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Salina les trois exils ou les bienfaits du recyclage.
Le théâtre ayant probablement encore moins d'adeptes que la poésie chez les visiteurs de librairies, Laurent Gaudé et Actes Sud ont fait de cette pièce un roman. Excellente idée, comme si souvent chez l'auteur et l'éditeur.
Je n'ai jamais aimé qu'on me raconte des histoires. Tout petit déjà, pour m'endormir, ce n'était pas mon truc. Ca ne s'est pas arrangé avec l'âge bien que… si on y met quelques formes…
Bon, Laurent Gaudé a cette écriture qui me parle associée aux indignations qui me chatouillent. Je pense qu'il pourrait me lire ou me réécrire les pages jaunes de la Creuse en réussissant à me captiver. Mon objectivité est donc mise à rude épreuve, c'est vrai. Bref, Gaudé, c'est top.
Ai-je besoin de préciser que j'ai adoré ce bouquin ? Ai-je besoin de préciser que j'aime que Laurent Gaudé me raconte une histoire ?

J'ai aimé avoir cette impression d'être au coin du feu à écouter l'ancien, d'avoir la sensation que le temps s'est arrêté pour laisser à la nuit, le temps qu'il faut à une vie pour se répandre. Et puis ce sentiment que chaque virgule est une apnée, chaque point un sursis, quel pied !!!
En fait d'ancien, dans Salina c'est plutôt un ancien depuis moins longtemps que d'autres qui raconte mais le résultat est le même. L'Afrique, ce continent qui m'a toujours attiré, m'a happé dès la première page. Entre conte et légende, l'envoutement a été total. Je me suis vu sur une barque de pêcheur, écoutant parmi les autres, l'histoire de Salina racontée par Malaka. Malaka, lui « fils de l'énigme » en route pour porter sa mère vers sa dernière demeure sur l'île cimetière.

« Moi, Malaka, fils élevé dans le désert par une mère qui parlait aux pierres, je vais raconter Salina, la femme aux trois exils. Je vais dire ma mère qui gît là au fond de la barque, et le monde qui apparaîtra sera fait de poussière et de cris. »

« Moi, Malaka, venu de si loin pour vous porter ma mère, je dois raconter maintenant le temps qui passe, inutile. Les heures de désoeuvrement et d'errance. Salina n'est plus rien pour personne. C'est de ce jour qu'elle commence à parler aux pierres, à haranguer les serpents. C'est de ce jour l'éclipse de son esprit, parfois, qui lui fait maudire les étoiles. »

Entre ces deux citations, une vie, la condition féminine, des traditions, une vengeance, le tout porté par une écriture qui correspond à mes attentes. le sujet est dur, violent mais rien n'est gratuit. Chaque mot est nécessaire, chaque mot est à sa place. Ce texte est empreint de poésie, comme un baume apaisant la rage de Salina.
Trois exils, trois ex ils… encore une perle.

S'il te plait Malaka, dessine-moi encore Salina.
S'il te plait m'sieur Gaudé, dessine-moi d'autres lettres sur d'autres pages.
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Le jour des origines, une scène terrible, déchirante ouvre le dernier roman de Laurent Gaudé qui, une fois de plus, ne déçoit pas, bien au contraire. Après avoir lu La mort du roi Tsongor, La porte des Enfers, Eldorado et Écoutez nos défaites, il ne fallait pas manquer celui-ci.

Dans Salina, les trois exils, il choisit la forme littéraire qui lui convient le mieux, celle du conte sans dater précisément son récit et sans le situer vraiment géographiquement, même s'il est permis d'en avoir une petite idée.
« Un petit être de chair est là, depuis des jours, des semaines, d'aussi loin qu'est parti cet homme étrange, et il pleure avec force, sans se lasser. » Une seule personne a le courage de braver l'indifférence des Djimba, leur peur devant ce bébé inconnu : Mamanbala et c'est elle qui l'appelle Salina, à cause du sel des larmes versées.
Après un préambule aussi fort, l'auteur propulse son lecteur à l'autre bout de la vie de Salina, au moment où Makala, son fils, revient avec une caravane de la tribu. le lendemain, ils partent tous les deux pour ce qui est le dernier voyage de Salina, au-delà du Mont Tadma qui ferme l'horizon.
Salina sait qu'elle va mourir et Makala veut lui trouver une sépulture sur une île cimetière qu'il découvre en arrivant en ville. L'auteur conte cela avec douceur, sensibilité comme lorsque le fils nettoie le corps de sa mère.
Pour qu'elle soit acceptée sur cette île-cimetière, il doit raconter la vie de la défunte et c'est dans une barque, avec d'autres barques transportant des témoins que Makala commence à raconter. C'est à la fois passionnant et terriblement poignant.
Plein de vie et d'amour, ce roman m'a fait partager une existence marquée par la violence, une violence insupportable, injuste et perfide mais la magie du conte opère jusqu'au bout parce que Makala, le fils aux deux mères, a raconté jusqu'au bout la vie de Salina.
Laurent Gaudé, tout en charmant son lecteur par une écriture fluide et sensuelle, donne une vraie leçon de vie : « Elle sait, elle, que la vie se soucie peu de la volonté des hommes, qu'elle décide à leur place, impose, écarte les chemins qu'on aurait voulu explorer et affaiblit ce qu'on croyait éternel. »

Comment ne pas partager ce qui est dit et réfléchir en lisant cette phrase ? Comment ne pas prendre un plaisir infini en découvrant cette existence même si la révolte bouillait en moi devant tant d'injustice et de malveillance envers cette femme hors du commun ?


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Conte mythique sans âge ni lieu véritablement identifiable, ce bref récit nous fait découvrir l'histoire tragique de Salina, bébé abandonné par un voyageur et recueilli par une tribu africaine. Heureuse pendant son enfance mais anéantie par un mariage forcé et un amour impossible, Salina connaîtra plusieurs fois l'exil, menant courageusement une existence rude et solitaire, portée par son esprit de vengeance puis par son amour pour son dernier fils.


Même si tous les ingrédients du conte africain sont réunis et nous transportent merveilleusement dans l'ambiance colorée d'un village, minérale du désert, sanglante des guerres tribales, poétique et onirique du passage qu'est la mort, Salina est avant tout une tragédie antique aux sonorités mythologiques, où l'héroïne, qui voit le bonheur lui être injustement et irrémédiablement arraché, combat vainement les coups du sort, aveuglée par l'amour et la haine.


L'écriture est poétique, portée par un souffle épique, et retranscrit magiquement, au travers du récit du fils de Salina, l'aveugle et violent combat qu'est la vie, jusqu'à son possible apaisement final.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Un début avec un cavalier qui surgit de nulle part et arrive dans un village, ça vous rappelle pas quelque chose ? « Le soleil des Scorta » de Laurent Gaudé bien sûr. Mais la comparaison s'arrête là avec son roman culte, il faut plutôt voir du côté de « La mort du roi Tsongor » pour les comparaisons, et le genre surtout. Un conte moderne, une fable mythique, peu importe le qualificatif, on est embarqué dans la maîtrise de l'écrivain conteur.
Un bébé empli de cris du désert est donc déposé par ce cavalier mystérieux devant des villageois médusés, circonspects et dubitatifs.Sissoko Djimba ordonne de laisser faire le cours des choses sans devenir acteur, la chaleur accablante finira bien par faire taire cet avorton de chairs hystérique. Ou les hyènes une fois le soleil vaincu. C'est finalement Mamambala qui défiera les ordres, nommera Salina et l'allaitera. le début d'une intégration défaillante, d'une vie de souffrance et de violence, d'une épopée de vengeance. Tout cela est conté bien plus tard par un de ses fils pour trouver un endroit décent à la dépouille de Salina.
Pas grand chose à dire, c'est admirable comme souvent avec Laurent Gaudé. Captivant, parfait, académique presque. Juste un peu court peut-être, on est à peine entré dans cette histoire fabuleuse que c'est déjà fini.
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Ce roman nous plonge dans un récit de poussières et de cris. Malaka se fait conteur, lui le dernier fils de Salina, celui qui fera de sa mère une légende.

Salina, bébé abandonné aux larmes de sel à l'entrée du village, trouvera pour seul réconfort les hyènes et les bras de Mamambala. Elle sera toute sa vie l'étrangère, celle qui résiste à la soumission, à la cruauté du clan.

Brisée, condamnée à l'exil, elle continuera d'avancer, avec la colère et la vengeance comme guides. Elle sera comme une tempête de sable, un rocher du désert, sauvage et forte.

Cette chaîne de voix qui conte à travers Malaka, porte tous les cris qui habitaient Salina, ses trois exils, et aussi l'amour qui sauve de tout, apaise les esprits, met fin à la guerre.

Le récit de Salina est emporté par la mémoire des auditeurs, dans le vent, dans la poussière du désert, dans les vagues. Il devient un chant de résistance et d'espoir, pour toutes les femmes brisées, soumises, piétinées.

Malaka, le dernier fils, poursuivra sa route après avoir fait éclore la légende de Salina. « Tout s'achève et tout commence en même temps. »

Un récit envoûtant, déchirant, à la voix de sable du désert, de sang et de sel. On marche dans les pas du conteur.
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Laurent Gaude, après une pièce de théâtre, a fait un roman de Salina, drame antique venu d'Afrique. Salina qui n'a que sa haine et son désir de vengeance pour laver l'affront des hommes. Forcée d'épouser le mauvais frère, toute sa vie ne suffira pas à réparer ce qui a été brisé en elle.

Que l'on soit africaine ou d'un autre continent le poids insupportable des hommes est le même. Mais en Afrique les femmes, démunies face à la primauté masculine et aux traditions, n'ont d'autres choix que de s'incliner, et les rares rebelles à subir l'opprobre de tous ou presque.

Laurent Gaudé, dans le style très particulier qui est le sien, fait une fois de plus mouche avec ce conte africain dédié à une femme qui refuse son sort. Les mots et les images de la tragédie de Salina, puissants et beaux, traduisent avec vraie amplitude une réalité universelle et intemporelle.

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Le récit de Salina, une femme puissante, m'a enchanté et m'a suivi plusieurs jours. Malaka raconte avec poésie la vie de sa mère vers le cimetière. La porte va-t-elle s'ouvrir ?
Résumée en peu de pages, la vie de Salina est captivante. Tragique et très beau. Envoutant.
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Au tout début, un pleur de bébé ; un cri vient de la montagne Tadma que l'on ne franchit pas. Ce sont les femmes qui l'entendent d'abord. Puis les pleurs deviennent plus nets et les femmes et les hommes du clan Djimba se rendent à l'entrée du village pour attendre ce qui vient. Un cavalier apparaît.
Sissoko Djimba, chef du village, et ses guerriers regroupés attendent. le cavalier dépose alors au sol le paquet de linge qui pleure encore, puis il rebrousse chemin. « Chez les Djimba, personne ne bouge. »
Malgré le soleil ardent, l'enfant pleure toujours. le soleil décline, les hyènes approchent. Alors qu'elles sont sur le point de s'emparer du bébé, Mamambala, sans demander à Sissoko Djimba, traverse la foule, saisit le paquet, le prend dans ses bras, présente son sein au petit corps affamé qui se révèle être une fille et prononce alors ces mots : « Par le sel de ces larmes dont tu as couvert la terre, je t'appelle Salina. »
Après nous avoir décrit le début de la vie de Salina, Laurent Gaudé nous emmène à l'autre bout de sa vie, quand, « vieillie par une vie entière de poussière, de combats, d'errance et de rage », vivant près d'une oasis, elle entend à son tour un cri. Elle se presse pour aller au devant des cavaliers où doit se trouver son fils, Malaka, fils qu'elle a confié aux caravaniers trente-sept jours plus tôt. Mais, maintenant, monte de la colonne le cri de celui qui annonce la mort. Elle se fige. Et puis, son fils apparaît. Enfin ! Elle sent alors qu'il n'a plus besoin d'autres voyages. le temps est venu, c'est décidé et elle lui dit : « demain nous partirons. » Ils vont prendre la direction du mont Tadma, cette barrière de montagnes.
« le Mont Tadma était pour eux la limite des mondes » et c'est vers lui qu'ils marchent. Salina va petit à petit faiblir mais persévérer jusqu'à ce qu'elle ne soit plus en mesure de marcher. Alors, Malaka va la porter. Il a compris que sa mère va mourir et qu'elle veut trouver une terre où reposer. Ils arrivent à un col. Malaka aperçoit pour la première fois l'autre face du monde. Alors qu'il s'apprête à poser Salina, accrochée à son dos, il ne le fait pas : elle est morte. Il lui faut donc trouver un lieu où l'ensevelir. Il fait la toilette de sa mère morte, construit un brancard et descend dans la vallée où il croise un fleuve et les premiers hommes depuis leur départ.
Un rempart se dresse. Il prend place dans la foule et passe la grande porte. Il déambule et débouche alors sur une place qui donne sur la mer où se tient un vieil homme à qui il prononce le mot « cimetière ». le vieil homme lui indique une île, l'invite à monter dans une barque pour s'y rendre.
Lorsque Malaka lui demande s'il pourra enterrer sa mère là-bas, celui-ci répond : « C'est le cimetière qui décidera » car le cimetière est sacré. La porte épaisse est close et aucun homme ne peut l'ouvrir. « Il faut embarquer les morts et pendant tout le temps que dure la traversée, raconter ce que fut la vie du défunt. le cimetière entend le récit. Et au terme du voyage décide si la porte doit s'ouvrir ou pas. » Et Malaka va alors entamer le récit de ce que fut la vie de Salina, la femme aux trois exils, cette femme recueillie par Mamambala et élevée come sa fille mais qui ne fut jamais acceptée dans le clan des Djimba.
Salina va connaître un destin parsemé d'épreuves. Elle est une véritable héroïne qui ne baissera jamais les bras et se relèvera toujours.
C'est une belle fable, un beau conte que nous livre Laurent Gaudé dans ce beau roman épique et poétique qui se passe dans un temps reculé au milieu du désert avec cette héroïne puissante et sauvage dont la vie sera faite de solitude et de souffrance. Un roman envoûtant qui m'a charmée : un petit bijou !
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Comme certaines des oeuvres issues du prodigieux imaginaire de Laurent Gaudé, Salina tient à la fois de la tragédie grecque et du conte fantastique. C'est le roman d'une exilée racontée par son fils, qui retrace le bouleversant destin d'une femme portée par sa soif de vengeance.

J'ai beaucoup lu Laurent Gaudé ces dernières années mais je crois que son admirable talent de passeur d'histoires ne m'aura jamais autant touchée que dans ce récit onirique d'une grande finesse et d'une formidable richesse.

Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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Salina, nommée ainsi à cause du sel de ses larmes…

Salina, enfant abandonnée dans le désert…

Salina, une femme, à la merci des règles d'une société archaïque.

Salina, une fable sur la cruauté du désert et des hommes.

Son fils racontera son histoire, sa vie devenue un mythe de la tradition orale.

J'accompagne Salina dans la chaleur et la poussière du désert… et je suis tout étonnée en relevant les yeux de voir par ma fenêtre la blancheur du froid de l'hiver. La magie de la qualité de l'écriture de Laurent Gaudé m'avait transportée au pays des sables…
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