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3,69

sur 1105 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Deuxième essai pour moi d'un roman de Philippe Jaenada et franchement, je suis fan. Je ne suis pourtant pas une grande amatrice (du tout) de romans policiers, hormis ceux d'Agathe Christie que je collectionne. Et je pense qu'il y a un point commun entre les deux : tout repose sur une analyse et une démonstration logiques. Je ne suis pourtant pas non plus une grande cartésienne, encore moins dans mes lectures, mais là, ça marche. Et ça marche très très bien. Je me prends complètement au jeu de son enquête, de son récit, de la recherche de détails et de réponses, de la confrontation des témoignages, de l'analyse de la scène de crime, des différents scénarios envisagés. Comme d'habitude, c'est impossible à résumer, plein de méandres et d'histoires parallèles, mais ça ne perd jamais le lecteur. J'ai été accrochée au récit du début à la fin. Et j'ai été beaucoup touchée par l'intrigue, plus que par celle d'Au printemps des monstres qui, bien qu'aussi prenante et addictive, flirte avec la mafia et les magouilles. Ici, on parle d'un triple meurtre dans un château au milieu de nulle part, en plein milieu de la seconde guerre mondiale et on touche à d'autres choses : les liens familiaux, les histoires de village, la guerre, les différences de classes sociales. C'est une expérience de lecture unique, complètement hallucinante et qui retourne les nerfs, et qui vaut le coup, vraiment.
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Bon, il ne faut pas confondre « La serpe » avec laquelle Pauline Dubuisson aurait pu tuer son amant. Et pourtant, Philippe Jaenada, pourfendeur de justice a voulu avec « La petite femelle » montrer à la vindicte populaire, une autre interprétation de son geste fatal.
Il n'a eu qu'un besoin irrépressible, pour cet adepte de la vérité, de mener des enquêtes : en-dehors des on-dit, des apparences, bref, il est la mouche du coche. Il n'a de cesse de comprendre, de vérifier les faits, d'élaborer les différentes possibilités conduisant au drame : et dans ce récit : « La serpe », elles sont foisonnantes.

Mais revenons, dans la nuit du 24 au 25 octobre 1941 ; au château d'Escoire, dans le Périgord, trois personnes trouvent une mort horrible, il s'agit pour Henri Girard : de son père, de sa tante et de la bonne ! Une affaire réelle qui a fait la une à l'époque.

Peu de jours après, Henri Girard, sera incarcéré ; par la maréchaussée, devant tant de faits troublants qui l'accusent irrémédiablement. Avec Henri Girard, nous avons un jeune homme, intelligent, cultivé mais sujet à un refus de l'autorité. La mort de sa mère, dans l'indifférence d'une partie de sa famille, lui a laissé de profondes séquelles. Et il dira : « Sans elle, je n'ai plus de refuge. ». Son comportement se définit comme un être plus sauvage que jamais, en colère contre tout et tout le monde (et le restera jusqu'à sa mort). Par ailleurs, également connu, sous le nom de Georges Arnaud : il sera l'auteur du livre : le salaire de la peur.

Suite logique, un procès aura lieu, pratiquement bouclé dès le début des débats, par la police tant les éléments à charge sont nombreux et irrécusables pour la justice. Il faudra l'intervention d'un ténor du barreau, en l'occurrence, Maître Maurice Garçon, pour obtenir la libération d'Henri Girard…

Or donc, rentre en scène l'auteur, qui avec ténacité, va compulser un nombre incalculable de documents, de minutes de procès, de plans, d'interrogatoires pour démêler le fil de l'écheveau des certitudes des policiers et de la justice. Et ainsi en démontrer la vacuité et l'injustice de cette parodie d'accusation. Autant dire l'impéritie des enquêteurs et des magistrats !

Un roman – un document ? – qui met en exergue, les possibles erreurs humaines, et ce dans tous les domaines, quand la passion fait le lit de l'opinion. Avec brio, Philippe Jaenada, retrace le parcours des protagonistes de ce dossier ; avec il faut le dire de multiples digressions, sur sa famille, pour rebondir sur le sujet concerné des crimes ; d'aucuns ne partagent pas ce style et risquent d'en perdre le fil. La résolution d'un crime, doit être réalisé avec un maximum de vérifications, et consubstantiel au droit à la Vérité…afin de garder la tête sur les épaules !

Une enquête brillante qui instille le besoin de comprendre, de suivre les circonvolutions de la pensée de l'auteur, car celui-ci invite le lecteur à admettre sa position sur l'énigme des crimes du château d'Escoire.

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Au matin du 25 octobre 1941 le jour se lève sur un drame terrible qui a frappé les habitants du château d'Escoire : Georges Girard, sa soeur Amélie et Louise la bonne sont retrouvés assassinés. Tués (massacrés) à coup de serpe. Un seul survivant au milieu de ce carnage, Henri Girard, 24 ans. Il s'agit du fils de Georges. Très vite, les soupçons se portent sur lui. Mais à l'issue de dix-neuf mois d'emprisonnement et d'un procès, il est acquitté.

Pourtant tout semble l'accuser : les faits sont là, le mobile est probant. Alors coupable ou non ? C'est à essayer de démêler cette énigme que va s'employer Philippe Jaenada en nous entraînant à sa suite dans les pas d'Henri Girard, sur les lieux même des faits, 70 ans plus tard.

Henri Girard, personnage haut en couleurs et aux multiples facettes, se transformera en Georges Arnaud dans une espèce de seconde vie qu'il entame après sa libération. Sous ce nom, il débute une carrière littéraire et bénéficie d'une belle notoriété (j'avoue ne pas avoir entendu parler de lui jusqu'ici). Il est ainsi l'auteur de plusieurs romans, et notamment de le salaire de la peur dont est tiré le film de Clouzot (information que j'ignorais totalement).

Mi-aventurier, mi-bourgeois il oscille selon les époques entre la plus grande richesse (surtout après le meurtre sordide de son père et de sa tante dont il est l'unique héritier) et l'extrême pauvreté. Exilé en Amérique du Sud en 1947 il épousera tour à tour les carrières de chercheur d'or, barman ou chauffeur de camion. Il aura aussi plusieurs conquêtes féminines, se mariera, divorcera, aura des enfants.

Il sera une nouvelle fois incarcéré en 1960, à l'époque de la guerre d'Algérie, pour ne pas avoir dénoncé les participants à une conférence en faveur de l'indépendance de l'Algérie. Il sera alors soutenu par les plus grands intellectuels de l'époque.

C'est cette vie à la fois très riche et nimbée d'un mystère épouvantable que nous conte Philippe Jaenada dans ce livre passionnant et très documenté. Cet homme dont l'auteur nous retrace minutieusement la vie est-il une sorte de Jekyll and Hyde ? Coupable du plus atroce des crimes ou victime de son attitude, un homme concerné par les enjeux de son époque au point de chercher à rejoindre la résistance et à s'engager lors de la guerre l'Algérie ou un manipulateur froid et retors ? Peut-il être passé en quelques années du plus épouvantable des meurtriers à cet homme à la vie certes dissolue, mais qui semble inoffensif.

C'est en épluchant les archives, en pointant les incohérences et les inexactitudes, en remontant le fil de l'histoire que l'auteur va chercher à démontrer la culpabilité ou non de son personnage. le jeu est malin car la première partie semble nous amener vers la culpabilité certaine et on commence à se dire que Philippe Jaenada se moque de nous car, enfin, c'est quand même ce dont la plupart des gens (et la police en premier) étaient persuadés à l'époque. Et puis, petit à petit, les pièces du puzzle s'emboîtent et on commence à s'interroger. A voir, comme l'auteur, les contradictions, les lacunes dans les témoignages et dans l'enquête, les partis-pris qui concourent à faire d'Henri un parfait coupable.

Philippe Jaenada prend un malin plaisir (et nous aussi) à balader son lecteur entre considérations personnelles, anecdotes politiques, historiques ou culturelles avant de revenir à son sujet principal. C'est l'une des caractéristiques de cet auteur avec la multiplication des parenthèses voire de parenthèses dans les parenthèses comme autant de poupées russes emboîtées les unes dans les autres. Une caractéristique qui peut en agacer plus d'un mais qui moi m'amuse beaucoup.

Les livres de Philippe Jaenada nécessitent une concentration sans faille pour suivre le fil de l'intrigue principale à travers les multiples méandres de sa pensée et de son écriture. C'est exigeant mais passionnant.

Au final, on ressort de ce récit convaincu que tout n'a pas été fait pour trouver le véritable coupable de ce triple meurtre sordide et qu'on s'est arrêté à une solution de facilité qui n'a heureusement pas conduit Henri à la guillotine. Mais ne peut-on pas aussi se dire que les faits, les preuves, les témoignages et les écrits peuvent être interprétés et manipulés selon ce qu'on a envie de démontrer ? Et qu'en ce sens Philippe Jaenada réalise un exercice démonstratif parfaitement maîtrisé !
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(Lui) 🎶"Si j'avais un marteau, je frapperais le jour, je frapperais la nuit..." (C.François)🎶 .... et si j'avais une Serpe, hein? Quel instrument incongru! Loin de celle, en or, de Panoramix, voici une arme de crime. Et quel crime. Triple meurtre. Dans un château. Une famille. Et la bonne (on est en 1941 quand même). Non élucidé (jusqu'à ce livre)
Mais le premier enquêteur pertinent à se pencher sur le dossier est Philippe Jaenada, l'auteur, 70 ans après. Un narrateur qui se met en scène malicieusement, avec une tonne de second degré et une auteur qui manie la parenthèse (et les digressions qui vont avec...) comme une arme (encore!).
Ah! Et le principale suspect de cette sordide affaire deviendra l'auteur de le Salaire de la Peur quelques années plus tard! Dingue, non? (C'est le prénom en réalité parce que l'enquête et le procès de l'époque sont encore plus dingues!)
Passionnant, avec tout de même quelques longueurs car l'enquête se déroule sous nos yeux quasi en temps réel. Pour les férus de romans (roman de procès ici) bien écrits, drôles et d'affaires non élucidées. Un plaisir. Long. Mais un plaisir.
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A chaque rentrée littéraire, j'essaie de sélectionner au moins un livre qui me fait envie, et en général je me le fais offrir à Noël. Cette année (enfin techniquement l'année dernière, mais vous aurez compris), j'ai choisi La Serpe, de Philippe Jaenada. le côté enquête policière, crime mystérieux et sanglant dans un château au fin fond de la campagne, m'a attirée.
J'avoue que l'épaisseur de l'ouvrage m'a un peu fait peur, ainsi que quelques critiques entendues ça et là sur les longueurs du récit (mais bon, on me l'avait déjà offert à ce moment là !)... Jusqu'à ce que j'entende une émission à la radio réunissant l'auteur et la chanteuse Jeanne Cherhal, littéralement fan de Philippe Jaeanda et de ce livre. Ca m'a donné à nouveau envie de me plonger dedans, et quelques jours après, c'était parti !
J'ai commencé le livre un dimanche, sans pouvoir le lâcher, et 8 jours plus tard, il était terminé ! Pour un livre de plus de 600 pages, c'est un record chez moi ! J'ai été réellement happée par ce livre, et j'ai même regretté de devoir le refermer une fois terminé. J'ai adoré le style de Jaenada, avec ses digressions souvent humoristiques (peut-être un peu moins celles au sujet de son dernier livre, que je n'ai pas lu, j'étais alors un peu perdue...), parfois carrément tordantes. Et surtout, j'ai été impressionnée par le travail de recherche et de synthèse que l'auteur a du fournir pour nous livrer un récit aussi bien ficelé et fouillé ! Il sait d'ailleurs nous transmettre l'émotion et la fièvre de la recherche ressentie lors des découvertes qu'il a faite aux archives, ou lorsqu'il visite le château.
Bref, ça se lit comme un polar, avec de nombreuses touches d'humour, mais c'est pourtant une histoire bien réelle, qui permet de rétablir la vérité (ou en tout cas une vérité plus proche de la réalité que celle retenue par la majorité des personnes au sujet de George Arnaud) sur un crime sanglant et atroce.
J'ai adoré, je vais me procurer sans tarder La petite femelle !
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Plus qu'un roman, c'est ensuite une véritable enquête, très documentée, entre archives, presse de l'époque, et autres témoignages, à laquelle s'est livré l'auteur.

Henri Girard , un sacré personnage! Innocent, coupable? Et si ce n'est pas lui, qui?
D'incohérences du procès aux lacunes de l'enquête, des zones troubles il y en a... largement de quoi faire un roman en tout cas!
Tout comme la personnalité du héros, qui donne envie de relire le salaire de la peur, dont il est l'auteur.

Philippe Jaenada fait durer le suspens, s'adresse au lecteur, raconte sa vie, revient à son roman précédent, nous égare ( et nous énerve parfois! ) pour finalement mieux nous accrocher, c'est un pavé mais qui se lit au final assez vite.

Bref, si le procédé peut finir par lasser un peu, cela reste un livre très intéressant et il n'y a plus qu'à souhaiter que l'auteur rouvre d'autres dossiers du même genre!
Lien : https://lecture-spectacle.bl..
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Pour une fois je n'ai pas été déçue par rapport aux critiques élogieuses concernant ce livre. Il ne s'agit pas d'un roman mais d'un récit, d'une enquête menée sous couvert de gros sabots et de beaucoup d'humour par un quidam qui entend parler d'un fait divers sordide qui n'aurait pas vraiment été résolu malgré un procès en 1941. le récit se décompose en deux parties : la première dans laquelle l'auteur expose de façon très détaillée la vie des protagonistes (accusé et victimes) de leur naissance à leurs morts, les crimes, le procès et la vie entière du fils. Dans la seconde l'auteur enquête et recoupe toutes ses sources pour établir si le verdict du procès était juste ou pas. Ce récit très descriptif, avec beaucoup de digressions très réjouissantes, se lit véritablement comme un excellent polar et il est terriblement difficile de le lâcher malgré ses 600 pages. J'ai découvert un véritable auteur et je vais me précipiter sur ses précédents ouvrages pour prolonger le plaisir.
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magnifique!!dès le depart il est évident que henry girard est le méchant! finalement est ce si sûr? très bien documenté!
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Philippe Jaenada a entendu parler d'Henri Girard par son ami Manu, père d'un copain de son fils. Henri Girard, grand-père de Manu, a écrit "Le salaire de la peur" sous le pseudonyme de Georges Arnaud publié chez Julliard, maison d'édition que Philippe Jaenada connaît bien. Mais c'est surtout un homme qui a été soupçonné en octobre 1941 d'avoir massacré à coups de serpe son père, sa tante et la bonne dans le château familial d'Escoire dans le Périgord, Henri avait alors vingt-quatre ans. Seul survivant dans un château dont toutes les portes étaient fermées et où aucune effraction n'a été constatée, Henri était le seul héritier et deux jours plus tôt, il avait emprunté l'arme du crime aux gardiens du château. Pourtant, défendu par Maurice Garçon, un grand avocat parisien, il sera acquitté au terme d'un procès retentissant. C'est donc à un fait-divers sordide jamais élucidé et à un personnage pour le moins antipathique que s'attaque l'auteur qui s'est plongé dans les archives de l'affaire et a reconstitué l'enquête.

Intéressé par le profil ambigu de cet homme, Philippe Jaenada part mener son enquête minutieuse, ainsi en parallèle, une autre histoire se déroule sous nos yeux : celle du détective Philippe Jaenada qui mène ses recherches en 2016. de plus, cet auteur à nul autre pareil, parsème son récit d'informations sur Sulak et Pauline Dubuisson, les deux personnages de ses précédents romans dont il nous donne ainsi des nouvelles. Car Philippe Jaenada est le roi des digressions, il parvient même à placer des parenthèses à l'intérieur de parenthèses...

Philippe Jaenada déroule d'abord la vie d'Henri avant d'en venir au crime. Henri, né en 1917, perd sa mère, atteinte de tuberculose alors qu'il n'a que neuf ans. Ses grands-parents paternels qui n'ont jamais accepté le mariage refusent de contribuer à payer les frais de séjour en sanatorium, Henri sera élevé par son père Georges, un homme perdu qui n'a pas appris à être père. Un drame qui explique la colère permanente qui habite Henri. D'un physique ingrat, maladif, il se comporte en enfant gâté et colérique, il mène la grande vie, entretenu par son père. Après guerre et après son acquittement, alors que l'opinion publique reste convaincue de sa culpabilité, Henri s'exile au Vénézuela où il devient chercheur d'or. Il rentre en France en 1950 avec le manuscrit du "Salaire de la peur" puis devient une grande personnalité du monde culturel, riche et célèbre après avoir dilapidé la fortune familiale. C'est un homme qui a eu mille vies, s'est marié quatre fois et a eu quatre enfants. Haut en couleurs, il a eu une vie incroyable " il ne mue, instantanément, qu'en anéantissant la fortune familiale, et se transforme en nomade combatif qui ne possède rien et vient en aide à ceux qui en ont besoin". Autant il était provocateur et cynique, en un mot extrêmement antipathique avant le crime, autant il devient sympathique ensuite notamment quand il lutte contre certaines injustices.

J'ai adoré ce roman pour de multiples raisons. La première est certainement la découverte de Philippe Jaenada, écrivain hors normes qui se met en scène avec un sens de l'auto dérision et un humour incroyables. Ses digressions sur sa famille, son fils, ses petites habitudes, les scènes désopilantes qu'il nous raconte (comme celle du restaurant chinois) m'ont vraiment amusée et ont contribué à alléger le récit d'une histoire bien sordide. Philippe Jaenada possède un réel talent de conteur, même si de temps en temps il doit faire appel à Balzac pour l'aider à être clair dans ses descriptions...
Par ailleurs, j'ai trouvé ce fait-divers vieux de 75 ans intéressant, le jugement qui a suivi pour le moins surprenant, le personnage d'Henri Girard assez fascinant et l'enquête minutieuse menée par Philippe Jaenada passionnante. Il a cherché à comprendre qui était vraiment Henri Girard derrière ses apparences de mauvais garçon et a mené une enquête très rigoureuse à la recherche du moindre détail, de la moindre incohérence aboutissant à des questions pertinentes et pleines de bon sens. Il nous raconte une enquête qui nous tient en haleine, qui nous plonge dans la France de Vichy et qui nous fait croiser, entre autres, Léo Ferré et Henri Charrière, le légendaire Papillon.
Philippe Jaenada a écrit un livre passionnant sur un crime sordide et sur un personnage aux multiples facettes et a abouti à des conclusions qui interpellent.
Un régal !
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Henri Girard et Georges Arnaud ne font qu'un. Sans doute ces deux noms ne vous disent-ils que vaguement quelque chose, à moins d'avoir déjà lu La Serpe. Pourtant ils ont marqué leur époque. Henri Girard a été accusé de trois horribles meurtres à la serpe, celui de son père, de sa tante et de la cuisinière du château, en 1941. S'il a été acquitté, il n'en reste pas moins que pratiquement personne ne l'a cru innocent, à part Maurice Garçon, son principal et brillant avocat. Neuf ans après le drame, sous le pseudonyme de George Arnaud, il a écrit, entre autres, le livre le Salaire de la peur (Julliard) sur lequel Georges Clouzot s'est appuyé pour tourner le film du même nom.
Philippe Jaenada a sa réputation bien installée en tant que fouille-merde dans les affaires glauques du passé. Dans Sulak (Julliard, 2013), il retrace la vie de Bruno Sulak le gentleman cambrioleur, ainsi que celle qu'il aurait pu vivre si la destinée ne s'en était pas mêlé. Dans La petite femelle (Julliard, 2015), il réhabilite la mémoire de Pauline Dubuisson bafouée par la population, la presse et tout ce qui pense et s'exprime à l'époque et bien des années après, suite au meurtre de son amant. La Serpe est de la même trempe. Philippe Jaenada décortique l'assassinat, les interrogatoires et le procès, s'installe dans les locaux des Archives de Périgueux, hante les lieux du crime et propose aux faits une autre explication que celle qui a conduit au jugement d'Henri Girard.
« Entre un nem et une bouchée de boeuf aux oignons (très moyen, si je peux me permettre), je retourne au livre de Guy Penaud. Il raconte le procès et son ahurissant dénouement. L'accusé a pu, miraculeusement, s'adjoindre les services du plus grand – et de loin – avocat de ces années-là et des suivantes, sans doute même du XX° siècle et du nôtre jusqu'à maintenant (seul Éric Dupond-Moretti, je pense, peut regarder son fantôme dans les yeux) : Maurice Garçon. C'est grâce à lui, à son génie, qu'Henri poursuivra sa vie, libre, claquera la fortune de la famille en deux ans, se traînera crevard en Amérique du Sud, que Georges Arnaud écrira le Salaire de la peur, sauvera la tête de Djamila Bouhired, se battra contre toutes les injustices et sera enterré au cimetière barcelonais de Cerdanyola, quarante-quatre ans après le verdict, sous son vrai nom et un seul mot, espagnol : « Henri GIRARD – ESCRITOR ». »
De son écriture mauvais genre toujours maîtrisée et brillante, il décortique les événements, raconte son enquête, ironise sur le passé et sur lui-même et, par là-même, captive le lecteur qu'il tient en haleine malgré la longueur de ses hypothèses ponctuées de descriptions, dont il a besoin pour étayer ses théories. le résultat est vibrant de vivacité, drôle et imagé.
« L'avocat général est Bernard Salingardes, Procureur de la République à Périgueux. La partie civile, en l'occurrence Madeleine Soudeix, la fille de Louise [la cuisinière], est représentée par Bardon-Damarzid, avocat au barreau de Périgueux, assisté de Maître Chapoulaud. Tout le monde ici est du coin. Quand Maurice Garçon pénètre dans la salle, c'est comme si Maurice Chevalier arrivait pour chanter au mariage de la cousine Paulette, ou comme si Gérard Depardieu acceptait d'interpréter l'ogre à la kermesse de fin d'année de la maternelle de Dylan. Sa réputation le précède, son physique intimidant l'accompagne. »
Philippe Jaenada a également l'art de croiser ses différents romans, ce qui donne encore plus d'ampleur au récit. Avec La petite femelle en particulier, certaines comparaisons ne manquent pas de truculence. Ainsi de Maurice Garçon qui sauve Henri Girard e
n 1943 alors qu'il réclamera la tête de Pauline Dubuisson dix ans plus tard. Hasard dans le choix de ses sujets ? Peut-être, mais Jaenada ne le présente pas ainsi.
Vous l'aurez compris, j'avais déjà beaucoup aimé La petite femelle et, malgré une ressemblance dans la structuration du récit (ressemblance toute relative, dans la mesure où Henri Girard a longuement et pleinement survécu au procès contrairement à Pauline Dubuisson), je me suis régalée en lisant La Serpe. Il a reçu le Prix Renaudot 2017, amplement mérité.
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