Un été sans juillet
Sorti de la pile, se superbe récit m'a séduit au-delà de toute attente. L'été en question est celui de 1962. J'avais treize ans et Larbi héros malgré lui 17.Lui à Guelma à 114 km de Constantine et moi petit parisien ignare politiquement jusqu'à remettre à mon prof de Français une rédaction sur le thème « où aimeriez-vous passez des vacances ? » dans laquelle je répondais : A Cuba !!! ses plages, ses palmiers etc .(mon prof bienveillant, m'avait, faute de télé, recommandé de lire les journaux….)
Le parti pris par
Salah Guemriche est justement de tourner depuis l'intérieur , depuis un quartier de Guelma, autour de l'évènement de Juillet 1962, soit du référendum sur l'autodétermination, le mois qui précède et ceux qui suivent en dehors du mois de Juillet pendant lequel le jeune lycéen Larbi Foulène ( L'arabe untel) est dans le coma suite à un attentat.
De tourner d'une manière métonymique autour de lui et dans la grande confusion que cela a produit, à savoir que de l'évènement local est censé refléter l'évènement national voire mondial (puisque Ben Bella est censé se rendre à l'ONU dans cette période pour faire reconnaitre l'Algérie indépendante).
Cette confusion est bien celle que j'ai ressenti à l'époque des
« évènements » où attentats et fusillades ponctuaient les nuits de la capitale sans qu'on puisse y comprendre grand-chose ; et la même chose se produisait en Algérie sans qu'on sache démêler vraiment qui était la « Force » et qui étaient les méchants des harkis, des chrétiens, des juifs, ou de l'OAS (encore que pour cette dernière avec
Pasqua aux commandes….).
On apprend beaucoup dans cette lecture. Notamment que
« hébreux » et « arabe » est le même mot dans cette langue, à cela près que les deux lettres centrales identiques placées différemment dans le mot lui donne le sens choisi. de fait l'écriture permet de « déporter » l'hébreux ou l'arabe comme on le souhaite et d'entériner ainsi la lutte millénaire.
On apprend que le département français de Constantine portait le numéro 93 ( !) Alger 91 et Oran 92 (et après une courte recherche, qu'une loi du « Général » de 1964 a créé les départements périphériques de Paris dont la Seine Saint Denis) avec les mêmes numéros tout juste recyclés sans aucune pudeur.Ce qui montre bien le cynisme et le mépris qu'avait la clique au pouvoir pour les Français et les Arabes d'où qu'ils puissent venir et quelles que soient leurs opinions.
Ah ces années 60 berceau de toutes les corruptions, des passes droits, des films les plus inspirés de
Mocky…
On apprend aussi qu'il s'en passait de belles dans les hammams, et on assiste ému au dépucelage savoureux du jeune Larbi.
C'est vraiment un cadeau que ce bouquin qui sommeillait sur mes étagères. On doit le trouver d'occasion puisque qu'il est sorti en 2004 pour le 50° anniversaire du début de la « guerre d'Algérie » en 1964.
Qui s'en souvient ?
Belle découverte en tout cas, et surtout rare.