Juste un petit mot après un séjour en Namibie qui a confirmé mon impression sur ce livre lu avant le voyage: au-delà du plaisir de lire un bon polar, cette histoire est une très bonne introduction à la Namibie d'aujourd'hui, plus de 25 ans après la prise du pouvoir par la SWAPO, mouvement indépendantiste. Comme en Afrique Sud avecl'ANC, le règne de la SWAPO est loin d'avoir résiolu tous les problèmes y compris ceux liés à son histoire, laquelle livre l'intrigue de ce polar. Bonne lecture!
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Un roman noir, sec et brûlant comme le soleil de Namibie. Où la fiction rejoint la réalité et vice versa. A travers une enquête policière inspirée d'un fait réel (le meurtre impuni de Lubowski), B.Jaumann nous entraîne dans la Namibie post-apartheid, où le présent répond encore aux échos du passé. le constat est sans appel : criminalité galopante, corruption, racisme, misère, sida, superstition... et une touche d'espoir. Un polar brûlant, vraiment...
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C'est une belle histoire que nous conte ici Bernard Jaumann : nous sommes en 2009 à Windhoek , capitale de la Namibie . Ecartelée entre ses racines coutumières noires représentées par ces deux tantes omniprésentes et sa volonté de s'affirmer au sein d'une équipe masculine , l'inspectrice Clemencia Garises va devoir tenter de débusquer un tueur en série qui élime tous les anciens membres du CCB ( commando secret liée à l'armée sud africaine ) soupçonnés d'avoir trempé dans l'assassinat d'Anton Lubowski , membre du SWAPO ( organisation pour la libération de la Namibie ) , opposant blanc au régime sud africain qui occupait le pays à l'époque , et ce un an avant l'indépendance du pays en 1990.
Cette fiction basée sur un fait réel est aussi le prétexte à la description d'un pays tout neuf qui a pris conscience de son autonomie récemment . Un pays qui est encore marqué par les séquelles de l'apartheid et dont la farouche volonté de faire table rase du passé pour mieux se reconstruire ne fait aucun doute .
Un récit captivant malgré une fin confuse et un peu décevante .
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La Namibie est un jeune pays où l'apartheid a laissé des traces mais qui tente de se faire une place dans le monde libre. C'est sans compter sur une affaire vieille de 20 ans qui refait surface. Un homme a été abattu et il semblerait que toutes les personnes impliquées dans son meurtre se fassent tuer.
L'affaire est donc confiée à une jeune inspectrice issue d'un quartier difficile. Face aux réticences des blancs, elle comprend que les meurtres d'aujourd'hui sont liés au meurtre perpétré 20 ans auparavant. Pour démasquer le tueur, il va falloir remonter le temps.
L'auteur dépeint un système judiciaire et politique encore gangréné par la corruption. Clemencia est une jeune femme d'aujourd'hui débrouillarde, intelligente mais doit encore se battre contre les coutumes ancestrales. Pas facile quand on vit dans un deux pièces avec la dizaine d'autres membres de sa famille.
Voici donc un roman noir dans tous les sens du terme très intéressant et documenté sur l'histoire du pays.
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L’un des principes de la justice pénale est que tout acte a des conséquences qui sont déterminées dans le cadre d’une certaine marge d’appréciation, et donc prévisibles. Quand on tue quelqu’un, on sait à quoi s’attendre. Il ne peut pas y avoir d’exception, pas seulement à cause des victimes et de leur famille, pas seulement à cause d’un idéal de justice quelconque, mais parce que sans cela, une règle toute simple et pourtant élémentaire de notre vie en communauté perdrait tout son sens : il faut assumer les conséquences de ses actes. Et ceux qui ne le font pas eux-mêmes doivent impérativement y être forcés par d’autres. Sinon, c’est le début de la fin.
Clemencia poursuivit son interrogatoire, qui se révéla particulièrement laborieux. Elle devait pousser Mme van Zyl dans ses derniers retranchements pour lui arracher le moindre mot et, même ainsi, elle n’en tirait presque aucune information utile. La femme de la victime affirmait que son mari avait mené une vie tout à fait normale. Naissance à Pretoria, école, service militaire, université. Comme elle-même ne voulait pas quitter son pays natal, il était venu s’installer à Windhoek. Ils y avaient fondé une famille, lui avait gravi les échelons professionnels jusqu’à devenir cadre dirigeant ; le soir, il s’occupait de son jardin, et le dimanche, il allait à la messe à la NG Kerk*.
Clemencia regarda Mme van Zyl écraser nerveusement sa cigarette et s’en allumer aussitôt une autre. Elle aussi aurait préféré arriver bien plus tôt. Évidemment, la situation était très dure pour l’entourage de la victime, mais ne pouvait-on tout de même espérer un peu de coopération ? Elle demanda au policier de lui montrer l’endroit où on avait trouvé le corps, et il la mena sur la terrasse, où deux de ses collègues attendaient en faisant mine de monter la garde. Lorsqu’ils furent hors de portée de voix de la maison, elle exigea des explications : pourquoi ne l’avaient-ils pas prévenue plus tôt ? Mais les trois hommes se contentèrent de hausser les épaules.
Un homme et quatre femmes, tous blancs, étaient assis à la table de la salle à manger. Clemencia devina aussitôt qui était la mère. Blême, le visage pétrifié, elle fixait des yeux le cendrier posé devant elle. On ne remarquait les tremblements de ses mains que lorsqu’elle portait sa cigarette à ses lèvres pour en tirer des bouffées avides. Quand Clemencia se présenta, la femme leva à peine les yeux.
« C’est vous qui menez les investigations ? lança en afrikaans l’homme assis près d’elle, détaillant Clemencia de la tête aux pieds.
— C’est bien que vous soyez déjà là, trois heures et demie plus tard », lâcha, amère, l’une des femmes.
Il enfonça le chargeur incurvé dans l’ouverture de l’AK-47 et vérifia qu’il était bien enclenché. Trente cartouches, 7,62 mm. En se penchant sur le côté, il sentit sa chemise trempée de sueur lui coller au dos. Le sang bouillonnait dans ses veines, mais c’était uniquement à cause de la chaleur qui stagnait dans la voiture, bien que toutes les vitres en soient descendues au maximum. Il déposa la kalachnikov à sa gauche, à la place du passager, et se rassit sur le siège conducteur. À la radio, le présentateur annonça le titre « Summer in the City ». C’était une station afrikaans*, radio Kosmos, 94.1 MHz.