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EAN : 9782355220265
316 pages
Zones (22/04/2010)
4.21/5   12 notes
Résumé :

Ou Axel Honneth, la pensée radicale est de retour. Quelles sont ces théories qui accompagnent l'émergence des nouvelles luttes sociales? En quoi se distinguent-elles de celles qui caractérisaient le mouvement ouvrier dans ses formes traditionnelles? Ce livre rend compte de la diversité de ces nouvelles pensées : théorie queer, marxisme et postmarxisme, théorie post-coloniale, théorie de la reconnaissance, posts... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« La conjoncture historique dans laquelle se forment des théories leur imprime leurs principales caractéristiques » Certes, mais ce qui est vrai pour les ”théoriciens” l'est tout aussi pour ceux et celles qui les interrogent. Il faudrait pour les un-e-s et les autres, ne jamais oublier de préciser leur insertion dans le champ social et politique. Ceci n'est pas une mauvaise querelle, mais il me semble qu'il convient toujours de se situer lorsque l'on travaille sur ces sujets, ou comme le disait Léo Thiers-Vidal « je ne peux nier ma position sociale et sa détermination sur mon rapport au monde et aux autres »

Razmig Keucheyan situe les nouvelles théories « nouvelles en ceci qu'elles sont apparues après la chute du mur de Berlin ». L'auteur pose, à très juste titre « Tout commence par une défaite ». le livre est divisé en trois parties « Contextes », « Système » et « Sujets ».

Sans forcément partager les analyses de l'auteur, je souligne l'intérêt du premier chapitre « La défaite de la pensée critique (1977-1993) », sa périodisation, sa géographie des pensées critiques, son insistance sur les élaborations de nombreux ”marxistes occidentaux” « sans rapports directs avec la stratégie politique », le foisonnement des références.

Puis l'auteur poursuit par une « Brève histoire de la Nouvelle gauche, 1953-1977 » riche de nombreuses références (débats et auteurs), mais sous estimant cependant les lieux de débats non universitaires.

Razmig Keucheyan tente une typologie des intellectuels critiques contemporains : les convertis, les pessimistes, les résistants, les novateurs, les experts, les dirigeants. Ce classement permet de d'aborder des parcours variés, de souligner l'internationalisation des pensées critiques et l'introduction de nouveaux objets d'analyse.

Je ne ferais pas querelle ni des regroupements, ni même de la présence de certains, que je juge un peu incongrue. Il ne suffit pas de « prendre le contre-pied du discours dominant » pour élaborer une pensée critique. Les choix des uns et des autres furent souvent, comme le souligne l'auteur, peu « en prise avec les processus politiques réels », voir en opposition aux mouvements concrets d'émancipation.

A l'inverse, les milieux militants, ”partisans” ou ”associatifs”, oubliés dans cette géographie , furent des lieux de confrontations, d'élaborations, à commencer par celles des « féministes radicales » ou des « féministes luttes de classes », d'une richesse qui vaut bien celle de X ou Y. Je pourrais aussi citer les élaborations, encore que fortes incomplètes, sur l'autogestion ou la démocratie radicale. En prise avec des revendications sociales et politiques, elles furent et restent porteuses d'une subversion potentielle, ce qui n'est pas le cas de toutes les nouvelles pensées critiques.

Quoiqu'il en soit, comme je le souligne en « éditorial » du blog : la pensée émancipatrice fait trop souvent l'impasse sur certains domaines et reste encore souvent plombée par l'économisme. La vulgate marxiste, les réductions sociologiques, les lectures sans sexe/genre, sans classe et sans espérance dominent trop souvent, pour que les lectrices et les lecteurs ne soient pas plus attentives ou soucieuses (graphie volontaire) des recherches iconoclastes, des démarches exploratrices, non abouties ou des interrogations sur les sentiers plus ou moins fréquentés.

Le travail de Razmig Keucheyan correspond à cette aspiration, il est de plus très clair et agréable à lire.

La seconde partie de l'ouvrage est consacrée aux « Théories » et l'auteur souligne que « la diversité des candidats potentiels est à la mesure de la crise du sujet de l'émancipation ». Les thématiques abordées sont successivement : le « Système » dont le renouveau des théories de l'impérialisme, les débats autour de l'État-nation ; les « Sujets » dont les élaborations des « postféministes », alors que, comme je l'ai déjà indiqué les théories féministes sont contournées, les classes sociales et ce qui est souvent négligé « Les identités conflictuelles ».

Je ne peux juger que la présentation des auteur-e-s que je connais. Les présentations de Razmig Keucheyan reflètent bien leurs préoccupations et leurs analyses. Je ne saurais lui reprocher de ne pas faire une critique plus approfondie de certains discours et d'en rester à une incitation à en savoir un peu plus sur ces auteur-e-s.

Reste que sa lecture de ce qui est nommée « tradition marxiste » souffre des réductions opérées par la seconde et la troisième internationale (je ne sais ce qu'est l'économie marxiste, l'économie socialiste en URSS, le modèle marxiste standard, la persistance du nationalisme comme anomalie du point de vue marxiste, les classes en dehors de leurs relations, etc…).

Je pourrais en dire de même à propos du féminisme et la valorisation des critiques actuelles contournant les théories des féministes, se revendiquant en tant que telles.

Quoiqu'il en soit, au de là des agacements, un livre qui donne un éclairage sympathique sur des pensées critiques universitaires actuelles, tout en soulignant leurs impasses sur les questions stratégiques et leurs faibles interactions avec les mouvements politiques et sociaux.

J'aurais aimé que l'auteur approfondisse aussi des possibles différences entre pensées critiques et pensées de l'émancipation. « Une nouvelle théorie critique est une théorie, et non une simple analyse ou explication. Elle réfléchit non seulement sur ce qui est, mais aussi sur ce qui est souhaitable. En cela, elle comporte nécessairement une dimension politique. Sont critiques les théories qui remettent en question l'ordre social existant de façon globale. Les critiques qu'elles formulent ne concernent pas des aspects limités de cet ordre, comme l'instauration d'une taxe sur les transactions financières, ou telle mesure relative à la réforme des retraites. Qu'elles soient radicales ou plus modérées, la dimension ”critique” des nouvelles théories critiques réside dans la généralité de leur remise en question du monde social contemporain. »
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Sur France Culture, une brève présentation de l'ouvrage
Alors que la politique est en plein renouvellement, qu'en est-il, ou que va-t-il en être des théories critiques ? C'est bien l'enjeu de cet ouvrage de Razmig Keucheyan, intitulé Hémisphère gauche, qui reparaît à nouveau...
Cet ouvrage nous permet de nous poser ces questions : que va-t-il en être de ces pensées qui ne sont pas seulement des explications ou des analyses, mais qui remettent en question l'ordre social et politique pour le transformer ?
Quels seront les grands sujets de discussion, et à quoi vont ressembler nos prochains penseurs critiques ? Aura-t-on plutôt des novateurs, de ceux qui mélangent, comme Toni Negri, le marxisme et le « deleuzo-foucaldisme », ou de ceux qui s'attaquent à de nouveaux objets de recherche, tel André Gorz et l'écologie ? Ou plutôt des dirigeants qui cumulent pouvoir et savoir ? Ou encore des pessimistes ?
Des pessimistes, façon Guy Debord, ou alors, aura-t-on des experts et des contre-experts ? Un contre-expert à la manière de Pierre Bourdieu qui veut dépasser l'opinion commune, la doxa, pour l'objectivité surplombante de la science ?

Bien sûr, il est beaucoup trop tôt pour dire qui seront nos penseurs critiques, mais cette galerie de portraits à laquelle on peut ajouter, entre autres, Judith Butler, Slavoj Zizek, Axel Honneth... et ce parcours au cœur des grands systèmes et sujets : féminisme, démocratie, classes, identités..., permettent déjà de se faire une idée, une cartographie, comme l'indique le sous-titre, des pensées critiques contemporaines à partir desquelles se forgeront sûrement les prochaines.
Et si cette carte semble sans fin, elle a au moins un pôle : tout part toujours d’une défaite, de défaites, politiques, idéologiques, d’une crise subie, d’un état critique qui devient alors la matière d'une critique, d'une proposition à venir.
France Culture 20/06/2017 par Géraldine Mosna-Savo
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Une nouvelle théorie critique est une théorie, et non une simple analyse ou explication. Elle réfléchit non seulement sur ce qui est, mais aussi sur ce qui est souhaitable. En cela, elle comporte nécessairement une dimension politique. Sont critiques les théories qui remettent en question l’ordre social existant de façon globale. Les critiques qu’elles formulent ne concernent pas des aspects limités de cet ordre, comme l’instauration d’une taxe sur les transactions financières, ou telle mesure relative à la réforme des retraites. Qu’elles soient radicales ou plus modérées, la dimension "critique" des nouvelles théories critiques réside dans la généralité de leur remise en question du monde social contemporain.
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Tout commence par une défaite. Quiconque souhaite comprendre la nature des pensées critiques contemporaines doit prendre ce constat pour point de départ.
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Vidéo de Razmig Keucheyan
La chercheuse Stéphanie Roza nous présente son "Histoire globale des socialismes", formidable abécédaire des notions, figures et moments du socialisme, codirigé avec Jean-Numa Ducange et Razmig Keucheyan. La philosophe constate la cote toujours baissante du terme "socialisme", tout en invitant les penseurs et les acteurs politiques à le revaloriser.
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