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3,66

sur 2815 notes
Je n'avais pas encore découvert Michel Houellebecq, voilà qui est désormais fait ! Et, apparemment, c'est même bien fait, car ce livre m'a plu.
Il m'a même beaucoup plu.
Le regard critique et ironique que Michel Houellebecq porte sur la société me semble bien venu. A l'ère des "fell good books", je crois qu'il est nécessaire d'avoir des écrivains comme ça, des écrivains qui ose critiquer le monde qui les entoure et être pessimiste.
Car "Extension du domaine de la lutte" est un livre idéal pour déprimer. Mais on a besoin d'auteurs comme ça, d'auteurs qui ose porter un regard sur la douleur du monde. Et Houellebecq le fait très bien.
En véritable sociologue, il analyse les moeurs de notre société, avec finesse, sans pour autant abandonner l'aspect littéraire de son écrit.
Car, l'auteur des "Particules élémentaires" a un véritable talent d'écrivain. Sans avoir un style exceptionnel, sidérant, à la Balzac ou à la Racine, il sait écrire, écrire simplement, mais très correctement. Et il nous offre, avec Extension du Domaine de la Lutte, un livre intéressant, fin et intelligent.
Un texte pertinent, qui fait réfléchir sur les maux de notre société actuelle.
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L'histoire d'un homme dans la trentaine, boulot bien payé, sécurité de l'emploi, appartement à Paris, mais dépressif après une rupture amoureuse, et sans le moindre ami. Situation qu'il a l'air d'accepter avec philosophie, ayant de toute façon perdu toute envie, de quelque nature que ce soit.

Lors d'un déplacement professionnel, il devra faire équipe avec un homme irrémédiablement laid, qui tente tout de même de jouer dans la cour des séducteurs. Un peu gêné d'assister à ce combat perdu d'avance, à ces tentatives de drague qui ne peuvent que s'achever sur un refus cruel, la narrateur prend conscience que le capitalisme a également envahi le champ amoureux : certains accumulent toujours plus de succès auprès de l'autre sexe, tandis que d'autres vivent dans une misère sexuelle et affective dont ils ne pourront jamais se sortir.

On ne peut pas dire que Houellebecq joue beaucoup sur l'effet de surprise dans ses romans : comme héros, un homme célibataire et dépressif, et comme thème, la misère sexuelle du monde moderne. Curieusement, même en parcourant son oeuvre sans tenir compte de l'ordre chronologique, j'ai toujours l'impression d'une certaine progression dans sa description de la société. L'histoire renvoie de manière saisissante à la multiplication des meurtres de femmes par des « Incels » en Amérique du Nord. Je me suis assez peu intéressé à l'écrivain en tant qu'homme, et je ne sais pas si ce qu'il écrit correspond à ce qu'il pense, mais la description du phénomène est tellement réaliste qu'il me semble valoir la peine d'être suivi de près.

Je range mon engouement pour l'auteur dans la même catégorie que mon récent goût pour le café froid : je sais que ça va être amer et que je vais garder cette amertume en bouche un petit moment, et que n'importe quelle autre boisson aurait bien mieux contribué à me rendre la vie meilleure sur le moment, mais quand j'aperçois une tasse, je ne peux pas m'empêcher de me précipiter dessus.
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Je n'avais jamais lu Michel Houellebecq et connaissant un peu le profil provocateur, j'ai eu envie de savoir ce qu'un tel personnage pouvait bien avoir à dire ou plutôt à écrire. Je suis par hasard tombée sur ce livre « extension du domaine de la lutte » à la bibliothèque et me voilà partie dans ce récit.
Je m'attendais à lire un franc parlé au niveau du sexe, ce qui s'est révélé vrai des les toutes premières pages. Je me suis dit, aller on s'accroche et on poursuit allègrement cette lecture.
Et puis vers la page 100, j'ai compris la profondeur de l'analyse sociologique des personnages mais aussi de la société des années 70-80 en général.
Être performant en tout domaine, voilà la devise pour être dans la course !
Faut-il être cela à tout moment pour être heureux ?
Et la solitude alors ?
Comment l'assumer en toute quiétude ?
Voici quelques questions soulevées dans ce roman.
Si je devais résumer en un mot ce livre, je choisirais : amertume, souvent repris par l'auteur.
Ce terme est revenu souvent lors d'une autre récente lecture « Une histoire d'amer ».
L'homme devient-il amer ?
Est-ce la société qui le rend ainsi ou lui qui ne fait plus face aux exigences ? quelles soient professionnelles, sociales, liées à l'apparence, à l'appartenance aussi.
Pour être honnête, je ne lirai pas cet auteur en boucle en enchainant ses oeuvres, néanmoins j'ai trouvé sa franchise, son analyse intéressantes.
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Disclaimer : Je vous propose de lire l'une de mes chroniques qui a failli ne jamais être publiée. Et pour cause, vous le comprendrez en lisant, je n'ai pas forcément apprécié ce roman… Par conséquent, pour les personnes qui l'ont apprécié, je vous prierai d'ouvrir votre esprit afin de comprendre mon ressenti.

De mon plein gré, je n'ai jamais voulu lire du Houellebecq – oui, je me dédouane complètement. Malheureusement, dans le cadre d'un cours de Littérature du XXème – XXIème siècle, trois romans d'Houellebecq faisaient partie des livres à lire et il fallait en choisir un. Après avoir lu les trois résumés ; les thématiques comme la société, la sexualité et l'érotisme revenaient sans cesse… J'ai donc fini par choisir Extension du domaine de lutte avec énormément de dépit, je l'avoue.

Comment vous dire que dès la première page, je me suis dit : « Mon dieu, je vais subir cette lecture ! ». Je l'ai flairé et ce, en lisant seulement quelques mots…

On m'a souvent placé Houellebecq sur un piédestal, malgré les nombreuses polémiques qui l'entourent. Après avoir lu ce roman, j'essaye de comprendre ces nombreux avis positifs, sans vraiment y arriver. La plume simpliste et sans prise de tête n'offre rien d'exceptionnel. La « représentation » de la femme, quant à elle, décrédibilise toute la parole de l'auteur. Tout au long de l'oeuvre, nous suivons un homme frustré, sexuellement parlant, qui n'arrive pas à se défaire de son « mal ». Pauvre Calimero, ai-je envie de dire. À cause de cela, il en devient méprisable et misérable. Il préfère rejeter la faute sur les femmes, plutôt que de remettre en question sa propre bassesse et sa vie sexuelle réduite à néant.

De cette manière, je n'ai pas réussi à m'attacher aux personnages. Je suis restée à la surface de ce roman, sans jamais arriver à rentrer dans cette histoire. L'intrigue plate, sans but précis, n'aide pas non plus. Elle offre un fond complètement vide, sans grand intérêt. Cependant, au cours de ma lecture, j'avais la constante impression que l'intrigue invisible était fixée sur la dégradation de la vision de la femme. le narrateur ne cesse de rabaisser, physiquement comme mentalement, les figures féminines, à base de : « pute », « très grosse, un boudin et même un sur boudin » et j'en passe. Dans ce livre, la femme passe littéralement pour un morceau de viande, sans une once d'intelligence et fortement naïve. Elle n'est juste bonne au pieu et à être matée.

Au début, je voulais dire que ce roman n'avait rien pour lui, mais je trouve cela un poil violent. Il possède, heureusement, des points positifs, comme ses chapitres courts, ses quelques pages et ses rares phrases sympathiques dans tout ce méli-mélo misogyne, qui développe la culture du viol et les agressions sexuelles – en effet, selon le narrateur, si une femme vient au travail en mini-jupe, il ne faut donc pas s'étonner que son patron bande ou se masturbe.

La vision de la femme est purement atroce et l'on sent bien que l'auteur est masculin et âgé. Toutes les femmes dépeintes ont des défauts, elles s'habillent trop court et leurs corps sont passés au peigne fin. Une poitrine tombante par-ci, des fesses bombées par-là. Une infirmière est imaginée en sous-vêtement sous sa blouse, etc. La liste est longue. Décrédibilisation, rabaissement et sexualisation des femmes, mais pas que ! le narrateur arrive même à sexualiser des mineures âgées de 17 et 14 ans et oui, il n'hésite pas à imaginer la vie sexuelle d'une enfant, sous le prisme de son regard et de celui des autres jeunes garçons.

L'auteur, sous le spectre du narrateur, se fait juge et critique. Je ne vais pas vous mentir, cela m'a grandement dérangé. C'est tout ce que je déteste chez les écrivains masculins. Pourtant, je suis objective et peut-être même un peu masochiste sur les bords, alors, j'ai décidé de continuer ma lecture, avec une once d'espoir que cela s'améliore au fil des pages. Ce qui n'a pas été le cas. le narrateur a même réussi à être raciste, en utilisant le terme « nègre ». Ainsi, j'ai gardé une mine dégoûtée tout au long de ma lecture. Bref. Un réel plaisir, n'est-ce pas ?

In fine, j'ai dû me forcer pour terminer ce roman et je pense que l'on peut dire que je l'ai subi. Bien évidemment, il ne s'agit que de mon humble avis, de ma perception des choses et de ma vision en tant que jeune femme.

Au vu des divers avis, j'ai pu remarquer que certains d'entre vous l'adorent… je ne vous jette pas la pierre, mais disons que je comprends mieux les personnes qui ont eu du mal avec ce roman.

En tous cas, en ce qui me concerne, je ne réitérerai pas l'expérience d'ici quelques années, car au cours de ma lecture, j'ai développé une certaine aversion pour l'auteur. Néanmoins, dans un sens, je pense que ce dernier a réussi son coup parce que je peux vous dire que l'extension du domaine de la lutte, je l'ai senti jusqu'au plus profond de mon être…
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Voici les très (peu) palpitantes aventures d'un cadre moyen analyste-programmeur travaillant pour une boîte d'informatique. Notre héros, on a les héros que l'on mérite, nous raconte sa vie qui est d'un mortel ennui. Nous ne connaissons pas son nom, mais vu sa personnalité, nous pourrions l'appeler « l'homme à peine visible ».

Les femmes le fuient ! Etonnant, non ? Faut dire qu'il a le charme d'une serpillère humide et est beau comme un cadenas même pas rouillé, mais guère brillant non plus.

Notre vedette a tout du dépressif (je ne comprends vraiment pas pourquoi il ne plaît pas aux femmes). Il ne devine pas pourquoi celles-ci ne semblent pas pressées d'avoir des rapports sexuels avec lui… Alors que d'autres hommes obtiennent tout ce qu'ils veulent. Il ne comprend pas la grande mécanique qui anime la gent féminine, en particulier en matière de sexe, la seule chose qui importe, finalement.

L'envie de sexe le taraude, même s'il ne se montre pas très entreprenant. (N'oublions pas que c'est un grand dépressif hyper passif.) Alors, n'étant pas très actif, il observe. Il observe ses congénères qui cherchent un peu d'amour, de fric, une position sociale… Il observe mais toujours avec cet enthousiasme palpitant de limace recalée pour les jeux olympiques des gastéropodes !

Il, notre héros à visibilité déficiente, fait équipe avec Raphaël Tisserand, qui semble être tout son contraire et qui ne rêve que d'une chose : avoir des rapports sexuels avec une femme ! Toutes ses tentatives se soldent immanquablement par des échecs malgré qu'il soit d'un naturel jovial, chaleureux et généreux.

Lorsque notre « homme (très) peu visible » observe ses contemporains qui font preuve d'un dynamisme qui lui fait défaut, c'est pour botter en touche en montrant à quel point ce dynamisme, cette réussite, n'est qu'une façade délabrée prête à s'effriter.


Critique :

Vous n'êtes pas encore dépressif ? Vous avez envie d'essayer ? Ce roman est fait pour vous ! En 156 pages, vous allez être dégoûté de la vie et comprendre que vos frustrations, surtout affectives et sexuelles, prendront toujours le dessus sur votre joie de vivre qui n'est qu'un fard appliqué sur votre visage plus triste qu'une pierre tombale… Et tout le monde est comme vous, même si certains collectionnent les aventures à caractère sexuel ou affectif !

Michel Houellebecq a une très belle écriture, mais pour en faire quoi ? Il m'a fallu des mois pour venir à bout de ce petit livre, et à de multiples reprises j'ai failli faire appel à un kinésithérapeute pour venir me débloquer la mâchoire restée coincée suite à un bâillement provoqué par une lecture des plus "enthousiasmantes".
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Premier roman de Michel Houellebecq, extension du domaine de la lutte était au moment de sa sortie une révélation. Il permet déjà d'esquisser largement les thèmes chers à l'auteur, qu'il développera davantage dans les particules élémentaires, et notamment une double théorie du libéralisme économique et sexuel. Pour lui, en matière de sexualité on ne naît pas tous avec les mêmes atouts et ce sont les plus forts qui ramassent la mise à tous les coups, certains sont des loosers qui n'attrapent jamais rien…ils leur reste alors les prostituées, la masturbation et une légère dépression. Triste monde, mais finalement assez réaliste.

Le narrateur, qui ressemble beaucoup à Michel, a une trentaine d'années. Informaticien, il est envoyé en mission pendant quelques semaines en Province par sa société pour installer un logiciel dans une direction locale du Ministère de l'Agriculture. Pas passionné pour deux sous, un peu « j'm'en foutiste », c'est un être gris, sans consistance, amer, dont le passe-temps principal est d'observer le comportement social de ses congénères, et notamment les jeux d'approche à caractère sexuel. Peu sociable, on ne peut pas dire que sa propre vie sexuelle soit florissante, et il vient notamment de se faire larguer par sa compagne Véronique que du coup il tient pour une salope. Mais il va trouver à travers cette mission en binôme sous l'autorité d'un dénommé Tisserand, un peu plus jeune que lui, de quoi s'occuper…en observant la déroute sentimentalo-sexuelle de son partenaire de circonstances. Tisserand se révèle être un fascinant spécimen de looser sexuel...entre deux moments de conscience embrumée, le narrateur va échafauder, à l'observation souvent perverse et amusée de ce cas désespéré, sa fameuse théorie.

Voici un livre à ne pas lire quand on a le moral qui flanche, il est assez désespérant avec ses airs nihilistes. Pour moi il s'agit d'une relecture, et je l'ai mieux apprécié que la première fois. En effet, à la lumière de ses écrits plus récents, il me semble que du point de vue du style, Michel fait davantage l'effort de construction, de vocabulaire.

Ce qui m'impressionne, c'est que sans avoir l'air d'y toucher, avec un scénario particulièrement plat, il est capable d'aligner d'immenses plages d'anthologie qui structurent peu à peu la pensée houellebecquienne, celle qu'on retrouve de livre en livre qui se peaufine, s'affine, s'étoffe…mais conserve toujours une base constante, autour notamment de l'idée de misère sexuelle de l'homme moderne occidental.
Le résumé stricto-sensu d'un tel livre n'apporte rien, il est plus puissant de citer quelques extraits clés pour en saisir l'essence intellectuelle.

« J'ai si peu vécu que j'ai tendance à m'imaginer que je ne vais pas mourir ; il paraît invraisemblable qu'une vie humaine se réduise à si peu de chose ; on s'imagine malgré soi que quelque chose va, tôt ou tard, advenir. Profonde erreur. Une vie peut fort bien être à la fois vide et brève. Les journées s'écoulent pauvrement, sans laisser de trace ni de souvenir ; et puis, d'un seul coup, elles s'arrêtent.
Parfois aussi, j'ai eu l'impression que je parviendrais à m'installer durablement dans une vie absente. Que l'ennui, relativement indolore, me permettrait de continuer à accomplir les gestes usuels de la vie. Nouvelle erreur. L'ennui prolongé n'est pas une position tenable : il se transforme tôt ou tard en perceptions nettement plus douloureuses, d'une douleur positive ; c'est exactement ce qui est en train de m'arriver. Peut-être me dis-je, ce déplacement en province va-t-il me changer les idées ; sans doute dans un sens négatif, mais il va me changer les idées ; il y aura au moins un infléchissement, un soubresaut. »

Ou encore : « Je mange une galette aux haricots rouges, et Jean-Pierre Buvet me parle de sexualité. D’après lui, l’intérêt que notre société feint d’éprouver pour l’érotisme (à travers la publicité, les magazines, les médias en général) est tout à fait factice. La plupart des gens, en réalité, sont assez vite ennuyés par le sujet ; mais ils prétendent le contraire, par une bizarre hypocrisie à l’envers. »

C’est décapant et désespérant de lucidité. Fondateur de l’œuvre à venir. Pour moi oui, Michel Houellebecq et son style parfois agaçant d’indigence est un grand écrivain de son temps, tellement son regard sur le monde qui l’entoure est acéré, pertinent.

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Ce petit livre est assez génial dans sa noirceur ordinaire : style plat pour peindre une réalité désenchantée, fond et forme se correspondent parfaitement. Le narrateur est un homme banal et son intelligence, qu'il estime lui-même supérieure à la moyenne (cela se voit) ne le sauve pas de la médiocrité : si l'intelligence sauvait de la médiocrité, cela se saurait. Une rupture amoureuse vieille de deux ans l'a laissé sur les rotules. Il a observé depuis une chasteté de moine, non par vertu mais par inappétence. Bref, comme on le dit aujourd'hui assez vilainement, il n'a pas fait son deuil et voit la vie en noir, c'est-à-dire juste comme elle est.
Houellebecq ne cherche pas à être original. Son créneau ici, c'est l'homme moderne, les hommes modernes dans leur plus grand dénominateur commun. C'est-à-dire finalement tout leur être car le libéralisme économique et sentimentalo-sexuel a tout uniformisé et tout transformé en rapport social de domination.
La loi de l'offre et de la demande a fait de nous des consommateurs, nous avons tous le même paysage mental, celui de la publicité vulgaire et omniprésente qui nous agresse et interfère avec nos rêves ; l'informatique génère une information continue et sauvage, coupe les liens, sature nos consciences et nous rend imbéciles ; la liberté sexuelle a placé l'intimité de l'individu sous l'autorité de cette même loi de l'offre et de la demande. Là aussi le libéralisme fait rage et détruit notre illusion d'être tous différents ; nous ne sommes plus que des produits, et devons nous charger nous-mêmes de notre promotion sur le marché du sexe. C'est souvent humiliant, et malheur à qui manquent des paramètres pour être "bankable" : malheur à la femme peu gironde, malheur à l'homme laid qui sue la peur et la frustration, ils ne trouveront pas preneurs et c'est bien triste. Attention aussi à vous, heureux élus, si un jour vous ne faîtes plus l'affaire : vous serez impitoyablement jetés à la décharge. En effet la psychanalyse, de mèche avec le libéralisme, nous a tous changés en redoutables hommes d'affaires de la vie privée. Elle nous a convaincus que nous étions responsables de notre bonheur et qu'il importait de nous défaire de nos boulets intérieurs et extérieurs. Exit donc les entraves à l'épanouissement personnel et le vieux compagnon un peu usagé ! tel est le nouveau catéchisme appris sur les divans. Or on sait ce que Houellebecq pense du bonheur.
Sans être tout-à-fait "no bankable", car il a eu une vie sentimentale dans un passé déjà ancien, proportionnellement à son âge, 30 ans, notre anti-héros, notre narrateur bien-aimé, va faire une méchante projection sur un de ses collègues qui remporte un carton plein dans le tirage au sort des perdants : irrémédiablement laid, puceau à 28 ans, frustré à mort, il n'attire que rebuffades. Quiconque se produit avec lui en public est immédiatement sanctionné par la baisse de sa cote auprès d'éventuels acquéreurs. C'est illustré par l'épisode du rock qu'il soutire à une jeune étourdie qui a baissé sa garde un instant et devra se racheter en l'humiliant devant tous. Le pauvre ne parviendra jamais à se caser, c'est clair, que ce soit pour la vie ou pour un quart d'heure. Son désespoir est tel que le narrateur, jusque là condescendant mais somme toute assez sympa avec lui, est peu à peu gagné par l'effroi et met en place un piège bien dégueulasse ( qui aime les perdants ? c'est peut-être contagieux ! ) : le voilà qui décide de devenir un assassin par personne interposée. Nous abordons la partie thriller du livre, très inattendue et glaçante. Les motivations, gluantes et rampantes, évoquent clairement les monstres lovecraftiens.
De ce qu'il adviendra du funeste projet je ne dirai rien, pour ne pas écorner davantage le sentiment de découverte du nouveau lecteur.
La morale de ce livre, celle que j'ai retenue, est la suivante : la lucidité est une maladie grave.
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Si je n'étais pas tombé dessus en parcourant les rayons de la bibliothèque de nos hôtes, jamais je n'aurais eu l'idée de lire un Michel Houellebecq. Mais comme le livre n'était pas bien épais et que je pouvais le lire avant mon départ, je me suis dit qu'au moins, je pourrais en parler en connaissance de cause. Dès les premières pages, le personnage se dévoile assez clairement : plutôt misanthrope, très misogyne. le style à proprement parler n'est pas désagréable, et l'ouvrage, découpé en courts chapitres, se lit facilement. Certains passages sont vraiment de qualité, littérairement parlant. Il semble que le roman esquisse une critique de la société (société au sens de l'entreprise, mais évidemment, aussi, au sens plus large de l'ensemble des rapports que nous entretenons avec nos concitoyens). Je ne renouvellerais sans doute pas l'expérience, mais je pourrais désormais dire que j'ai lu un Houellebecq. Je peux aussi dire que je ne le placerais pas dans le panthéon des écrivains.
Lien : https://bw.heraut.eu/user/Ba..
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Expression brute du mal être d'un homme dans la société occidentale moderne, ce livre ne peut laisser indifférent. Perte de sens générale, solitude, matérialisme sordide, inhumanité de l'individualisme et du libéralisme, hypersexualisation, aliénation au travail, disparition de toute valeur morale, le narrateur nous fait part de ses tourments au fil d'un quotidien finalement très banal.
La critique de l'ultralibéralisme prêtée à ce livre n'est pas d'une grande finesse, j'ai eu plutôt le sentiment d'un livre de témoignage. Témoignage triste, sordide, réac, témoignage qui bien sûr ne parlera pas, ne touchera pas certains d'entre nous mais qui fera mouche pour beaucoup d'autres!
Je comprend que l'on puisse ne pas aimer du tout cet auteur. Par contre, je ne comprend pas que l'on puisse le juger totalement nul, vide ou le traiter carrément d'imposteur (comme on peut le voir dans certaines critiques). Mauvaise foi ou éloignement de certaines réalités?
"Ce n'est pas un signe de bonne santé d'être bien adapté à une société profondément malade".
Krishnamurti.

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J'ai été finalement positivement surprise par ce court roman de Houellebecq. certes l'outrance des mots et des situations est bien telle qu'on me l'a décrite, mais il décrit surtout la société avec un cynisme empreint d'une certaine vérité. Même si elle ne fait pas forcément plaisir.

L'informaticien est le type même du gars qui ne s'insère pas dans la société présente alors qu'il en est pourtant le pivot. En faire le chantre de la contre-modernité est intéressant.

Mais en étant si critique envers tout conformisme, n'est-ce pas déjà un conformisme ?
Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
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