J'avais envie de commencer l'année en me plongeant dans une ambiance british, mission accomplie grâce à ce joli roman de
Rachel Joyce, paru en France en septembre 2012. le titre atypique – comme je les aime, je pense également au Cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates et au Goût des pépins de pommes lus il y a quelques années – a achevé de me convaincre.
Un mardi donc, un certain Harold Fry, retraité depuis peu, reçoit une lettre ; elle émane d'une ancienne collègue qu'il n'a pas vue depuis vingt ans ; dans un petit mot très court, elle lui fait savoir qu'elle est atteinte d'un cancer en phase terminale. Harold tente de formuler une réponse, bien qu'il soit difficile de trouver les mots appropriés. Mais au moment de poster la missive, il est pris d'une impulsion soudaine : il va se rendre au chevet de Queenie, à pied, afin de la sauver. Sans chaussures de marche ni aucun équipement, sans même consulter son épouse Maureen, il s'apprête à traverser l'Angleterre du sud au nord, de Kingsbridge à Berwick, dans l'espoir fou de guérir son amie. Commence alors un voyage initiatique aux consonances de pèlerinage, de rédemption, à la découverte du monde, à la rencontre des autres, et surtout à la rencontre de soi.
J'étais impatiente de le lire donc, et pourtant, j'ai mis du temps à entrer dans cet univers feutré, morose, trop lisse. Au bout de quelques chapitres, je craignais de me laisser envahir par la douce monotonie du récit. En effet Harold commence à cheminer et le lecteur découvre essentiellement des considérations d'ordre pragmatique certes justifiées mais un peu lassantes. Heureusement, le rythme s'accélère lorsqu'Harold prend son « destin » en main et laisse tomber les artifices de la vie moderne pour communier avec la nature. Cet homme effacé, terne, fermé comme une huître, devient un héros en quelques semaines.
Peu à peu, je me suis laissé happer par la marche d'Harold et je me suis attachée à ces personnages, frustrés et touchants. Harold Fry fait partie de ces livres qui font du bien, miroirs de nos craintes mais aussi de nos espoirs et de nos petits bonheurs. Sans parler bien évidemment, de l'émotion qui va crescendo, et qui nous fait tourner la dernière page partagé entre larmes et optimisme. Très sensible au thème de la rédemption ou simplement, de la seconde chance, je suis toujours émue par ces récits qui nous dévoilent la possibilité d'un nouveau commencement. Sensible aussi au mélange des tonalités, j'apprécie les oeuvres qui savent allier drame et touches d'humour « so british », bien que l'émotion l'emporte largement sur ces dernières.
Qui plus est, c'est un plaisir de cheminer dans la campagne anglaise, et de saisir au vol quelques éléments typiques :
« A Brampforde Speke, les maisons avaient maintenant des toits de chaume et la brique n'était plus couleur silex, mais d'un rouge chaud. Des branches de spirées ployaient sous les fleurs et des pousses de delphinium pointaient leur nez dans la terre. »
J'aurais même apprécié davantage de descriptions, mais là n'était pas l'objet du récit. On peut cependant suivre avec plaisir l'itinéraire d'Harold en tête d'ouvrage.
Une belle histoire que je vous recommande vivement !