La beauté des jours

Lå table était dressée.
Le père avait pris sa place au bout,il,attendait.Il y avait Emma,son mari et leurs trois filles,Jeanne et Rémy le père, la mère et la M'mé.
Sur la table dix assiettes.
Et une de plus à la droite du père.
Toutes les années c'était comme ça ,ce jour-là, on mettait une assiette pour le frère.
Une assiette qui faisait dates,et que Jeanne laverait avec les autres.Le frère, un enfant de sexe masculin,et qui aurait dû être l'aîné. Un mort-nė. Le début et la fin pris ensemble ,et qui avait ourlé la douleur infini du père.
La vie s'etait continuée avec les enfants suivants Jeanne,Emma,Sylvie et Isa.
Jeanne observait les visages.Personne ne regardait l'assiette.Ni la serviette blanche et la chaise poussée. Cette place vide allait pourtant fouiller profond,dans un chagrin ancien,dans le silence .Elle forçait la pensée du frère disparu et pourtant terriblement plus vivant que les quatre soeurs nées après.
Jeanne regardait le père. Il était fatigué. Il,était seul.Jeanne aurait beau faire il avait raté ce rendez-vous,le seul valable ,avoir ce fils qui aurait poursuivi la lignée, mais qui avait failli à sa naissance, à la reprise du nom,de la ferme, des prés, des machines.
Jeanne regardait à la dérobée le ventre gros d'Emma .Allait-elle avoir un fils?.

En exergue phrase d'Okakura Kakuzo

Le premier homme de la préhistoire qui composa un bouquet de fleurs fut le premier à quitter l'état animal: il comprit l'utilité de l'inutile.

- Les psys disent que c'est surtout un truc de filles, le retour aux amours d'avant.
[...]
Elle a ajouté : Les types, c'est moins con, ça préfère l'avenir.

J'ai mis du temps à comprendre, mais maintenant, je sais. Les femmes ne sont pas moins fortes que les hommes, non, ce n'est pas ça, mais elles renoncent. Elles laissent leurs rêves pour réaliser ceux des hommes.

Elle se sentait enfin en équilibre, comme lorsque, en de rares et brèves occasions, ce que l'on est parvient à rejoindre ce que l'on croit être, et se noue à ce que l'on fait. p.403

Le bonheur ça n'existe pas, on devrait arrêter de faire croire ça aux gens, ils seraient bien plus heureux...

Les yeux du père étaient fermés, paupières brunes, presque mauves. Jeanne avait grandi dans cette absence de regard. Elle venait de ce bourbier magnifique. Du doigt, elle a frôlé le drap.

La Tête Plate aussi, il me fait réfléchir. Comme quoi... Il dit que sa mère ne l'aime pas, comme s'il y avait une obligation à l'amour. Pareil pour les vies, il y en a qui laissent des traces et les autres pas. Et celles qui laissent des traces ne sont pas plus importantes que les autres. Et c'est pas vrai qu'on recommence à zéro. On ne recommence rien, on continue, comme on peut et du mieux qu'on peut. On peut juste essayer d'être la meilleure. Faire de son mieux, oui, ça, on peut.
Les regrets, c'est le pire. Je suis sûre qu'on oublie pas les belles choses quand on est de l'autre côté. Il reste forcément des trucs dans la mémoire, les abeilles qui butinent, les bêtes avec leurs petits, les chemins, tous les machins simples qu'on faisait. C'est les petits riens sans importance qui font les vies superbes. (p; 379-380)

Rémy est sorti leur dire de foutre le camp, mais les cons c'est comme les chiens, ça revient toujours à leurs rues. Ceux-là avaient leurs habitudes ici. Le plus grand avait un regard vide, ce vide l'autorisait à tout, même à pisser contre les murs. Pour qu'ils changent de quartier, Rémy avait répandu du répulsif. Du répulsif contre la connerie. L'odeur était partie avec la première pluie, la bande était revenue.

A la ferme non plus, on ne parlait pas de certaines choses, comme si les taire les empêchait d'exister.