommes castrés, des personnes transgenres ou des homosexuels). Chinti est une enfant pleine de vie qui grandit dans la Ruelle, quartier très pauvre où vivent les prostituées. Dans cet endroit, la résignation, la tristesse et la colère règnent, Chinti est le seul petit rayon de soleil qui subsiste. Pourtant sa mère, Veena, ne parvient pas à créer un lien avec elle, à l'aimer, elle ne se l'autorise pas de peur de fendiller sa carapace faîte de colère et de rage. Chinti grandit, cherche de l'affection ailleurs, auprès des autres femmes de la Ruelle et des Hijras, elle s'épanouit et attire malheureusement le regard de Shivnath, homme tout puissant, vénéré tel un Dieu. Cet homme est prêt à tout pour obtenir Chinti, et assouvir ses désirs pervers. Il la kidnappe et l'entraîne à Bénarès pour en faire une déesse, la sienne.

Vous l'aurez compris le rire des déesses est un roman fort, on le lit la boule au ventre, le coeur au bout des lèvres. Il nous bouscule, nous fait voir les pensées les plus intimes, les plus viles de certains personnages. On est emporté dans le tourbillon de rage et de colère que représente Veena, cette mère qui réalise au moment où sa fille est l'objet des délires d'un hommes, tout l'amour caché qu'elle lui porte et surtout tout ce qu'elle représente : l'espoir que Chinti pourra sortir de ce quartier, échapper au destin terrible qui les attend toutes. On est bouleversé par Chinti, petite lumière, boule d'énergie qui tente d'alléger le quotidien de son entourage, qui prend de la distance avec sa mère par peur du rejet et tristesse, et qui de par l'innocence de son âge, reconnaît en Shivnath, un sauveur, un ange gardien qui la sortira de cette crasse ambiante. On est en admiration devant le personnage de Sadhana, hijra, belle, forte, lumineuse, qui va devenir la véritable ange gardien de Chinti. Et on est dégoûté par les pensées obscènes et tordues de Shivnath, personnage mégalomane, qui se considère comme un surhomme, comme un homme de Dieu, qu'aucune loi, aucun être humain ne peut stopper.

Je ne peux que vous conseiller de lire ce roman. Il aborde différents sujets tels que la sororité, la religion, la folie de la foi, la pédophilie, la place de la femme et des hijras dans la société et surtout la difficulté d'aimer son enfant, le développement d'un lien mère-fille qui ne se fait pas naturellement.

Un roman qui se dévore et qu'on ne peut lâcher tant on a peur de l'issue de l'histoire.
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L'histoire se déroule en Inde, tous les commentaires commencent par là. L'histoire se déroule en Inde ? L'histoire concrète, certes. Mais elle a une valeur universelle pour dénoncer le sort général des femmes, filles ou fillettes, laminées par la toute-puissance masculine – qu'elles soient prostituées ou épouses-objets jolies embijoutées, faire-valoir de leur partenaire, ainsi que l'omnipotence hypocrite de toutes les religions où le masculin est maître, et les femmes glorifiées à balayer, fleurir les édifices religieux et chanter des cantiques.
Lectrices et lecteurs occidentaux, réveillez-vous ! Si cette histoire se déroule en Inde, où les castes supérieures peuvent éventuellement piétiner sans vergogne les parias, elle se passe aussi, sous d'autres formes, bien dissimulée sous le manteau, à votre porte.
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Ananda Devi, d'origine indienne, ayant une formation d'anthropologue, nous emmène parcourir les ruelles des bas-fonds d'une ville indienne. On y découvre les conditions de vie atroces des prostituées et celles non moins épouvantables des hijras, transsexuelles souvent violentées par la société. Plus tard, l'auteure nous fera suivre le pèlerinage à Bénarès sur les pas de Shiynath, homme pieux dépravé. L'écriture est très imagée. Féminisme, transsexualité, pédophilie sont les sujets forts de cet ouvrage dans l'Inde actuelle où les anciennes croyances sont toujours vives.
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Le récit est hallucinant de cruauté mais de réalité pour les femmes indiennes : la fiction nous fait entrer dans la vie de Veena une prostituée des bas fonds de la Ruelle, une femme qui tente de survivre dans la misère, la crasse, la merde, dans la violence des hommes et de la société indienne pour qui ces femmes, pauvres, miséreuses ne sont rien. Une femme tellement malmenée qu'elle fait tout pour ne plus souffrir, pour ne plus ressentir, pour ne plus aimer. Pour cette raison, elle laisse sa fille vivre ou plutôt survivre au milieu de cette maison de passe, de ces minuscules cellules où les autres femmes survivent et travaillent, à l'intérieur des murs, cachées aux yeux de tous , comme une fourmi. La petite très vite est laissée seule, doit vivre, s'occuper et grandir ...A tel point qu'elle doit elle même se trouver un nom, se nommer pour exister et elle choisit le nom de Chinti, qui signifie Fourmi, celle qu'elle est au sein de sa maison. 
En grandissant elle est appréciée par les comparses de sa mère, elles aiment son naturel, sa beauté, sa grâce, sa joie de vivre, Chinti se révêle une enfant lumineuse. Elle est aimée des femmes de la ruelle mais se lie aussi avec les Hijras, classe en marge, ces femmes-hommes et découvre en Sadhana et sa compagne Réhane plus que des amies, des mères de substitution. Lumineuse au point d'être repérée par le client le plus important de sa mère, un swami, un homme saint et puissant qui se dédouane de ses actes, loin d'être vertueux en cotôyant ces femmes des bas fonds, qui tombe en admiration devant cet enfant pur et innocente, lumineuse dans cette crasse, qui en devient fou, comme envoûté, comme amoureux, avec l'intention de la posséder. En homme de pouvoir il s' empare de son nouveau jouet, l'emmenant contre le gré de Veena dans son temple. 
L'auteure sait décrire ces deux mondes totalement différents, opposés en tout. Seuls les rapprochent la bassesse. Elle n'hésite pas à plonger le lecteur dans la réalité affreuse des femmes ,elle utilise les mots vrais et crus qui disent l"horreur des corps, des coeurs et elle nous plonge aussi dans la société indienne qui ne cautionne pas la vie des femmes. L'inde est un pays d'hommes, on honore le lingam, la puissance masculine. L'homme saint retrouve sa véritable place d'homme, humain. Lui même démonte cette religiosité si naîve et innocente des croyants. Il est la figure même de l'anti sainteté, manipulateur des foules et créateur de mystères et de mensonges.
La 4ème de couverture de Grasset ou de NetGalley qui m'a permis de découvrir ce roman (citée ci-dessus) dévoile trop l'intrigue à mon sens et va jusqu'à résumer plus de la moitié du roman. Mais heureusement elle ne rend pas la langue, le style de l'auteure : lucide, acide et critique. Ce style ouvre les yeux des lecteurs tout en ouvrant ceux des personnages sur cette société injuste, monstrueuse pour les femmes et les miséreux. 
C'est un roman réaliste cru qui raconte une quête haletante, un combat désespéré de ces femmes. Les personnages principaux à l'opposé de la réalité sont des héroïnes qui s'élèvent dans les sentiments, les valeurs d'amour, de sacrifice, de courage, de résistance, de force...et d'espoir.  #Leriredesdéesses #NetGalleyFrance !
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Dans « le rire des déesses », Ananda Devi, nous transporte dans les bas-fonds de cet immense pays très patriarcal qu'est l'Inde pour nous faire découvrir la misère, la détresse, la pauvreté, la malnutrition dans lesquelles vivent ces femmes rejetées de la société et, qui, pour pouvoir manger et donner à manger à leur enfant, sont obligées de se prostituer. Elles vivent dans des quartiers insalubres sous l'autorité d'une mère maquerelle. L'une des prostituées, Veena, a une fille de dix ans , Chinti, qu'elle délaisse jusqu'au jour où l'un des clients, un homme d'église corrompu, tombe amoureuse de sa fille ; il veut la faire déesse et l'emmène à Bénarès pour la consacrer.
Mais, sera-t-il assez fort pour résister au courage et à la force des prostituées du quartier ?…
Dans un pays très conservateur et à la religion très présente, l'auteur nous invite à réfléchir sur la place des femmes dans cette société, le rôle puissant des hommes et des religieux. Un roman qui fait écho dans nos sociétés occidentales où certains combats sont loin d'être terminés, même s'il faut rester optimiste et croire sur l'intelligence de tous !
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Que signifie Chinti, le nom que décide de se donner la petite fille à l’âge de neuf ans ?

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