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sur 1174 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le reflet du temps qui passe.

30 ans de moins et sans argent, l'homme qui consume de passion la narratrice se fait révélateur de son propre désir et de ses manières bourgeoises. Devant l'inconvenance sociale de cette union, elle redevient la fille scandaleuse fière de son genre et de sa classe. Une ode à la puissance de la conscience sociale. 

40 pages à peine, avec une police d'écriture large, mais non moins essentiel. Ce n'est pas la longueur d'un texte qui importe selon moi, mais ce qu'il peut dire ou fait surgir à sa lecture. Un texte court qui parle de sujets que de nombreux longs romans n'abordent jamais : la conscience de classe et la
condition d'être une transfuge qui refuse d'oublier ses origines sociales ; le scandale encore et toujours d'être une femme libre aux yeux de certains hommes et d'autres femmes.

Dans ses yeux se reflète sa jeunesse qui n'est plus, physiquement bien sûr, aussi socialement. Il est
étudiant quand elle est devenue professeure et écrivaine reconnue. Avec lui, elle est de nouveau cette jeune femme que d'aucuns trouvaient effrontée portant des robes courtes sur les plages normandes, mais elle n'a plus honte désormais d'être libre en tenant la main d'un garçon de trente ans de moins qu'elle.

Encore une fois, avec le Jeune homme, Annie Ernaux parle d'elle pour mieux parler de nous tous. Un texte bref et irradiant comme peut l'être une passion, celle d'être une femme ou un homme tout simplement.
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Un si petit livre signé Annie Ernaux, ça ne se refuse pas !
Après avoir lu Les armoires vides, La place, La honte, L'événement, Les années, le vrai lieu et Écrire la vie qui reprenait une grande partie de l'oeuvre de notre Prix Nobel de Littérature 2022, me voici avec le jeune homme, ouvrage qui permet de comprendre un peu mieux son autrice.
Alors, je me suis plongé dans la lecture : le jeune homme et ses 37 pages dans lesquelles Annie Ernaux, avec sa franchise habituelle et son écriture épurée, se confie.
Ce jeune homme, étudiant, a trente ans de moins qu'elle et c'est lui qui est demandeur. Alors, pourquoi pas ?
C'est à Rouen où Annie Ernaux a fait ses études supérieures, qu'ils font l'amour et se découvrent. Surtout, elle ne voit pas pourquoi elle se refuserait ce que certains hommes vivent sans vergogne.
Pour elle, c'est un vrai bain de jouvence. Elle a 54 ans, est ménopausée et il lui témoigne une grande ferveur, se montre d'une jalousie extrême. Elle s'amuse des regards au restaurant, ceux des autres hommes mais surtout des femmes de son âge et se voit même draguée par d'autres jeunes hommes.
J'ai souri en lisant cette expérience initiatique et apprécié la formule comparant le présent à un passé dupliqué. J'ai été un peu sceptique quand elle parle de pauvreté du jeune homme puis raconte leurs voyages à Venise, Madrid, Capri et même Fécamp ! Annie Ernaux assure !
Moins drôle mais tout aussi évocateur de l'oeuvre de l'écrivaine, l'évocation de son avortement clandestin relie le jeune homme à ses livres précédents et permet de mieux les comprendre.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Quand « Lire au lit » lit debout… Ah, ah, approchez que je vous raconte ma petite mésaventure. le ridicule ne tue pas paraît-il… Samedi matin, je vais faire mes courses (j'ai une vie passionnante...) Quatre (grands) gosses = caddie, panier, sacs… Bref. Avant d'entrer dans le supermarché (avais-je déjà une petite idée en tête ?), j'oblique vers l'Espace Culturel. le bouquin d'Annie Ernaux est là. Je l'ouvre et commence à le lire. Debout. le problème avec un bouquin aussi court, c'est que quand t'as commencé à le lire, tu l'as déjà fini. 27 pages de texte, c'est vite lu...
Je le repose, l'air détaché, reprends mon caddie et commence à arpenter les rayons. Alors, elle rencontre un gars de 30 ans de moins qu'elle. Bon, on en a vu d'autres. (Cela dit, l'essentiel du texte ayant été écrit il y a plus de vingt ans, le sujet était peut-être à l'époque un peu tabou...) La suite est classique : l'impression de revivre sa jeunesse, de se voir donc comme elle était avant, la différence de statut social… Et puis, le regard des autres, le temps qui passe, le corps qui vieillit, la mort etc etc... Bien analysé, écriture au couteau… du Ernaux pur jus.
J'avais préféré « Passion simple » mais pourquoi pas... Tiens un poulet pour demain, c'est pas mal. Un poulet ou une pintade ? Un truc me turlupine quand même. Je ne sais pas quoi. J'ai l'impression que je suis passée à côté d'une chose importante… Merde, j'aurais dû acheter le bouquin… Céréales, baguette… Je retournerais bien dans l'Espace Culturel relire deux trois phrases mais bon, pas le temps… Des bananes. Qu'est-ce qu'il m'a demandé Antoine déjà ? Des cordons bleus ? Est-ce qu'elle ne dit pas, à un moment, que dans cette relation, elle est un personnage de fiction ? J'ai bien lu ça ou j'invente ? Je regarde les compotes et là, je comprends, je me dis, attends, en fait, c'est énorme ce qui se passe dans ce bouquin, énorme. L'essentiel, ce n'est pas du tout le jeune homme, évidemment, mais l'écriture. Oui, elle parle de la littérature là. Je ne me souviens plus… qu'est-ce qu'elle emploie comme termes exactement ?
Je rentre. Je raconte. Les gamins ricanent : tu pouvais pas te l'acheter ton bouquin, hein, pas plus cher qu'un paquet de clopes. Allez les mioches, il n'y a pas de petites économies et puis, je l'avais déjà lu… Je repense à ce truc qui me turlupine. Je rumine, tourne en rond. Je n'ai pas de librairie en bas de chez moi, faut que je reprenne la voiture, fasse vingt bornes... Je raconte à une amie, une vraie, qui me dit : bouge pas, j'y vais, non je l'ai lu, j'y vais je te dis, bah si tu veux...
Elle revient, je le lis, il est à moi, je le relis, crayonne, retourne en arrière, vérifie. C'est ça et c'est effectivement ÉNORME. Parce que ce qu'elle nous dit, c'est non seulement que sa vie est littérature mais là, on se demande si ça ne va pas plus loin et si cette relation n'a pas été entamée précisément POUR ÊTRE ÉCRITE. Ce qui signifie qu'au moment même où elle était vécue, elle devenait matière littéraire. En fait, chez Ernaux, la vie EST littérature et n'a de sens que si et seulement si elle devient littérature, se transforme en objet littéraire. Et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la vie mérite d'être vécue : pour être écrite. Sinon, autant mourir. La vie ne doit servir qu'à être écrite. « C'est peut-être ce désir de déclencher l'écriture du livre… qui m'avait poussée à emmener A. chez moi. » Ici , tout se passe comme si Annie Ernaux « PROVOQUAIT » dans le réel un événement afin qu'il DONNE LIEU à une matière susceptible d'être à l'origine d'un texte.
Si j'osais, j'irais jusqu'à dire qu'elle vit cette relation PARCE QU'ELLE SAIT qu'elle va générer une matière littéraire.
Jusqu'à présent, elle se servait de son vécu pour écrire. Là, elle « amorce » (et prolongera aussi longtemps que nécessaire) ce qu'on appellera par commodité « l'action » dans le réel, d'où la présence simultanée des deux verbes dans cette citation : « … écrire/vivre un roman dont je construisais avec soin les épisodes.»
Et cette « construction » n'a pas lieu sur le papier, après les événements, mais AU MOMENT MÊME où l'autrice les vit. Annie Ernaux n'attend pas d'écrire pour lancer son récit, elle le fait naître avant, in real life, le déroule, s'observe, observe les autres EN TANT QUE PERSONNAGES LITTÉRAIRES (de fiction?) prêts à être embarqués pour un récit imminent. C'est pourquoi elle dit : «La principale raison que j'avais à vouloir continuer cette histoire, c'est… que j'en étais le personnage de fiction.» Ainsi, au moment même où elle vit les événements, elle agit en sachant qu'ils vont devenir objets d'écriture. D'ailleurs, la fin de l'écriture du livre coïncidera logiquement avec la fin de la relation.
(Je ne vous raconte même pas ce que ça doit impliquer comme regard distancié sur ce qu'on vit...)
Je suis stupéfaite. Je crois que chez aucun écrivain je n'ai senti une telle nécessité absolue d'écrire au point même de provoquer des événements parce qu'ils sont susceptibles de donner lieu à un texte.
C'est l'impression que j'avais eue en parcourant rapidement le livre, à savoir que, dans le fond, l'essentiel, ce n'était pas le jeune homme (ce qui explique d'ailleurs pourquoi le livre est court : c'est une histoire banale à notre époque… et finalement, il n'y a pas grand-chose à en dire.) Non, l'essentiel apparaît à mon avis dans cinq, six phrases et dans le sublime exergue : « Si je ne les écris pas, les choses ne sont pas allées jusqu'à leur terme, elles ont été seulement vécues. » Et ce qu'elle dit là est vertigineux. Et terrible : elle exprime l'espèce de fusion, de tissage, d'imbrication que sa vie entretient avec la littérature non seulement parce que ses textes se nourrissent de son existence mais aussi parce qu'ils influencent la trajectoire même de cette existence.
Et c'est précisément le cas ici parce qu'elle vit quelque chose qu'elle a déjà vécu lorsqu'elle était étudiante (fréquenter un jeune homme, aller au resto U, dormir sur un matelas par terre…) Interviewée pour le Magazine Littéraire, elle dit « Écrire ne se confond pas avec imaginer… Pour moi, écrire, c'est retrouver. » Or, finalement, ici, dans cette expérience précise, il ne lui est pas nécessaire de passer par l'écriture pour « retrouver », elle le fait déjà en le vivant. On comprend mieux alors son impression d'être une actrice et de « rejouer des scènes et des gestes qui avaient déjà eu lieu. » Ce que je veux dire, c'est qu'il me semble ici que « l'acte littéraire », le passage à « la création », « la fiction » a lieu avant même l'écriture. Je ne sais pas si l'on retrouvera cette posture particulière ailleurs, dans d'autres textes d'Annie Ernaux. (sauf peut-être dans l'épisode de la rencontre avec l'officier à Venise qui sera à l'origine du livre « Les Années » : « Parce que j'attends toujours de la vie qu'elle apporte une solution à mes problèmes d'écriture, il me semblait que cette rencontre sur le vaporetto m'avait d'un seul coup rapprochée du livre que je voulais entreprendre. »)
À la page p 23, l'autrice écrit : « Notre relation pouvait s'envisager sous l'angle du profit. » Il me semble que le principal profit que la romancière ait tiré de cette relation, ce n'est pas forcément le fait de revivre une seconde jeunesse mais celui de donner naissance à une matière fictionnelle. Elle dit d'ailleurs qu'elle a « conscience qu'envers ce jeune homme, cela impliquait une forme de cruauté. » Je veux bien la croire… Elle domine sur le plan matériel et culturel, tient les cordes, joue un rôle (celui de la fille qu'elle était autrefois), sait que tout ça ne débouchera sur rien sinon une séparation… et surtout… un texte.
Évidemment, on s'en remet d'être transformé à son insu en être de fiction mais j'aimerais mieux, moi, que ça ne m'arrive pas…
Allez, j'espère que leur histoire fut tout de même une belle histoire…
En tout cas, « Le jeune homme » me semble être un texte complètement essentiel sur le rapport d'Annie Ernaux à l'écriture.
Et je suis contente de l'avoir dans ma bib !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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C'est toujours un immense plaisir de découvrir un nouveau récit d'Annie Ernaux.

« Si je ne les écris pas, les choses ne sont pas allées jusqu'à leur terme, elles ont été seulement vécues », nous dit l'autrice dès la page de garde.
Nous sommes à Rouen, à la fin du 20ème siècle – Rouen, la ville qui a été celle de l'écrivain, qui a connu un avortement clandestin il y a bien longtemps. La narratrice accepte de rencontrer un jeune étudiant qui lui écrivait depuis un an et qui avait trente ans de moins qu'elle.

Ils nouent ce qu'on pourrait qualifier une relation sexuelle, une relation que la narratrice qualifie d'équitable : il lui donne du plaisir, il lui fait revivre ce qu'elle n'aurait jamais imaginé revivre, et elle lui évite un travail qui le rendrait moins disponible : « J'étais en position dominante et j'utilisais les armes d'une domination don, toutefois, je connaissais la fragilité dans une relation amoureuse » : le décor est planté.

Ils dorment dans l'appartement de l'étudiant, concoctent des repas sur une plaque électrique, vont parfois dans des café fréquentés par des jeunes. le couple présidentiel de 2017 n'est pas encore arrivé, et ce type de relation n'est pas du tout dans l'air du temps : « comment peux-tu sortir avec une femme ménopausée » ? pensent probablement les jeunes qu'ils croisent.

L'étudiant est pauvre. Il n'a pas encore accédé au niveau de vie qui est celui de la narratrice à ce moment-là, il est même un peu « plouc » selon elle : cela la replonge doublement dans sa propre jeunesse, pauvre et sans culture non plus, à ceci près qu'elle pensait s'en sortir en travaillant – « avoir un métier avait été la condition de ma liberté » - tandis que lui essaye d'esquiver le travail en profitant tout de même des droits que la société peut lui accorder.

Une sensation étrange nait dans l'esprit de la narratrice, qui se retrouve face à lui dans des gestes qu'elle avait autrefois : « Avec lui je parcourais tous les âges de la vie, ma vie. ». Sensation qui se poursuit lorsqu'elle parcourt des lieux qu'elle a fréquenté à Rouen, comme la cité universitaire encore visible et restée quasiment en l'état.

N'est-elle pas en quelque sorte le personnage de sa propre fiction ? On peut se le demander.

Lorsqu'il évoque le futur, elle fait preuve d'une forme de cruauté. Elle lui répond « le présent suffit », mais ils peuvent parler tout de même du temps où il sera marié, père d'un enfant et … loin d'elle.
Le regard que les autres portent sur eux est bien sûr jugeant, mais ils n'en ont cure, et cherchent même les couples semblables au leur : une forme de connivence s'enclenche aussitôt.

Il y a même de la revanche chez la narratrice à s'afficher ainsi avec lui, comme sur la jetée près de la mer à Fécamp, en écho à une scène sur le même lieu lorsqu'à 18 ans elle se promenait sous le regard furieux de sa mère parce que portant une robe trop moulante : la différence c'est qu'avec l'étudiant elle ne ressent plus la moindre honte, voire même un sentiment de victoire.

D'autres coïncidences troublantes émergent encore, notamment lorsque la narratrice regarde son amant manger, et pense à cet autre étudiant de qui elle est tombée enceinte : et on comprend que tout le récit de cette relation n'avait qu'une finalité : pouvoir entreprendre le récit de l'avortement clandestin qui s'en est suivi à Rouen – et de fait mettre un terme à la relation avec l'étudiant.

Trois ans après la fin de leur histoire, Annie Ernaux publiait « L'Evénement » en 2000 (qui a fait l'objet d'une adaptation au cinéma).

Il faut donc relier ce « Jeune homme » à l'ensemble de son oeuvre pour bien le comprendre. Je l'ai lu trois fois successivement pour en digérer le suc, et je me suis rappelée l'immense plaisir à lire « Les Années » que j'avais chroniqué il y a longtemps, mais aussi « Passion simple », « La place » ou « L'autre fille ».

Annie Ernaux est une très grande écrivaine, qui tient une place à part mais très importante dans la littérature française. On se ne lasse pas de la lire – je ne m'en lasse pas pour ma part. J'ai lu trois fois les 37 pages de ce « Jeune homme » et je pourrais recommencer encore sans problèmes.

Elle a une façon bien à elle de traiter du récit : il ne s'agit ni d'une confession, ni d'un aveu, mais de « sauver quelque chose du temps où on ne sera plus jamais » comme elle le dira dans « les Années ».
Elle a confié pourtant à François Busnel de la Grande Librairie se sentir un peu illégitime – pour moi sa légitimité dans la littérature française ne fait pas du tout débat.
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Dans ce court récit Annie Ernaux raconte la relation amoureuse qu'elle a vécue avec A, un jeune de 30 ans son cadet.
Le livre dit le rapport entre l'amour et l'écriture, l'écriture et la mémoire aussi, sujets principaux du livre, ils lui ont inspiré cet écrit.

L'auteure évoque la thématique du temps et de la mémoire comme si psychologiquement le temps n'existait pas, les actions se situant plutôt dans la permanence des choses, le temps est plus cyclique que linéaire.

Les souvenirs induits par la relation avec le jeune A donnent l'impression d'une répétition de choses déjà vécues et ressenties, trente ans plus tôt, rien de nouveau, on revient au point de départ.

A Ernaux utilise le terme de Palimpseste (un texte en cache un autre, plus ancien), ici c'est un événement actuel qui en révèle un autre, plus ancien. L'écriture permet de fixer les choses, de les mémoriser.

Par ce moyen l'auteure va au-delà du vécu, ce qui lui permet d'en garder une trace durable, une mémoire des choses vécues.

On retrouve dans le livre d'Annie Ernaux toujours cette thématique obsédante des souvenirs de jeunesse, comme dans presque tous ses livres, de ses origines populaires, tout comme son désir d'ascension sociale, la lutte des classes.

Plus prosaïquement l'auteure évoque le regard forcément accusateur des autres sur ce couple dépareillé, aux yeux de la société, qui pourtant s'initient l'un l'autre, selon l'auteure, chacun apporte quelque chose à l'autre sans distinction d'âge.

Le récit entremêle l'écriture, l'amour et la mémoire pour le plaisir du lecteur.


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La Grande Dame nous percute
avec ce récit sensible et sincère.
Qu'un tout jeune homme soit amoureux
d'Annie, quelle évidence!
Tout est là ! le désir, la liberté ,
le plaisir, les différences qui rassemblent.
Tout est dit,.. par petites touches.
Elle, la bourge, intello, ménopausée,
puise dans sa jeunesse une vitalité grisante.
Lui, fauché, timide, amoureux comme un fou
exsude l'ardeur de la jeunesse.
Ce qui devrait les opposer, les réunit .
Encore une fois, Ernaux témoigne
avec courage, et liberté !
Cette histoire la renvoie à son histoire.
Elle exorcise les tabous en tous genres.
Elle vit, elle écrit, l'intellectuelle se sait femme.
Elle offre à tous une parole libératrice
des carcans sociétaux.

Merci Madame !

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Chaque mot est posé, soigneusement pesé. Il se dégage cependant de chaque phrase une intense émotion.

Ce Jeune homme est un étudiant, cadet de trente de l'auteur. Il pourrait être son fils. Cette relation crée un incessant va et vient entre le passé, l'époque où elle était étudiante, et le présent, comme par exemple lorsqu'elle se sent jugée et n'en a que fi lorsque la société la voit comme une mère incestueuse. Elle se joue d'ailleurs assez joyeusement du regard des autres.

Annie Ernaux ausculte une nouvelle fois la création littéraire, sa propre vie étant le matériau essentiel de son oeuvre. Ses interrogations sont tout à la fois impudiques et universelles.

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Comment aller à l'essentiel ?
Annie Ernaux, que je lis pour la première fois, nous relate en même pas 40 pages la relation "amoureuse" (ou pas) qu'elle a entretenue avec un jeune homme de 30 ans son cadet.
Une relation qu'elle a vécue intensément, une relation qui l'a rajeunie de 30 ans, une relation qui lui a rappelé différents moments de sa vie passée, un peu comme si elle les revivait, une expérience qui sort du commun. Elle quitte de son corps en regardant celui de son amant, elle s'imagine dans celui de la jeune fille, puis la jeune femme qu'elle a été et qu'elle est encore dans sa tête.
Un bien beau texte qui, bien que très court, en dit long sur cette relation. C'est très bien écrit, et l'essentiel est dit avec des mots justes !
En écrivant cette courte chronique, j'espère, moi aussi, être allée à l'essentiel !
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« Si je ne les écris pas, les choses ne sont pas allées jusqu'à leur terme, elles ont été simplement vécues. » Cette phrase est en exergue de ce très court récit autobiographique. Quelques pages qui racontent une relation intense mais hors norme, que ça soit lors de son déroulement en 1999, ou encore aujourd'hui : une histoire d'amour entre une femme de cinquante- quatre ans et un étudiant de trente ans son cadet…

« J'espérais que la fin de l'attente la plus violente qui soit, celle de jouir, me fasse éprouver la certitude qu'il n'y avait pas de jouissance supérieure à l'écriture d'un livre. » Pour Annie Ernaux, l'amour et les mots sont intimement liés, et cela depuis son plus jeune âge. Ce court texte n'échappe pas à la règle, voguant entre l'un et les autres.

« Il me vouait une ferveur dont, à cinquante- quatre ans, je n'avais jamais été l'objet de la part d'un amant. » Et malgré les regards en biais qui suivent le couple, on ne peut que se rendre compte de la véracité de l'adage : « l'amour n'a pas d'âge ». Alors pourquoi accepte- t- on qu'un homme soit en couple avec une femme de trente ou vingt ans de moins que lui, alors que, lorsque c'est la femme qui est l'aînée du couple, on ne croit pas une seconde à la véracité de leur relation, et on crie presque à l'inceste ?

« Il m'arrachait à ma génération mais je n'étais pas dans la sienne. » Malgré la force des sentiments qui les lient, l'auteure et son amoureux se retrouvent en décalage sur les souvenirs sociétaux qui les ont construits. Mais pour l'auteure, cette relation a clairement été l'occasion de replonger, durant quelques mois, dans ce qui fut sa jeunesse…

Au final, une vingtaine de pages qui se savourent d'une traite et qui remettent en bouche la saveur des phrases si bien tournées d'Annie Ernaux, et qui donne très envie de se replonger dans « L'Evènement » (2000), né à la fin de cette relation.
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Je retrouve la plume précise et incisive d'Annie Ernaux qui en quelques mots bien choisis nous ouvre une porte sur une pléthore de pensées et de sentiments. "Avoir un métier avait été la condition de ma liberté" ... une telle phrase résonne tellement en moi!
Elle nous raconte dans ce court roman son aventure avec un jeune homme de 30 ans de moins qu'elle, mais ce n'est pas pour cela qu'il est si marquant : "il était le porteur de la mémoire de mon premier monde" ...
J'aime cette autrice qui assume ses faiblesses et parle ouvertement de la difficulté des personnes qui "changent de monde", ces "transfuges de classe" ... quelle horreur d'ailleurs cette expression! Cela vient quand même du verbe latin "fuir" et fait référence aux soldats qui passent à l'ennemi!
Pour moi elle est brillante du point de vue littéraire ET social ...
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