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sur 134 notes
« Ci-gît l'amer (guérir du ressentiment) », Cynthia Fleury (325P, Gallimard).

Premier constat, sur la forme, c'est une lecture rendue difficile par l'usage permanent d'un vocabulaire compliqué ou baroque (pourquoi évoquer un monde « capitalistique » ?), d'expressions latines non traduites, par les très nombreuses références explicites ou implicites à des auteurs célèbres ou inconnus, et parfois par des phrases plus qu'alambiquées (exemple : « Chez Georg Lukacs, la réification est le processus de chosification de la vie du sujet, qui n'est pas sans rappeler les affres de la rationalisation wébérienne qui a pour conséquence de « qualifier » le quantitatif, autrement dit de disqualifier le qualitatif au profit d'une surévaluation du quantitatif, appelé dès lors à devenir le nouveau qualitatif, le chiffre venant se substituer à la puissance du nom. » ouf !!!) le texte, dense, manque de concret, d'illustrations pour éclairer les raisonnements. Cynthia Fleury est une « pure » (sic) intellectuelle qui se paie assez facilement de mots, et de jeux de mots à la Lacan, et d'ailleurs, l'essentiel de l'ouvrage est construit autour d'une déclinaison du titre : « Ci-gît l'amer » en « Ci-gît la mer » et en « Ci-gît la mère ». N'étant pas outillé d'un 3ème cycle en philosophie, j'ai dû m'accrocher pour aller au bout de ma lecture, et je suis loin d'avoir tout saisi de la pensée de CF, qui reste à mes yeux confuse et teintée d'une certaine prétention élitiste.

Sur le fond, comment guérir, au plan individuel ou collectif, au niveau psychologique ou politique, de cette si mauvaise passion, cet amer ressentiment qui habite tant de personnes et/ou de groupes sociaux ? C'est la question à laquelle tente de répondre ce livre, s'appuyant essentiellement sur les deux champs de références de l'essayiste que sont la psychanalyse et la philosophie politique.

Dans la première partie, elle démonte de manière très fouillée et souvent convaincante les mécanismes victimaires qui poussent au ressentiment, et dans lequel les individus les plus « faibles » ou les plus « lâches » peuvent s'enfermer sans cesse plus sûrement. Face à des situations personnelles vécues comme injustes ou discriminatoires, le sujet se sent parfois incapable de dépasser le ressentiment, il se fige dans l'attente d'une réparation trop souvent hypothétique, au lieu de se donner les moyens d'une sublimation, d'un dépassement positif dans des engagements constructifs. Les processus de dé-narcissisation du sujet, de dévalorisation le conduisent à ruminer sans fin son amertume, au point de ne plus savoir parfois contre quoi il est en colère, et de tourner celle-ci vers des objets (des personnes) en la transformant en vengeance aveugle. le ressentiment finit par s'alimenter de lui-même, bloquant de fait toute issue positive, et pouvant conduire à une forme de jouissance de la blessure. La rancoeur reste l'arme des faibles, le ressentiment ne poussant pas à se défendre mais à vouloir détruire « l'ennemi ». Face à ces situations, la cure analytique peut être une solution au long cours, mais pas forcément exclusive ni accessible à tous.

Cynthia Fleury ne nie pas qu'il puisse y avoir parfois des causes objectives et réelles à ces sentiments d'injustice, (comment le pourrait-elle ?), mais son analyse induit pourtant que celui qu'elle nomme le « ressentimiste » est essentiellement responsable et source de son état d'amertume. Pour elle, la certitude d'être objectivement lésé, quand elle se fige, est un leurre dangereux, car on peut toujours trouver plus lésé que soi, et que chacun d'entre nous peut se retrouver dans la posture de celui qui lèse autrui (une posture "chrétienne"?) Certes, mais quand elle se préoccupe de situations moins individuelles, donc des mêmes processus au niveau social, on finit par se demander si son argumentaire ne conduit pas, peu ou prou et quoiqu'elle en dise, à une forme de passivité ou de résignation, puisque toute forme de révolte violente face à l'injustice dans une démocratie dont elle ne semble guère contester les fondements lui semble illégitime. Faire intérioriser une culpabilité intime aux victimes d'injustices sociales, en dédouanant de fait la responsabilité des systèmes sociopolitiques et de ceux qu'ils servent, tel est pour moi, le point d'achoppement avec son raisonnement (ou de ce que j'ai cru en comprendre). Ce qui ne l'empêche pas de dénoncer l'apolitisme comme l'expression d'une lâcheté.

Elle cite dans la seconde partie Hitler, Mussolini ou Trump comme figures autoritaires qui incarnent ce ressentiment exacerbé et dangereux dans lequel se reconnaissent les soumis, au point que ce sont eux qui investissent, et pour une part fabriquent ces « führers » qui vont les brosser dans le sens du poil, en abusant de leurs ressentis. Elle évoque de manière plus que floue ceux qu'elle désigne comme des populistes, une catégorie d'autant plus fourre-tout qu'elle ne cite personne (en sous texte, on l'imagine renvoyer dos à dos dans un discours aussi facile qu'implicite tous les extrêmes qui seraient fondamentalement de même nature). « le ressentiment, tout en pourrissant l'être, maintient en forme physique, conserve dans son jus amer l'individu rongé. Il a le pouvoir du formol ». Mais est-ce vraiment parce que le fascisme est d'abord en chacun de nous qu'il finit par s'imposer dans un état ? Je ne suis guère convaincu par l'argument. Si nombre de remarques me sont apparues pertinentes, j'ai été gêné par cette dimension, où Cynthia Fleury me semble ‘'charger'' l'individu ou le groupe d'individus, ''la masse'', et dédouaner la structure sociale et surtout ceux qui en tirent les bénéfices et en jouissent. J'ai par ailleurs perçu une forme d'élitisme assez hautain dans son discours, une vision dévalorisée des « faibles », de ceux qui « suivent » cette belle élite très minoritaire qui serait source de progrès social et démocratique.

Poursuivant son analyse du ressentiment, dans un des passages les plus passionnants de son essai, elle nous fait croiser Frantz Fanon ; elle nous montre comment ce psychiatre et militant anticolonialiste a suivi un chemin de sublimation, de non victimisation, faisant passer l'humain avant tout particularisme identitaire, pointant pour le colonisé le risque de s'enfermer dans cette exclusive représentation victimaire de sa condition. Elle fait aussi un parallèle intéressant avec la situation des femmes dans notre société, défendant un féminisme aux antipodes d'une attitude de complainte ou de rancoeur vengeresse (rejoignant ainsi Belinda Cannone dans « le nouveau nom de l'amour », chroniqué ici ; mais là où celle-ci exprime une belle poésie joyeuse et plutôt optimiste sur le devenir des rapports hommes-femmes, Cynthia Fleury nous propose une austérité de la pensée et de l'expression.)

Un livre donc intéressant, rude, qui a le mérite d'être discutable (au meilleur sens du mot), mais qui m'a plus touché du côté des mécanismes du ressentiment dans sa dimension individuelle, celle que tout un chacun peut parfois percevoir dans sa vie affective, que dans le parallèle fait avec le côté social qui en est l'objet essentiel.
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Il est plus aisé pour moi de chroniquer un roman qu'un essai. Cependant, j'ai beaucoup aimé ce livre malgré les écueils de la lecture d'un texte complexe et, sans tomber dans le travers de vouloir en faire un résumé, je vais essayer de faire un pas de côté pour vous exprimer les raisons pour lesquels ce texte m'a inspiré.
Ci-gît l'amer porte un sous-titre Guérir du ressentiment, et toute la portée de cet essai réside dans ce sous-titre. Cynthia Fleury est à la fois philosophe et psychanalyste. Spécialiste du soin, on a beaucoup entendu sa parole dans les médias durant la crise sanitaire que nous vivons encore.
J'aime beaucoup entendre sa parole.
Le soin bien sûr s'invite dans cet essai, j'y reviendrai.
Mais lorsqu'on parle de ressentiment, de quoi parle-ton au juste ? C'est un mal insidieux qui touche la personne qui le porte, et qui fait mal à son tour aux autres. On pourrait même parler de maladie. C'est un mal qui s'installe durablement à la différence d'une colère qui est plus spontanée et impulsive, le ressentiment est un mal qui se mâche, qui se remâche, qui tourne en boucle...
C'est comme une haine, un sentiment de défiance exacerbée ou d'envie, pire que la jalousie, parce que dans la jalousie on admire l'autre sans vouloir le détruire pour autant. Dans le ressentiment, l'autre est méprisé, devient l'ennemi qu'il faut détruire de manière symbolique ou physique.
Le ressentiment s'inscrit dans le temps et crée des fractures qu'on ne soupçonne pas.
J'ai aimé cette manière d'aborder ce thème du ressentiment sous l'angle de la personne et sous l'approche collective. Bien sûr, Cynthia Fleury aborde ici les régimes fascistes ou fascisants, rien d'étonnant ici depuis Étienne de la Boétie qui nous disait 450 ans plus tôt : « Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. » Cynthia Fleury nous confirme bien que les leaders en dictature assoient aisément leur pouvoir, non pas par grâce à leur charisme ou leur puissance, encore moins grâce à leurs compétences puisqu'elles sont inexistantes, mais par la simple frustration du peuple. D'un point de vue paradoxal, nos démocraties imparfaites et toujours en réalisation ne sont pas en reste, exacerbent le ressentiment. Pourquoi ? Parce que les inégalités en démocratie apparaissent injustes, comme des promesses non tenues. Rajoutez à cela les réseaux sociaux en caisse de résonance et vous obtenez là un beau terreau pour faire germer les ressentiments.
J'y ai vu quelques clefs intéressantes de lecture des maux de notre société à quelques mois des élections présidentielles où les ressentiments seront forcément exacerbés et récupérés par les candidats des extrêmes. Cela commence déjà, cela ne vous aura pas échappé, n'est-ce pas ?
C'est bien beau de parler du mal et Cynthia Fleury en parle bien, jouant de ses deux casquettes, la philosophe et la psychanalyste. J'avoue avoir un faible pour la philosophe, mais c'est intéressant de voir comment l'un vient nourrir l'autre. C'est bien beau de parler du mal, et si l'on parlait du remède, du contre-poison, de l'antidote ? Cynthia Fleury en parle tout aussi bien et de manière plus intime, j'ai été plus réceptif sur cette dimension.
Le remède paraît simple, si simple, trop simple. Bien sûr j'y crois sinon je ne pense que j'aurais écrit cette chronique, ni même lu ce livre. J'y crois, même si au fond de moi une petite voix obscure me dit au loin que c'est vain d'y croire, que cela ne changera pas le monde, ni les gens, que c'est une mission impossible. Allez ! j'y crois quand même et c'est tellement facile de l'exprimer ici, peut-être naïvement, vous en jugerez.
Bien sûr, ce livre regorge d'antidotes. Cynthia Fleury nous dit tout d'abord qu'il faut accepter le ressentiment, l'accueillir comme une épreuve pour mieux le combattre.
Le ressentiment, on ne doit pas le nier, mais le prendre à bras le corps, en faire quelque chose, pour le remplacer.
Ne vous êtes-vous jamais posé la question : et si c'était possible de revenir en arrière ? On ne peut pas revenir en arrière, les choses ne se réécrivent pas, les choses ne se réparent pas. Nous ne réparons pas ce qui s'est cassé en nous. Nous créons quelque chose de nouveau, faire advenir quelque chose de nouveau, tisser un nouveau récit qui va nous éloigner de la peine. Nous ne sommes pas des ordinateurs.
Le ressentiment, il faut l'accepter, on va en faire quelque chose, par la sublimation, la culture, l'éducation, le soin, ce sont les forces de sublimation qu'il faut réactiver dans notre démocratie.
Le soin, l'empathie, l'écoute, le soin au sens de prendre soin de la capacité de sa réaction, venir accompagner l'émergence de quelque chose, et faire en sorte qu'un sujet redevienne une puissance d'événement et de créativité. Justement la créativité est un magnifique antidote.
Prendre soin par la parole, par le non-verbal, par la simple présence, en faire quelque chose, le début d'une résilience possible.
L'attention à l'autre, l'amitié, l'admiration, l'éducation, la culture, la sublimation...
Une rencontre. Des rencontres.
Redéployer son corps.
Le mettre en accord avec le reste du monde.
Prendre soin par la parole, par le non-verbal, par la simple présence, en faire quelque chose, le début d'une résilience possible.
Chacun peut trouver son équation dans la sublimation en utilisant toutes ses potentialités.
Les passions tristes sont constitutives de la vie, de nos vies, il ne faut ni lutter, ni se laisser totalement submerger, engloutir...
La poésie est une forme de sublimation. Cynthia Fleury évoque la poésie de Rilke, sa découverte a été un choc pour elle, un pont, une possibilité d'attraper quelque chose, de cranter avec le monde, avec les livres.
Et puis elle ouvre un chapitre qui fut pour moi une magnifique rencontre, une découverte, celle de Frantz Fanon, psychiatre et militant anticolonialiste dont le parcours est un magnifique chemin de sublimation.
J'ai aimé aussi le propos de ce livre parce qu'il est un respect, un amour des singularités.
Récemment, sur une radio publique, - France-Inter pour ne pas la citer, Cynthia Fleury disait : « le soin est le premier geste politique, il nous permet d'habiter le monde. »
Je trouve cette citation fort belle et je voudrais conclure ma chronique par cette ouverture magnifique.
Habiter le monde.
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« Ci-gît l'amer… » de Cynthia FLEURY est le texte le plus alambiqué qu'il m'ait été donné de lire en entier sans faiblir.

La raison ? Un sujet original (le ressentiment) avec un traitement (psy, philosophie politique) mais traité de manière plutôt particulière.

Il m'en aura fallu du temps pour en découvrir le contenu. Quinze pages par jour de lecture avaient fini par être le contrat passé entre la raison - ma volonté - et la passion - mon envie de lire des choses légères et d'abandonner cette langue surgie d'une autre planète. Une fois le deal passé, l'aventure fut plus supportable. Elle se mena, comme j'en ai l'habitude, avec un crayon en main, mais cette fois-ci il allait virevolter.
Cette psychanalyste philosophe française, très présente dans les médias, a une manière d'écrire compliquée à l'excès, mais je ne crois pas qu'elle le fasse exprès. En fait, elle parle comme une érudite qui ne sait pas que 99,9 % de son public n'est pas agrégé de philosophie : elle a posé un prisme langagier sur sa bouche, ou précisément, dans l'affaire qui nous intéresse, sur son stylo, ou clavier…

Il y a tant de ruminations autour de moi qu'il me fallait pourtant absolument parcourir ce voyage intellectuel éclairant.
Mais que nous raconte-t-elle ? Heu… pardon… quels présupposés pose-t-elle ?
L'ouvrage s'organise autour du titre : «Ci-gît l'amer » en « Ci-gît la mer » puis « Ci-gît la mère ». Je ne me suis pas laissée impressionner par cette perche subtile placée au-dessus des nuages, j'ai plané avec elle, et j'ai aimé ça. Je laisse aux courageux/seuses le plaisir de découvrir le fil conducteur entre « l'amer » « la mer » et « la mère ».

De la plainte chronique à la faculté de jugement dénaturée, de la perte du discernement à la capacité dépréciative, de la focalisation sur l'objet de rancoeur jusqu'au plaisir sur la psyché que toute cette haine procure à la personne ressentimiste, des pathologies narcissiques au sein des démocraties, jusqu'à la grande dépréciation universelle en cours (merci les réseaux sociaux et les médias), sans oublier un détour par le nazisme, le colonialisme et le repli communautaire (« la solidarité entre pairs rancuniers et victimisés ») … voici les principales pierres à l'édifice d'explication puis de déconstruction que traite la philosophe.

Sachez déjà que le ressentiment « reste un rempart devant la dépression » pour celui qui le pratique, que « le ressentiment maintient en forme », et vous aurez déjà fait un grand pas dans la compréhension de ce fléau.
Point de surprise, la solution est éducationnelle, mais elle se joue également au niveau « du gouvernement de soi-même » (Foucault). Oui, il y a beaucoup de psychanalyse dans ce texte, mais ça tient la route et Cynthia Fleury sait de quoi elle parle.

Pour se faire, elle cite énormément d'autres auteurs, reprend d'autres positions, voguant d'un théoricien vers un autre, donnant son avis à chaque fois, poursuivant la réflexion la plupart du temps. Sa culture est immense, et j'ai apprécié cette initiation à la philo et à la psychiatrie que j'ai considérée comme une sacrée expédition au pays des penseurs. Contrairement aux sujets atteints de ressentiment, j'aime la compagnie des intellectuels.
Enfin, même si « le ressentiment est un défi pour chaque âme cherchant à s'affirmer comme vertueuse », C.F. donne de nombreuses pistes : la faculté d'oubli (on s'en serait un peu douté), la générosité, l'admiration (pas pour un râleur), la fin de la soumission patriarcale (passage pertinent), prendre « le chemin de l'agir » (traduction : bouger de son canapé), apprendre à expérimenter, le pouvoir des arts (littérature,…), l'humour (pas le moqueur !), l'amour… Il y a aussi une place pour « une éducation à la séparation » (parent / enfant), pour comprendre enfin que « naître c'est manquer », et que râler c'est vouloir obtenir quelque chose coûte que coûte.
Seul regret - qui n'étonnera personne - que Madame FLEURY n'ait pas eu l'idée de rendre accessible syntaxiquement et lexicalement parlant son traité des personnalités aigries, victimaires, ruminantes (mais qu'on ne voit pas dans les près, hélas) et j'en passe.

D'abord, elle en vendrait plus, et SURTOUT ce serait (peut-être) l'occasion pour certains mortels de tenter leur chance dans une reconversion du type « avant j'étais un gros râleur, vivant dans la victimisation perpétuelle et ami avec les mêmes que moi - maintenant j'ai compris que le monde est amer, qu'il faut que je quitte psychiquement un tas de personnes néfastes pour moi et un idéal inaccessible, et que j'essaye d'en profiter un max avant de mourir sans me dédouaner de mes responsabilités ».

En gros, c'est du développement personnel mais à la sauce Cynthia FLEURY !

C'était dur, mais finalement… la somme de la réflexion proposée dans ce livre se révèle absolument indispensable.

Lien : http://justelire.fr/ci-git-l..
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Bien plus qu'une simple lecture, CI-GÎT L'AMER a été pour moi, à titre plus personnel, une véritable expérience. Ceci dans le sens où on parlerait par exemple, lors d'une manifestation artistique, de "vivre une expérience artistique" pour évoquer cette dimension de proximité et d'intensité présentes et à laquelle aucune conception purement muséale de l'art ne pourrait normalement nous faire accéder...
Bien que la réflexion philosophique y soit approchée dans toute la complexité des notions qu'elle implique habituellement quand pratiquée à haut niveau comme c'est le cas ici, et bien que l'auteure ne cède à aucun moment à la tentation de les rendre à tout prix accessibles à tous, le développement de sa pensée philosophique ne se résume jamais à une spéculation purement abstraite, n'opposant à mon sens aucune résistance à pouvoir être incarnée et à intégrer la vraie vie. Cynthia Fleury n'hésite pas d'ailleurs, elle-même, à franchir parfois ce pas, et c'est alors de sa voix à elle, individuée – cette notion d'individuation étant par ailleurs un des socles de cette pensée libératrice face à l'individualisme croissant produit par nos sociétés actuelles néo-libérales- c'est de sa voix subjective que la démonstration s'empare subitement, rebelle à toute forme d'académisme. Pour l'illustrer, citons ce passage où elle s'exprime personnellement à propos de Rilke : «Moi, qui ne suis pas poète, je reste à l'écart de cette violence magnifique, que je perçois trop ardente pour ce corps ridicule qui est le mien, je me tiens à distance, incapable de vivre autant d'émotions sans en avoir la nausée, je me tiens à l'écart pour écrire, certes des choses plus insuffisantes, mais qui tentent d'expliquer (...) comment, malgré tout, on peut tenir dans ce monde, hors du ressentiment et même de l'amertume, hors de l'échine courbée devant l'absence de sens. L'Ouvert. L'Ouvert. Quand j'ai lu cela, à la fin de l'adolescence, j'ai compris qu'était là un salut, peut-être le mien. »

Bien-sûr, il y a tout de même dans ce livre des développements, des passages où le lecteur (selon son «background» personnel en matière de concepts et d'histoire de la philosophie) pourra se sentir plus ou moins «largué». Mais serait-ce du fait que, parallèlement à une brillante carrière de philosophe, Cynthia Fleury exerce également en tant que psychanalyste, et que s'occupant en même temps de soigner -un rôle qui doit, selon elle, chercher avant tout à être « humble, simple et efficace »- , l'auteure sait se montrer à ce point attentionnée et apte à trouver dans le paragraphe qui suit les mots pour que cette pensée qu'on vient de lire et qui, à première vue, avait semblé si sophistiquée, prenne soudain corps, entraînant le lecteur à y voir plus clair et donnant même par moments l'impression (illusoire , certes, mais ô combien agréable et évocatrice !) que les mots lui sont directement et personnellement adressés, à «Moi, qui ne suis pas philosophe et qui reste à l'écart de cette démonstration magnifique, que je perçois trop dense pour ce corps ridicule qui est le mien (...) et m'invitant alors, moi aussi, à l'Ouvert »!!!

Quant à la démonstration elle-même, celle-ci n‘est pas, bien évidemment, ni à refaire ni même à résumer dans le cadre de ce billet. Je vous laisserai le plaisir de prendre le temps nécessaire pour la savourer, tout en vous souhaitant aussi personnellement qu'il m'a été donné à moi de la parcourir et de «vivre» cette belle expérience! Pour ce faire, je vous conseille, par contre, de laisser de côté tout apriori ou tout jugement hâtif concernant un pseudo intellectualisme ou un supposé «lacanisme» abscons dont certains lecteurs de ce livre ont pu affubler l'auteure. Ainsi par exemple des notions de « l'amer », «la mère » et « la mer », qui à mon sens ne constituent absolument pas un simple jeu de mots «lacanien» et gratuit, renvoyant au contraire, de manière très intense et polysémique, à la fois symbolique et imagée, à la question centrale de ce livre : comment dans le parcours qui partant de l'amertume (l'amer) laissée inévitablement par le sentiment d'incomplétude, de séparation à l'origine de la vie et représentée ici par la séparation avec la mère, le sujet pourrait-il réussir à s'individuer , à s'extraire de cette souffrance liée à son incomplétude et à sa finitude, non d'une fois pour toutes - mission impossible! -, mais à chaque fois que celle-ci est réveillée tout au long de son existence, comment arriver à tisser un autre lien avec le Réel dont le sens ne cesse d'échapper, lui permettant de se positionner en dehors de l'amer, de prendre le large et de goûter au sentiment «océanique» de communion avec le monde qui l'entoure (la mer) ? Comment éviter par ailleurs que cette amertume se transforme en ressentiment, «un des maux les plus dangereux pour la santé psychique des individus», mais aussi pour le fonctionnement de la démocratie ? Comment s'en prévenir individuellement et collectivement ?

Ce sont là les questions urgentes et cruciales posées par CI-GÎT L'AMER, à un moment de notre Histoire où nous sommes de plus en plus confrontés au développement effréné d'une économie néo-libérale et mondialisée, où les individus, devenus interchangeables, sont réifiés et, de plus en plus souvent, ne se sentent pas reconnus en tant que tels, à un moment où de nouvelles technologies, et tout particulièrement le développement exponentiel d'une intelligence artificielle, leur proposent sans cesse de nouvelles modalités «d'expériences dissolvantes» conduisant à un sentiment de vide et de non-sens...Et qui sont autant d'éléments, selon Cynthia Fleury, susceptibles de produire massivement du ressentiment et, à terme, de mettre en échec tout idéal commun de construction démocratique.
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J'avais déjà lu "Les Irremplaçables" de la même auteure, qui m'avait beaucoup intéressée ; Mais là, Cynthia Fleury arrive ici à la maturité flamboyante de sa pensée.

La première partie du livre traite du ressentiment individuel ; l'analyse est impeccable, mais un peu difficile, quoique le style en soit fort beau.

Là où l'essai prend tout son envol, c'est dans sa deuxième partie, très inspirée de l'Ecole de Frankfort, (qu'il n'est pas nécessaire de connaître préalablement, puisqu'elle en brosse les grands traits) , lorsque Cynthia Fleury aborde le thème du ressentiment collectif comme se trouvant à l'origine de l'émergence d'un leader "fasciste" (au sens large, celui-ci pouvant tout aussi bien s'afficher communiste) : le guide que le peuple choisit à sa ressemblance n'a pas besoin d'être charismatique puisqu'il est la personnification même du ressentiment populaire. Autrement dit, le peuple a le dirigeant qu'il s'est façonné sans se douter que sa créature lui échapperait bientôt comme un Frankelstein démoniaque.
Le "fürher", objet créé par le peuple, le réifiera à son tour. Il se lancera dans un programme paranoïaque et incontrôlable de destruction d'un bouc émissaire nominativement désigné (le juif, le bourgeois, le nanti, le basané, le koulak, l'intellectuel, l'assisté...). Habité désormais par un grand mépris du peuple qui l'a adoubé, il donnera libre cours à son appétit de pouvoir et de chaos.

La troisième partie traite du soin et de l'attention à l'autre, en donnant souvent la parole à Franz Fanon qui créa en Algérie une unité alternative de soins psychiatriques. Cette partie est lumineuse.

L'essai offre une réflexion rigoureuse et généreuse sur les pièges individuels et collectifs que représentent les ruminations "ressentimistes" qui étouffent individus et sociétés en les précipitant dans une spirale infernale et victimaire. Elle ne porte pas de jugement moral mais note le danger de ne pas combattre cette pente naturelle qui expose l'être humain à passer sa vie enfermé dans le cercle vicieux du ressentiment. Il faut renoncer à ce faux confort, pour s'exposer au risque de créer sa vie : personnelle, professionnelle, de citoyen dans la cité. Cynthia Fleury aborde également les enjeux de la démocratie et sait donner l'envie d'approfondir la question. Les éclairages apportés sont déjà très édifiants.

Un grand grand livre : il m'est arrivé de me sentir en difficulté pour la compréhension de quelques passages de la première partie, un peu difficiles : je me suis alors mise en mode "lecture attention flottante" ; cela ne m'a pas trop mal réussi puisque les seconde et troisième parties m'ont apporté une grande joie de lecture, sans les trous dans la compréhension que je pouvais redouter du fait de ma façon d'aborder le début de l'ouvrage. Dans tous les cas, si vous décidez de lire ce livre, ne vous laissez pas rebuter par les quelques paragraphes un peu abscons du début...

C'est un ouvrage fondamental que je relirai.

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Cynthia Fleury, philosophe ET psychanalyste (ça fait toute la différence), explique le ressentiment. Ses mécanismes, le "piège" qu'il peut représenter, tant à titre individuel qu'à titre collectif, et donne quelques pistes pour en sortir, pour le "sublimer". Et notamment la littérature :
"Le territoire littéraire permet de sublimer tous les ressentiments et de goûter précisément l'amertume des choses, des êtres, des idées."
Nous autres, lectrices et lecteurs, avions déjà deviné n'est-ce pas ?
C'est accessible (avec un dico à côté quand même), éclairant et passionnant et, au bout du compte, apaisant, comme tout ce qui permet de mieux se comprendre, seul(e), ou les uns les autres, au choix...
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C'est ma première lecture de Cynthia Fleury et sa voix me paraît importante. Voilà quelqu'un qui peut nous aider à vivre, à comprendre, à comprendre ce que nous vivons.
Alors malgré les quelques bémols éprouvés lors de cette lecture j'ai mis cinq étoiles. de toute façon quantifier nos émotions littéraires ou intellectuelles est toujours arbitraire.
Ce que je trouve remarquable dans le propos de Cynthia Fleury c'est qu'elle propose une voie humaniste sans illusion ni faux-semblant. Elle met le doigt sur des mécanismes psychiques, ici le ressentiment, qui nous empêchent d'être nous-mêmes, qui nous enferment dans des modes de pensée toxiques, pour nous-mêmes et pour les autres. En faisant cela, elle entrelace l'intime, l'éthique et le politique. le moins que l'on puisse dire c'est que nous expérimentons ce genre de liaison depuis pas mal de mois maintenant. Et elle ne se contente pas d'un diagnostic, elle ouvre des voies salutaires pour se libérer de ces enfermements: l'humour, la créativité, l'amitié (et l'amour). Dit comme cela, cela peut paraître naïf, mais il n'y a aucune naïveté chez Cynthia Fleury, au contraire il y a toujours l'exigence du corps à corps avec les réalités psychiques. Elle ne propose pas de solutions toutes faites, elle connaît les difficultés, elle se heurte à l'inguérissable. J'ai eu un grand coup de coeur pour cette démarche dans laquelle je me reconnais, malgré ma grande méfiance pour la psychanalyse. J'ai d'ailleurs failli ne pas me lancer dans cette lecture pour cette raison. Il faut se méfier de ses méfiances.
Malgré tout il reste des bémols. le premier d'entre eux est peut-être lié aux méthodes de catégorisation psychanalytiques. C'est la tendance à essentialiser les individus en raison de leur pathologie. Ainsi l'individu qui éprouve le ressentiment devient "l'homme ressentimiste", il paraît réduit à cette seule dimension. On peut pourtant éprouver, heureusement, le ressentiment à côté de bien d'autres affects.
Le deuxième bémol est cette façon de picorer parmi une multitude d'auteurs ce qui peut servir à son propos. Certaines analyses sont un peu plus fouillées, mais généralement on passe vite, trop vite, sur des auteurs et des oeuvres très considérables. Parfois, ils sont cités de seconde ou de troisième main. Cela donne le sentiment que ces auteurs sont instrumentalisés au service de son propos et qu'on ne s'y confronte pas profondément.
Mais il reste que le parcours vaut la peine d'être suivi. Il suscite bien des interrogations, mais aussi une meilleure compréhension, sur soi-même et ses proches. Alors, allez-y, vous ne perdrez pas votre temps.
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Pas évident de lire Cynthia Fleury. Beaucoup de notions de psychanalyse. de plus, le style, le vocabulaire, les tournures de phrases alambiquées, font que ce livre n'est pas très accessible. Pourtant, le sujet est passionnant. le ressentiment occupe une place importante dans nos relations aux autres, et si l'on y prend pas garde, ce re-sentiment peut empoisonner notre vie. Ceci au niveau individuel comme sur le plan collectif. C'est le propre, d'après l'auteur, des régimes autoritaires belliqueux. Ce ressentiment nous submerge à nos dépens, de manière inconsciente. En être conscient est important pour pouvoir le désamorcer. L'auteure traite également son sujet en citant de nombreux auteurs, dont le propos n'est pas toujours limpide non plus. Ceci dit, j'ai quand même lu ce livre jusqu'au bout, alternant les relectures et la diagonale.
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Le ressentiment, la rumination, le ressassement d'un état victimaire sont des poisons de l'âme et l'hygiène mentale minimale serait de ne pas s'en repaître. Cynthia Fleury, philosophe et psychanalyste, y voit un mal du siècle (comme l'hystérie des femmes au XIXeme siècle), au sens d'un désordre psychique qui n'est pas indépendant des conditions socio-économiques et politiques.
Quatre choses m'ont marquée dans cet essai largement présenté et commenté, y compris à la Grande librairie de François Busnel :
- la volonté de ne pas s'en sortir, l'enfermement dans l'inaction de ceux gravement atteints par le ressentiment, . "ça ne marche pas" est leur antienne. Elle a de très belles phrases pour montrer comment le ressentiment est une construction sur la souffrance ressentie, construction à laquelle on s'accroche de peur de n'être plus rien ( p98 et suivantes) ;
- l'appel aux analyses de nombreux penseurs et courantsdont on n'entend plus beaucoup parler (Canguilhem, Laing, Palo Alto, La Borde....) et en particulier à Frantz Fanon, le psychiatre noir antillais qui refusait la victimisation du descendant d'esclave, mais se servait aussi de son expérience de potentielle victime pour comprendre et respecter ses patients ;
- l'optimisme du soignant dont elle fait preuve pour aider ceux qui ne veulent pas s'en sortir et les échecs et difficultés personnelles qu'elle rencontre ;
- les conseils qu'elle va chercher chez Montaigne, Winnicott et bien d'autres pour inciter au souci de soi, à l'effort qu'il faut faire pour sortir du découragement, se mettre en mouvement, se protéger contre l'érosion de l'âme et prendre soin des autres à travers, l'éducation, la culture et le soin.
Prôner l'ouverture,l'engagement, l'admiration, l'émerveillement pour combattre cette passion triste qu'est le ressentiment. Il faut l'écouter et la lire, car elle fait du bien et redonne courage face à tout ce que l'on entend et lit (y compris venant d'amis proches) sur les réseaux sociaux.
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Le thème est le ressentiment, personnel ou collectif. La forme est pénétrante, attentive et inquiète, un « jeu de la pensée » dans le brassage des idées et le choix des mots : « Il n'est pas simple de trancher entre une définition du ressentiment qui le place du côté de l'impuissance, et une autre qui finit par constater qu'il y a choix pour la puissance » (p 23). Philosophe et psychanalyste, Cynthia Fleury propose une méditation personnelle, tantôt nette et précise, tantôt voilée, émotive, allusive, littéraire pour tout dire — « C'est une pensée qu'il faut tenter de vivre, sans se laisser séduire par sa seule poésie » (p 70). Gallimard la publie dans la collection blanche, pas dans la collection Idées.

Ci-gît l'amer, ci-gît la mère, ci-gît la mer, un jeu sémantique en trois métaphores. Douleur de l'amertume, douleur haineuse — haine de soi et haine de l'autre —, dont l'homme du ressentiment ne veut pas guérir. Douleur de la séparation de la mère, sublimation, libération qui donne accès à l'ouvert, à l'incertain, à l'action, à l'oeuvre : « J'ai toujours considéré que la vérité, dans sa part non dynamique, était essentiellement mortifère ; c'est la part de la finitude de l'homme et du caractère poussiéreux de son existence. Je ne suis pas sûre de savoir vivre avec cette vérité-là, qui m'ennuie et me désespère. Dès lors, la part de vérité qui m'intéresse se situe du seul côté de l'oeuvre, qu'elle soit artistique ou qu'elle relève plus généralement de l'ordre de la subjectivation (enfantement, amour, partage, découverte du monde et des autres, engagement, contemplation, spiritualité, etc.) » (p 186). La mer, sentiment océanique, vagues éternelles et inlassables, Fleury l'illustre par la poésie de Péguy (il a encore des lecteurs !) : « Par la répétition, par le style, nous pouvons habiter un autre monde que celui qui nous environne, un monde qui fait lien avec le passé, avec la permanence des âmes qui nous ont précédés, et dont l'amplitude continue de tonner dans le style » (p 75).

Le ressentiment est échec personnel « échec de l'âme, du coeur et de l'esprit » (p 48), qu'il faut reconnaitre pour lutter ; ailleurs pathologie clinique, névrose aggravée par le refus de guérison ; et encore maladie politique dans le fascisme, la collaboration, les rancoeurs postcoloniales, le dévoiement d'une démocratie déclinante : « Le ressentiment est produit par un écart entre les droits politiques reconnus et uniformes et une réalité d'inégalité concrète. Cette coexistence d'un droit formel et de l'absence d'un droit concret produit le ressentiment collectif. Sans nul doute. Mais à la différence de Scheler, je crois le ressentiment plus structuré dans l'homme, car dans une situation économique égalitaire, il se déplace vers la reconnaissance symbolique et exige toujours plus d'égalitarisme ou projette sur l'autre sa détestation » (p 34). le ressentiment prolifère dans les réseaux sociaux où l'anonymat favorise « l'utilisation ordurière du langage. L'homme du ressentiment, après un silence coupable, qui relève souvent de la dissimulation du soumis, se “lâche”, et vomit par son langage sa rancoeur. le langage devient vomissement, et surtout possibilité de salir l'autre. Tel est bien l'enjeu : utiliser le langage non simplement comme un véhicule de la verbalisation de ses sentiments ou comme un outil de communication à l'égard d'autrui, mais comme une puissance de frappe contre l'autre. Il faut frapper, violenter l'autre, et comme on ne peut pas le faire par la violence physique, il s'agit d'utiliser le langage comme violence. Insulter, dénigrer par la parole, le délégitimer, le couvrir d'opprobre, diffamer, calomnier, injurier. le langage devient le premier territoire pour expulser ce fiel et surtout pour porter atteinte à cet autrui qu'on suppose être la cause du mal dont on se dit victime » (p 274).

Vaste réflexion où l'empathie est partout présente, grand livre subjectif où sont cités poètes et penseurs : Hölderlin, Mallarmé, Rilke, Péguy, aussi bien que Plotin, Descartes, Nietzche, Freud, Adorno, Jankélévitch, Fanon ou Cioran.
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