Claude Farrère prétend, ici, dissiper un malentendu.
Longtemps, il a été présenté comme le disciple choisi de Loti, comme un très intime ami, ou même comme son héritier spirituel.
Mais dès les premières pages, Farrère l'affirme.
Il n'en est rien.
Il n'y eût jamais, dit-il, aucune affinité entre les deux hommes.
Seul un hasard les fit se rencontrer.
Pourtant, le livre entier est un démenti de ses premières lignes.
C'est un livre de souvenirs, un livre sensible et délicat, un livre tissé d'émotions.
Le livre est un hommage à Loti.
Mais le propos n'est pas, ici, de confectionner une quelconque biographie, ni de composer une analyse littéraire de plus.
Il est de montrer Loti, tel qu'il était.
Le livre se décompose en deux parties principales : la première est la retranscription du journal que Farrère écrivit, d'octobre 1903 à septembre 1904, à bord du petit croiseur "Vautour" que commandait, en Turquie, le capitaine de frégate Julien Viaud.
La seconde est dernière visite que fit, à Rochefort, Claude Farrère à Pierre Loti.
Plus encore que dans ses autres livres, le style de l'écriture de Claude Farrère est ici splendide.
Il est magnifié par l'émotion.
Car, bien sûr, le livre parle de Loti, mais Claude Farrère s'y dévoilant, se révéle comme un homme sensible, un officier de marine attentif et un écrivain passionné de littérature.
Il émane de la dernière partie une profonde tristesse baroque.
Mais que le lecteur soit prévenu.
Ce livre n'est pas fait pour ceux qui ne le comprendrait pas.
D'ailleurs Farrère les supplie de ne pas le lire.
Ce n'est pas pour eux qu'il a été écrit.
L'ouvrage est fait de ce que, ni l'un ni l'autre des deux hommes n'ont dit, car ce qu'ils ont dit l'un et l'autre ne sera jamais pour d'autres que pour eux deux.
J'ai lu ce livre d'une traite, et ce qui ne m'était jamais arrivé, aussitôt, je l'ai relu, plus doucement encore, par peur de devoir le quitter trop vite ...
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Mais j'ai toujours remarqué qu'après n'importe quelle émotion brutale les pauvres petits êtres que nous sommes se dépensent tout de suite, volubilement, en de pauvres petites paroles pressées ... C'est comme un besoin, une nécessité ... Et sans doute l'infirmité humaine l'exige ...
Son malheur fut peut-être d'habiter toute sa vie à Rochefort, de s'y enliser dans une existence devenue d'année en année plus sombre et plus solitaire. Tous ceux qui l'aimaient étaient de beaucoup ses aînés. Et tous l'ont quitté, un à un. — cependant que Rochefort, port fossile, ne lui offrait nulle occasion d'amitié nouvelle et vivante. Ainsi son coeur s'est peu à peu effarouché de solitude. La Marine a toujours médiocrement aimé ce marin qui ignorait Brest comme Toulon, qui détestait Paris et se souciait seulement de mers lointaines et de croisières sans fin. Sa grande gloire s'abattant par là-dessus, mille jalousies, toutes plus mesquines les unes que les autres, ont ajouté à sa misanthropie.
Au fur et à mesure que Loti s'éloigne de nous dans le passé, et que son souvenir grandit dans toutes nos mémoires, des livres naissent en foule, évoquant cet homme dont on s'apercevra peu à peu qu'il fut le plus génial des écrivains du XIXème siècle ...
Mesdames, n'oubliez jamais que l'encre violette est une dangereuse substance : une dame qui presse contre ses seins une lettre écrite avec l'encre en question ne pas vraiment se décolleter le soir même ...
Le grand rêveur a vécu toute sa vie sur la mer.
Il n'y a pas pire solitaires que les marins ...
Claude Farrère :
La maison des hommes vivantsOlivier BARROT, installé dans une chambre, présente une réédition de "
La maison des hommes vivants" en poche Librio ; une histoire
fantastique écrite par
Claude FARRERE, auteur populaire, élu à l'Académie française.