J'ai terminé
Cris de
Laurent Gaudé, qui malheureusement souffrira de mes 2 précédentes lectures.
La voix d'
Oscar Lalo m'a beaucoup plu dans
Les contes défaits, tant et si bien que j'ai souvent chuchoté en lisant pour faire courir sur mes lèvres la mélodie de ses mots.
Je pensais trouver les mêmes qualités chez Gaudé mais son phrasé très court, très répétitif, haché, comme des tirs de Maxim, n'aura pas eu chez moi l'effet escompté.
Bien sûr, il sait écrire, le texte contient de quoi s'émouvoir et même de prendre quelques notes, ce qui ne m'arrive pas à chaque lecture, loin s'en faut, mais à trop démontrer le malheur et la tragique solidarité de ces jeunes soldats embourbés dans les boyaux des tranchées de la Grande guerre, avec autant d'emphase, j'ai eu l'impression que l'auteur était sorti de ses brodequins pour se regarder écrire, et cela m'a un peu sortie moi-même du contexte, pourtant prometteur.
Je garde surtout en tête l'excellent
Fratricide de
Patrice Quélard, qui ne sera lui, probablement jamais étudié au lycée comme son homologue, parce que trop dense, trop complet, trop réaliste, trop juste.
Quand l'un survole les différents points de vue de manière unilatérale, l'autre se positionne à hauteur d'hommes, glaçant de cruauté et de réalisme, mais débordant d'humanisme.
Le livre de Gaudé se présente comme un court roman choral dans lequel chaque protagoniste, du soldat au sergent, du permissionnaire au gazé crevant dans le trou d'un obus du no man's land, prend la parole et nous révèle à brûle pourpoint sous forme de minis monologues, ses états d'âme.
Il est bien dommage qu'ils s'expriment tous d'une même voix, sur le même ton, qu'il soit artisan, palefrenier, venu d'Afrique ou d'ailleurs.
Quand Quélard enrichit son récit et nuance les propos de chacun en fonction de son origine et de son intelligence émotionnelle, Gaudé est un monolithe.
Quand Gaudé met le focus sur une bataille sanglante, sur une ligne perdue dans le quotidien de la guerre, Quélard nous offre plusieurs points de vue, moult histoires dans l'Histoire et davantage d'humanité que dans ce trop court récit de Gaudé dont il ne me restera finalement pas grand chose.
À faire parler de manière si brève et d'une même tonalité tous ces protagonistes, ces témoignages, post-it collés sur un mémorial de douleur et de tragédies, il nous protège certes de l'oubli, mais ne nous permet pas d'approfondir ni la réflexion, ni les émotions.
J'ai néanmoins acquis
Eldorado, curieuse de voir si le style et la construction changeront dans un genre différent.