On ne peut guère commenter un pareil texte fait d'émotions révélées, suggérées ou tacites et qui nous sont transmises. Les mots pour donner un « avis » semblent grossiers à côté d'une telle poésie. Je m'y autorise quand même pour dire ma découverte, mon enthousiasme, mon émotion devant cette délicatesse, mon éblouissement, dans chaque phrase, dans chaque mot accolé au suivant, dans chaque son que l'alliance de ces mots nous renvoie, évoquant l'enfance, « le temps d'avant les mots », puis d'après, d'une poésie subjuguante.
Un livre émerveillant! Chaque paragraphe, et même chacune des phrases livre et délivre une telle émotion qu'on a envie aussitôt de la relire et de la lire encore, de s'en souvenir.
Jean-Christophe Galiègue "tourne" ses mots, les fait se répondre, s'enlacer, se distendre, se mettre en écho dans des assonances harmonieuses, pour ainsi rythmer ses courtes phrases qu'on aimerait presque couper pour en renvoyer à la ligne la seconde partie, ou la troisième parfois, de façon que physiquement elle ressemble à une poésie. C'est un « roman poésie ».
Et comment appeler ces phrases si particulières à votre style,
Jean-Christophe Galiègue, à votre écriture, qui se suffisent à elles-mêmes et résument une émotion, un sentiment? Des phrases semées entre deux étoiles...
Et puis, sur la route difficile du narrateur enfant en but à la haine parce qu'il est différent, il y a tout à coup la sombreur de la page du dictionnaire qui lui donne ce mot, celui de sa différence, un mot qui ne sera jamais nommé, parce que trop cru parmi les autres de la liste, dévoyé, déplacé, honteux sans doute et qui seul dans la bouche des autres élèves de l'école, du collègue, du lycée ensuite leur donne, croient-ils, le droit (quel droit ?) de malmener, brutaliser, se moquer, harceler, rejeter et possiblement tuer. Tuer à cause de ce mot.
Heureusement il y a la nature qui sauve, qui est là dans ses plus petits brins d'herbe pour aider, pour faire voir autre chose que les murs de l'école, des murs qui enferment. Alors l'enfant s'adresse parfois directement à la nature, lui écrit des « lettres », de vraies lettres qui commencent par « Chère forêt », « Chers nuages », des lettres à la nuit, à la neige, aux fleurs sauvages, au brin d'herbe (mon préféré je crois).
Un livre inclassable en vérité, un hymne à la nature, à l'amour, à la tolérance, au droit à la différence, à la VIE, qui a reçu le Prix du Roman Gay 2022 dans la catégorie Roman poétique.
Tout cela est précieux et rare et donne le désir de mieux connaître l'auteur. Et on peut le connaître ! Il est accessible et vous répond avec la même sensibilité, les mêmes mots, la même délicatesse infinie que lorsqu'il écrit ses livres... Un auteur rare.
Et pour choisir donner un extrait, comme c'est difficile! Chaque paragraphe ou chacune des «lettres» pourrait être mon extrait préféré. Quel serait donc le vôtre ?