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Citations sur L'Année de l'éveil (29)

Une paix monte en moi,
des choses vitales me sont confusément dévoilées,
et je comprends que je commence à quitter mon enfance
p 61
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Quand je songe à celui que j'ai été, à cette naïveté et cette puérilité qui ont si longtemps été miennes, quand certains faits me reviennent en mémoire, ma stupidité m'apparaît, et je suis submergé par la honte.
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J'affectionnais particulièrement deux exercices. Le premier consistait à demeurer immobile et à observer longuement tout ce qui se trouvait dans mon champ de vision. Puis je fermais les yeux et devais me rappeler et me décrire tout ce que j'avais observé. Le second exercice était un peu semblable à celui-ci. Mais au lieu de porter mon regard sur ce qui m'entourait, je gardais les paupières closes et me racontais ce que je ressentais, ou ce qui me passait par la tête. (...) Parfois, je cessais de me parler, et une histoire se développait, qui m'entraînait fort loin, en des villes et des pays dont les noms me faisaient rêver.
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Revenu à mon cachot, écrasé de silence et de solitude, je découvre avec accablement que les choses, la nature, l'univers ne peuvent rien pour nous, que je n'ai plus à espérer leur aide, qu'il me faudra à jamais me passer d'eux.
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(...) selon moi, Dieu n'existe pas. Depuis le fond des âges, l'homme est dans un tel effroi face à la vie, à la mort, l'immensité de l'univers et de ce qu'il ignore, qu'il a éprouvé le besoin d'imaginer un père tout-puissant, un père qui a pour rôle de le guider, le protéger, le consoler, un père qu'il ne cesse d'implorer et à qui il demande de dispenser largement bonheur, réussite, richesse, un père qui lui assure qu'après avoir été jeté en terre, il ressuscitera, puis jouira d'une existence et d'une félicité éternelles. Tout cela est si puéril, si dérisoire. Comment l'homme eut-il pareillement se leurrer, fonder sa vie sur un tel tour de passe-passe, croire en Dieu qui est le produit de sa propre invention ? Cela est pour moi un mystère. (p.116-117)
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Je me figurais que pour s'aimer, un homme et une femme devaient se cacher dans le noir, être étendus sur un lit, et mon étonnement est sans bornes d'avoir découvert qu'ils peuvent s'étreindre le jour et dans la campagne. Que cet acte ait pu être commis en pleine lumière et en dehors d'une pièce close, augmente encore mon tourment. (...) A coup sûr, Dieu nous aura vus. Terrible sera le châtiment. (p.42-43)
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En entrant dans cette caserne, en voyant ces murs, ces bâtiments, en découvrant ces centaines de visages inconnus, ces manières de parler tellement différentes de la mienne, dès la première minute, j’ai compris que j’étais seul, irrémédiablement seul, que je serais à jamais seul, que chaque être humain est misérablement seul. (p 62)
Je prends conscience qu’on ne choisit ni ses parents, ni son enfance, ni ce qui en découle, ni ce qu’on est. Mais ce que le hasard et les circonstances m’ont attribué, et qui n’est pas forcément pour me convenir, dois-je le combattre, ou m’y soumettre ? Ces questions qui viennent de surgir en moi, je devine qu’elles ne me lâcheront plus. Ainsi non seulement suis-je seul, dramatiquement seul, mais encore, il ne m’est pas accordé de choisir la vie qui pourrait répondre à mes désirs. Mes pas, ces pas que je ne peux diriger, où vont-ils me conduire ? Vers quels pays ? Quelles rencontres ? Quels abîmes ? (p 66)
(Un professeur parlant aux élèves de son expérience en camp de concentration) : « La première de ces conclusions, fort banale, procède d’un simple constat. Elle peut s’énoncer ainsi : en toute bonne conscience, l’homme est capable d’infliger à d’autres hommes les choses les plus terribles, les plus atroces. En les écrasant et les humiliant, en les contraignant à perdre toute dignité et à se mépriser eux-mêmes, il vise à tuer leur âme, à les transformer en loques, en déchets puants et repoussants, de sorte qu’à la fin, hébétés, vidés de toute humanité, ne se reconnaissant plus le droit de vivre, ils en viennent à être des victimes consentantes, à collaborer avec la machine de mort qui travaille à les anéantir.
Mais il faut aussi savoir qu’à l’opposé, l’homme peut faire montre d’un dévouement, d’une générosité, d’un héroïsme absolument admirables. Lors de mon prochain cours, je vous raconterai comment des déportés n’hésitèrent pas à mettre leur vie en jeu pour venir en aide à un camarade. […] Donc, lorsque devenus adultes, vous chercherez à sonder ce mystère qu’est l’être humain, à vous faire une juste idée de ce que nous sommes, il vous faudra ne pas perdre de vue que nous avons au moins deux versants. […]
La seconde conclusion à laquelle je suis parvenu, non moins banale que la première, est également née d’un constat. Un constat qui m’a amené à découvrir que l’homme possède des ressources de courage, de ténacité, d’énergie absolument insoupçonnables. Aux prises avec les pires circonstances, prisonnier des situations les plus désespérées, il trouve en lui les moyens de se rendre quasiment invincible, de déjouer ce qui est conçu pour l’avilir et l’éliminer. S’il veut, il peut surmonter souffrance et désespoir. S’il veut, il peut même vaincre sa peur de la mort. Et lorsqu’il est affranchi de cette peur, il possède une force et une liberté qui lui permettent de tout défier, tout affronter.
Au maquis, j’avais un grand ami, […]. Un jour, alors que nous étions traqués par les Allemands et que nous grelottions, enfouis dans la neige, je maugréais, maudissais cette vie que nous menions. […] Il me rappela à l’ordre, puis conclut, comme s’il émettait une évidence : ‘Si on sait s’y prendre, on peut être heureux même en enfer.’ Cette réflexion, je ne l’ai jamais oubliée. Non plus que ce regard qu’il avait eu. Un regard vibrant de défi, de force, de joie, d’une détermination farouche, qui m’avait immédiatement regonflé. » (p 112-115)
˗ Monsieur, pourquoi Dieu a-t-il permis qu’il y ait des camps de concentration ?
[…]
˗ Si ta question s’adresse non au professeur, mais à l’homme que je suis, je me sentirai autorisé à te dire que, selon moi, Dieu n’existe pas. Depuis le fond des âges, l’homme est dans un tel effroi face à la vie, la mort, l’immensité de l’univers et de ce qu’il ignore, qu’il a éprouvé le besoin d’imaginer un père tout-puissant, un père qui a pour rôle de le guider, le protéger, le consoler, un père qu’il ne cesse d’implorer et à qui il demande de dispenser largement bonheur, réussite, richesse, un père qui lui assure qu’après avoir été jeté en terre, il ressuscitera, puis jouira d’une existence et d’une félicité éternelles. Tout cela est si puéril, si dérisoire. Comment l’homme peut-il pareillement se leurrer, fonder sa vie sur un tel tour de passe-passe, croire en un Dieu qui est le produit de sa propre invention ? Cela est pour moi un mystère. D’ailleurs, que Dieu existe ou non, quelle importance ! En revanche, ce qui importe au plus haut point, c’est ce que nous sommes, et la manière dont nous nous conduisons avec autrui.. Cet autre moi-même, mon semblable, est-ce que je le respecte, le traite en égal, fais preuve de rectitude dans mes rapports avec lui ? Ou au contraire, est-ce que je ne cherche pas, subtilement ou non, à le dominer et l’exploiter ? A l’abaisser et l’humilier ? Ces questions, vous aurez à vous les poser cent fois le jour et tout au long de votre existence. (p 116-117)
Moi, pour que je ne sois pas toujours à me faire des reproches et à me mépriser, pour que je travaille bien en classe, j’ai besoin qu’un adulte me marque de l’intérêt, se préoccupe de mes résultats, me donne de l’amitié. (p 145)
J’écoute cette voix qui me parle avec insistance, me ressasse depuis quelques heures toujours les mêmes mots. C’est un ensemble de trois courtes phrases qui se rapportent à ce que je préfère laisser enfoui au fond de moi. Soudain, à peine l’envie m’en est-elle venue, je décide de graver ces phrases dans le bois du bat-flanc. […] L’enfant que le père a chassé n’a plus de route. Là-bas loin dans la montagne du fond de sa tombe la mère appelle. Inlassablement de sa bouche écrasée le fils la supplie d’accorder enfin son pardon. (p 196, 198)
Mais, avait poursuivi notre professeur, dans l’hypothèse où Dieu n’existerait pas, il ne faudrait pas commettre l’erreur de considérer que tout est permis. L’exigence morale est en chacun et il incombe à chacun de lui obéir. Et pourquoi ne serions-nous pas capables de mener des vies authentiquement morales sans l’espoir d’obtenir une rétribution dans l’au-delà ? Bien des croyants s’efforcent d’être irréprochables, mais uniquement par égoïsme, pour s’assurer un profit, gagner la vie éternelle. Il n’y a là ni plus ni moins qu’une sorte de marchandage, et ce marchandage est profondément immoral. (p 246)
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En entrant dans cette caserne, en voyant ces murs, ces bâtiments, en découvrant ces centaines de visages inconnus, ces manières de parler tellement différentes de la mienne, dès la première minute, j’ai compris que j’étais seul, irrémédiablement seul, que je serais à jamais seul, que chaque être humain est misérablement seul, et depuis, je ne suis plus comme avant.
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Je rampe jusqu'à me trouver entre deux fenêtres, me mets sur le dos, croise les mains derrière la nuque et contemple les étoiles. Leur diversité ne m'avait jamais frappé, et cette nuit, j'en fais la découverte. Certaines sont minuscules, d'autres plus grosses qu'une mirabelle, certaines paraissent ineffablement éloignées, d'autres toutes proches, certaines émettent un
rayon uniforme, d'autres vivent et palpitent, semblent lancer des appels, forcent mon esprit à s'interroger sur leur multitude, sur l'énigme de la vie, sur l'origine et l'étrangeté de cet univers dont l'immensité m'épouvante et m'écrase. Car ces espaces infinis, criblés d'étoiles, qui descendent en moi et m'émerveillent, m'amènent à me sentir désaccordé, inconsistant, vain, nul, m'emplissent de honte, me donnent le désir de me retirer de l'existence.
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Les feuillets que je tiens enfouis dans ma poche, je les porte à ma bouche. Me mets à les mâcher et les avaler. Pour n'avoir pas à me séparer de ce qui m'est venu d'elle. Pour la sentir vivre en moi. Pour faire passer ses mots dans mon sang.
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