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EAN : 9782841113088
306 pages
Editions Nil (15/01/2007)
3.92/5   223 notes
Résumé :
"Les Landes, la campagne normande ou les îles Fortunées : il fallait bien se poser quelque part. Je n'ai pas choisi la maison dans la forêt. Elle s'est proposée à moi, par défaut, à une époque confuse de mon existence. Choix hâtif auquel je suis lié à jamais."

Détenu au Liban pendant trois ans, le narrateur choisit après sa libération de s'installer au cœur de la forêt landaise. Deux maçons taciturnes restaurent la maison. Il campe au milieu du chanti... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (47) Voir plus Ajouter une critique
3,92

sur 223 notes
A son retour de captivité, Jean Paul Kauffmann s'est mis en quête d'un lieu.
Pendant trois années, il avait été détenu, enchaîné, plongé dans l'obscurité et confronté à la «stupidité» de ses geôliers. En recouvrant la liberté, l'aveuglante lumière de la liberté, il savait que plus jamais il ne pourrait reprendre le cours normal de sa vie d'avant, ni son métier de journaliste, ni ses virées en Sologne. Il lui fallait renaître autrement et ailleurs.

"Les Landes, la campagne normande ou les îles Fortunées: il fallait bien se poser quelque part. Je n'ai pas choisi la maison dans la forêt. Elle s'est proposée à moi par défaut, à une époque confuse de mon existence. Choix hâtif auquel je suis lié à jamais."

Après avoir sillonné le Bordelais, l'amateur de grands vins a jeté son dévolu sur les Tilleuls, une bâtisse abandonnée au coeur de la forêt des Landes, dont il a appris qu'elle avait été, pendant l'Occupation, un bordel pour SS.
Avec, pour complices diurnes, Castor et Pollux, deux ouvriers chargés de restaurer ce qui manquait de s'écrouler et, le soir venu, pour unique lecture, « les Géorgiques », de Virgile, Jean-Paul Kauffmann va réapprendre. le métier de vivre...

C'est un livre magnifique, où l'on ne perçoit jamais l'once d'un auto-apitoiement. Il parle de la nature environnante, de la rénovation d'une bâtisse abandonnée en parallèle à sa propre renaissance, de ce que les livres lui ont apporté en captivité et, comme tout humain qui a été longuement privé de tout, il redécouvre l'émerveillement devant un arbre, la pluie, etc.

J'ai choisi deux extraits, assez longs, mais j'aime ce livre!

"L'airial a belle allure, mais à quel prix? La terre des Landes me désespère. Ce matin, j'ai arrosé, constatant comme à chaque fois que le sable mat laissait passer l'eau sans la fixer. le lessivage creuse un peu plus la surface, formant de petites vallées bien nettoyées aux échancrures blanchies par le rinçage. La terre des Tilleuls est ingrate. On a beau y déverser de l'humus, de la tourbe, du fumier, le sable finit toujours par réapparaître . a tout ce qu'il touche, il transmet sa nature pulvérulente
Ce sable qui resurgit, je le compare volontiers à ma condition, à ce passé qui ne cesse de remonter à la surface. Il métamorphose tout sur son passage, exerçant sur moi un pouvoir absolu. de ce passé qui a pu me montrer ma vulnérabilité, je me suis servi comme d'un tremplin. L'histoire des deux souris qui tombent dans une jatte de lait m'enchante. La première crie " Au secours" et se noie. La deuxième bat tellement des pattes qu'elle se retrouve sur une motte de beurre.
Reprendre une vie normale, il n'en était pas question. Dès mon retour, je me suis empressé d'adopter aux Tilleuls une existence résolument anormale. C'est probablement ce qui m'a sauvé. Une fois libéré, j'ai vite compris qu'il me serait impossible de renouer avec la vie d'antan.
Pour l'occasion, j'avais inventé le syndrome de Luis de Leon, du nom de ce théologien fameux de Salamanque qui fut arrêté au beau milieu de son cours par le tribunal de l'Inquisition . Torturé puis condamné, Leon passa une dizaine d'années en prison. Libéré, il reprit son enseignement à l'université, à l'endroit même où il l'avait abandonné en disant :" Comme je vous le disais hier", voulant signifier par là qu'il évacuait ces années terribles.

Tout invite l'ancien reclus et ses proches à se reporter à la période d'avant, à recommencer comme si de rien n'était. Je répugne à ma prévaloir de mon malheur passé. Je ne l'oublie pas pour autant. Je lui suis absolument fidèle: " Je ne veux pas qu'on m'intègre". Cette phrase d'un héros de Sartre est la mienne. Dans quel monde suis-je? J'ai pu m'échapper de l'autre rive, mais une chose est sûre: je ne serai jamais d'ici. ....
.... Réussir son retour est pour le rescapé presque aussi difficile que de tenir pendant l'épreuve. Dans le trou,il résiste. Il n'a pas le choix. Hors du trou, il a le choix, tous les choix. Il est maître du jeu. Problème de taille: le jeu est trop ouvert, béant pour celui qui vient de s'extraire d'une existence réduite à sa plus simple expression. par où commencer? C'est là que les ennuis commencent. Mais ce ne sont que des ennuis, pas des tragédies."




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Voilà un auteur que j'ai lu à cause d'un article concernant son périple au long de la Marne, donc un autre de ses livres, en fait. Je connaissais l'homme me rappelant le compte des jours de détention, quotidiennement, quand j'étais plus jeune mais l'écrivain, j'étais passée sans le voir.
J'ai emprunté le titre disponible à la bibliothèque et c'était celui-ci.


Après son retour du Liban, plus rien des sa vie ne peut ou ne doit reprendre le cours à l'identique de "l'avant". Il décide d'acheter une maison, dans une "nouvelle" région et c'est, en fait , une rencontre qu'il va faire. Lui, l'homme au passé "abimé" va tomber sous le charme d'une maison au passé "trouble" que personne ne voulait habiter et qui l'attendait, on pourrait presque le penser.

Et c'est le partage d'un retour à la vie, celui d'une maison maudite et celui de cet homme qui décide de camper au milieu des travaux et qui restaure son âme au rythme de la restauration des murs de la bâtisse. La maison et les jardins lui permettent de se réadapter au quotidien, tout comme un livre classique, trouvé, abandonné là, qui le fait s'interroger sur la force de la lecture dans une vie.

Les pages sur la nature sont très belles, très "observatrices", il parle très bien des arbres et des animaux, et eux, à leur façon, vont lui faire reprendre la cadence des saisons.



J'ai vraiment beaucoup aimé, c'est plein d'érudition qu'il partage simplement, et on ne peut être qu'admiratif devant la force de caractère qui l'habite.
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Je fais partie de la génération qui a vu pendant trois longues années l'annonce à la TV du nombre de jours de détention de ceux qu'on appelait "les otages du Liban". Et c'est toujours avec beaucoup d'émotion que je revois l'image de leur arrivée à Paris le 5 mai 1988. Jean-Paul Kauffmann est hagard, amaigri, sans ses lunettes, et surtout sans Michel Seurat mort en captivité. Vous me direz qu'être otage ne fait pas forcément de vous un bon écrivain, mais Kauffmann est quelqu'un qui a un vrai style. On l'a vu dans les très beaux "La chambre noire de Longwood" (le récit de la captivité de Napoléon à Sainte-Hélène) et "L'Arche des Kerguelen". Dans "La maison du retour" il raconte l'origine de cette vocation d'écrivain (au départ il était journaliste).


Au retour de sa captivité, il ne se sent pas capable de reprendre le cours normal de sa vie à Paris, il a besoin d'une sorte de sas pour réapprendre à vivre. Il décide d'acheter une maison, plutôt dans la région de Bordeaux en bon amateur de vin qu'il est. Mais c'est pour une maison perdue dans les Landes qu'il aura le coup de foudre. Et là, pendant de longs mois il va cohabiter avec les deux ouvriers qui restaurent la batisse, découvrant cette nature landaise un peu sauvage, comme lui. Cette parenthèse lui sera nécessaire pour retrouver la notion de temps, les saisons, la nature qui se met en sommeil puis revit. Pour toute lecture "les Georgiques" de Virgile et pour toute musique, un disque de Haydn. La radio des maçons lui donne quelques nouvelles de l'extérieur.


J'ai lu ce livre d'une traite, complètement immergée dans cette solitude au milieu des pins, avec quelqu'un à la redécouverte de la vie. L'humour n'est pas absent de ce récit, au contraire avec les descriptions des deux maçons énigmatiques, de l'agent immobilier insaisissable, de l'architecte pressé et des voisins qui lui donnent des conseils pour son "airial" (clairière enserrée dans une vaste pinède). Dix-huit ans après, il peut enfin revenir sur sa captivité mais sans insister, en choisissant de ne conserver que l'amour de la vie qu'il a retrouvé sans doute un peu grâce à cette maison.

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Après son retour du Liban où il a été retenu comme otage pendant 3 ans, Jean-Paul Kaufmann cherche un endroit "à lui" et jette son dévolu sur une vieille maison dans les Landes qu'il fait retaper. Pendant toute la durée des travaux, il campe dans cette maison et s'approprie les lieux...

Je suis tombée par hasard sur ce livre que j'ai subtilisé dans la bibliothèque d'une amie et dont je ne me souvenais plus que je l'avais. J'ai failli lui rendre sa liberté mais le résumé de la 4e de couverture m'a donné envie d'en savoir un peu plus et grand bien m'en a pris. J'ai traversé ce roman dans un état d'émerveillement permanent, bercée par les phrases limpides de cet homme qui ré-apprend la liberté et qui adopte un nouveau nid, pourtant pas facile au milieu d'une jungle d'arbres qui l'isolent encore plus du monde extérieur. Les liens que tisse l'auteur avec cette maison et la nature qui l'environne sont très touchants, toujours pleins de sensibilité et merveilleusement desservis par une langue magnifique, une richesse de vocabulaire qu'on ne rencontre hélas plus si souvent dans la littérature contemporaine (et sans que jamais, ça ne produise un effet ennuyeux ou pompeux). Je voyais arriver la fin du roman avec détresse, je ne voulais pas quitter cet univers et ces réflexions sur le monde, la nature ou l'humanité. La conclusion est assez longue, ce qui m'a permis une séparation en douceur mais vraiment, quel excellent moment de lecture. Merci M. Kaufmann.
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Jules Supervielle, poète attentif et fabuleux, est mis en exergue du récit de Jean-Paul Kauffmann, « La maison du retour » et telle une ancienne clé soulevant un loquet longtemps bloqué, la citation ouvre sur une réincarnation pimentée de mélancolie : « C'était le temps inoubliable où nous étions sur la Terre ». Dès lors, la fragrance est tenace et persiste à mesure que Jean-Paul Kauffmann se démène pour trouver une maison dans les Landes au tout début des années quatre-vingt-dix. La limpidité de l'histoire et la fluidité de l'écriture (précise, légère, presque pétillante) coulent sur un lit de ténèbres. Sous le propos badin et le ton ironique couvent des souvenirs douloureux évoqués avec pudeur : « …j'avais connu l'âge de fer : trois années fantômes. J'aspirais à la paix, à la substance et à la fluidité des choses ». La maison rêvée va s'imposer, sertie dans la démesure des pinèdes sans limite. C'est presque par effraction que l'auteur s'immisce tout au début dans l'intimité de la maison longuement délaissée. Il surprend : « l'âme secrète d'une maison qui essaie de ne pas sombrer. J'imagine l'effort que représente ce refus de disparaître. Il y a de l'indécence à observer une telle obstination ». L'auteur campe au premier étage alors que les deux maçons rénovent le rez-de-chaussée. Soucieux d'assister, par sa présence « augurale », à la résurrection de la vieille demeure, Jean-Paul Kauffmann sent, par osmose, les choses se mettre en place. L'airial, cette clairière gazonnée entourant la maison landaise, non clôturée et plantée de grands arbres est perçu de façon subtile, notamment à travers l'odorat. La maison et l'homme sont en connivence et en convalescence. Ils reviennent lentement à la vie. Jean-Paul Kauffmann connaît le dénuement et la précarité de la vie. L'instant présent est savamment distillé et savouré : « Je sens une pression qui monte lentement de la terre pour atteindre l'être profond, lui donner de la saveur puis disparaître. » L'homme passe du dedans, en chantier, au dehors, en friche. L'arbre supplante le livre : « …je préférais finalement les arbres aux livres… J'aimais évidemment les lire. Je les aimais d'une effusion tendre et raffinée, un amour courtois, platonique. Pour tout dire inattentif. » Bien qu'il ait perdu son « savoir-lire », il lit toujours avec ferveur de la poésie. Son livre autobiographique est moelleux. Ses mots sont emplis de pulpe. L'écriture est chargée de sens mais délestée de toute emphase et de tout pathos. Certaines phrases pourraient paraître sentencieuses au premier abord alors qu'elles expriment de manière ramassée une pensée claire et complexe. La thématique de la solitude et de l'enfermement est omniprésente dans ses livres (L'arche des Kerguelen, La chambre noire de Longwood). Il est difficile de ne pas être touché en profondeur par un livre de Jean-Paul Kauffmann.
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Citations et extraits (73) Voir plus Ajouter une citation
Quelle est la vocation de la maison dans la clairière ? Trop tard pour se poser la question.Villa, ermitage, chaumière pour deux cœurs. On connaît bien ces demeures où Narcisse contemple devant ses murs, se met en scène obsédé par le reflet qu'il souhaite présenter à l'invité ou au visiteur. Les lampes signées, les meubles à tirage limité obéissent à des pulsions artistiques nées d'images traînant dans les magazines et veulent signifier le personnage qu'on voudrait être.
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Suis-je victime de ce mal-être moderne: la mélancolie de l'accomplissement? Une fois parvenu au but, le sujet se sent morose, désappointé. " Tout ce qui est atteint est détruit ", affirme Montherlant. Ai- je aboli mon rêve en le réalisant ?

( Gallimard, Folio, 2008, p.74)
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Après trois années d'enfermement, j'ai besoin de la démesure de ce paysage, ponctué par des vides au milieu des pinèdes mais jamais borné.Tout est clos en France, le moindre espace est délimité.
Mes compatriotes considèrent que le monde n'est en ordre que s'il est fermé. Pour jouir de sa possession, chaque propriétaire pense d'abord à l'entourer d'un grillage, d'une haie ou d'un mur hérissé de tessons.Chez nous, posséder c'est exclure ou interdire.(...)
Ce qui me plaît dans le Landes, c'est l'absence de clôtures.Voilà la seule forêt ouverte de France, la seule contrée où l'immensité à un sens.


( Folio, 2008, p.24)
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Je fais tout à l'envers.On pend généralement la crémaillère une fois les travaux terminés. La fête improvisée se prolonge jusqu'en fin d'après-midi. Les maisons vides ont la particularité de susciter un goût de la découverte qui remonte sans doute à l'enfance.
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" Vous n'êtes pas un peu seul, non ?" dit- il avec prévenance.Je lui réponds que j'apprécie la solitude mais pas l'isolement. " J'aime faire retraite parce que je sais qu'au bout il y a la compagnie et le partage.
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Videos de Jean-Paul Kauffmann (57) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Paul Kauffmann
Jean-Paul Kauffmann vous présente son ouvrage "Zones limites" aux éditions Bouquins.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2678916/jean-paul-kauffmann-zones-limites
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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