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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
De 1585 à 1592, il y a un vide dans l'histoire de William Shakespeare. de ces « Années perdues », l'autrice nous propose un récit où l'imagination, sans aucun doute, peut en remontrer au réel. « Pour un écrivain, rien ne peut être plus fécond qu'un mystère de cette envergure. » (p. 9) Ainsi, le jeune résident de Stratford-upon-Avon épouse Anne Hathaway. Rapidement naissent trois enfants, mais William se rêve sur les planches et se sent piégé dans la vie établie et étroite d'un pater familias. Quand sa chance lui est donnée, il la saisit et rejoint la Compagnie des Comédiens de la Reine. Être ou ne pas être, il a choisi : il sera comédien ! de villes en villages, évitant la peste, la troupe se rapproche de Londres, la ville bouillonnante où un nouveau théâtre est en train de s'écrire. Shakespeare rencontre l'impressionnant Richard Burbage, acteur pour qui il créera de nombreuses pièces, le fascinant Christopher Marlowe ou encore son protecteur, le raffiné et élégant Henry Wriothesley. « Les historiens sont impuissants, les biographes font face à un mur, la romancière se délecte. » (p. 154) Quand la trace de l'auteur élisabéthain reparaît dans L Histoire, la parenthèse fictionnelle se referme. Et sur une dernière phrase tonitruante de double sens, l'autrice clôt un morceau de sa propre histoire.

Stéphanie Hochet entrecoupe son récit imaginaire en parlant de sa propre enfance et de son désir de fuite. Elle raconte la puissance créatrice du départ, voire de la disparition, et de la transgression. Elle mesure également la place de Shakespeare dans son identité d'autrice. En évoquant son cousin Thierry et les brimades verbales dont il a souffert, Stéphanie Hochet parle de la famille-ogre de laquelle elle s'est échappée, pour sa propre survie. Construisant en parallèle sa fiction shakespearienne et l'histoire à rebours de sa jeunesse, l'autrice nous montre ses propres années perdues, mais surtout le ressort que celles-ci donnent au reste de son existence.

Dans chacun de ses textes, Stéphanie Hochet m'emporte ailleurs, ici dans l'Angleterre élisabéthaine qu'elle a longtemps étudiée, période qui me fascine également. Ayant refermé ce texte après une lecture enchantée, j'ai plus que jamais envie de relire A Midsummer's Night Dream, mon oeuvre préférée de Shakespeare.
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On s'interroge souvent sur la façon dont une oeuvre trouve un écho particulier en nous, il est néanmoins très rare de voir cette question littéralement s'incarner sous la plume d'un écrivain. Loin de la démonstration intellectuelle, avec le talent narratif qu'on lui connaît, Stéphanie Hochet explore toutes les dimensions, du parallèle à l'osmose dans un texte à l'imbrication virtuose et aux origines très personnelles. J'ai déjà eu l'occasion de louer la précision de son écriture mais ici j'ai été soufflée par sa performance littéraire et par les différents niveaux de sa composition.

Puisque William Shakespeare en est le héros, cette pièce se jouera en plusieurs actes mais deux des personnages se partageront la première personne, ce "je" dont on dit qu'il peut être un autre, W.S et S.H. le thème pourrait en être l'absence et le mystère qui l'entoure. Ces sept années entre 1585 et 1592 au cours desquelles William a disparu et dont on ignore tout. Il a laissé sa femme Anne et leurs deux jeunes enfants à Stratford pour suivre une troupe de théâtre jusqu'à Londres. Entre ce moment et la représentation de sa première pièce c'est le vide que seuls les romanciers peuvent être tentés de remplir par la fiction. Mais pour Stéphanie Hochet subjuguée à l'adolescence par l'oeuvre du dramaturge le fil qui les relie est bien plus complexe. Il touche à quelque chose d'essentiel, de vital qui implique d'aller explorer les ressorts de la violence dans ce qu'elle a de plus intime. Ce qui se joue là prend alors une intensité singulière tandis que l'autrice reconstitue en parallèle sa vision des "années perdues" de Shakespeare et les événements tragiques de sa propre histoire. Dans ce récit d'apprentissage à double niveau elle met au jour le pouvoir salvateur et inspirant de l'art ; elle s'interroge sur la façon dont Shakespeare a si bien appris à saisir la noirceur de la nature humaine à l'aune des expériences vécues elle-même. La construction en miroir est percutante, le parallèle est sidérant.

Ce que nous offre Stéphanie Hochet est à la fois un poignant éloge de la fuite et un formidable tribut aux formes artistiques qui permettent d'être soi et aussi tous les autres. En plus de - by the way - vous sauver la vie.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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WILLIAM de Stéphanie Hochet aux éditions @rivages est un chef d'oeuvre éblouissant, d'une intensité rare qui se déguste de bout en bout. Sous forme de pièce de théâtre en plusieurs actes,  WILLIAM retrace les 7 années de disparition de William Shakespeare entre ses 21 et ses 28 ans. L'autrice, à travers l'exil du jeune WILLIAM  mène une réflexion sur son propre parcours jusqu'à sa transmutation en autrice telle Shakespeare, devenu acteur, dramaturge et poète dans ce laps de temps qui demeure une énigme, un mystère absolu.
Shakespeare, de ses jeunes années jusqu'à son union prématurée avec Anne Hattaway,  la naissance de sa fille aînée, ses jumeaux puis son départ brusque après avoir intégré une troupe de théâtre de passage dans Stratford, sa petite ville, ses débuts dans la troupe de la Reine, tout est conté, décrypté.

WILLIAM, d'une plume hypnotique, élégante, fine, est un roman  métaphysique qui aborde la question de l'être et son devenir mais aussi de ses soufffrances, ses errances à travers des thèmes omniprésents dans l'oeuvre de Shakespeare, l'aliénation des  aînés, la quête artistique, l'androgynie,  le désir de fuite,  le suicide.
À la fois psychanalytique, roman d'apprentissage, WILLIAM dans sa narration en trois actes, mêle les points de vue de Shakespeare, ses expériences dans un style à la fois vibrant et vivant car il interpelle sur cet universel, l'émancipation et la liberté à travers l'art. Il allie la modernité de l'oeuvre de Shakespeare dans nos vies à travers celle de l'autrice. Il évoque nécessairement les personnalités qui influencent nos existences comme ce fut le cas pour Shakespeare avec le ténébreux Richard Burbage qui lui inspira Richard III.
WILLIAM de Stéphanie Hochet évoque aussi bien le tragique que le merveilleux des êtres à travers l'écriture romancée de la vie de Shakespeare pendant ses années perdues.
Comme l'autrice,  j'ai étudié Shakespeare à l'université, j'ai aussitôt été fascinée autant qu'emportée par son oeuvre. Il est un dramaturge et poète inégalable dont on ne revient jamais d'autant quand il fait écho à votre vie. Comme Shakespeare et l'autrice, moi aussi j'ai fugué hors de ma vie étouffante plutôt que de subir cette aliénation de mes aînés.
WILLIAM de Stéphanie Hochet est une lecture indispensable car elle nous offre un regard introspectif à travers l'oeuvre de William Shakespeare. Un roman à lire absolument pour celui qui cherche à s'élever
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De 1585 à 1592, personnes ne sait quelle aura été la vie de William Shakespeare. Une période fondatrice de son oeuvre à venir et pourtant aucune trace ne demeure. Avec une grande imagination, l'autrice nous embarque dans cette Angleterre sombre et violente, empestée, qui forgera l'avenir du dramaturge.

William aura fini par suivre son idéal, devenir acteur. Pour cela, il lui faut quitter sa femme dévouée, Anne, ainsi que ses trois enfants, mais avant tout, un carcan familial devenu étouffant.

Nous suivons donc, un acteur, un écrivain débutant, à travers de nombreuses rencontres, son besoin de reconnaissance envers ses pairs, mais aussi du public.

Sa fascination pour la couronne et la force féminine qui s'en dégage, prémisses de grands changements, son regard face à la religion et ses ambiguïtés, ses conflits et ses jugements, la noirceur des villes, leur pauvreté et la violence de chaque instant qui y règne.

Et puis il y a Richard, ce monstre, ce comédien qui devient pourtant un modèle, car il sait utiliser la noirceur qu'il a en lui pour transcender son jeu d'acteur, cet homme adulé autant que craint, le jeune William aspire à lui ressembler, tout comme il aspire à retrouver dans ses futures créations la "puissance au service de la destruction".

Le monde est un théâtre. L'histoire a été façonnée par quelques monstres.

Un personnage ambigu, tout comme le sont les sentiments de William à son égard.
Une plongée fascinante bien que fictive dans cette période charnière de la vie du dramaturge, mais dont il ne reste malheureusement aucune trace aujourd'hui. L'autrice se dévoile également, sur ses propres tragédies, infiniment sombres elles aussi, sur la force puisée dans la lecture de ces oeuvres complexes autant qu'emblématiques.

Je serais bien resté quelques pages de plus dans cet univers envoûtant, où le monde du théâtre est en plein effervescence, porteur de l'usurpation de genre, du travestissement sexuel, de la dénonciation, de l'explosion des sens. Un livre qui ravira les amoureux de Shakespeare comme ceux qui n'arrivent pas à lire une de ses pièces en entier.

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Ce roman m'a surprise 😲 son titre et le résumé de la 4ème de couverture ont fait écho à un roman coup de coeur, un bijou partagé sur ce compte : Hamnet de Maggie O'Farrell. Je pensais donc me plonger dans l'Angleterre élisabethaine. Et en effet, l'intrigue est similaire : l'autrice propose de suivre la destinée de William Shakespeare quand il quitte son village natal de Stratford-upon-Avon pour suivre une troupe de comédiens. Quand il abandonne sa femme et ses 3 bébés dans la maison de ses parents pour vivre -ivre de liberté-sur les routes au sein d'une troupes de comédiens.

Mais surprise, Stéphanie Hochet prend le parti pris d'interrompre régulièrement son récit dans l'Angleterre du XVIème siècle pour nous confier des pans entiers de son enfance traumatisante. Il faut oser mettre "je" dans un roman inspiré par la vie du plus célèbre des dramaturges anglais ! le parallèle est ainsi fait sur la noirceur de l'âme des hommes et le pouvoir salvateur de l'art, sur le carcan des destins tout tracés par des familles castratrices et la liberté des chemins bucoliques. Une construction en miroir sur des thématiques comme le suicide, les fugues, l'androgynie, l'éducation toxique d'une figure paternelle.

Ce récit romanesque offre des pages magnifiques sur le métier d'acteur et illustre les tourments de la création. William écrit ses premières pièces et Stéphanie Hochet imagine les rencontres, les discussions, les événements à l'origine des "vers blancs" lyriques de Shakespeare. A travers les lignes, je perçois toute l'admiration de la romancière pour Shakespeare avec qui, indocile, elle revendique la quête de la liberté.
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