Une collégienne de 16 ans grandie loin de sa mère, absente en raison de son emploi à l'étranger. Elle sa pour soutien Oncle Louis, un septuagénaire fantasque. Mais un jour notre sage collégienne décide que la vérité doit être dite : sa mère travaille au Sémimaris, un bordel sur les hauteurs d'Honfleur et elle veut travailler avec elle.
Un récit étrange ou de temps en temps l'irréel se mélange au réel. Mais l'accumulation des personnages loufoques et des situations incroyables fait que ce récit est peu attractif.
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Il a l'instinct de la hyène et les prémonitions du serpent. Il savait comme tout le monde que j'aimais ma moustache, la chérissais, la taillais, la lissais avec la ferveur du rabbin caressant le parchemin de la Torah. On peut rire mais ma moustache était un élément constitutif de mon visage au même titre que mon long nez, mes lèvres, mes yeux ou mes cheveux. Cent fois on a tenté de me persuader de la raser mais personne n'est parvenu à fléchir ma détermination. Alors, tu penses bien, quand il a vu ma lèvre supérieure glabre, Messaoud a tout de suite compris qu'il avait fallu un événement grave ou un charme supérieur pour obtenir ce sacrifice. Tu peux être sûre également que lorsque nous arriverons au Sémiramis et que Margot me verra sans moustache elle n'aura besoin que d'un regard vers toi pour comprendre la nature de nos rapports et l'étendue de ta domination.
On trompe, on humilie les enfants, on traumatise les adolescents, on les enfonce dans l'ignorance pour finalement mieux dominer, terroriser, manipuler. Oui je veux pouvoir dire à haute voix : « Vagin ! Ovaires ! Trompes ! Clitoris ! Lèvres ! » Je n'offense personne. Se taire, évoquer des euphémismes de troubadours au rabais, c'est vitrioler l'innocence, défigurer la fraîcheur de l'amour pour ce sexe de femme qui représente tout ! Tu entends, Aurélie ? Tout : la sublimation du plaisir, la tendresse, la dévotion, le don de soi, la reproduction !... Et on devrait taire ce sexe ? Cette matrice magique, cette usine à rêves, à éblouissements ?...
Ma séduction est ma seule force !... A seize ans, tu ne peux pas t'imaginer à quel point c'est important de dominer le monde des adultes qui nous tiennent et nous maintiennent en totale dépendance : argent, morale, avenir... Quelle adolescente n'a rêvé de pénétrer l'univers despotique de ceux qui décident et d'y faire régner sa loi ?... C'est cela que je veux... C'est tout cela que j'ai eu avec toi !... En quelques heures... Et c'est toi qui vas me faire entrer dans la citadelle interdite avec en prime, le sacrifice de ta moustache en offrande expiatoire tel Samson qui abandonna sa puissance et sa chevelure pour l'amour de Dalila.
Il avait compris, lui, le fou des asiles d'aliénés de Genève, interné par des parents procéduriers, affolés à l'idée qu'il était en train de dilapider le patrimoine familial, lui, le laid, le maigre, le pervers, le flambeur, le drogué, le maniaque des costards aux prix ahurissants payés par des chèques en bois, lui le fugueur, le menteur et plus impardonnablement encore : le jouisseur, celui qui avait dit oui à la vie, oui à la mort, il était là, tétanisé devant une fillette de seize ans qui lui avait tendu les lèvres et il avait hésité, la seconde qui fait la différence.
Chaque fois qu'il ouvre la bouche c'est pour cracher la haine, la calomnie. Tout est mauvais en lui. C'est un serpent. Je l'ai peint comme ça... Ses paroles sécrètent le venin qui suinte aux commissures de ses lèvres. Quand il regarde le ciel, des tortillons de merde coulent le long de ses joues. C'est Satan.