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sur 224 notes
A son retour de captivité, Jean Paul Kauffmann s'est mis en quête d'un lieu.
Pendant trois années, il avait été détenu, enchaîné, plongé dans l'obscurité et confronté à la «stupidité» de ses geôliers. En recouvrant la liberté, l'aveuglante lumière de la liberté, il savait que plus jamais il ne pourrait reprendre le cours normal de sa vie d'avant, ni son métier de journaliste, ni ses virées en Sologne. Il lui fallait renaître autrement et ailleurs.

"Les Landes, la campagne normande ou les îles Fortunées: il fallait bien se poser quelque part. Je n'ai pas choisi la maison dans la forêt. Elle s'est proposée à moi par défaut, à une époque confuse de mon existence. Choix hâtif auquel je suis lié à jamais."

Après avoir sillonné le Bordelais, l'amateur de grands vins a jeté son dévolu sur les Tilleuls, une bâtisse abandonnée au coeur de la forêt des Landes, dont il a appris qu'elle avait été, pendant l'Occupation, un bordel pour SS.
Avec, pour complices diurnes, Castor et Pollux, deux ouvriers chargés de restaurer ce qui manquait de s'écrouler et, le soir venu, pour unique lecture, « les Géorgiques », de Virgile, Jean-Paul Kauffmann va réapprendre. le métier de vivre...

C'est un livre magnifique, où l'on ne perçoit jamais l'once d'un auto-apitoiement. Il parle de la nature environnante, de la rénovation d'une bâtisse abandonnée en parallèle à sa propre renaissance, de ce que les livres lui ont apporté en captivité et, comme tout humain qui a été longuement privé de tout, il redécouvre l'émerveillement devant un arbre, la pluie, etc.

J'ai choisi deux extraits, assez longs, mais j'aime ce livre!

"L'airial a belle allure, mais à quel prix? La terre des Landes me désespère. Ce matin, j'ai arrosé, constatant comme à chaque fois que le sable mat laissait passer l'eau sans la fixer. le lessivage creuse un peu plus la surface, formant de petites vallées bien nettoyées aux échancrures blanchies par le rinçage. La terre des Tilleuls est ingrate. On a beau y déverser de l'humus, de la tourbe, du fumier, le sable finit toujours par réapparaître . a tout ce qu'il touche, il transmet sa nature pulvérulente
Ce sable qui resurgit, je le compare volontiers à ma condition, à ce passé qui ne cesse de remonter à la surface. Il métamorphose tout sur son passage, exerçant sur moi un pouvoir absolu. de ce passé qui a pu me montrer ma vulnérabilité, je me suis servi comme d'un tremplin. L'histoire des deux souris qui tombent dans une jatte de lait m'enchante. La première crie " Au secours" et se noie. La deuxième bat tellement des pattes qu'elle se retrouve sur une motte de beurre.
Reprendre une vie normale, il n'en était pas question. Dès mon retour, je me suis empressé d'adopter aux Tilleuls une existence résolument anormale. C'est probablement ce qui m'a sauvé. Une fois libéré, j'ai vite compris qu'il me serait impossible de renouer avec la vie d'antan.
Pour l'occasion, j'avais inventé le syndrome de Luis de Leon, du nom de ce théologien fameux de Salamanque qui fut arrêté au beau milieu de son cours par le tribunal de l'Inquisition . Torturé puis condamné, Leon passa une dizaine d'années en prison. Libéré, il reprit son enseignement à l'université, à l'endroit même où il l'avait abandonné en disant :" Comme je vous le disais hier", voulant signifier par là qu'il évacuait ces années terribles.

Tout invite l'ancien reclus et ses proches à se reporter à la période d'avant, à recommencer comme si de rien n'était. Je répugne à ma prévaloir de mon malheur passé. Je ne l'oublie pas pour autant. Je lui suis absolument fidèle: " Je ne veux pas qu'on m'intègre". Cette phrase d'un héros de Sartre est la mienne. Dans quel monde suis-je? J'ai pu m'échapper de l'autre rive, mais une chose est sûre: je ne serai jamais d'ici. ....
.... Réussir son retour est pour le rescapé presque aussi difficile que de tenir pendant l'épreuve. Dans le trou,il résiste. Il n'a pas le choix. Hors du trou, il a le choix, tous les choix. Il est maître du jeu. Problème de taille: le jeu est trop ouvert, béant pour celui qui vient de s'extraire d'une existence réduite à sa plus simple expression. par où commencer? C'est là que les ennuis commencent. Mais ce ne sont que des ennuis, pas des tragédies."




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Voilà un auteur que j'ai lu à cause d'un article concernant son périple au long de la Marne, donc un autre de ses livres, en fait. Je connaissais l'homme me rappelant le compte des jours de détention, quotidiennement, quand j'étais plus jeune mais l'écrivain, j'étais passée sans le voir.
J'ai emprunté le titre disponible à la bibliothèque et c'était celui-ci.


Après son retour du Liban, plus rien des sa vie ne peut ou ne doit reprendre le cours à l'identique de "l'avant". Il décide d'acheter une maison, dans une "nouvelle" région et c'est, en fait , une rencontre qu'il va faire. Lui, l'homme au passé "abimé" va tomber sous le charme d'une maison au passé "trouble" que personne ne voulait habiter et qui l'attendait, on pourrait presque le penser.

Et c'est le partage d'un retour à la vie, celui d'une maison maudite et celui de cet homme qui décide de camper au milieu des travaux et qui restaure son âme au rythme de la restauration des murs de la bâtisse. La maison et les jardins lui permettent de se réadapter au quotidien, tout comme un livre classique, trouvé, abandonné là, qui le fait s'interroger sur la force de la lecture dans une vie.

Les pages sur la nature sont très belles, très "observatrices", il parle très bien des arbres et des animaux, et eux, à leur façon, vont lui faire reprendre la cadence des saisons.



J'ai vraiment beaucoup aimé, c'est plein d'érudition qu'il partage simplement, et on ne peut être qu'admiratif devant la force de caractère qui l'habite.
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De retour en france il achète et retape 'Les Tilleuls', une batisse dans les Landes. Il tente de nous distraire avec l'impayable agent immobilier 'ballon', les maçons taiseux Castor et Polux, le copain architecte Urbain, les conversations branchées du voisin, Virgile.

On peut faire un livre avec pas grand chose mais dans le genre je préfère Tesson.
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Après sa libération du Liban, où il est resté prisonnier pendant trois ans, Jean-Paul Kauffmann décide de se retirer du monde et achète une maison dans les Landes. Il va y rester seul, même pendant la durée des travaux, c'est ce parcours qu'il raconte dans son livre ainsi que son retour à la vie. Un texte qui montre justement combien ce retour à la vie peut-être laborieux.
Lien : http://araucaria.20six.fr/
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Après son retour du Liban où il a été retenu comme otage pendant 3 ans, Jean-Paul Kaufmann cherche un endroit "à lui" et jette son dévolu sur une vieille maison dans les Landes qu'il fait retaper. Pendant toute la durée des travaux, il campe dans cette maison et s'approprie les lieux...

Je suis tombée par hasard sur ce livre que j'ai subtilisé dans la bibliothèque d'une amie et dont je ne me souvenais plus que je l'avais. J'ai failli lui rendre sa liberté mais le résumé de la 4e de couverture m'a donné envie d'en savoir un peu plus et grand bien m'en a pris. J'ai traversé ce roman dans un état d'émerveillement permanent, bercée par les phrases limpides de cet homme qui ré-apprend la liberté et qui adopte un nouveau nid, pourtant pas facile au milieu d'une jungle d'arbres qui l'isolent encore plus du monde extérieur. Les liens que tisse l'auteur avec cette maison et la nature qui l'environne sont très touchants, toujours pleins de sensibilité et merveilleusement desservis par une langue magnifique, une richesse de vocabulaire qu'on ne rencontre hélas plus si souvent dans la littérature contemporaine (et sans que jamais, ça ne produise un effet ennuyeux ou pompeux). Je voyais arriver la fin du roman avec détresse, je ne voulais pas quitter cet univers et ces réflexions sur le monde, la nature ou l'humanité. La conclusion est assez longue, ce qui m'a permis une séparation en douceur mais vraiment, quel excellent moment de lecture. Merci M. Kaufmann.
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Je fais partie de la génération qui a vu pendant trois longues années l'annonce à la TV du nombre de jours de détention de ceux qu'on appelait "les otages du Liban". Et c'est toujours avec beaucoup d'émotion que je revois l'image de leur arrivée à Paris le 5 mai 1988. Jean-Paul Kauffmann est hagard, amaigri, sans ses lunettes, et surtout sans Michel Seurat mort en captivité. Vous me direz qu'être otage ne fait pas forcément de vous un bon écrivain, mais Kauffmann est quelqu'un qui a un vrai style. On l'a vu dans les très beaux "La chambre noire de Longwood" (le récit de la captivité de Napoléon à Sainte-Hélène) et "L'Arche des Kerguelen". Dans "La maison du retour" il raconte l'origine de cette vocation d'écrivain (au départ il était journaliste).


Au retour de sa captivité, il ne se sent pas capable de reprendre le cours normal de sa vie à Paris, il a besoin d'une sorte de sas pour réapprendre à vivre. Il décide d'acheter une maison, plutôt dans la région de Bordeaux en bon amateur de vin qu'il est. Mais c'est pour une maison perdue dans les Landes qu'il aura le coup de foudre. Et là, pendant de longs mois il va cohabiter avec les deux ouvriers qui restaurent la batisse, découvrant cette nature landaise un peu sauvage, comme lui. Cette parenthèse lui sera nécessaire pour retrouver la notion de temps, les saisons, la nature qui se met en sommeil puis revit. Pour toute lecture "les Georgiques" de Virgile et pour toute musique, un disque de Haydn. La radio des maçons lui donne quelques nouvelles de l'extérieur.


J'ai lu ce livre d'une traite, complètement immergée dans cette solitude au milieu des pins, avec quelqu'un à la redécouverte de la vie. L'humour n'est pas absent de ce récit, au contraire avec les descriptions des deux maçons énigmatiques, de l'agent immobilier insaisissable, de l'architecte pressé et des voisins qui lui donnent des conseils pour son "airial" (clairière enserrée dans une vaste pinède). Dix-huit ans après, il peut enfin revenir sur sa captivité mais sans insister, en choisissant de ne conserver que l'amour de la vie qu'il a retrouvé sans doute un peu grâce à cette maison.

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Je viens de fermer le livre de Kauffman, il n'y a personne près de moi pour partager ce moment de lecture alors c'est vers Babelio que je me tourne.
Après sa captivité de 3 ans au Liban, l'auteur achète une maison dans les Landes. La restauration de la maison et de "l'airial" iront de pair avec le retour du propriétaire au monde du vivant.
le livre est bien écrit, rythmé par le bruissement de la nature environnante. Ces re naissances parrallèles s'emmèlent dans des odeurs de poussière et de plâtre, de grands crus bordelais et de cigares bagués.
Cette lecture bouscule ma vision un peu convenue (plat pays monotone) sur la région des Landes.
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Voilà bientôt vingt ans que Jean-paul Kauffmann a été libéré après trois longues années de détention au Liban.

Le personnage principal de ce livre est une maison, chère à l'auteur, puisqu'elle lui a permis de reprendre goût à la vie, après le traumatisme de sa détention. Cette maison, il l'avait rêvée et désespérait de la trouver. Mais un jour, se produit le coup de foudre : "Devant moi la maison dont je rêve : une vaste retraite campagnarde, des arbres, beaucoup d'arbres, dont deux immenses platanes qui déploient leur ligne brisée autour de la façade. Et la forêt de pins qui entoure sans étouffer".

Il s'y installe avec pour prétexte de suivre le chantier et fait corps immédiatement avec elle, redoutant la fin des travaux. La cohabitation discrète avec les deux ouvriers lui convient, lui permettant de ne pas être totalement seul, mais un peu tout de même.

Une fois les travaux finis, il prend le temps de s'approprier la maison, sans brusquer les choses, puis s'attaque à l'extérieur. Il vit au rythme des saisons et prend le temps d'apprécier des choses toutes simples, mais extraordinaires pour quelqu'un qui a été privé de liberté. Il vit une relation fusionnelle avec "les tilleuls" et cette douce dépendance l'aide à reprendre goût à la vie.

De temps à autre il évoque son passé, mais seulement par petites touches, avec beaucoup de pudeur. Il nous confie entre autres que la détention a altéré sa passion de la lecture. Cela m'a attristée. "Le lien qui m'attachait aux livres est bien rompu. Je tiens cette cassure pour une véritable infirmité. C'est aux tilleuls plus qu'ailleurs que j'ai prix conscience de cette malédiction. Je suis entouré de livres et je n'ai pas faim. Je picore, j'avale, je ne finis pas"

J'ai passé un très agréable moment de lecture. Jean-Paul Kaufmann a une très belle plume et un amour de la vie communicatif. Il a vécu un traumatisme qui laissera à jamais des traces dans sa vie, mais on ne peut qu'admirer sa capacité à aller de l'avant.

Un très bel hommage à une maison, quelque part dans les Landes...

Lien : http://sylire.over-blog.com/..
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Je n'ai pas été détenu plusieurs années quelque part et ne peux donc préjuger de ce que je ferais.
Pour autant, ce retour aux sources de l'auteur après ses années de détention, même si je le comprends, je ne peux pas le partager. Ces centres d'intérêt ne sont pas les miens. du moins, je ne les vis pas du tout par la même approche. Cette description des choses, de la vie que l'auteur redécouvre m'a prodigieusement agacé. de plus, j'y vois, mais je peux me tromper, un matérialisme très bourgeois auquel je n'adhère pas. Mais alors pas du tout. Son rapport à la nature me semble emprunt d'un idéal de possession bourgeois. Il ne voit pas la nature et les choses comme elles sont mais comme un acquis. Une maison, pour moi, ne représente absolument rien. Je m'en fous complètement. Ma quête est à l'opposé de la sienne. Un passage de ce livre m'est resté : Lorsqu'il découvre avec tristesse que sa collection de livres précieux est subitement détruite par une inondation. C'est alors qu'il se dit que ça devait se passer ainsi et qu'il n'a d'autre moyen que de l'accepter. Bel exemple d'impermanence. Oui, tout finit par s'écrouler un jour.
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Jules Supervielle, poète attentif et fabuleux, est mis en exergue du récit de Jean-Paul Kauffmann, « La maison du retour » et telle une ancienne clé soulevant un loquet longtemps bloqué, la citation ouvre sur une réincarnation pimentée de mélancolie : « C'était le temps inoubliable où nous étions sur la Terre ». Dès lors, la fragrance est tenace et persiste à mesure que Jean-Paul Kauffmann se démène pour trouver une maison dans les Landes au tout début des années quatre-vingt-dix. La limpidité de l'histoire et la fluidité de l'écriture (précise, légère, presque pétillante) coulent sur un lit de ténèbres. Sous le propos badin et le ton ironique couvent des souvenirs douloureux évoqués avec pudeur : « …j'avais connu l'âge de fer : trois années fantômes. J'aspirais à la paix, à la substance et à la fluidité des choses ». La maison rêvée va s'imposer, sertie dans la démesure des pinèdes sans limite. C'est presque par effraction que l'auteur s'immisce tout au début dans l'intimité de la maison longuement délaissée. Il surprend : « l'âme secrète d'une maison qui essaie de ne pas sombrer. J'imagine l'effort que représente ce refus de disparaître. Il y a de l'indécence à observer une telle obstination ». L'auteur campe au premier étage alors que les deux maçons rénovent le rez-de-chaussée. Soucieux d'assister, par sa présence « augurale », à la résurrection de la vieille demeure, Jean-Paul Kauffmann sent, par osmose, les choses se mettre en place. L'airial, cette clairière gazonnée entourant la maison landaise, non clôturée et plantée de grands arbres est perçu de façon subtile, notamment à travers l'odorat. La maison et l'homme sont en connivence et en convalescence. Ils reviennent lentement à la vie. Jean-Paul Kauffmann connaît le dénuement et la précarité de la vie. L'instant présent est savamment distillé et savouré : « Je sens une pression qui monte lentement de la terre pour atteindre l'être profond, lui donner de la saveur puis disparaître. » L'homme passe du dedans, en chantier, au dehors, en friche. L'arbre supplante le livre : « …je préférais finalement les arbres aux livres… J'aimais évidemment les lire. Je les aimais d'une effusion tendre et raffinée, un amour courtois, platonique. Pour tout dire inattentif. » Bien qu'il ait perdu son « savoir-lire », il lit toujours avec ferveur de la poésie. Son livre autobiographique est moelleux. Ses mots sont emplis de pulpe. L'écriture est chargée de sens mais délestée de toute emphase et de tout pathos. Certaines phrases pourraient paraître sentencieuses au premier abord alors qu'elles expriment de manière ramassée une pensée claire et complexe. La thématique de la solitude et de l'enfermement est omniprésente dans ses livres (L'arche des Kerguelen, La chambre noire de Longwood). Il est difficile de ne pas être touché en profondeur par un livre de Jean-Paul Kauffmann.
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