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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Il y a des thèmes sur lesquels on pourrait croire avoir tout vu, ou plutôt, tout lu. La ségrégation aux États-Unis en est un, à en juger par les oeuvres de (liste non exhaustive…) William Faulkner, Harper Lee, Paul Beatty, Carson McCullers, Toni Morrison, Joël Norst, Richard Powers ou encore Greg Iles.

Paru en 1962 aux États-Unis, mais aujourd'hui seulement en version française, Un autre tambour de William Melvin Kelley -traduit par Lisa Rosenbaum- trouve cependant toute sa place dans cette histoire (toujours en cours…) de la lutte pour l'égalité raciale en Amérique. L'originalité du récit, l'angle choisi pour le relater mais aussi la force de l'écriture de Kelley en font un grand livre, étonnamment mâture pour un jeune auteur de 24 ans.

Un autre tambour est une fable ou un conte, qui voit l'ensemble de la population noire de Sutton, une petite ville imaginaire du « deep south » des États-Unis, quitter en masse la ville ; du jour au lendemain ; dans un même et incompréhensible élan ; sous les yeux médusés et incrédules des spectateurs blancs. « Get up, stand up… » aurait dit Bob, mais à Sutton, celui qui s'est levé, c'est Tucker Caliban, probablement et paradoxalement le noir qui semblait le plus « intégré » à la population blanche de Sutton.

Cette fable, Kelley prend le parti de nous la raconter via le prisme de cette population blanche, d'abord comme au spectacle, puis frappée d'incompréhension pour un phénomène qui la dépasse. À cette incompréhension, il oppose la longue maturation de cette volonté de libération de la population noire. À travers le récit de la vie locale sur trois générations et les témoignages de ses habitants, cette maturation prend sens pour le lecteur qui en saisit peu à peu les origines et la cohérence.

Un autre tambour, c'est aussi un roman engagé, comparant la destinée de David Willson, qui aurait pu changer les choses et le cours de sa vie par la même occasion, à celle de Tucker Caliban, qui a mis en oeuvre les conditions du changement. L'histoire du résigné et de ses regrets, face à celui qui ose suivre la petite musique que lui seul entend, porteuse d'espoirs et de fierté. Ensemble, tout aurait pourtant été plus simple, plus rapide, plus prometteur…

« Quand un homme ne marche pas du même pas que ses compagnons, c'est peut-être parce qu'il entend battre un autre tambour. » À l'invitation de Thoreau, William Melvin Kelley nous appelle avec force à suivre la petite musique différente des autres tambours. Un livre marquant et bigrement réussi !
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Quelle finesse d'analyse, quel style maitrisé, quelle acuité, quel talent Monsieur William Melvin Kelley !

Un autre tambour est son premier livre, écrit à seulement 24 ans, et il y a de quoi rester béat d'admiration devant tant de maturité sur la compréhension de la nature humaine. Sans manichéisme et tout en subtilité il nous fait voir au travers du regard de ses personnages - des Blancs - pourquoi Tucker, un jeune fermier noir, anéantit tout : ses bêtes, ses champs et sa maison pour quitter Sutton, petite ville du Sud profond où sévit toujours en 1957 une ségrégation raciale nauséabonde et ancrée comme étant dans l'ordre des choses. Tucker bouleversera cet "ordre" et sèmera avec lui le départ de tous les Noirs et les questions de tous les Blancs qui pensent pouvoir très bien se passer d'eux...

J'ai pris énormément de plaisir à lire Un autre tambour qui est un kaléidoscope d'une histoire polyphonique.
Une histoire qui est aussi l'Histoire de la question raciale des Etats-Unis où liberté et dignité n'étaient pas accordées à ceux qui pourtant ont érigé ce pays. Un pays qui n'a jamais accordé de place à ses propres citoyens noirs, considérés non comme des étrangers, mais pis, déconsidérés jusqu'à n'être que des Nègres. Et comme le disait James Baldwin "Si je ne suis pas un nègre, ici, et que vous l'avez inventé, alors vous devez trouver pourquoi. Et l'avenir du pays dépend de cela, de si oui ou non le pays est capable de se poser cette question."
Et ce livre fait précisément écho à cette question.
Question tristement actuelle. Encore.

"Le géant oublié de la littérature américaine" peut-on lire sur la couverture. Et pour une fois il ne s'agit pas d'un vain effet d'annonce.
William Melvin Kelley est un grand écrivain à découvrir, assurément.
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UN AUTRE TAMBOUR de William Melvin Kelley
Traduit par Lisa Rosenbaum

Éditions Delcourt

UN AUTRE TAMBOUR a été publié pour la première fois en 1962 aux USA puis, après avoir fait scandale, il est tombé aux oubliettes... Mais tel le phénix qui resurgit de ses cendres, il a été réédité en 2019 par les génialissimes éditions Delcourt.

L'histoire se déroule en 1957 dans un état fictif du sud des états-unis. Tucker Caliban, descendant d'un esclave rebelle, quitte la ville après avoir volontairement détruit la totalité de ses biens. Ce départ sert d'exemple à toute la population noire qui partira à son tour en laissant les blancs s'interroger sur l'énigme de cet exode massif.

L'originalité de ce livre est d'être raconté uniquement par les personnages blancs qui assistent à cette "migration". Des blancs bien incapables de comprendre ce soudain refus des afro-américains de continuer à vivre dans des conditions de subordination.
Voilà donc ce qui choqua tant le lecteur blanc et "bien pensant" américain lors de la parution initiale de ce roman : comment un auteur d'origine africaine osait-il penser à la place des blancs ? Car c'est bien connu, ce qui est permis aux blancs est interdit aux auteurs dont la peau est plus foncée... intolérance quand tu nous tient !

Pour en revenir au phénix, un de ses pouvoirs est de lire dans le coeur des hommes et de débusquer ceux dont les intentions sont impures... Et c'est bien ce que fait William Melvin Kelley en décrivant une Amérique blanche qui tient fermement à sa (soi-disant) supériorité morale blanche et sur ce qui en découle : l'hostilité raciale ! Mais il attire également notre attention sur le lien entre l'oppression et la bigoterie.

Ce livre nous propose une étude sans faille de la psyché sud-américaine blanche à l'aube du mouvement des droits civiques et il délivre un message très négatif sur l'évolution des mentalités. 60 ans plus tard, il est toujours d'actualité et, comme c'est un grand livre intemporel, on peut parfaitement le transposer à d'autres crises bien réelles d'aujourd'hui.

Pour en finir avec le phénix, son origine remonterait à l'Egypte antique et serait liée au dieu solaire Râ... Râ étant représenté par un faucon surmonté d'un disque solaire. Et si ce n'est pas un soleil couchant que l'on retrouve sur la couverture, qu'est-ce que c'est ?

UN AUTRE TAMBOUR de William Melvin kelley est un livre essentiel qu'il faut absolument avoir lu au moins une fois dans sa vie.

Je remercie les éditions Delcourt ainsi que le Picabo River Book Club pour cette lecture.
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"Roman novateur pour l'époque, autant par sa forme, dépassant les limites d'un récit réaliste, que par son fond, retracer l'histoire d'une communauté opprimée, en creux, à travers les voix des oppresseurs, il avait été encensé à sa sortie aux États-Unis avant de sombrer dans l'oubli. Si dans l'introduction à la réédition anglaise, on peut lire que «beaucoup de lecteurs blancs ne voulaient pas d'un écrivain noir qui leur dise ce qu'ils pensaient », il n'en reste pas moins que William Melvin Kelley, acclamé par les militants des droits civiques en 1962, a disparu de lui-même, refusant de vivre dans un pays qui avait assassiné coup sur coup Malcom X, Martin Luther King et John Kennedy. (...) L'auteur n'est plus, donc. Il n'a pas assisté à la réhabilitation de son oeuvre. Reste son roman choral déclinant les teintes de l'oppression, aussi bien sous les formes de la haine, de la cupidité et de la colère que de celles de l'incompréhension, du renoncement, de la mauvaise conscience et du désespoir, qui a suivi l'abolition de l'esclavage. Reste une ode magistrale à la rébellion."
Kits Hilaire (Extrait) in DM
Lien : https://doublemarge.com/un-a..
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Un autre tambour est le premier roman, paru en 1962, d'un jeune auteur noir américain de vingt trois ans redécouvert récemment, et qui paraît cette rentrée en français chez Delcourt Littérature.

L'histoire a pour cadre un état imaginaire du sud des États-Unis, entre Mississippi et Alabama. le jeudi 30 mai 1957 dans l'après-midi, Tucker Caliban, un fermier noir du village de Sutton, sale son champ, met le feu à sa ferme et quitte le village avec sa femme enceinte. Dès le lendemain, tous les noirs de Sutton s'en vont. Tous ceux de New Marsails, la grande ville, tous ceux de l'État, tous disparaissent, du plus vieux au plus jeune ; sans une explication. Pour les blancs, c'est la stupéfaction. « Aucun d'eux n'avait le moindre repère auquel il aurait pu rattacher la notion d'un monde dépourvu de noirs ».

Ce qui fait toute la puissance de ce roman choral, c'est que l'auteur n'explique rien, ni à aucun moment n'émet un jugement. Les témoignages des blancs s'enchainent, charge au lecteur de comprendre, déduire et deviner. Et c'est édifiant. Les quidams qui trainent toute la journée à ne rien faire sous la véranda de l'épicerie. Les membres de la famille à qui appartenaient les ascendants de Tucker. Des libéraux. Des conservateurs. Pendant que tous sont là à questionner leur version des faits et le passé, tentant de comprendre les raisons de cet exode, son sens et les conséquences pour la ville et l'avenir, se dessine la réalité de cette société raciste et ségrégationniste, dont l'injustice et l'extrême violence se conjuguent dans tous les aspects, même les plus infimes, du quotidien.

« Je prends conscience que ces choses-là sont sinon normales, du moins attendues dans la vie d'un noir, ils sont conditionnés, presque résignés à devoir renoncer à leurs rêves, ou du moins à les remettre à plus tard. »

Ce livre a une vraie musique intérieure, tissée dans les silences et les non-dits. William Melvin Kelley fait preuve d'un immense talent, tant dans sa maitrise de la trame narrative que pour incarner chaque personnage. Sous ses allures de conte, c'est un véritable appel à la rébellion. « [Ils] se lèveront et diront : « je peux faire ce que je veux, sans attendre que quelqu'un vienne me donner la liberté, il suffit que je la prenne. Je n'ai pas besoin de Monsieur le chef, de Monsieur le patron, de Monsieur le président, de Monsieur le curé ou de Monsieur le pasteur, ou du révérend Bradshaw. Je n'ai besoin de personne, je peux faire ce qui me plait pour moi-même et par moi-même. » »

Un autre tambour est un roman puissant, audacieux et féroce, d'une rare intelligence. Quelle claque, mes amis, quelle claque ! Similaire à celle que j'ai ressentie en lisant Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, d'Harper Lee...

Merci infiniment au Picabo River Book Club et aux éditions Delcourt pour cette découverte marquante.

« Quand un homme ne marche pas du même pas que ses compagnons,
C'est peut-être parce qu'il entend battre un autre tambour.
Qu'il accorde donc ses pas à la musique qu'il entend,
Quelle qu'en soit la mesure ou l'éloignement. » (extrait de Walden, d'H. D. Thoreau)
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
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Ce roman écrit par un jeune auteur de vingt-trois ans, et publié une première fois en 1962, était plus ou moins tombé dans l'oubli, jusqu'à sa réédition l'année dernière, suivie de cette parution française. Ce roman au ton singulier est situé dans un état imaginaire du sud des États-Unis, entre le Mississippi et l'Alabama, en 1957. Un jour, un groupe d'hommes blancs oisifs observe un camion qui va livrer du sel en grande quantité à Tucker Caliban. C'est un fermier noir, descendant du mythique Africain, esclave de Dewitt Willsson, le général sudiste emblématique de ce état. Ce qu'observent ces hommes, et un jeune garçon surnommé « Monsieur Leland », est particulièrement étrange. Tucker Caliban, laissant derrière lui les ruines fumantes de sa ferme, quitte l'état. D'autres noirs, puis tous les habitants de Sutton prennent leur valise, montent qui à bord de l'autobus, qui dans une voiture, et partent pour une destination inconnue.

Plusieurs points de vue se succèdent au fil du roman, qui, s'il n'est pas très long, n'en est pas moins dense, avec ses voix multiples. Ce sont les blancs qui commentent ce départ, la famille Willson en particulier, qui a toujours entretenu des relations embarrassées avec ses domestiques, relations qu'il est passionnant de voir développées, sans explication psychologique, simplement des faits qui parlent d'eux-mêmes.
C'est un enchantement de lire entre les lignes, de relier les personnages, de comprendre leurs motivations, leurs limites et leurs renoncements. Il y a beaucoup à deviner, à déduire, de phrases ou de paragraphes parfois sibyllins, et la lecture n'en est que plus réjouissante.
J'ai eu du mal à croire à l'âge de l'auteur, tant la construction est maîtrisée et les personnages incarnés, vivants, complexes. J'attendrai avec intérêt un autre de ses romans (il n'en a écrit que quatre) que Delcourt publiera en 2020. Celui-ci m'a rappelé le roman beaucoup plus récent La route de nuit de Laird Hunt, l'un comme l'autre continuent leur chemin après lecture, au lieu de s'évaporer comme bien d'autres. Un achat de rentrée qui correspond parfaitement à mes attentes !
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RESUME: "Juin 1957. Un après-midi dans une petite ville du Sud profond des États-Unis , Tucker Caliban, un jeune fermier noir, recouvre de sel son champ, abat sa vache et son cheval, met le feu à sa maison, puis quitte la ville. le jour suivant, toute la population noire déserte la ville à son tour.
Quel sens donner à cet exode spontané ? Quelles conséquences pour la ville soudain vidée d'un tiers de ses habitants ? L'histoire est racontée par ceux qui restent : les Blancs. Des enfants, hommes et femmes libéraux ou conservateurs. "

MON AVIS: L'auteur a écrit ce livre à la même époque où il situe son histoire. Un état imaginaire où les habitants vivent une situation inédite. Tous les noirs partent. Ne reste que les blancs.
William Melvin Kelley est noir, et il se met à la place des blancs pour commenter ce départ incroyable . C'est audacieux mais certainement très réaliste. Il est bien placé pour décrire ce besoin de tout laisser derrière soi, ne plus travailler pour les blancs qui les jugent encore et toujours inférieurs. Ce que ressentent les blancs face à ce qu'ils considèrent comme un abandon est d'ailleurs très parlant. Comment? ils osent nous laisser? Dans cette petite ville de Sutton les bas instincts ressortent et l'incompréhension mène à la violence, aveugle, bête.
Parallèlement il y a l'histoire de la famille Willson qui ont toujours eu des noirs à leur service et dont un des hommes, David aurait pu, peut-être, contribuer à changer les mentalités. Cela n'a pas été le cas et les remords et les regrets l'ont hanté toute sa vie et ont eu des répercutions sur sa vie de famille.

C'est un bon roman qui parle de choix, de convictions et de ce racisme profondément ancré chez les américains aux ancêtres, pour certains peu glorieux.

Lu pour le livre du mois du Picabo River Book Club
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Aucun d'eux n'avait le moindre repère auquel il aurait pu rattacher la notion d'un monde dépourvu de Noirs".

Nous sommes plongés à la fin des années 50 dans un état imaginaire du sud des Etats Unis où les blancs et les noirs cohabitent dans un climat de ségrégation raciale. Dans la ville Sutton, un événement inimaginable survient : la population noire quitte la ville en masse, sans la moindre explication. le premier à quitter les lieux s'appelle Tucker Caliban. Il n'est pas n'importe qui, comme nous le découvrirons plus tard. Il descend en effet de la première lignée d'esclaves à avoir mis les pieds dans la ville. Turcker quitte sa ferme de façon subite et spectaculaire. Il brûle sa maison, abat sa vache et son cheval et étend du sel sur ses terres. Les autres noirs, ni une ni deux, font leur valise et abandonnent leur maison sans un mot.



Ce livre, publié en 1962 aux USA, m'a fait immédiatement penser à "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur", bien que les deux histoires soient très différentes. On y trouve le même climat de défiance entre les noirs et les blancs, une ségrégation pas toujours assumée mais bien réelle et parfois terriblement violente. Ce roman comporte une part de surnaturel et se lit comme un conte. Mais il ne faut pas que cet aspect vous effraie si vous n'aimez pas ce genre littéraire. L'histoire est ancrée dans une réalité historique et aborde le thème de la discrimination raciale de façon originale mais réaliste. L'ouvrage peut se lire d'une traite tant nous sommes pris par l'enchaînement des faits et des témoignages. Ce sont les blancs qui relatent les faits, des blancs qui ne s'imaginent pas vivre sans les noirs, tant ils font partie de leur quotidien. Les témoignages se succèdent, nous offrant plusieurs facettes d'une même histoire. La fin peut déconcerter. J'avoue qu'il m'a fallu "rembobiner" l'histoire et relire l'ouvrage en diagonale pour (je l'espère) en saisir toute la portée.

On peut remercier les Editions Delcourt d'avoir publié ce roman en France, plus de 50 ans après sa parution aux Etats Unis. J'ai appris qu'un autre roman de l'auteur serait publié prochainement par la maison d'édition. Espérons qu'il soit du même niveau !

Un premier roman assez époustouflant, surtout quand on sait que son auteur n'avait que 23 ans quand il l'a écrit.
Lien : http://www.sylire.com/2019/0..
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1957, dans une petite ville d'un état imaginaire ségrégationniste du sud des États Unis, les blancs observent l'exode de la population noire qui dans sa totalité déserte subitement les lieux. TUCKER CALIBAN homme discret et intégré issu de plusieurs générations d'esclaves, qui vit depuis toujours chez les Willson, recouvre de sel son champ, abat sa vache et son cheval, et incendie sa maison sous les yeux éberlués des blancs de ce sud profond qui l'observent lui et sa famille quitter la ville, sans comprendre ses actes. Une attitude symbolique et éminemment politique dans l'Amérique raciste des années 60.
Un autre tambour c'est l'histoire de ceux auxquels on a « volé quelque chose mais qui ne s'en étaient jamais aperçus parce qu'il(s) ne savai(en)t même pas qu'il(s)possédai(en)t ce qu'on leur avait dérobé ». Cet exode nous est conté successivement par différents habitants blancs de cette petite ville rurale, spectateurs d'un départ en masse qui les étonnent, offrant au lecteur une perception diverse mais à la fois commune de l'incompréhension d'une part de l'humanité qui quitte les terres de l'esclavage pour le nord leur offrant plus d'espérances.
C'est aussi l'histoire de celui qui réagit pour changer sa condition et de celui qui se contente de la subir sans faire de choix alors « qu'il entend battre un autre tambour ».
Un roman d'une grande richesse, porteur de nombreux messages
d'un écrivain américain
quelque peu oublié ou simplement méconnu et jamais traduit en français, comparé à Faulkner et Baldwin, qui a écrit trois romans et un recueil de nouvelles: un autre tambour est son premier Roman écrit alors que William Melvin Kelley n'est âgé que de 24 ans en 1962.
Kelley lui aussi quitte les Etats-Unis après le procès des assassins de Malcolm X qui ébranle ses derniers espoirs du rêve américain pour Paris puis la Jamaïque avant de rentrer dans son pays pour se consacrer à l'enseignement au Sarah Lawrence Collège de BRONXVILLE (New York), les éditions Delcourt publieront son deuxième roman en 2020 « A drop of patience » que l'on attend avec impatience !
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Tucker Caliban, descendant d'une famille d'esclave restée au service de la famille Willsons, épand du sel dans son champ, abat son cheval et sa vache d'un coup de fusil, détruit à coups de hache l'horloge du Général dont il avait hérité, brûle sa maison, sous le regard sidéré de quelques blancs du coin, puis part avec sa femme enceinte et leur enfant en bas âge sans se retourner. Quelques heures plus tard, tous les noirs de l'Etat plient bagage et partent vers le Nord, en bus, en voiture ou en carriole. Quelle est la cause de cet acte de folie ? Les réponses sont suggérées plutôt qu'explicitées, et c'est là la force de ce roman où les personnages sont représentatifs des relations entre noirs et blancs dans les états du sud et illustrent les conséquences dévastatrices de l'esclavage sur les individus. Trois groupes se côtoient : Les Willsons, anciens esclavagistes, qui représentent la classe des riches propriétaires terriens. Ils louent leurs terres et collectent les loyers. Ils sont plutôt progressistes. La classe des petits blancs est constituée principalement de métayers. Pauvres, ils reportent leurs frustrations sur les Noirs qu'ils méprisent. La population noire est représentée par Tucker Caliban, descendant d'esclaves, et Bennett Bradshaw, pasteur de New-York qui ne croit plus aux solutions politiques pour obtenir l'égalité des droits. Les relations entre noirs et blancs, perverties par l'esclavage et ses conséquences, sont basées sur le mépris ou la méfiance. Même les blancs les plus progressistes sont atteints dans leur humanité. Il faudra le courage d'un homme pour briser le cercle vicieux de la soumission et sauver ceux qui peuvent l'être. Un roman percutant, écrit en 1959, au moment du mouvement des droits civiques.
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