Un simple "oh..." n'est pas banal. Selon l'interlocuteur, il est un "Oh félicitations!" joyeux, un "Oh pardon!" cynique, un "Oh s'il te plait!" coléreux, un "Oh eh bien, excuse-moi" gêné, un "Oh mais non" emprunté, un "Oh vraiment"admiratif, un "Oh dis-je.." choqué ou un simple "oh.." qui feint l'outrage, hypocrite, mais n'en pense pas moins...
Philippe Djian, avec son talent inimitable, analyse les comportements les plus inavouables, ouvre différentes bouches en coeur d'adultes en âge de déraison.Dans "oh..", comme dans
Lent dehors, les rapports de couple sont abordés: Richard le mari, faible, séparé de sa femme Michèle, mais toujours proche est un "mauvais scénariste", alors qu'elle froide femme de tête, manipulatrice, associée avec sa meilleure amie Anna est productrice de films.
Comme dans
Frictions, Michèle est une mère abusive, qui se mêle des problèmes de son fils Vincent faible aussi, juste bon à travailler au
Mac Do.
Et nous retrouvons surtout l'atmosphère névrosée, déjantée, empreinte de violence, chère à
Philippe Djian (mots crus en moins, juste quelques rares "putain" ouf! ) car tout va tourner autour du viol de Michèle qu'elle prend avec une dose de sang froid surprenante.
Philippe Djian navigue, par petites touches perfides, avec maîtrise et tout en finesse, dans cet univers aisé dans lequel tout est contrôlé par Michèle la narratrice, dont le père a été surnommé "le monstre d'Aquitaine", la mère est une dévergondée avec laquelle elle entretient des "relations nauséeuses", l'ex-mari à la jeune maitresse qui accourt dés qu'elle le siffle, Robert le mari de sa meilleure amie qu'elle se tape, le voisin Patrick homme athlétique pas si athlétique que ça...
Bref, les frissons parcourent l'
échine du lecteur qui pénètre avec curiosité dans la boite noire de chacun et dans le suspense ambiant pour ne plus lâcher ce roman palpitant.
Autant le dernier Nothomb (pour moi) sonnait creux, autant ici les personnages sont psychologiquement palpables et font vrais.
Et cette Michèle...on se dit "oh.." .....A quand le film car j'y verrais comme pour
37,2 ° le matin un excellent scénario! Et l'écriture imagée ( "ses paroles ont un goût de sang", "un jet de vapeur fuse de ses oreilles"..) Bravo!