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3,39

sur 783 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Cristina est serveuse dans un bar, alors qu'elle a une licence, qu'elle finit une thèse et qu'elle est trilingue (page 84) : nympho affamée de tendresse, elle croque les hommes et avale de l'ecstasy avec la boulimie du désespoir. Rosa, trente ans, est directrice financière : elle a fait des études brillantes en philologie anglaise, quitte le boulot à 22h00, vit en solitaire dans un appartement immense, s'habille en vêtements de marque, impeccables, discrets et sur mesure, ne connait ni le solde de son compte courant, ni le nombre de ses subalternes (page 21), et elle se drogue au Prozac. Ana est sans profession : elle se cantonne dans un rôle de mère de famille rangée, nageant dans un perpétuel mal-être, véritable zombie cathodique (page 84), accroc aux comprimés (page 236).

Le décor est planté : avec Amour, Prozac et autres curiosités, le lecteur plonge dans un roman écrit par une femme, un roman parlant, parfois avec beaucoup d'intimité, de la triste vie de trois soeurs : paumées, sans illusions, leurs vies va cahincaha, faites de hauts et de bas, d'amours, de doutes, de rencontres et de situations curieuses ou inattendues. Des points communs entre ces soeurs ? Oui. Leur père a quitté le domicile conjugal sans explications (page 24) alors qu'elles étaient toutes jeunes, les laissant poursuivre leurs vies en compagnie d'une mère pharmacienne, glaciale, autoritaire et distante, une vrai Walkyrie (page 64) avec laquelle les contacts sont rares et planifiés, le tout sur fond de méfiance réciproque (page 22). Elles ont reçu toutes trois une éducation religieuse, très stricte. Elles sont pourtant devenues accroc aux paradis artificiels. Elles voudraient se sortir de leurs conditions de vie actuelles. Elles échangent entre elles leurs impressions, leurs doutes et leurs espoirs, réfléchissant à leur drame commun, à leurs douleurs, à leurs souffrances respectives et aux moyens de s'en sortir.

Le récit est cru (page 42 – j'ai besoin d'une queue entre les jambes ; page 102 – les culs c'est comme des melons) et sent la provocation : l'auteure nous promène entre sexe (page 22, il est rappelé que le sexe peut être contaminé), vice, débauche, alcool, drogue et solitude. Alternativement déjantées, désespérées, en dérive ou temporairement sereines, nos trois héroïnes sont attachantes. Elles ne se parlent pas directement, mais elles le voudraient très probablement si elles arrivaient à faire tomber les conventions et les interdits qui les musèlent, en tous cas elles nous conduisent tantôt au milieu de leurs extravagances, tantôt au milieu de leur réalité quotidienne ordinaire. le ton est libre, assez souvent grave, parfois humoristique : en toile de fond, un pessimisme ambiant et quelques touches de nostalgie, car les trois soeurs naviguent à vue dans un monde qui les dépasse. Peu de poésie, des expressions qui peuvent être vulgaires, une tonalité sensible et parfois tendre (page 18 – c'était si doux de se laisser emmener par la main). le suspense est garanti et il y a de l'énergie dans cette histoire. L'ouvrage est original par sa composition en forme d'abécédaire (les chapitres vont de « A comme atypique » à «  Z comme Zénith »).

Que faut-il retenir de cet ouvrage définitivement ancré dans le monde d'aujourd'hui ?
D'abord, que ça n'est pas un livre pour les mecs : à la page 11, on lit « leur virilité s'agite avec inquiétude entre leurs jambes » ; à la page 17, on lit que l'homme est un paquet « d'hormones sur pattes » ; à la page 20, l'auteure nous parle de règles et d'aménorrhée, puis (page 23) de ménopause, de frottis et d'hormones. le sexe de la femme est sans arrêt survalorisé : c'est un « refuge humide et chaud » qui dépasse le pénis « en dimension et en appétit ». L'amour de l'homme se mesure en centimètres !
Ensuite, que ça n'est pas un livre à lire si on a le cafard : sans faire dans le misérabilisme, le lecteur notera au fil des pages que la famille ne semble pas constituer une protection si on en juge par la mère qui ne désirait pas ce troisième enfant et qui le lui fera sentir toute sa vie, ou par les désunions qui foisonnent dans cet ouvrage ; que l'éducation plonge les êtres humains dans des conventions qui devraient pour la plupart être abolies (page 18 – la femme ne doit pas dire un mot plus haut que l'autre devant son époux) ; que le monde du travail offre une réalité sociale peu valorisante (page 21 – Cristina n'a ni sécurité sociale, ni contrat fixe, ni stabilité ; page 31 – Rosa a perdu deux dioptries et gagné une scoliose au travail ; les cadres ont des costards mal coupés et les secrétaires n'ont pas d'autres sujets de conversation que le film de la veille au soir ou que les amours de la presse People ; page 32 - les promesses de salaires s'effacent devant la réalité de la crise alors que la hiérarchie touche onze fois votre salaire, ne parle pas l'anglais et fait des fautes d'orthographes) ; que l'amour (page 29) ne dure pas toute la vie et n'offre au final qu'illusions et déceptions. L'amour, c'est bien là leur problème à toutes les trois : pour les hommes, l'amour n'est que confrontation avec la femme et conquête de la femme quand, pour la femme, l'amour est une entreprise d'identification et d'accueil du partenaire ! Alors les femmes doivent feindre et se résigner à aimer sans jamais posséder, avec en corolaire un sentiment de culpabilité doublé de honte à ne pas pouvoir construire une relation loyale et durable avec leur partenaire. Quant à la vie, elle est insupportable (page 120), un tissu de jalousies, même entre les enfants, des jalousies qu'il faudrait pouvoir nettoyer (page 87). La vie, est d'une tristesse à mourir : (page 223), chaque année qui passe, c'est une pelletée de terre sur la chambre de votre jeunesse ; et (page 243) elle se déroule dans un monde sans réponse.

Alors, quelle issue s'offre à nous ? Garder un regard d'enfant sur les êtres et sur les choses (page 232 – fais-moi rester enfant). Ne pas avoir honte. Refuser l'aliénation, l'épuisement et les chimères (il faut jeter nos comprimés). Garder de l'espoir et du temps libre (page 36 – ça vaut mieux que le meilleur salaire du monde). Se prendre en main, sortir, voir des gens, se confier (page 40 – se réveiller à côté de quelqu'un et partager avec lui un petit déjeuner au lit, il n'y a que ça de vrai), respecter l'intimité d'autrui, profiter de tous les instants agréables, fuir de temps en temps la ville (page 40 - car en ville, il n'y a pas de relations suivies) et prendre les choses avec un peu d'humour (page 123 – pour ne pas ressembler à une daurade congelée). C'est à ce prix (page 259) que la vie est un immense cadeau : d'ailleurs, si le dernier chapitre s'intitule « Z comme Zénith » ça n'est pas par hasard ! Un livre à lire et à relire.
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Les auteurs espagnols semblent fascinants. C'est le deuxième auteur de ce pays que je lis, tout comme pour Záfon, je suis sous le charme de l'écriture de Lucía Etxebarría. Ce roman est beau, parfois triste souvent interpellant. Il est très bien agencé, chaque chapitre raconte une des soeurs, avec un style bien adapté au personnage concerné. Une mise en histoire intime et personnelle sans être "voyeuse". J'ai été entraînée dans les pensées de ces jeunes femmes avec plaisir même si souvent ces pensées sont dures, difficiles, violentes, tristes ou tout cela à la fois.

Ce que j'ai aimé : l'écriture, vive et intime qui rend ces jeunes femmes attachantes, troublantes et impressionnantes.
Ce que j'ai moins aimé : rien...
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Après une lecture poétique et onirique de Bauchau, je me suis plongée dans l'univers désopilant de Lucia Etxebarria. Roman qui tour à tour nous fait rire avec les frasques des héroïnes espagnoles assez déjantées, où l'auteure a voulu montrer trois tranches de vies différentes mais qui sont unies dans la souffrance et la solitude. Naturellement, les livres de Etxebarria s'adressent essentiellement à un public féminin... Aussi, si vous êtes un homme, passez votre chemin sinon vous serez déçu comme Eric Zemmour, qui n'a pas compris que certaines lectures ne doivent pas être lues par des hommes. Et pire, je me demande comment il a eu l'idée de s'aventurer dans les romans de Lucia Etxebarria (cfr. la video).D'ailleurs, j'espère que Lucia Etxebarria se servira de lui comme une caricature grotesque dans son prochain roman afin lui renvoyer l'ascenseur.Pour revenir au livre, ce titre est une bonne découverte et donne la pêche pour démarrer la journée grisonnante de cet automne.
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L'un des meilleurs si ce n'est le meilleur livre de l'auteur qui nous fait rire et pleurer avec cette histoire du destin de trois soeurs, avec l'Espagne en toile de fond et sa société revue et corrigée à la sauce Etxebarria - sauce pimentée à déguster sans aucune modération !!
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J'ai adoré ce roman! D'abord pour son ton cru, très libre! J'ai beaucoup ri. le début m'a rappelé mon expérience de l'Espagne et des jeunes Espagnols : à la fois des jeunes qui vivent un pays qui a des principes moraux, une religion importante mais parfois largement délurés, avec l'envie de jouir de tout après 50 ans de dictature... Mais plus on avance dans le roman et plus on découvre qu'il s'agit aussi d'histoires individuelles, presque insupportables! Mais il n'y pas de misérabilisme, on reste dans un certain humour, une liberté de ton (qui correspond surtout à la voix de Cristina) qui m'a plu, m'a permis de relativiser les choses... Certes, ce ton peut être dérangeant mais il est juste il me semble. Vrai. Il secoue tout de même. C'est déjanté, c'est cinglant, c'est dur aussi. Mais c'est bon
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Je m'attendais pas à une telle bombe; "Amour, Prozac et autres curiosités", ça sonne comme un livre de plage, du Katherine Pancol, une blague mais non, NON NON NON.
Trois soeurs à relations distantes. Elles s'aiment, sûrement mais chacune représente un mode de vie qu'on désapprouve ou dont l'on rêve, selon, et chacune a de ces clichés de fantasmes et une situation de bad trip, Christina la beauté, la jeunesse, la liberté mais les cauchemars de l'après-amour, Rosa la réussite et la force et l'intelligence, surmontées d'une incroyable solitude, et enfin Ana, la richesse et une famille, le manque et la tristesse, elle ne sait pas.
Autrefois, tout était rangé, quand il n'y avait nul autre homme que le père mais cette période, au moment de narration de l'histoire, semble n'avoir jamais existé.
Amour, Prozac et autres curiosités, comment dire, je m'arrête là. Livre à ressentir.
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Une oeuvre muy caliente et muy vivant, j'ai adoré lire ce livre, une très bonne lecture. C'est un roman que je trouve assez réaliste, rien à voir avec des sortes de roman qui dégage un univers utopique de jeunesses dorées dont le seul souci est la couleur de leur vernis à ongle
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Ma lecture: Oui, je me suis amusée. Oui, j'ai pensé à Almodovar et ses différents films en lisant l'histoire de ces trois soeurs. Oui j'ai pensé à la "Movida". Trois soeurs dont on découvre petit à petit les fêlures et les blessures, trois soeurs abandonnées par leur père, trois soeurs aux chemins différents mais qui finalement se retrouvent dans un mal-être (qu'on se régale de lire!!!). Ana la mère de famille, Rosa la business woman, Cristina la déjantée. Et en filigrane, la mère. Et, page après page, nous apprivoisons l'histoire familiale, sexuelle, professionnelle, amoureuse de chacune d'elle. Trois femmes qu'on n'a pas envie de quitter.

Des mondes (si) différents sont abordés en fonction du regard des trois narratrices(on passe de l'une à l'autre, d'une peau à l'autre, d'une façon de penser à l'autre, d'une intimité à l'autre). Et on constate que chacune n'a pas été épargnée par la vie, au-delà des apparences. Chacune a vécu des événements douloureux et on comprend mieux ce qui les a menées vers ce désenchantement. Ma petite préférée, c'est Cristina... le livre se déguste comme un film d'Almodovar. Avec la même truculence, les mêmes extravagances et la gravité aussi de ce que vivent les femmes.
Lien : http://lejournaldechrys.blog..
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L'histoire de trois soeurs dégoûtées par leurs vies. Tout les opposent : Anita, la femme mariée, mère de famille; Rosa, la business woman; et Cristina, la petite dernière, serveuse droguée et boulimique de sexe. Pourtant, ces différences sont trompeuses et on finit par s'apercevoir que le lien qui les unit est plus fort que tout.(Clickez sue le lien pour lire la suite).
Lien : http://aufildeslivres.over-b..
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"Le monde est plein de vampires. Celui qui mord a été mordu un jour. Celui qui abuse a souffert d'abus. Celui qui frappe a été frappé. Celui qui abuse a été abusé. le bien et le mal ne surgissent pas du néant, quelqu'un les a fait entrer dans notre tête à coups de marteau. En naissant, nous étions des pierres attendant que la vie nous taille. En grandissant, nous nous sommes transformés en statues. Nous pouvons nous fêler ou nous briser, mais nous ne changeons plus fondamentalement."
Amour, Prozac et autres curiosités, Lucía Etxebarría

Un faux roman de chicklit, le titre et la couverture ne rendent pas hommage à l'écriture de l'auteure. Écrit en 1997 par une Espagnole Basque, fan de Courtney Love, issue d'une famille nombreuse et ayant fait sa scolarité dans une école catholique, elle dépeint la vie en parallèle de trois soeurs que les modes de vie séparent et dont les personnalités si éloignées empêchent toute véritable relation.
Elle y dépeint cette période si particulière de la fin du dernier millénaire, du début du nouveau, qui a déjà bien plus de 20 ans désormais. Une époque que j'aime énormément au niveau littéraire, une époque où de nombreux romans écrits par des femmes relatent la réalité trash et cruelle de la vie tout en rappelant à notre mémoire quelle était la vie durant notre adolescence, plus fluo, plus nocturne, plus sombre mais aussi plus folle et joyeuse, la liberté guidait alors mes pas et mon esprit en pleine rébellion. Nostalgie ? Mais non...
Dans celui-ci, elle y va crescendo, plus les lettres défilent, chaque lettre étant un chapitre, plus l'on s'immisce dans les tréfonds des héroïnes, avec leur passé, leur présent, leurs souffrances, le sexe y est omniprésent, décrit d'une manière crue et très poétique, les drogues légales ou non sont le fil d'Ariane, et les non-dits, ces poids que l'on traînent, lourds de notre passé, l'explication du présent et potentiellement la voie vers l'avenir.
Pourquoi une couverture à la Bridget Jones alors que l'on se retrouve plus avec du Despentes, du Ann Scott ou Camille de Peretti ? Aucune idée, sans doute que le mec qui a fait la maquette a juste pensé "Tiens un truc de gonzesses, j'vais mettre un truc bien cliché".
Enfin bref...
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