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4,14

sur 1175 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je me rappelle fort bien les efforts répétés d'un de mes amis de fac pour m'éduquer moindrement l'oreille à la culture reggae. Je me souviens en particulier d'un des titres des Gladiators où le tempo et la majorité des instruments marquaient une légère pause pour laisser ressortir la phrase que scandait le chanteur : « A good friend is better than pocket money ! » lequel Pocket Money était également le titre de la chanson.
Telle pourrait être la devise de l'ouvrage qui nous occupe aujourd'hui : Un bon ami vaut mieux que de grandes espérances.
J'ai trouvé ce roman réellement remarquable car combinant à la fois une construction romanesque et une efficacité de narration, essentielles dans l'établissement de toute bonne recette de roman réussi. Mais également, ce qui est plus rare, une révélation claire tant de la pensée que de la philosophie de vie de l'auteur et qui, elles aussi, sont très intéressantes.
Charles Dickens nous invite à réfléchir sur la destinée. Les deux personnages centraux du roman ont l'un et l'autre été placés à un moment de leur existence sous l'influence d'un protecteur. D'extraction humble et populaire, ces deux personnages se voient promis à la fortune financière et à l'élévation sociale.
Ce faisant, les deux personnages en question ne sont pas impliqués, ou fort peu, dans le projet de leur protecteur. Dit autrement, on décide à leur place de leur avenir et de ce qui sera bien ou pas pour eux.
Pour alléchantes que puissent être les « grandes espérances », conduisent-elles les bénéficiaires à s'épanouir et à tendre vers le bonheur tel qu'on pourrait être enclin à le penser ?
Outre ces deux personnages, un jeune garçon surnommé Pip et une jeune fille prénommée Estella, l'auteur nous dresse une série de portraits de personnages secondaires tous plus intéressants les uns que les autres.
Parmi ceux-là, trois figures masculines semblent ressortir en constituant pour Dickens l'archétype de l'exemple à suivre. Tout d'abord Joe, le forgeron qui a accompagné Pip dans toute son enfance. Ensuite Wemmick, le clerc d'un avocat en charge des intérêts de Pip et enfin Herbert, compagnon sensiblement du même âge que Pip et qui lui sert de guide dans la vie londonienne.
Ces trois personnages mènent une vie humble, ont des rêves modestes et accessibles et savent se montrer judicieux dans le choix de leurs épouses. Raisonnables, la tête sur les épaules, pas intéressées par l'argent et accessoirement belles mais ce n'est jamais la priorité, les qualités humaines devant constituer l'essentiel de la dot.
Seul Joe semble avoir commis une petite erreur en s'appariant dans sa jeunesse à une femme dont la principale qualité était sa beauté physique.
Parallèlement, une kyrielle de personnages intéressés fourmillent autour de ces trois figures et sont copieusement égratignées par l'auteur.
Une autre figure est à distinguer, celle de l'avocat Jaggers, qui symbolise selon moi l'ambition mais pas la cupidité. Dickens le présente comme quelqu'un d'éminemment compétent dans son domaine, respecté et/ou redouté (l'un entraînant probablement l'autre) qui est l'exemple type de la réussite professionnelle, mais qui a une vie privée aussi aride que les comptes-rendus d'audience et qui ne saurait donc être un parangon d'être accompli.
Pip, quant à lui, bien qu'intimement persuadé qu'il commette une profonde erreur n'arrive pas à se défaire de l'amour qu'il porte à une jeune fille remarquablement belle et dont la beauté, semble la principale qualité.
Nous cheminons dans ce parcours initiatique du jeune Pip tel que pourrait le faire un Candide qui, volant de déroute en déconvenue, apprend à aimer sa Cunégonde pour ce qu'elle est intrinsèquement et plus nécessairement pour sa beauté, élément qui était déterminant pourtant au départ.
L'auteur s'appesantit également sur le tragique destin du protecteur, quel qu'il soit, qui s'expose à être déçu de l'évolution du protégé, qui ne répond pas toujours exactement aux espérances qui étaient fondées sur lui. On pourrait rajouter qu'il en va de même pour le protégé qui espérait certainement un protecteur tout autre. En ce sens, il y a probablement quelque chose de l'ordre de la relation parents/enfants qu'essaie de nous faire percevoir Charles Dickens. Ô vous, chers parents, de par les siècles et de par le monde, vous avez toujours fondé des espoirs sur votre descendance. Tous ces beaux héritages, toutes ces belles situations, tous ces beaux mariages, toutes ces belles écoles, tous ces beaux métiers, vous vous souvenez ? Est-ce que vos soins attentifs et attendris prendront part dans l'éventuel bonheur ou malheur de votre enfant ? Vous sera-t-il reconnaissant d'avoir choisi pour lui l'orientation de sa vie ? Répondra-t-il à vos attentes les plus profondes ? À quoi vous exposez-vous en agissant de la sorte ?
C'est donc un magistral édifice que nous a construit Charles Dickens, que je vous conseille tant pour l'humour qu'il ne manque jamais de distiller à droite à gauche dans ses pages, que pour le plaisir de se laisser embarquer dans la narration, que pour sa portée philosophique, psychologique et sociologique. Au fil du roman, il nous fait l'éloge des gens simples qui savent avoir des ambitions raisonnables, qui mettent en oeuvre quelques principes comme la fidélité en amitié ou la droiture morale et qui comptent sur leur propre travail pour se créer un petit paradis, tout petit, à leur image, mais bien à eux.
En manière de conclusion je vous dirais : Ô vous tous qui avez de grandes espérances ; souvenez-vous du message de Dickens et des Gladiators réunis : a good friend is better than pocket money. (Qu'on pourrait transcrire grossièrement en français doctrinal sous la forme : « un ami véritable vaut plus que tout l'argent du monde. » et en langage reggae comme quelque chose du genre : « Yeah man ! à Babylone, avoir un bon pote c'est peut être pas le zion, mais c'est quand même mieux que d'avoir seulement son pèze à qui parler. »)
Mais comme toujours, pour les traductions hautement fidèles comme pour le reste, ceci n'est que mon avis, c'est-à-dire, pas grand-chose.

P. S. : la traduction de Charles Bernard-Derosne revue par Jean-Pierre Naugrette pour le Livre de Poche est excellente, certaines autres semblent de plus piètre aloi.
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Oh comme il va me marquer pour longtemps, ce très beau, ce très grand «De Grandes espérances» de Charles Dickens.

Les personnages, d'abord, sont multiples et c'est incroyable de découvrir que tous, absolument tous, ont un rôle primordial dans l'histoire. S'il y en a un qui nous semble bien banal et de peu d'importance à priori, on découvre quelques chapitres plus tard qu'il est un pilier de l'histoire. Ça, c'est vraiment quelque chose que j'apprécie, et que, je dois l'admettre, je retrouve dans peu de livre.
Pour ma part, s'il fallait mettre en lumière l'un d'entre eux, et l'élire comme personnage favori - en excluant le narrateur, Pip, qui est devenu comme mon frère et qui, s'il devait entrer dans la compétition, relèguerait d'emblée bien derrière lui tous les autres - je dois avouer que je n'ai pas su résister au charme du tendre et fidèle Joe, « le meilleur ami du monde » de Pip avec lequel « il s'amuse royalement », et personne n'a su le détrôner - même si je dois reconnaître qu'Herbert est adorable et attachant, lui aussi. Ce qui est frappant avec ce trio de personnages, c'est leur humilité et les valeurs (notamment celles d'amitié) qui les lient les uns aux autres, et qui nous éblouissent… Et l'on comprend que l'amitié c'est tellement moins superficiel, tellement plus grand que ce que l'on s'imagine…
L'intrigue est pour moi parfaite, tant au niveau de la narration que d'un point de vue romanesque. Outre le fait que la lecture soit (sur)prenante et fluide – un vrai plaisir-, les réflexions, notamment sur la destinée - qu'elle soit modelée par le hasard d'une rencontre, imaginée et contrôlée par autrui, l'auteur nous montre qu'elle nous échappe et nous échappera toujours quoi que l'on fasse – sont absolument et divinement exquises.
L'écriture poétique de Dickens est un délice absolu, il manie l'humour et le tragique à merveille. L'auteur nous propose d'ailleurs deux fins, ce qui est assez original également.

Pour conclure, j'aimerai juste dire que l'idée la plus forte du livre – et celle que j'en garderai incontestablement – est celle de la désillusion, mais pas du désespoir. D'ailleurs, même si tout ne se termine pas comme on l'aurait présagé et que beaucoup d'espérances ne se sont pas transformés en faits, le livre s'achève tout de même sur des espoirs, des nouveaux. Et puis, après tout, toute la beauté d'une espérance, n'est-ce pas qu'elle le reste éternellement ?

Incontestablement un livre que vous devez laisser vous éblouir et vous submerger.
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Ce livre est à la hauteur de toutes mes espérances, et même au-delà. Je ne sais comment débuter cette critique sur un roman qui me marquera à jamais...Mais commençons par l'histoire, Philip Pirrip, qui s'est attribué le prénom de Pip vit une existence modeste auprès de sa soeur Mme Gargery et de l'époux de celle-ci, Joe. Toutefois, le jeune garçon mène une vie malheureuse, sans cesse battu par sa soeur qui "l'élève à la cuiller" ; seul Joe l'aime comme son propre fils et le défend tant bien que mal...Pip est également maltraité par les amis de sa soeur, tels M.Pumblechook, M.et Mme Hubble et M.Wopsle. le début du roman, à savoir, le premier chapitre, le met en scène alors qu'il se promène au cimetière et se fait interpeller par un forçat dont on ignore le nom mais qui sera déterminant dans le reste de l'existence de Pip...

Au fil du récit, Pip grandit, fait de nouvelles rencontres avec Mlle Havisham et Estella à Satis House, ce même lieu qui verra pour la première fois les espérances de Philip.

L'intrigue même de l'histoire débute au moment où Pip, destiné à reprendre la forge de Joe, est l'objet d'un évènement singulier : un héritage qui changera sa vie, ses habitudes, ses relations et surtout ses sentiments...

Tant de personnages plus ou moins importants se croisent que je ne peux pas tous les citer ! J'aimerai particulièrement évoquer Herbert, "le pâle jeune gentleman", personnage au grand coeur, dévoué et fidèle à Pip ; M.Jaggers et M.Wemmick, si sérieux mais tellement attentionnés ; Abel Magwitch, LE personnage incontournable de ce roman ; Biddy, cette jeune femme amie de Pip, qui fournit à Joe l'aide nécessaire pour apprendre à lire et écrire...La majorité des protagonistes auxquels je me suis attachée sont entrés dans ma vie comme si je les connaissais réellement et les rencontrais à longueur de journée !
Et, pour ne rien oublier concernant les personnages, un point sur Pip : jeune homme qui est pour moi, le plus méritant, le plus touchant, le plus modeste, et le plus généreux des narrateurs masculins que j'ai suivis...Proche de la perfection...

Charles Dickens est un auteur que je viens de découvrir, à travers "De Grandes Espérances", et je dois dire que je ne suis pas prête de le laisser tomber ! Son écriture est la plus fluide que j'ai jamais lue, avec un style si envoûtant pour ne pas dire délicieux, et dont chaque mot est un petit plaisir que l'on dévore patiemment...Un brillant écrivain que je considère comme l'un de mes préférés. Il décrit si bien la misère humaine et les sentiments incontestablement généreux des plus pauvres, cet écrivain engagé au coeur d'or !

Ainsi, je ne peux que conseiller ce roman à tout lecteur avide de lecture, qui n'a pas encore vécu d'expérience saisissante, et qui veut découvrir une oeuvre majeure de la littérature. Lisez- le si ce n'est déjà fait ! Ou plutôt, dévorez-le !
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Classique et monumental: voilà les principaux adjectifs que m'inspire la lecture de ce roman, retraduit dernièrement par Jean-Jacques Greif pour les éditions Tristram. Il y a tout ce que l'on peut attendre d'une oeuvre romanesque : l'histoire d'amour, l'aventure, le mystère, les rebondissements, la comédie sociale, la nostalgie et des ambiances très marquées.

Dickens, avec le talent qui le distingue dans l'écriture et la caractérisation des personnages, raconte l'histoire de Pip, un jeune orphelin qui vit avec sa soeur et son mari Joe dans un village du Kent. Elevé à la dure, destiné à devenir forgeron, le jeune Pip devient garçon de compagnie d'une vieille aristocrate, capricieuse et étrange, habitant au village. Abandonnée autrefois le jour de ses noces, sa vie s'est figée tout comme sa maison qui n'est que poussière et toiles d'araignée. Elle a adopté la jeune Estella pour en faire l'instrument de sa vengeance contre les hommes. Pip tombe amoureux d'Estella mais se rend bien compte du fossé social et culturel qui les sépare. Il rêve de devenir un gentleman, un lettré, lui dont les manières sont celles d'un rustre.
Le miracle se produit lorsqu'un mystérieux bienfaiteur finance l'installation de Pip à Londres et son ascension sociale. Et alors que l'ombre d'un forçat évadé plane sur son destin, Pip court vers des mirages.

C'est l'exemple même du roman d'apprentissage. On suit le cheminement de Pip vers l'âge adulte alors qu'il fait l'expérience des grands événements de l'existence. de son enfance où il rêve de s'élever socialement, en passant par sa jeunesse insouciante à Londres, jusqu'à la désillusion quand il découvre la source de sa fortune et sa lente prise de conscience sur sa vanité et ses fausses valeurs.

L'auteur brasse une multitude de thèmes universels: l'exclusion, les inégalités, le désir, la culpabilité, la jalousie, l'argent et c'est bien ce qui fait de ce roman une oeuvre intemporelle. Il s'en dégage une profonde humanité car Dickens ne juge jamais les grandeurs et les faiblesses de l'Homme.

L'écriture est bien sûr irréprochable et la traduction restitue à merveille la diversité des langages selon les classes sociales ainsi que les touches d'humour qui parsème ce roman pourtant bien sombre.

« De Grandes Espérances » est le roman des illusions perdues et des espoirs envolés mais c'est surtout un roman inoubliable avec des scènes d'anthologie. L'occasion de redécouvrir en quoi consiste l'art de l'intrigue et l'art de la narration.
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Après avoir refermé ce roman de @Charles Dickens, je comprends mieux pourquoi il est l'un des romanciers préférés de anglais. J'avais lu et apprécié @David Copperfield et @Oliver Twist en étant adolescent, mais j'avoue en garder un souvenir diffus ce qui est déjà en soi remarquable car c'était il y très, très longtemps.

Le roman se découpe en deux parties.
Dans la première, nous faisons connaissance avec le narrateur Pip, un orphelin de sept ans, tyrannisé par sa soeur, elle-même mariée à Joe, le forgeron, l'ami fidèle de Pip, celui qui atténue la pauvre vie du petit garçon. Pip se rend un soir au cimetière sur la tombe de sa mère lorsqu'il rencontre un forçat évadé qu'il va aider, contraint et forcé, à se débarrasser de ses chaines. Quelques mois plus tard, Pip est envoyé chez une riche voisine pour le moins bizarre, Miss Havisham, qui veut voir jouer un petit garçon. Lors de cette rencontre il fait la connaissance d'Estella, la fille adoptive de Miss Havisham dont il tombe éperdument amoureux. Il fera de nombreuses visites chez Miss Havisham.
Pleine de rebondissements et illuminé par la qualité d'écriture et de narration de @Charles Dickens, c'est la partie que j'ai préféré. J'aurais sans doute versé plus d'une fois une larme sur le sort du pauvre Pip sans l'humour omniprésent délivré par l'auteur. A la fin de cette partie, alors que Pip est devenu entretemps un apprenti forgeron insatisfait de son sort, un mystérieux homme de loi londonien vient lui annoncer qu'une personne désirant garder l'anonymat offre la possibilité à Pip de recevoir une éducation propre à faire de lui un gentleman. C'est le début des grandes espérances.

La deuxième partie commence avec l'arrivée de Pip à Londres, il reçoit une rente régulière qu'il dépense à tort et à travers avec son ami Herbert qu'il avait rencontré chez Miss Havisham. Les dettes s'accumulent et sans la visite de son ami Joe et les conseils avisés de Wemmick, le clerc de l'avocat en charge des intérêts de Pip, il est probable que ses grandes espérances eurent fait long feu. On retrouve ici le thème très en vogue au XIXe siècle notamment chez @Balzac du provincial qui débarque à la capitale et qui s'y brule les ailes. Mais la comparaison s'arrête là car @Dickens reste concentré sur son personnage et son histoire et n'émet pas de critique sociale de la bourgeoisie londonienne. Les descriptions des quartiers de Londres laissent bien imaginer ce que devait être la vie au bord de la Tamise avant de devenir les quartiers branchés ou des affaires d'aujourd'hui.
Qu'adviendra-t-il des rêves de grandeur de Pip ? épousera-t-il Estella ? Deviendra-t-il un gentleman ? C'est ce que je m'attendais à découvrir dans cette partie et si la réponse nous est donnée finalement ce n'est pas avant que @Dickens mette un grand coup de pied dans la fourmilière avec un rebondissement qui rebat toutes les cartes.
Roman social, roman d'apprentissage, roman d'aventures ou policier, parfois roman gothique. @De grandes espérances c'est un peu de tout cela à la fois. le style est poétique, la narration dynamique et efficace. Chaque personnage a un rôle essentiel dans la construction du roman. Un pur régal ! La grande leçon du roman est apportée par Joe, le forgeron analphabète, qui prouve qu'il vaut mieux une vie simple et heureuse que des rêves de grandeur.

Challenge Multi-défis
Challenge pavé
Challenge XIXème siècle
Challenge BBC
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Comment critiquer un tel roman ? Sans dévoiler l'intrigue qui plus est... Pour commencer, une note pour moi-même (qui peut servir à d'autres aussi) : préface = spoilface ! Ne plus lire la préface avant l'oeuvre elle-même, elle m'a gâché l'intrigue mais heureusement, pas la lecture !
Cela faisait des années que je voulais lire un Dickens et CE Dickens. le titre me fascinait je crois : Les grandes espérances, qu'est-ce que cela pouvait être ? Une grande histoire d'amour ? Une quête initiatique ? L'histoire d'une ascension sociale ? Une chasse au trésor ? Eh bien ce roman est tout ça à la fois ! Quête d'identité, questionnement sur la valeur d'un homme, espérances et désillusions de la vie...
Passés les premiers chapitres où il faut quand même s'habituer au vocabulaire, aux tournures de phrases et aux moeurs de l'époque dont on n'a pas l'habitude, je me suis retrouvée happée par ce roman. L'intrigue est simple et complexe à la fois, faite de révélations et de coups de théâtre. On y rencontre bon nombre de personnages hauts en couleur voire "barrés", le seul qui paraît "normal" est le jeune héros Pip que l'on voit grandir et essayer de trouver sa place dans le monde qui l'entoure. Ce roman est aussi truffé d'humour pour critiquer de manière acerbe la bonne société anglaise, celle qui pond des gentlemen promus pour leur rang et non pour leur mérite.
Je recommande chaudement la lecture de cette oeuvre et j'ai hâte d'en lire d'autres du même auteur.
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Qui dit qu'on ne définit jamais un terme, un concept, par un exemple ? Un maître d'école ? Un rédacteur de dictionnaire ? Un précepteur ? Toutes gens utiles, certes, et parfois même illustres mais qui ne sont pas, ne peuvent être, appuyées sur semblables principes, en même temps, écrivains.
Qu'est-ce donc que ces grandes espérances ? La réponse ne tient pas en une ligne pas plus qu'en mille. Il faut le talent d'un conteur de génie pour les donner à voir, à sentir, à vivre et puis saisir qu'elles ne peuvent être que de « fausses espérances ». Il faut, pour bien les appréhender, emboîter le pas d'un Pip, marcher à ses côtés, compter ses péripéties, le voir grandir, imaginer, aimer, le regarder progresser dans ses grandes errances, se gonfler de ses grandes prétentions, rire ou s'irriter de ses grandes illusions, tout ce qu'il faut de grand à l'impétrant gentleman. Ce devenant, transformé mais trompé, adoubé mais aliéné, reconnu mais oublieux (de ses amitiés passées, de ses amoures possibles, des solidarités), devant le naufrage d'une belle humanité, on pense lui crier : "quand donc vas-tu cesser ?" ; "Ne vois-tu donc rien ?" ; "À quel point tu t'égares ?"... "Ceci n'est pas Pip !" ; "Où est-il passé, qu'est-il devenu, l'enfant qui était tout sans rien avoir en poche ?".
Mais quel jeune homme apprend en suivant des conseils ? Il lui faut, par lui-même, se dresser sur ses pieds et apprendre à s'y tenir. Mieux : à y rester. Car les grandes espérances, celles que l'on érige pour soi seul, piédestaux, tribunes, ou tout échafaudage qu'on dresse pour se percher par-dessus l'autre, ne mènent qu'a des sommets de solitude, ne sont que victoires trompeuses : des faîtes en trompe-l'oeil, des cimes abyssales.
Il n'y a d'autre vérité derrière les apparences que celle d'une affirmation de soi par le dépassement de l'autre. Or, c'est être vrai qu'il faut. Et « un homme qui n'est pas vraiment gentleman par le coeur, n'a jamais été, depuis que le monde existe, un vrai gentleman par les manières ».
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Ce roman raconte l'histoire de Pip, un orphelin, qui a été recueilli par sa soeur tyrannique et son beau-frère Joe, un forgeron qui est le modèle moral à suivre, loyal, honnête et gentil.
La rencontre dans les marais d'un prisonnier échappé d'un bateau-prison et l'aide que Pip va lui apporter changera sa vie.
Ce roman est une représentation très fidèle de la vie anglaise du XIXème siècle, des références aux lieux, prisons, déportations en Australie, pauvreté omniprésente, le travail des enfants, …
Je pense que le personnage de Miss Havisham est juste inoubliable : la pauvre femme devenue quasiment folle, en robe de mariée défraichie, assise près la table toujours couverte de victuailles pour son mariage qui n'a jamais eu lieu, pleine de haine et de ressentiment, élevant la jeune Estella, une enfant abandonnée, dans l'unique but de faire souffrir les hommes …
Pip tombe bien sûr amoureux de cette beauté froide et inaccessible, qui lui fait tellement sentir son infériorité d'éducation, de manières et d'argent.
C'est un très beau roman d'apprentissage pour Pip, qui apprendra l'importance de l'amitié et la gratitude.
En le lisant, notez bien les chapitres très courts, la densité des événements, les détails physiques marquants sur les personnages … ce roman fut publié par partie dans un hebdomadaire ! Il fallait bien fidéliser les lecteurs !
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Ça fait un bien fou de retrouver la plume de Dickens après tant de temps sans lire cet auteur !

Il est vrai que les histoires de Dickens ne sont pas les romans les plus joyeux de la littérature anglaise, ne serait-ce que parce que le romancier traite toujours de sujets assez difficiles. Mais malgré cela, j'ai toujours trouvé un petit quelque chose d'optimiste et de léger dans sa façon d'écrire. Je ne saurais pas vous expliquer ce que j'entends par là (c'est plus une sensation ressentie à la lecture que l'identification de passages précis), mais cette sensation est bien là : tout n'est pas désespéré et il reste toujours une lueur d'espoir.

C'est le cas dans les aventures de Pip. Si la vie du jeune orphelin commence très mal, son évolution est assez spectaculaire, puisque ses "grandes espérances" se réalisent lorsqu'un mystérieux tuteur décide de le prendre en charge et de lui donner une éducation de gentleman.
Pip est persuadé que le "tuteur" est en réalité la vieille Miss Havisham, qui a eu quelques bontés pour lui lorsqu'il était petit.

Bien entendu, cela reste du Dickens et, par moments, le récit est assez moralisateur, notamment lorsque l'auteur nous parle des défauts de Pip : le jeune homme que Pip est devenu est dépensier, ingrat (il oublie totalement Joe, son beau-frère et, même s'il retourne dans sa contrée d'origine, c'est uniquement pour rendre visite à Miss Havisham et à Estelle, et non à la forge dans laquelle il a grandi), un peu fainéant aussi. Mais tous ces défauts seront, bien entendus, punis au moment où Pip s'y attend le moins. Et le jeune homme va s'amender, regretter sa mauvaise conduite et demander pardon à tous ceux qu'il a lésés.
Les bons sentiments affluent, donc (surtout à la fin du récit), mais ce n'est pas désagréable pour autant. le roman est bien écrit (forcément, c'est Dickens !) et se lit avec grand plaisir.
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En Angleterre , au début du dix-neuvième siècle, dans le Kent, Philip Pirrip, dit Pip, est "élevé à la main" par son acariâtre soeur aînée. Celle-ci est mariée à un forgeron au grand coeur. La vie de Pip semble toute tracée mais voilà que notre héros rencontre deux forçats en difficulté puis une vieille fille aisée, miss Havisham. Celle-ci s'occupe d'une belle jeune fille qu'elle a adoptée, Estella. le naïf Pip tombe follement amoureux de l'implacable jeune fille mais cet amour sans issu est mis en berne quand, recevant beaucoup d'argent d'un mystérieux bienfaiteur, il est amené à vivre à Londres. Là, il songe d'abord à s'assurer une position qui répondrait aux grandes espérances qu'il portait en lui, mais bientôt il se laisse vivre. Il lui faudra vivre bien des aventures et toucher le fond pour enfin devenir une jeune homme stable qui a su tirer la leçon de ses dérives et de celles des autres...

Quel roman extraordinaire et quelle jubilation à le lire ! J'ai adoré les portraits que Dickens fait de son jeune héros, du noble forgeron, des deux bagnards, de Herbert, l'ami de coeur et de ces deux femmes ambiguës qui changent la destinée du héros. J'ai adoré également l'apparition et la disparition de personnages clé comme les deux forçats et la façon dont s'éclairent soudain les liens entre les personnages.
Un vrai grand roman d'apprentissage, plein de tours et de détours, empli d'humour, de douceur et de théâtralité.
Un très grand écrivain dont il convient de signaler la sagacité et la maestria...

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