La lecture de "Holocaustes" par
Gilles Kepel offre une plongée dans les événements récents qui ont secoué le Moyen-Orient, mais elle laisse également une impression mitigée quant à l'approche de l'auteur concernant des sujets aussi sensibles et complexes. Kepel, reconnu pour son expertise sur l'islam et le monde arabe, s'aventure ici sur un terrain où chaque mot porte un poids considérable, et certains de ses choix peuvent prêter à controverse.D'emblée, la manière dont l'auteur aborde l'accusation de génocide portée par l'Afrique du Sud contre Israël soulève des questions. Cette accusation est traitée avec une certaine légèreté, presque comme si elle était une simple manoeuvre politique plutôt que le reflet d'une réalité tragique à Gaza. Cette approche risque de minimiser les souffrances des Palestiniens et de négliger la gravité des actions menées dans le cadre du conflit.En outre, l'absence d'une contextualisation suffisante des événements du 7 octobre est flagrante. L'ouvrage semble par moments sous-entendre que le conflit a débuté à cette date, sans offrir une perspective historique adéquate sur les années de blocus de Gaza, les ambitions de colonisation en Cisjordanie en violation du droit international, ou l'étouffement et le manque de perspectives d'avenir pour les jeunes Palestiniens. Cette omission contribue à une compréhension fragmentée du conflit, qui ne rend pas pleinement compte des tensions et des désespoirs accumulés qui ont mené à l'escalade.De même, l'influence des chrétiens sionistes aux États-Unis, qui constitue un aspect important de la dynamique géopolitique entourant Israël et la Palestine, est peu explorée. Cette lacune laisse de côté une composante essentielle du soutien dont bénéficie Israël, en particulier en ce qui concerne sa politique de colonisation et sa posture militaire dans la région.En somme, "Holocaustes" parvient à mettre en lumière certains aspects du conflit israélo-palestinien et du contexte géopolitique plus large, mais il peine à offrir l'analyse approfondie et nuancée que la complexité de la situation exige. Les choix sémantiques et les manquements en termes de contextualisation et de perspective historique peuvent laisser le lecteur en quête d'une compréhension plus complète et équilibrée des enjeux à l'oeuvre.