Citations sur Éloge de la faiblesse (132)
Il faut tout mettre en œuvre pour parvenir à tirer profit même de la situation la plus destructrice. J'insiste sur les épreuves parce que celles-ci restent inévitables. Rien ne sert de discourir, d'épiloguer des heures durant sur la souffrance. Il faut trouver des moyens pour l'éliminer et, si on ne le peut pas, l'accepter, lui donner sens.
Je pense, au contraire, qu[e se sentir tributaire des autres est] une richesse, mais pour cela il faut dépasser les mortifications du départ. Mon incapacité à atteindre une parfaite autonomie me montre quotidiennement la grandeur de l'homme. Au cœur de ma faiblesse, je peux donc apprécier le cadeau de la présence de l'autre et à mon tour, j'essaie avec mes moyens de leur offrir mon humble et fragile présence.
Lundi, mardi, mercredi, jeudi et vendredi se succédaient à la même cadence. Sans jamais se ressembler, les jours suivaient pourtant leur cours avec une étonnante régularité. Le temps nous entraînait inéluctablement dans sa marche sans que nous lui opposions jamais un pourquoi.
Nier le corps, loin de s'élever, c'est s'abaisser. Nier le spirituel, même résultat !
Viser l'harmonie entre ces deux dimensions, savoir la gérer, là réside précisément le difficile apprentissage du métier d'homme.
Je me rappelle toujours cet esprit rebelle à qui je lançais ma salutation habituelle, "Sois sage". Un jour, il me répondit à brûle-pourpoint "Et toi, marche droit !". Cela me procura un plaisir extrême. Il m'estimait pour moi-même, et n'avait pas pris les pincettes que prennent ceux qui me sourient béatement quand, à la caisse, je paie mon paquet de spaghettis aux herbes.
La réification consiste à réduire l'autre en rang de chose.Elle réduit l'autre à un attribut ,ne voit en lui qu'une qualité ou un défaut ,elle le pétrifie en bloquant toute évolution.
La peur de perdre, la peur de blesser, la peur d'être repoussé par l'ami, ou plutôt par celui dont je dépends, est effectivement un poison dangereux. Il instrumentalise l'autre, le réduit au rang de moyen pour combler un vide, moyen pour combler ma solitude. On s'accroche, on rampe vers l'autre pour se fuir soi-même.
Inconsciemment je percevais et comprenais que ma présence était pour beaucoup de personnes associée à un échec, un accident. J'incarnais pour eux une sorte de souffrance qui les culpabilisait. Ils se rendaient presque coupables de mon handicap. Je jouais le rôle d'une mauvaise conscience.
La difficulté aguerrit, stimule, elle oblige à trouver des solutions.
'L'individu faible de représente pas nécessairement un poids pour l'autre. Chacun dispose librement de sa faiblesse, libre à lui d'en user judicieusement."