Que l'écriture est belle ! Que ce livre est beau dans sa douleur !
Une "cruelle" poésie suinte à chaque page au travers du désenchantement !
Si juste, il écorche les coeurs, cogne les vies, détruit les cartes postales !
La rage - le désespoir
* les désirs d'une jeunesse oubliée, cabossée, enterrée à Troumaron au bas des immeubles construits sur des marécages qui n'a pas réussi à combler l'odeur du goémon ni l'incertitude du sol où ne poussent que les cadavres des ronces et des rêves. (p.29)
La douleur des âmes s'infiltrent dans les mots qui vous prennent aux tripes et se gravent en larmes d'océan sur le sable du soleil brûlant.
Le silence d'Eve est celui qui grandit , naufragée d'un visage noyé - Une si grande solitude !
* L'étoile a pleuré rose au coeur de tes oreilles, l'infini roulé blanc de ta nuque à tes reins et l'homme saigné noir à ton flanc souverain.
Je suis jeune : prenez moi la main *.
Gribouillis d'humanité qui ne croit en rien mais souffre quand même.
Eve, Sarita, Clélio, Sad et les autres les oubliés de Port Louis, à l'Ile Maurice .
*Les enfants ont des ailes de plomb et persistent à croire qu'ils peuvent voler, jusqu'à ce qu'on les retrouve, ordures parmi un tas d'ordures *. (p.114)
L'auteure originaire de l'Ile nous raconte le verso de la carte postale entre tristesse et cruauté de la vie.
Livre trouvé en boîte à livres, une pépite !
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Eve, Sadiq, Clelio, Savita, quatre adolescents à l'ïle Maurice.
Tous meurtris par la vie, la pauvreté, la misère, la violence.
C'est Eve le personnage central.
Sadiq, plus intellectuel, est fou amoureux d'elle.
Savita est son amie, qui veut la débarrasser de ses démons.
Clelio est le plus violent et le plus démuni des quatre.
Les personnages alternent dans le récit.
J'ai eu un peu de mal au début.
Et puis je me suis laissée emporter par la beauté et la poésie de l'écriture.
Je me suis attachée à ces quatre jeunes en perdition.
C'est une très belle et triste histoire, racontée avec une grande délicatesse.
Le quartier de Troumaron, à Port-Louis va me rester en tête un bon moment, ainsi que la désespérance de ces jeunes.
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Par blessure. Par mystère. Pour confirmer, avec rage, avec hargne, avec désespoir, ce qu'ils pensent tous, là bas, dehors.
pour être. Pour devenir. Pour ne pas disparaître à tes propres yeux. Pour sortir de la gangue des passifs, des oisifs, des ratés, de la sciure des regards, du plomb des jours, du tranchant des heures, de l'ombre des vivants, de l'absence des morts, du gravier des médiocres, du moisi, de la nudité, de la laideur, de la moquerie, des rires, des pleurs, des instants, de l'éternité, du bref, du lourd, de la nuit, du jour, de l'après-midi, de l'aube, des madones effacées, des diablesses disparues.
Rien de tout cela n'est toi.
Sortir de tout cela, déjouer les chercheurs, les suiveurs, quitter la piste, tromper les chiens, changer de forme, achever ta mue et tes métaphores et tes métamorphoses, laisser une traînée argent qui fleure la femme et les plis de la nuit, suivre un chemin de broussailles qui mène loin au fond des mythes et permet d'en sortir refaite à neuf, récurée de ta peau, marchant sanglante au rouge de tes vies, être, devenir, ne pas disparaître.
Tu n'es pas d'ici, te dis-tu. Tu le diras jusqu'à la fin des choses.
Elle est saisie par une lumière d'étoile. Son visage semble décousu. D'étranges couleurs, les couleurs des coups, brouillent ses traits. Ses yeux sont si profonds et leur résonnance si métallique que j'ai du mal à la regarder. Ils vont au-delà de cette maison au-delà de Port Louis, au-delà du présent.
Ses yeux sont à demain, et demain n'existe pas.
Sad :
On me dit que je réussirai. Il faut savoir que réussir, ça ne veut pas dire la même chose pour tout le monde. C’est un mot à déclinaison variable. Dans mon cas, cela veut simplement dire que les portes fermées pourraient s’entrebâiller et que je pourrais, en rentrant bien le ventre, me glisser entre elles et tromper la vigilance de Troumaron. Tout le monde sait que la pauvreté est le plus féroce des geôliers. Les profs, eux, disent que tout est possible. Ils me racontent qu’eux aussi apprenaient leurs leçons à la lumière de la bougie. Je vois d’ailleurs dans leurs yeux l’obscurité de penser qui en a résulté. Ils me disent, il faut saisir votre chance, vous ne devez pas freiner le développement du pays. C’est qui vous ?
Eve :
Un mouchoir de dégoût. Oui, moi aussi on me l’a enfoncé dans la bouche dès la naissance.
Debout près de la fenêtre, je crache la fumée du tabac dans la nuit. Je la regarde se dissoudre comme si elle emportait une part de moi. Ma mère, quand elle viendra dans ma chambre après avoir longtemps hésité devant la porte fermée, ne dira rien, ne sentira rien. Elle s’est délibérément insonorisé la chair pour ne pas avoir à ressentir la vie et à la regretter. Une existence à l’abri de tous les remous, voilà ce qu’elle voudrait. Mais peut-être est-ce la seule vision possible, pour ceux qui sont accouchés par le besoin ?
Personne ne sait qu'on peut aimer comme ça, à dix sept ans. Je baigne dans l'eau nocturne d'Eve. Je plonge dans sa vision trouble. Je me noie dans sa boue, dans son innocence. Je me fous de ce qu'elle est, et de ce qu'elle fait. Je suis le clin d'oeil noir au-dessus de la ceinture de son jeans. Je suis le talon arrondi de son pied nu dans ses sandales. Je suis le souvenir de son rire si rare, de sa force, de son défi.
Je ne vois rien d'autre. Les phrases sur mes murs ne sont plus écrites à l'encre noire mais blanche, et le stylo se remplit et se désemplit tout seul, en un incomparable jaillissement.
À l'occasion du Forum des libraires 2023, Olivier Nora, Président-Directeur général, présente la rentrée littéraire des Éditions Grasset - @editionsgrasset7893
Au programme de la rentrée d'automne 2023 :
0:00 Introduction
1:01 *_perspective(s)_ de Laurent Binet*
1:15 *_À ma soeur et unique_ de Guy Boley*
1:29 *_l'enragé_ de Sorj Chalandon*
1:55 *_Rose nuit_ d'Oscar Coop-Phane*
2:30 *_strange_ de Geneviève Damas*
2:50 *_Le Jour des caméléons_ d'Ananda Devi*
3:06 *_Adieu Tanger_ de Salma El Moumni*
3:17 *_Le Grand Feu_ de Léonor de Récondo*
3:47 *_Comédie d'automne_ de Jean Rouaud*
3:58 *_Croix de cendre_ d'Antoine Sénanque*
4:11 *_Impossibles adieux_ de Han Kang*
4:39 Conclusion
Un événement @livreshebdo_ en partenariat avec @babelio
© Livres Hebdo
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