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EAN : 9782072791567
160 pages
Gallimard (17/05/2018)
3.75/5   2 notes
Résumé :
Un anniversaire de naissance – elle aurait cent dix ans en 2018 – convoque les souvenirs. Geneviève Fraisse évoque le parcours de celle qui se voyait en «correspondante de guerre» au cœur de l’histoire philosophique, politique et littéraire.
Comment Simone de Beauvoir, qui use si souvent du mot «privilège», place-t-elle son désir de connaître et de se connaître au cœur du Privilège de la pensée que le XXe siècle lui a accordé? Formidable espace que celui de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Une historicité susceptible d'ouvrir le chemin de la libération

« Il n'y a aucune hésitation, nous sommes d'emblée installés dans l'histoire, l'histoire longues des femmes à la conquête collective du savoir et de toutes les jouissances singulières qui s'y attachent. Tel est le premier Privilège de Simone de Beauvoir, celui de s'imaginer dans l'histoire, de plain-pied. »

Ainsi débute le prologue, je souligne, privilège, histoire, femmes, jouissance…

Quelques éléments choisis subjectivement. Mes lectures incomplètes de Simone de Beauvoir sont maintenant lointaines.

Privilège, « le Privilège n'est jamais un donné comme au temps de l'Ancien régime, un avantage incontesté, il est le résultat d'une conquête, propre à tout être, à l'intérieur de nos démocraties », les privilèges, « le Privilège de cette femme qui pense, élucide, et décrit l'être collectif de la condition des femmes n'est que le privilège, les privilèges de l'être humain en général », l'histoire, « le choix de l'histoire et de la mémoire comme lieux actifs, producteurs de pensées nouvelles, suscite l'appropriation de la transmission plutôt que sa passive réception convenue », l'histoire du présent vers le passé des historiennes, les femmes, « Un homme ne commence jamais par se poser comme un individu d'un certain sexe : qu'il soit homme, cela va de soit » (Simone de Beauvoir).

Dans cette invitation à lire et à penser, Geneviève Fraisse aborde, entre autres, la muse et le génie, la liberté et l'égalité, la hiérarchie du unet du deuxclôturant l'espace, le devenir sujet des femmes, la division entre biologique et social/culturel, le parcours d'une intellectuelle « qui débusque l'une après l'autre les places où sont assignées les femmes, malgré elles ou non », le penser comme acte simple, la raison, « Avoir la même raison que les hommes et vouloir s'en servir signale une capacité, un droit, mais aussi et surtout, une jouissance possible »…

L'école, « les filles se sont glissées subrepticement dans l'obligation, puis dans les interstices élitaires du système », l'émancipation par le savoir, le temps des « droits révolutionnaires » de la contraception et de l'avortement, l'écriture et la décision d'écrire sur les femmes, entre expérience et théorisation, « l'écriture de l'histoire des femmes échappe au biographique », commencer par une description de toutes les femmes pour se comprendre soi-même. Je souligne les pages autour des Mémoires, les réflexions autour du récit de soi, l'énoncé de la position sexuée, le « je », le sujet de la connaissance, « L'assurance de celle qui s'autorise l'exercice de la raison appartient à une tradition peu connue de l'histoire des femmes, et pourtant solide ». Une histoire longue des femmes…

La domination rend invisible la place occupée par le dominant, « l'homme peut oublier et faire oublier son sexe lorsqu'il se place dans un lieu de pensée », les hommes semblent être « naturellement » sujet. L'autrice pose une juste question qui devrait interpeller les hommes : « Mais pourquoi les hommes feraient-ils l'économie d'une étude du sexe masculin » ?

Il faut approfondir. Quelles sont donc les conditions pour des connaissances possibles ? « « Je suis une femme » est une condition de la pensée, cela implique ni une définition de ce qu'est cette femme, ni une certitude quant à la sexualité de cette femme-là ».

Geneviève Fraisse poursuit sur l'affirmation de l'égalité, – « désormais concept politique » -, le sujet sexué de connaissance. Elle souligne que « Ce n'est ni l'organe sexué, ni la sexualité qui fait la sexuation du sujet qui pense ». L'égalité est produite dans et par un rapport social.

Comprendre, élucider, tourner le dos au malheur, le luxe de l'impartialité, l'objectivité comme contradiction vivante avec le cogitosexué, « le tribunal ouvert au procès de l'inégalité des sexes se déplace du coté de l'espace de vérité créé par le savoir et la connaissance ; en rupture avec le passé ». Une rupture d'avec la cité aux portes closes et la démocratie exclusive…

L'autrice souligne que Simone de Beauvoir « se mêle donc clairement de ce qui la regarde ». Et si elle considère que « son cogito est historiquement daté », elle ajoute « Là où il me concerne, ce cogito, c'est en ce qu'il est une méthode, un parcours lucide ». Cette forme de lecture me semble bien plus adéquate au penser historique que les « affiliations » identitaires…

La marge, les regards obliques, le dévoilement et l'action, la pensée et la politique, l'histoire humaine comme promesse. Je souligne les pages de critique du terme « fraternité » inscrite dans une conception historique de la domination (qui ne peut être abordée comme un invariant), les femmes ne sont pas quasi immobiles dans leur état de subordination… le devenir historique, la promesse de l'égalité et de la liberté. Reste des difficultés liées, entre autres, à la « proximité des sexes ». C'est bien du coté des rapports sociaux et de leurs contradictions qu'il nous faut regarder. Donc « sursauter » et rejeter le terme même de « condition féminine », « Quand on me dit que je travaille sur « la condition féminine », je sursaute ; et je sais immédiatement que c'est une manière d'isoler la question du reste de la philosophie, de désamorcer la pensée qui pourrait surgir ».

Ce texte est suivi de trois lectures. « Comme un discours de la méthode », « Histoire et mémoire historique du féminisme », « Correspondante de guerre » et d'une conclusion « L'icône et après ». je laisse à chacun·e le plaisir de la découverte. Et je termine par une question soulevée : Comment les sexes font-ils aussi l'histoire ?

Lien : https://entreleslignesentrel..
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critiques presse (1)
NonFiction
24 août 2018
Dans Le Privilège de Simone de Beauvoir, Geneviève Fraisse approfondit dans un essai passionnant le concept de « privilège », souvent employé par la philosophe. Geneviève Fraisse invite son lecteur à plonger à ses côtés dans la généalogie de l’un des ouvrages fondateurs de la vie des femmes.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Il n’y a aucune hésitation, nous sommes d’emblée installés dans l’histoire, l’histoire longues des femmes à la conquête collective du savoir et de toutes les jouissances singulières qui s’y attachent. Tel est le premier Privilège de Simone de Beauvoir, celui de s’imaginer dans l’histoire, de plain-pied.
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Quand on me dit que je travaille sur « la condition féminine », je sursaute ; et je sais immédiatement que c’est une manière d’isoler la question du reste de la philosophie, de désamorcer la pensée qui pourrait surgir
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Le Privilège de cette femme qui pense, élucide, et décrit l’être collectif de la condition des femmes n’est que le privilège, les privilèges de l’être humain en général
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Je suis une femme » est une condition de la pensée, cela implique ni une définition de ce qu’est cette femme, ni une certitude quant à la sexualité de cette femme-là
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Le tribunal ouvert au procès de l’inégalité des sexes se déplace du coté de l’espace de vérité créé par le savoir et la connaissance ; en rupture avec le passé
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Vidéo de Geneviève Fraisse
Comment aimer son corps dans une société qui a longtemps cherché à dissimuler et à modifier celui des femmes ? Comment parler du corps quand sa représentation est toujours sujette à un regard normatif cherchant avant tout à façonner des corps performants et utiles ?
Chantal Thomas, de l'Académie française, est écrivaine et essayiste. Ses livres Souvenirs de la marée basse (2017), de sable et de neige (2021), et Journal de nage (2022) sont des évocations autobiographiques dans lesquelles elle révèle l'histoire de ses sensations et notamment son goût inconditionnel pour la nage et un mode de vie nomade, détaché des servitudes communes.
Geneviève Fraisse, directrice de recherche émérite au CNRS, est philosophe de la pensée féministe. Ses ouvrages La suite de l'histoire, actrices, créatrices (2019), et Féminisme et philosophie, (2020), À côté du genre. Sexe et philosophie de l'égalité (2010), ou encore La sexuation du monde. Réflexions sur l'émancipation (2019) et le féminisme, ça pense ! (2023), réintroduisent le sexe, le genre et le corps au coeur de la pensée philosophique et d'une réflexion renouvelée sur la nécessaire égalité entre les sexes.
Les extraits lus par Ambre Pietri lors de cette soirée mettront à l'honneur le corps, auquel les oeuvres de Chantal Thomas et celle de Geneviève Fraisse assignent une place prépondérante.
La rencontre est présentée par Fanny Arama, docteure en littérature française du 19e siècle.
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