Une petite ville brésilienne disparaît sous les eaux d'un nouveau barrage, probablement dans les années 1960 ou 1970 puisque la société Petrobras qui a été créée en 1953, est citée, dans le livre, comme employeur de certains des habitants.
L'auteur ne précise pas la localisation du barrage et de la ville, et ne s'intéresse pas non plus à ce qu'il va advenir des habitants expulsés de leur bourgade condamnée.
Non, ce qu'il tente avec cet ouvrage, c'est de rapporter quelques traits de ceux qui vivaient là, qui constituaient une communauté humaine, dans toutes ses composantes.
Consigner ce que chacun représentait dans ce groupe, ce qui le caractérisait ou, du moins, ce que ses concitoyens connaissaient de lui. L'auteur s'attache donc à des anecdotes, des
faits du quotidien, mais aussi des drames, qui avaient donné ses couleurs et son ambiance à la ville. Des histoires d'enfance, de bel amour ou d'amour désespéré, de haine et de vengeance, de fêtes religieuses, d'échecs et de faillites, d'obsessions, de jalousies, de maladies, de bonté, et même de résurrection...
En rendant aux habitants une part de leur histoire dans cette ville, l'auteur refuse que tout en soit perdu, noyé sous les eaux, définitivement.
Il ne consacre pas plus de deux ou trois pages à chacun, parfois quelques lignes seulement. Mais la
ville se dessine au fur et à mesure que l'auteur en parcourt les rues et les maisons, suivant la progression de l'eau qui les envahit peu à peu. Et de chaque maison ou fazenda, il rappelle les occupants, leurs noms, leurs activités, leurs relations de voisinage, leurs liens familiaux.
La ville était brésilienne, sans doute, dans ses habitants, dans ses coutumes et ses métiers, dans sa faune et sa flore. Mais ce qui se dégage du récit, pourrait être de n'importe quelle nationalité. Et l'auteur veut sauver de l'oubli, de l'inondation, ce qu'a été ce morceau d'humanité, en ce lieu précis.
Si les écritures et les styles sont très différents, s'il y a une continuité évidente dans le livre de
Oswaldo França Junior qui n'existe pas dans les «
Faits » de
Marcel Cohen, je retrouve pourtant un peu le même principe : un observateur, neutre et transparent, écrit des histoires brèves qui racontent, chacune, quelque chose de ce que nous sommes.