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sur 657 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
En décernant le Prix Femina 2022 à Claudie Hunzinger pour Un chien à ma table, le jury a récompensé une belle oeuvre littéraire, un superbe travail d'écri-vaine, comme Grieg, le compagnon de la narratrice aime à la définir.
Modifiant un peu son nom, l'autrice dit s'appeler Sophie Huizinga ; elle m'emmène dans cette maison située aux Bois-Bannis, un nom assez peu engageant mais qui ne rebute pas ce couple uni par une complicité profonde et très émouvante.
C'est là qu'a débarqué une chienne en piteux état qu'elle nomme sans hésiter Yes. La narratrice constate, horrifiée, que cette chienne a été victime de sévices sexuels et qu'elle porte des blessures. Mais, aussitôt après avoir mangé, Yes disparaît.
Ainsi, tout au long de ce roman, le chien n'apparaît pas constamment. Il sert plutôt de repère, de support dans cette maison isolée que frôlent tout de même un parcours santé et le GR5. Quelques passages mis à part dans lesquels Claudie Hunzinger paraît meubler, je suis la plupart du temps très touché, vite ému par ses réflexions, ses avis pertinents sur notre planète. le saccage de la nature, du vivant, est dénoncé avec tellement de pertinence qu'il est impossible de lire ces passages sans être bouleversé. La justesse de son point de vue sur une évolution qui ne semble pas inquiéter la majorité des humains, mérite d'être prise en compte.
Avec ça, l'autrice partage sa façon de faire, son travail au quotidien pour ne rien perdre de ses observations. Il le faut bien car il ne se passe tout de même pas grand-chose dans ce coin isolé des Vosges d'où, indique-t-elle, on aperçoit une autoroute au loin…
Après une sortie dans la libraire Rive Gauche, à Lyon, Sophie que Grieg appelle aussi « ma Biche » ou encore « Cibiche », retrouve les Bois-Bannis et Litanie, leur ânesse, compagne essentielle. Là, elle peut se confier, disserter sur elle-même, faire partager son ressenti face aux animaux, aux gens, aux chiens, à la nature, aux aléas de la météo.
Est-ce un effet de l'âge, mais Claudie Hunzinger me touche vraiment lorsqu'elle évoque la vieillesse, la diminution de ses ressources physiques, voire la perte de certaines possibilités autrefois essentielles. Elle ajoute à cela ce que la vétusté des choses déclenche en elle et les questions qu'elle pose : « Pourquoi la vétusté est-elle douce et anarchiste en même temps ? Pourquoi est-elle compatissante ? »
Que c'est bien écrit ! Que c'est juste !
Qu'elle se nomme Sophie Huizinga ou Claudie Hunzinger, depuis les Bois-Bannis, ne peut mettre un point final à Un chien à ma table sans évoquer cette mort inéluctable pour tout vivant, sans une pirouette humoristique et poétique. Humoristique avec Grieg qui lui demande enfin d'acheter des bretelles pour tenir son pantalon ; poétique grâce à Dominique A et sa chanson « Les éveillés » avec ces vers simples et admirables :
« Nous n'avons pas le droit de nous / perdre de vue.
Nous n'avons pas le choix / et tu le sais.
Il n'est pas question que l'amour/vienne à manquer ».

J'ajoute que Un chien à ma table fait partie des huit livres en lice pour le Prix des Lecteurs des 2 Rives.

Lien : https://notre-jardin-des-liv..
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Depuis trois ans, une écrivaine Sophie Huizinga et Grieg, son compagnon depuis presque soixante ans vivent pratiquement en reclus, dans une petite maison cachée au fin fond d'une forêt vosgienne au lieu-dit, Les Bois-Bannis, un nom étrange. Ils l'avaient découverte au moment même où ils avaient eu envie de changer encore une fois d'air et « pour se sortir sans trop de casse du chaos qui s'annonçait et que tout le monde avait senti venir sans bouger le petit doigt. »
Sophie écrit des livres qui parlent de grand air et de nature et se définit elle-même comme une romancière des marges. Quant à Grieg, il est déjà comme sorti du monde, dormant le jour et lisant la nuit, survivant grâce à la littérature.
L'arrivée un soir, par la porte laissée ouverte d'un « balluchon de poils gris, sale, exténué, famélique », d'une petite chienne blessée, va carrément réenchanter leur vie et rapprocher ce couple vieillissant. Leur vie va se trouver bousculée quand ce troisième personnage va s'inviter à leur table.
C'est d'abord Sophie qui va retrouver le goût de sortir et retrouver des forces au contact de cette nature avec qui elle fait littéralement corps et ressentir des instants de joie divins, ces éclairs que l'on ressent de se sentir en vie. Puis Grieg lui aussi sera gagné par l‘énergie transmise par cette petite chienne. Ils vont du coup refaire chambre commune, se fabricant un lit composé d'un simple cadre de quatre planches clouées, posé au sol et en y entassant trois ans de journaux ficelés par petits tas pour le combler, leurs deux matelas posés dessus. Dès le premier soir, Yes n'hésitera pas à sauter sur le lit et désormais ils dormiront tous les trois « sur les nouvelles du monde, celles qui de jour en jour tombent dans les abîmes pour être remplacées par les suivantes »…
Un chien à ma table, Prix Femina 2022, évoque le désastre qui menace notre planète avec la disparition entre autres, de multiples espèces animales. le personnage de Sophie, cette femme révoltée va transformer cette catastrophe environnementale en une véritable ode à la nature, et nous offrir une magnifique fresque de la nature sauvage, du monde végétal et animal. Ses escapades aux alentours de leur bâtisse offrent au lecteur de sublimes pages de poésie.
Beau roman d'amour, il est aussi une réflexion sur la vieillesse et sur le pouvoir de la littérature tout en mettant en avant les bienfaits de ce qu'un certain Pierre Rabhi nommait la sobriété heureuse.
J'ai particulièrement apprécié cette osmose entre l'humain et la nature que recherche Sophie Huizinga, alias Claudie Hunzinger et qu'elle excelle à dépeindre.
J'ai été happée par cet hymne à la Terre et à la vie qu'est Un chien à ma table, récit de ce trio qui vit en communion avec la nature et entouré de livres...
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Sophie et Grieg vivent dans les Vosges, dans la forêt au lieu dit les Bois-Bannis.
Tous deux sont âgés et Sophie, la narratrice, fait souvent référence à la vieillesse de son corps qui doit se remettre en route chaque jour et à celle de son compagnon.
Grieg vit la nuit dans sa bibliothèque. Il se nourrit de littérature.
Sophie vit le jour, observe les animaux, les plantes, les arbres.
Ils vivent chacun dans le respect de l'autre.
Tous deux se sont connus dans la prime enfance.
Un chien arrive dans leur vie mais ne s'approche pas trop. Il est méfiant. Sophie s'aperçoit qu'il a subi des sévices de la part d'un humain.
Elle lui donne le nom de Yes et croit qu'il va rester auprès d'eux mais cet animal pour qui Sophie craque n'apparaît que de temps à autre, assez toutefois pour parcourir la forêt avec elle. C'est un renouveau pour Sophie. Yes lui donne de la force.
Tout au long du récit, Sophie a peur des humains qui bordent la forêt et pourtant, elle les observe. Yes les craint aussi. Elle apparaît comme la gardienne de ces bois.
L'écriture du livre est poétique rien que dans la description des plantes, des petits animaux, de son logis bien rudimentaire, de sa nourriture très frugale.
Un peu plus de vie aurait mieux correspondu à mon style de lecture mais les mots sont très beaux et le thème abordé inhabituel.
Afin de pouvoir profiter des mots, je lisais un autre livre et puis je reprenais celui-ci comme on le ferait avec un recueil de poésies.
"Un chien à ma table" de Claudie Hunzinger a reçu le Prix Femina 2022. Je l'ai appris en le lisant sur le bandeau à la librairie. C'est une belle récompense pour un roman proche de la nature exprimé en de si beaux mots.
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Un baluchon de poil gris, sale, exténué, famélique, c'est ainsi que Yes, une petite chienne est entrée dans la vie de Sophie et de Grieg son compagnon depuis 60 ans. Deux êtres totalement décalés. Ils habitent les Bois-Bannis au milieu des forêts, loin de tout, à l'écart du monde. Sophie est une romancière qui vit en communion avec la nature, Grieg dort le jour et lit la nuit, il habite dans ses livres.

J'ai été très troublé par ce récit, par sa construction, il ne se passe rien. Tout au long des pages, l'auteure nous invite à une réflexion sur la jeunesse qui s'en va, la planète dévastée par l'homme. C'est une balade poétique, une célébration de la beauté de la nature. L'errance d'une vieille femme qui se ressource auprès des arbres et des animaux dont elle se sent plus proche que des humains. Certains passages sont magnifiques. Un livre qui se respire.
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Un couple d'intellectuels vieillissant s'est retiré dans une maison isolée dans les Vosges ,ils ne se sentent plus en accord avec la société actuelle et se sont mis en marge volontairement. Grieg se refugie dans la lecture, il lit durant la nuit et dort le jour .Sophie est écrivaine, amoureuse de la nature et des animaux. En retrait du monde le couple observe le lent delitement de la planète, la disparition d'espèces d'animaux et de végétaux, les villes tentaculaires qui dévorent la nature et délogent les animaux. "Tout se casse la gueule "dit Grieg déprimé .Sophie se demande souvent si écrire sert encore à quelque chose.
Une petite chienne maltraitée se refugie chez eux,ils l'adoptent .Cette arrivée va transformer leur vie .Sophie avait renoncé à ses longues marches dans la forêt à cause de son corps vieillissant mais avec Yes, la petite chienne, Sophie se sent une seconde jeunesse .
L'auteure parle de sa position par rapport aux animaux , elle pense que l'humain n'est pas supérieur aux animaux, l'homme est une espèce comme l'animal, au même titre. C'est une idée que je partage . l''écriture est fluide et poétique,il y a de belles descriptions de la nature et l'auteure ne cache pas ses inquiétudes pour l'avenir de la terre et des hommes. C'est un livre qui parle aussi de la vieillesse, de l'amour et de la tendresse dans un vieux couple.
Un prix fémina bien mérité.
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«Yes I said yes I will Yes»

Couronnée par le Prix Femina 2022, Claudie Hunzinger a réussi avec ce roman, qui raconte la rencontre d'un chien errant avec un couple âgé vivant en marge du monde, un cri d'alarme écolo-féministe, mais aussi une belle déclaration d'amour.
La nuit n'était pas encore tombée aux Bois-Bannis, le refuge de Sophie et Grieg, lorsqu'une ombre a pris l'apparence d'un chien errant, ou plus exactement d'une chienne. Sans doute affamée, elle n'a pas tardé à s'approcher. «La fuyarde avait pris la pluie avant nous, elle venait de la pluie, de l'ouest, et sentait le chien mouillé. J'ai cherché s'il y avait une plaque au collier. Au passage, j'ai scruté le pavillon de ses oreilles à la recherche d'une identité, d'un tatouage, de quelque chose, mais rien, sauf une tique que j'ai enlevée avec le crochet en plastique jaune toujours dans la poche de mon pantalon. La chienne se laissait faire. Je lui disais, je suis là, c'est fini, tout va bien.» Après avoir rapidement mangé et bu, la voilà pourtant qui prend la fuite. Elle n'a même pas le temps de répondre au nom que Sophie lui a trouvée, «Yes». Yes comme dans l'envolée de James Joyce, «Yes I said yes I will Yes».
Mais ce n'est que partie remise. Il faut laisser à l'animal, dont on découvrira qu'il a été maltraité, le temps d'accepter l'hospitalité que lui offre Sophie.
Le récit va alors prendre la forme d'une enquête – qu'est-il arrivé à la chienne, d'où vient-elle, que fuit-elle? – et d'une quête, celle qui lie l'homme – ici plus exactement la femme – à l'animal. Yes est adoptée, partage le quotidien de Sophie et Grieg et les accompagne dans leurs excursions au coeur d'une nature menacée.
Ce dernier formant sans doute le coeur du livre. La menace plane en effet sur ces pages, celle d'un environnement qui n'est plus préservé, celle aussi qui accompagne la vieillesse avec laquelle le couple doit composer.
Mais qu'on ne s'y trompe pas, la venue de Yes est d'abord l'occasion pour Sophie de retrouver une vitalité assoupie, d'interroger sa vie de couple, de repartir explorer son environnement. Conjuguant «l'énergie pure» de Yes et son corps «vieil arbre qui avait perdu le sens de l'équilibre, un peu vacillant, mais avec encore de l'imagination et un reste d'énergie», elle retrouve le goût de ,se tailler vite fait». Quand Grieg se réfugie dans les livres, Sophie préfère «lire le dehors» et comprendre ainsi «qu'on n'est pas emmurés dans notre espèce, une espèce séparée des autres espèces, différente mais pas séparée, et que faire partie des humains n'est qu'une façon très restreinte d'être au monde. Qu'on est plus vaste que ça.»
Claudie Hunzinger trouve alors une langue d'une grande poésie pour accompagner ses escapades. Elle convoque tous les sens pour dire les bruits et les odeurs, les couleurs et les saveurs dans un foisonnement charmant. En courts chapitres, elle tente de conjurer un double compte à rebours funeste, celui qui a été déclenché par le réchauffement climatique – et peut-être bien avant – et celui qui rapproche les humains de leur fin. «Le pire pouvait arriver d'un instant à l'autre. Il était déjà là. On s'était soudain retrouvés dans un temps de charniers humains, animaux, végétaux, comme toujours, mais en accéléré. Un temps d'effroi global. Qui pouvait y échapper? Personne ne pouvait y échapper.»
Alors il reste le bonheur d'être au monde.

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Lire Un chien à ma table, c'est partir pour un étrange voyage au bout du monde... ou plutôt au bout d'un monde, le monde "d'en bas" comme le dit Grieg, le mari de la narratrice, Sophie, double à peine déguisée de Claudie Hunzinger elle-même. C'est au lieu-dit les Bois Bannis, que Sophie et Grieg Hunzinga ont choisi de vivre, dans une vieille bâtisse datant du XVIIIe siècle , tenant à la fois de l'ermitage et de la forteresse contre le monde des "civilisés", celui qui a perdu ses attaches avec la Nature et court inexorablement à sa perte comme le pense avec effarement Sophie et résignation Grieg.
Ce qui m'a avant tout séduite dans ce roman/récit ce sont les personnages évoqués avec empathie, force et drôlerie. Grieg, est à la fois désarmant et émouvant par son anarchisme viscéral et son farouche refus de se plier à des conventions sociales qui lui paraissent une atteinte intolérable à son besoin de liberté. Un ermite donc d'un genre très particulier mais qui sous le regard tendrement moqueur de Sophie devient "mon gredin", "mon vieux grigou", ce qui souligne alors son extrême vulnérabilité plutôt que son côté transgressif. C'est sous le sceau d'une complicité étonnante que fonctionne ce couple hors-normes , fusionnel et que Sophie désigne très joliment comme "une entente d'enfants fugueurs". D'ailleurs rébellion et goût "des marges" sont les maîtres mots qui me viennent à l'esprit pour évoquer la personnalité de Sophie, le narratrice. Une femme étonnante , aux convictions fortes. Ce qui m'a frappé c'est tout d'abord son sens de l'autodérision lorsqu'elle évoque son corps vieillissant, jusqu'à parler de lui comme d'un objet encombrant, dont elle examine avec une hyper lucidité le déclin inexorable. Mais ce "corps déglingué" ne l'empêche pas de témoigner d'un formidable amour de la vie : "J'étais émue de penser que nous ajoutions de la gaieté au monde. Et de l'inconvenance. de l'incorrection. de l'extravagance. du foutraque. du fabiloutraque." Mais notre narratrice n'en n'est pas à un paradoxe près et c'est avec la même force de conviction qu'elle parle du déclin inexorable du monde des vivants. Une vision apocalyptique qu'elle évoque avec force dans un passage aux accents prophétiques.
C'est pour moi un des points forts de ce roman/récit que de nous entraîner aux confins d'une écriture tantôt fiévreuse, éruptive, tantôt d'une délicatesse infinie et poétique, comme lorsque l'auteure évoque par exemple une pie grièche venant boire au bord d'une fontaine. C'est sans doute également ce qui fait que je suis entrée dans l'univers de l'auteure sans forcément partager toutes ses idées. Claudie Hunzinger, en effet, va très loin dans l'antispécisme et la notion de genre lorsqu'elle évoque les liens qui vont relier Grieg et Sophie à une petite chienne, Yes, arrivée chez eux, un soir, sans crier gare. Très impressionnants aussi sont les passages évoquant les expériences extra sensorielles avec le monde de la forêt.
Soyons clair, je crois que ce qui m'a accroché aussi fortement à ce roman sans ligne narrative précise, c'est le formidable pouvoir de suggestion de l'écriture et les questionnements sur la littérature qui courent en filigrane tout au long du livre.
Je terminerai donc cette chronique par une citation qui me paraît très révélatrice de l'esprit du roman :
"Je souhaitais ardemment que l'instinct de survie, les forces de refus qui nous restaient à Grieg et moi, deux grains de sable nous permettent de trouver en ce lieu une faille rétive à tout idéalisme. A tout système. A toute mystique. A tout pouvoir. A tout universalisme même écologique".
Elle m'a renvoyé à ce formidable besoin d'utopie salvatrice comme sait si bien en créer la littérature... Et je suis retournée lire dans la foulée la très belle évocation de l'abbaye de Thélème, imaginée par Rabelais au XVIe siècle... Evocation de deux univers qui n'ont rien à voir l'un avec l'autre mais entrent tout de même en résonance au delà des siècles...
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Sophie Hunzinga et Grieg son compagnon ont décidé, il y a trois ans de se retirer dans une ancienne bergerie qu'ils ont achetée dans un endroit au nom prédestiné : « Les bois-bannis ». Ils ont choisi volontairement ce lieu-dit, situé à environ une heure de marche de tout lieu d'habitation, et qui fut autrefois peuplé par des amish, à moins que ce ne soit des anabaptistes, dans le but de vivre au plus près de la nature et en harmonie avec elle mais de fuir la compagnie des hommes.

Une jour, une petite chienne fait son apparition sur le pas de la porte en quête de nourriture. Ce jour-là, elle ne fait que se restaurer et repart. Mais, contre toute attente elle revient et Sophie finit par « l'adopter » , la baptisant Yes ; elle s'aperçoit que celle-ci a été victime de violence zoophile.

Grieg ne vit que par ses livres, Sophie est écri-vaine et doit se rendre à une rencontre littéraire. Ceci inclut un voyage en train, donc une sortie d'un territoire protégé, mais cependant anxiogène, car on sent au fil des pages que le danger rode. Pour cette équipée, elle décide de chausser des Buffalos en hommage à Brigitte Fontaine qu'elle admire.

""Quelle idée d'avoir chausser ce matin ces grolles monstrueuses pour venir disserter du regard de la gazelle ? – Oui, mais on annonçait de la pluie et c'était les mêmes que celles de Brigitte Fontaine, chanteuse archi-culte, écrivain aussi, un an de plus que moi, laquelle un jour lança ; « Si on me dit écri-vaine, je tue. »""

On assiste au quotidien du couple, une vie saine, frugale, de longues marches dans les alentours, une réflexion sur la société actuelle, sa violence, sa responsabilité dans la nouvelle extinction de masse touchant oiseaux notamment. Leur situation est plus gaie depuis l'apparition de Yes dans leur vie, car cette chienne déborde d'énergie, une énergie communicative.

Sophie Hunzinga , avatar de Claudie Hunzinger, on l'a bien compris, est touchante par son réalisme par rapport à la situation de la planète et l'évolution du monde, et j'avoue que parfois j'ai envié son courage, aller s'installer loin de tout, des hommes, des commerces, (pour ne pas parler du désert médical certain!) et vivre au contact de la Nature. C'est un choix audacieux et lucide dont le commun des mortels n'est pas forcément n'est pas capable de faire ou de supporter.

J'ai beaucoup aimé sa tirade rageuse sur le mot « écrivaine » qu'elle persiste à écrire « écri-vaine » car pour elle il s'agit d'un terme péjoratif, comme un écrivain au rabais, opinion que je partage totalement, cela va de soi. Il ne faut pas s'y tromper, l'auteure nous parle aussi de la solitude et de la vieillesse dans un monde déshumanisé en nous rappelant que les animaux sont souvent plus bienveillants à notre égard que les humains.

Je retiendrai aussi le fait de se construire un lit avec un cadre en bois et des piles de vieux journaux, (de vieux exemplaires du « Monde » attachées entre elles sur lesquelles ils ont déposé leur matelas, lit dans lequel ils dormaient tous les trois, Yes, la chienne entre eux-deux !

Claudie Hunzinger nous propose également un voyage en littérature où l'on côtoie aussi bien des philosophes de l'antiquité que des auteurs contemporains, de Démocrite à Marguerite Duras en passant par le génial Tolstoï dont elle étrille un peu le mode de vie au passage , pour ne citer qu'eux...

Ce roman m'a beaucoup plu, car il y a quand même de la lumière dans cette réflexion, mais il faut reconnaître que, si l'on est affecté par la sinistrose ambiante, cela risque de plomber le moral...

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteure

#Unchienàmatable #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Sophie et Graig , elle écri-vaine et lui, lecteur compulsif , ont décidé de vivre isolés dans une maison en pleine forêt des Vosges , lieu dit Les bois bannis ...
C'est un vieux couple qui a appris à respecter le besoin de solitude de chacun et à supporter leurs manies . Un arrangement qui leur permet de vivre dans une certaine harmonie mais chacun de son coté...

Lors d'une de ses longues promenades solitaires, Sophie découvre une chienne enfuie avec un bout de chaine autour du cou et visiblement maltraitée . Elle parvient à l'attirer jusqu'à sa maison et à la soigner, la chienne qu'elle dénomme Yes, acceptant de rester dans ce nouveau foyer , son arrivée entraine une modification du motus vivendi dans le couple qui se rapproche partageant une tendresse complice autour de la chienne.

Les premières pages de ce récit m'ont vraiment enthousiasmé par leur style et la profondeur de ce que j'ai ressenti me demandant pourquoi je n'avais encore rien lu de cet écrivain , j'étais en parfaite osmose ...

J'ai un peu décroché ensuite car le récit glisse peu à peu sur des considérations plus philosophiques , certes empreintes de poésie, de considérations sur la vieillesse, sur le couple , sur les rapports de Sophie se distanciant des humains pour se rapprocher de la nature . Toutes pensées dont je me suis pourtant sentie plutôt proche mais j'ai perdu étonnement le fil petit à petit de mon plaisir initial .
Lu en Aout 2022.
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"Le mauvais temps ne me faisait rien. J'aimais la pluie, le vent, la neige. Notre temps c'était autre chose. Je ne l'aimais pas. Il s'était effondré, tous ses murs porteurs effondrés. Production de marchandises, destruction du monde, grèves, promesses, mensonges, production accrue de marchandises. Violences. Surveillance. Bizarreries. Toutes ces bizarreries. Ça n'arrêtait pas, nous atteignant jusqu'aux Bois-Bannis".

Dans cet endroit reculé et montagneux la narratrice, Sophie Huizinga, vit avec son compagnon, nommé Grieg et une petite chienne errante qu'ils ont sauvé d'une mort certaine, tant elle était mal en point. Elle l'a appelée Yes. Un peu comme "oui à la vie", qui continue à la surprendre et à l'émerveiller, malgré le poids de l'âge et les décrépitudes du corps. La vie qu'ils mènent là est proche de la nature et, aux yeux de beaucoup, presque entièrement dénuée de confort. Pourtant ils y sont bien.
Sophie, c'est l'extérieur qui l'attire. Elle est toujours attentive à ce qui se passe dans les quelques kilomètres autour de sa maison et n'a pas renoncé à les arpenter, parfois jour et nuit, qu'il vente, qu'il pleuve ou qu'il gèle.
Grieg est son contraire : perdu dans ses livres, il est avant tout un casanier, immergé dans ses livres pendant une bonne partie de ses nuits.

Claudie Hunzinger possède un ton tout à fait à part, fait d'appétit de vivre, de digressions sur l'état de notre société mais aussi de révolte contre les souffrances que l'humain inflige, notamment aux animaux. Dans ce nouvel exemple de son talent, couronné cette année par le prix Fémina, j'ai retrouvé le style de "Les grands cerfs". Mais si les personnages ont un air de famille, ils sont quand même différents dans cette nouvelle narration. Claudie Hunzinger s'inspire probablement beaucoup de ce qu'elle vit pour en faire la matière de ses romans. Mais ce n'est pas de l'autofiction pour autant. Ce livre, peut-être parfois un peu trop décousu, surprend et enchante par ses fulgurances sur les rapports entre humain et nature, vus comme s'inscrivant dans un tout.

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