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4,34

sur 1247 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Cet auteur est juste incroyable !
C'est le deuxième ( et pas le dernier) roman que je lis de lui. Ses histoires sont incroyables et emmènent le lecteur dans un autre monde , un autre univers et pourtant il est d'une justesse sans nom.

A travers ses contes, ses légendes repris et transformés, on suit la rencontre entre le monde de la forêt et celui de la ville. La confrontation entre le magique , la religion... En fait, je crois que ces romans son emprunts d'une certaine philosophie, mais l'auteur tourne les choses de façon si magique ,si fantastique, que c'est lié a la mythologie qu'on aborde des sujets importants sans s'en rendre vraiment compte.
Je suis même sûre aujourd'hui qu'il faut plusieurs lectures de ce roman pour pouvoir en saisir tous les tenants et tous les aboutissants.

Et c'est sans oublié tout le côté humoristique qui donne une immense légereté à cette oeuvre

L'écriture de l'auteur est magique , prenante , envoutante et tellement juste. Je ne peux que recommander vivement la découverte d'un tel auteur
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Connaître et siffler les mots des serpents qui assujettissent les loups, les ours ou les élans, qui font des reptiles ses amis, en voilà un don linguistique ancestral qui facilite la vie sylvestre et mérite la transmission culturelle. Pourtant la forêt se déserte d'humains au profit des villages, où la modernité fanfaronne avec des faucilles, du pain ou des rouets, où Jésus-Christ est le must de la tendance branchée : «  Papa est d'une autre génération, les trucs des jeunes, ça le dépasse. C'est comme ça, il a fait son temps. Qu'est-ce qu'on pense de Jésus par chez nous ? Moi, je l'adore. J'ai son image au-dessus de mon lit. »
L'on est quelque part en Estonie, quelque part dans un monde médiéval en trompe-l'oeil de fable romanesque. Il y a Leemet le narrateur comme le dernier des Mohicans, l'on croise sur son chemin des anthropopithèques des cavernes un brin nostalgiques, un sage des esprits et des ondins pour le moins sanguinaire, un traditionaliste obscur aux contours à peine cachés de nationalisme. L'on rigole d'amours tendres et délicieux entre ours libidineux et filles nubiles, l'on médite sur les sirènes de la modernité et le poids des coutumes, l'on découvre le temps sacré de la Salamandre qui savait bouter hors de la forêt les hommes de fer. Et l'on frémit aux chocs des civilisations et son déchaînement de violence. Et puis « il n'y a plus personne dans la forêt ».

J'ai dévoré ce roman culte (450 pages) venant d'Estonie. Une sorte de mise en abyme de mondes qui disparaissent, avec une ironie mordante à nous montrer l'ancien comme nouveau, aux accents mirobolants teintés d'anachronisme, d'absurde, de drôlerie et de méditation sous-jacente sur la culture, la différence, le poids des traditions et l'attrait du moderne.
J'ai ri (beaucoup, surtout dans la première moitié), j'ai pas dormi, j'ai empathi (même avec un serpent), j'ai frémi. Et puis je l'ai fini (avec regrets).



« 

« Je l'ai rencontré dans la forêt. On ne se connait pas vraiment, on s'est vus qu'une fois ou deux. Je t'en prie maman, ne commence pas ! Je sais que tu ne supportes pas les ours, mais lui il est tout gentil, et puis il n'y a rien de sérieux entre nous, on se dit juste bonjour quand on se rencontre. »
« Salme, à ton âge on ne fréquente pas les ours ! » dit maman en tombant assise, l'air épouvanté, comme si un éclair venait de foudroyer le toit de notre cabane et de mettre le feu à son ménage.
« Il n'y a rien entre nous ! », répliqua Salme. « Tu entends ? On se dit juste bonjour. »
….
« Salme, les ours ça ne pense qu'à une chose ! »
« Ah oui, et à quoi ? »
« Tu le sais très bien ! Je t'interdis, tu m'entends, je t'interdis de revoir cet ours ! Ils sont beaux gosses et costauds, mais ils n'amènent que du malheur. »

 »
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Il y a fort fort longtemps, les estoniens vivaient au coeur de la forêt en totale harmonie avec la nature. Et puis, de la mer, sont venus les chevaliers allemands et avec eux, la modernité et le christianisme. Eblouis par ces hommes de fer, convaincus par les moines, les estoniens ont peu à peu quitté les bois pour vivre dans des villages, cultiver la terre et adorer Jésus-christ.
Mais Leemet n'est pas de cette eau là! Certes, il est né au village mais suite à un incident malheureux mettant en scène un ours, un adultère et une décapitation, sa mère est retournée dans la forêt avec ses deux enfants. Leemet a donc grandi dans le respect des traditions ancestrales et surtout, il a appris la langue des serpents. L'apprentissage fut douloureux, il n'est pas donné à tout le monde de communiquer avec les vipères royales et de se faire obéir de tous les animaux. Mais Leemet a tenu bon, s'est musclé la langue et, brillant élève, a fini par maîtriser entièrement ce langage, sans se douter qu'il serait un jour le dernier homme à le parler...En attendant cette ère funeste, Leemet vit heureux dans cette forêt qu'il connait par coeur. Avec ses amis, Pärtel et Hiie, sans oublier Ints, le jeune vipèreau, ils parcourent les bois en tout sens, rendent visite au dernier couple d' anthropopithèques éleveurs de poux, se régalent de délicieux rôtis d'élans ou de chevreuils et parfois jettent un oeil au village, intrigués par ces hommes qui ont oublié la langue des serpents, courbent l'échine dans les champs et se nourrissent de pain et de soupe d'orge. Bien sûr, leurs filles ne manquent pas de charme mais s'installer au village ce serait abandonner la liberté d'aller à sa guise, renoncer au plaisir interdit d'observer les femmes se flagellant, nues, à la cime des arbres certaines nuits de pleine lune, oublier la légendaire salamandre qui dort, bien cachée, quelque part au fond des bois. Leemet n'est pas prêt à cela et même quand la forêt se dépeuple inexorablement, même quand son meilleur ami suit le mouvement, même quand sa soeur se met en ménage avec un ours faute d'homme à marier, même quand il se sent seul, même quand Ülgas, le sage étend sa néfaste influence aux derniers résistants, Leemet tient bon, convaincu que ceux qui sont attirés par les sirènes de la modernité ont perdu toute raison. Seul rescapé de l'exode, il vivra seul, dernier homme du peuple de la forêt, dernier gardien des traditions.


Que dire de cette fantastique épopée pour que le public français en fasse le succès littéraire qu'il connait déjà en Estonie? Peut-être que chacun y trouvera son compte...Les écolos découvriront une ode à la nature où l'on l'homme vit en symbiose avec le règne animal, ne prélevant que ce qui lui est nécessaire pour vivre. Les amateurs de fantastique pourront lire une histoire épique où un cul-de-jatte peut s'envoler dans les airs tel un oiseau, une salamandre peut repousser l'envahisseur si des milliers d'hommes lui en sifflent l'ordre. Les assoiffés de sang y trouveront le récit de batailles sanglantes, de morts atroces, de rites sacrificiels. Ceux qui aiment rire seront comblés par la tournure comique de certaines scènes, quand les femmes de la forêt s'offrent aux ours patauds, mignons et terriblement séducteurs, quand les villageois se pâment devant le crottin de cheval que les chevaliers sèment dans les champs tandis que les filles s'émerveillent du chant des moines auxquels on coupe "les choses" pour rendre leurs voix plus mélodieuses, quand tous vénèrent Jésus comme une idole. Les historiens en apprendront beaucoup sur la culture estonienne, ses mythes, ses légendes. Et tous aimeront Leemet, le dernier homme à pouvoir parler avec les serpents. Il a bien essayé de vivre au village mais n'a pas su s'y adapter. Même si le récit de la disparition inéluctable de son mode de vie prend parfois des accents tristes et tragiques, ce n'est pas pour autant une histoire larmoyante et nostalgique, c'est juste le constat que l'avancée de ce qu'on appelle le progrès est inéluctable mais que l'on peut choisir de s'y soustraire, en toute connaissance de cause, quitte à être le dernier.
Il y aurait encore tant à dire mais l'ultime conseil sera : Précipitez-vous sur ce livre hors du commun!!
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« Dans mon temps, c’était beaucoup mieux… » ou alors « C’est dépassé tout ça , ce n’est plus tendance ! » Quel que soit le camp que l’on défend avec fanatisme, on perd toujours quelque chose… C’est ce que nous apprend cette fable sur le changement, qui dénonce avec le même humour ceux qui s’accrochent absurdement au passé et ceux qui adoptent aveuglément les idées nouvelles venues d’ailleurs.

L’histoire raconte une Estonie d’autrefois, un pays où on vivait dans la forêt et où on parlait encore la langue des serpents. Mais des chevaliers venus d’ailleurs ont apporté l’agriculture et la vie dans les plaines et les villages et peu à peu, les créatures fantastiques sont disparues. On y retrouvait même des anthropopithèques qui voulaient vivre dans les arbres comme leurs ancêtres !

Les étrangers amènent de nouvelles religions et les croyances se heurtent. De nouveaux Dieux remplacent les anciens, avec des logiques parfois bizarres. L’auteur traite la chose avec beaucoup d’ironie. Par exemple, lorsque le héros s’étonne que des moines civilisés castrent les jeunes garçons pour qu’ils puissent mieux chanter et que des villageois disent vouloir participer à cette modernité…

Les tenants du passé glorifient la puissance d’autrefois et rêvent de revanche. N’est-ce pas absurde de vouloir massacrer des gens pour venger les torts des générations précédentes ?

Malgré son ton souvent léger, on peut aussi réagir aux émotions du dernier homme, un homme sur qui le malheur s’acharne, puisque ses amours disparaissent, puisque son entourage se fait massacrer et que tout contribue à ce qu’il ne puisse transmettre son savoir.

Voilà donc une fable de l’Estonie, mais qui rejoint bien d’autres sociétés qui sont écartelées entre les modes de retrouver « les vraies valeurs de nos ancêtres » et l’obsolescence planifiée du prêt-à-jeter moderne ? Ne peut-on pas ainsi discuter de la diète paléolithique sur Facebook ?

Pour ma part, je ne crois pas que le passé soit la voie de l’avenir… mais je n’en oublie pas pour autant la devise du Québec, « Je me souviens… »

*Pour un résumé voir plutôt la critique de Sandrine57. C'est tellement bien dit que je ne veux pas répéter. :-)
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Bien sûr, tout comme moi, vous détestez les serpents ! Et pourtant ! En ouvrant ce livre, vous n'imaginez pas l'aventure que vous allez vivre en leur compagnie.
Vous y rencontrerez Leemet, enfant au début du roman, héros profondément attachant et narrateur de ce qui s'avère être une véritable fable décalée dont chaque épisode fourmille d'inventions surprenantes.

Vous y croiserez des ours libidineux qui se tressent des couronnes de pissenlits pour séduire les femmes, de sages serpents incompris qui méprisent les âneries fanatiques des humains, , un grand-père increvable à la fureur jubilatoire qui se fabrique des ailes avec des os humains, une salamandre géante depuis trop longtemps endormie… Sans compter Leemet, héros follement attachant et terriblement seul face à la bêtise humaine qui refuse toutes les différences.

L'histoire parfaitement construite, parvient sans peine à jouer sur tous les registres, entre épique et burlesque, aussi bien capable d'émouvoir à l'extrême que d'arracher un sourire.
Drôle, touchant, philosophique, magique, parfois mélancolique, parfois tragique ce roman est une pépite, un livre qui ne ressemble à aucun autre et qui ne s'oublie pas.
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Édition le Tripode – Littératures - Arts - OVNIS

Extrait de la Postface de Jean-Pierre Minaudier, traducteur de L'homme qui savait la langue des serpents :

C'est comme un pamphlet et non comme un simple conte fantastique que le roman de Kivirähk a été accueilli en Estonie. Cette dimension pamphlétaire n'a pas surpris le public estonien, même si elle était absente des précédents romans de Kivirähk : il intervient régulièrement dans les journaux sur des sujets politiques ou de société. Elle n'a pas non plus vraiment fait scandale, car les Estoniens sont tolérants et ont un sens aigu de l'autodérision, et parce que depuis quelques années des essayistes, comme Andreï Hvostov, et des historiens, comme Ea Jansen, disent à leur manière ce que Kivirähk exprime sur le mode romanesque.

Quatrième de couverture

Empreint de réalisme magique et d'un souffle inspiré des sagas islandaises, L'homme qui savait la langue des serpents révèle l'humour et l'imagination délirante d'Andrus Kivirähk.

Le roman qui connaît un immense succès depuis sa parution en 2007 en Estonie, retrace dans une époque médiévale réinventée la vie d'un homme qui, habitant dans la forêt, voit le monde de ses ancêtres disparaître et la modernité l'emporter.

Grand Prix de L'Imaginaire 2014

Challenge Atout prix 2017 – Grand Prix de L'Imaginaire 2014

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A la vue de cette superbe couverture représentant une sorte de reptile ailé, je n'ai pu résister à son charme ancien qui m'a rappelée les planches Deyrolle tant aimées de mon enfance.
« L'homme qui savait la langue des serpents » est un roman étonnant, mystérieux, qui m'a transportée dans un monde fascinant et étrange, peuplé d'animaux extraordinaires. Dans mes rêves éveillés, j'ai vu la légendaire Salamandre protégeant les rivages et affrontant des navires qui venaient piller les côtes estoniennes, un pou géant de compagnie, des ours qui séduisaient les jeunes filles,...

Entre récit fantastique et vieux mythes, roman picaresque et conte épique, règne un univers enchanteur où le réalisme magique côtoie l'histoire, le folklore, la culture et le paganisme. Ce roman est incontestablement insolite et extravagant, accentué peut-être par notre manque de connaissances et de références culturelles et historiques sur l'Estonie.

*
Le roman d'Andrus Kivirähk est un voyage passionnant qui nous plonge dans les forêts de l'Estonie médiévale à la rencontre des derniers peuples païens.

Avant l'invasion de chevaliers teutoniques venus de Germanie, les estoniens vivaient en harmonie dans la forêt, parlaient encore la langue des serpents, élevaient des louves laitières, se déplaçaient à dos de loup et hibernaient en hiver.
Mais depuis, leur monde et leur mode de vie sont en sursis. Petit à petit, les familles quittent la forêt, attirées par la vie plus facile dans les villages, et oublient leurs coutumes ancestrales. Elles apprennent l'allemand, se convertissent au christianisme et adoptent des noms bibliques.

« le monde change, il y a des choses qui sombrent dans l'oubli, d'autres émergent. »

Andrus Kivirähk est un auteur talentueux, qui a su créer un univers fascinant et original saupoudré de merveilleux et de fantaisie débridée. Toutefois, la dernière partie du récit devient un peu plus sombre et plus violente.

*
L'histoire n'est pas linéaire, elle se déroule en empruntant des sinuosités, suivant les différents habitants de la forêt tout au long de leur vie. L'auteur ne s'est pas focalisé totalement sur le personnage principal, il a aussi réussi à donner vie à de nombreux personnages inoubliables.

Le jeune Leemet, le narrateur, est le dernier de son peuple à connaître la langue ancestrale des serpents, celle qui lui permet de communiquer avec les serpents et les animaux de la forêt. Son récit se teinte souvent de mélancolie et de nostalgie, car si la Salamandre endormie ne se réveille pas, son peuple va s'éteindre.
Sa personnalité complexe, avec ses failles et ses imperfections, sa curiosité, ses doutes et ses interrogations le rend profondément humain et d'autant plus attachant. A travers le parcours de notre jeune héros, on ressent le changement profond qui s'opère dans sa vie : attiré par le nouveau mode de vie des étrangers et respectueux de l'ancienne culture, on voit se dessiner dans son esprit une envie de compromis.

« Les désagréments, c'est comme la pluie : un jour ils vont nous tomber dessus, mais il n'y a pas de raison de s'en soucier tant que le soleil brille. Et puis, la pluie, on peut s'en protéger, et beaucoup de choses qui semblent fort laides vues de loin ne sont pas si terribles que ça quand on s'en approche. »

Il dépeint un monde en profonde mutation : le poids des anciennes traditions et des rites sacrés face la modernité, un mode de vie de chasseurs-cueilleurs face à l'agriculture et l'élevage, la nature face à la culture, le paganisme face à la religion chrétienne.
Ce qui est extrêmement bien réussi, c'est la façon dont Leemet prend conscience de l'irrationalité et de l'absurdité du fanatisme religieux des deux sociétés.

« Il y en a qui croient aux génies et fréquentent les bois sacrés, et puis d'autres qui croient en Jésus et qui vont à l'église. C'est juste une question de mode. Il n'y a rien d'utile à tirer de tous ces dieux, c'est comme des broches ou des perles, c'est pour faire joli. »

*
De nombreux personnages, délicieusement croqués, à la fois hauts en couleur, loufoques et charismatiques, mettent une ambiance pleine de folie et d'extravagance : une jeune vipère royale, le grand-père de Leemet qui se bat comme un enragé avec ses crocs venimeux, le mystérieux personnage de Meeme, Tambet le sorcier du bois sacré, un couple d'anthropopithèques, Nounours l'amoureux transi de Salme.

« Nounours, c'était ce gros plantigrade avec qui ma soeur s'était mise en ménage depuis déjà cinq ans. Je me rappelais très bien comment elle avait quitté notre foyer – pour maman, naturellement, c'était une grande honte et un terrible malheur, car depuis sa triste expérience de jeunesse elle ne pouvait pas voir les ours, même en peinture. Bien sûr, il y avait belle lurette que nous savions que l'un d'entre eux tournait autour de Salme, mais maman faisait tout ce qu'elle pouvait pour tenir sa fille à l'écart du grand brun. À vrai dire, elle ne pouvait pas grand-chose. Salme traînait tout son saoul dans la forêt, et son galant traînait là où il fallait ; dans ces conditions, évidemment, leurs chemins se croisaient sans arrêt dans les fourrés. Il est très difficile à une jeune fille de se garder d'un ours : c'est si grand, si doux, si mignon, et ce museau qui sent le miel. Maman guerroya tant qu'elle put, mais le soir, quand ma soeur rentrait, ses vêtements étaient toujours couverts de poils. »

*
Dans une langue fluide et ensorcelante, Andrus Kivirähk explore avec profondeur et subtilité, la perte de l'identité culturelle et sociale, la confrontation entre traditions ancestrales et modernité. Il offre également des réflexions très intéressantes sur la famille, la guerre, l'amour, la condition de la femme et la liberté.

*
L'écriture d'Andrus Kivirähk est magnifique, poétique, colorée, légère, vivante, teintée d'humour, d'ironie et de sarcasme. Par la beauté des paysages, par la richesse incroyable du monde imaginé par l'auteur, par les émotions transmises, cette lecture est vraiment immersive.
Mais l'auteur n'hésite pas à emprunter des chemins plus tragiques, jonglant habilement avec la brutalité, la naïveté ou la stupidité des hommes, jouant ainsi avec nos émotions.

*
En résumé, "L'homme qui savait la langue des serpents" a un charme très particulier. Il a réussi à me séduire grâce à son atmosphère déjantée, son inventivité, ses personnages burlesques à la limite de la caricature, son monde riche et fascinant, son atmosphère entre mythologie et Histoire.

"L'homme qui savait la langue des serpents" fait partie de ces romans rares, qui sortent de l'ordinaire. Il ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais si vous souhaitez lire un roman atypique, il sera peut-être votre prochain coup de coeur, tout comme moi.
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Une fois n'est pas coutume, j'ai entamé la lecture de ce roman sans avoir consulté la moindre critique au préalable. Je savais donc très peu de choses à son sujet, hormis qu'il était précédé d'une réputation flatteuse (Grand Prix de l'Imaginaire en 2014 notamment) et que ses ingrédients principaux devaient fatalement provoquer notre rencontre un jour ou l'autre : Europe de l'Est médiévale et Imaginaire sur fond d'opposition entre paganisme et christianisme, comment résister ? Si je suis entré dans l'univers d'Andrus Kivirähk avec une certaine circonspection, j'en ressors littéralement enchanté. "L'homme qui savait la langue des serpents" est assurément l'une de mes plus belles découvertes de cette année, le type de lecture dont on sait qu'elle restera longtemps en mémoire.

Le roman est impossible à résumer, d'ailleurs l'entreprise serait assez vaine. Pour se faire une idée, il suffit de savoir qu'on y croise, entre autres, un couple d'éleveurs de poux dont le plus beau spécimen atteint la taille d'un chevreuil ; des ours libidineux recherchant la compagnie des femmes humaines jusqu'à se mettre en ménage avec elles ; un grand-père cul-de-jatte doté de crocs venimeux ; un gigantesque poisson à longue barbe dormant depuis des siècles au fond des mers ; des hordes de loups que l'on chevauche pour aller guerroyer contre les "hommes de fer" envahissant l'Estonie ; une mythique Salamandre cachée sous terre ; et bien sûr des serpents avec lesquels certaines personnes ont le pouvoir de parler... Le récit prend tour à tour des allures de fable, de conte philosophique, de saga nordique, de roman picaresque. L'écriture d'Andrus Kivirähk est pleine d'inventivité, de facétie, d'humour, ce qui n'empêche pas une bonne dose de noirceur, de violence et de cruauté. Et si les péripéties sont nombreuses tout au long de ces 450 pages, il ne faut pas forcément s'attendre à une succession d'événements très spectaculaires. Quitter sa forêt pour aller au village et goûter à ces étranges mets nommés "pain" et "vin", c'est déjà toute une aventure !

Il faut saluer le travail du traducteur, qui nous propose une postface d'un grand intérêt. Jean-Pierre Minaudier ne surinterprète pas le texte de manière pédante comme c'est souvent le cas dans ce genre d'exercice. Au contraire, il nous donne quelques clefs de compréhension fort bienvenues, liées au contexte historique et culturel de l'Estonie, tout en insistant sur l'une des idées essentielles développées dans le roman : si son narrateur est un homme de la forêt confronté à la disparition de son mode de vie traditionnel, Andrus Kivirähk ne cède pas pour autant à un discours rétrograde de type "c'était mieux avant". La course effrénée au prétendu progrès, l'imitation des modes venues de l'étranger (Jésus-Christ l'idole des jeunes !) sont des lubies ridicules, mais ceux qui s'accrochent de toute force à un passé révolu ne valent guère mieux. Païens et chrétiens, réactionnaires et progressistes, sont finalement renvoyés dos à dos.

"L'homme qui savait la langue des serpents" a été publié en français par un éditeur généraliste et son auteur ne vient pas montrer sa trogne chaque printemps aux Imaginales, pourtant on a bel et bien affaire à un authentique roman de fantasy. Il est à recommander chaudement aux habitués du genre, qui y retrouveront la magie et l'émerveillement qu'ils recherchent dans leurs lectures (avec en prime un dépaysement bien supérieur à la production anglo-saxonne courante) mais aussi à tous ceux qui ont de lourds a priori envers la fantasy : non, celle-ci ne se limite pas à l'image préconçue que vous en avez... Quant aux critiques de grands journaux, si prompts d'ordinaire à toiser avec dédain les "littératures de genre" mais dont l'enthousiasme s'affiche cette fois en quatrième de couverture : félicitations, vous avez lu et aimé un roman de fantasy, et parler de "réalisme magique" n'y changera rien !
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Voilà un livre de 470 pages dévoré en quelques soirée. Quelle imagination, quel talent.

Je ne connaissais pas cet auteur et j'ai deux de ses romans dans ma bibliothèque depuis des années. J'avais été attirée par la couverture, le titre et les recommandations de mon libraire. Et puis ils étaient restés bien au chaud dans ma bibliothèque. Finalement ce titre qui m'avait d'abord attiré, finissait par me répulser...

En début de semaine, je décidais de passer le cap. Et bien m'en a pris car ce livre est vraiment passionnant. Je m'étonne qu'aucun film n'ai été tiré de ce roman car c'est une belle épopée. La seule remarque négative est peut être que la dernière partie est franchement sanguinolente sur des pages et des pages.

Cette épopée qui permet une satire des religions, des nostalgiques des temps anciens et des adulateurs du monde moderne mis sur le même plan est vraiment très réussie. Car si le sujet est grave, il y a également plusieurs moments drôles.

je me réjouis de lire le second livre qui est dans ma bibliothèque de cet auteur.

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C'est un savoureux roman qui se lit comme une légende, un conte, une fable.
Un récit qui vous mène vers des terres étranges et lointaines (le moyen-âge et l'Estonie).
C'est aussi un rappel, une sorte de morale qui nous incite à ne pas oublier d'où on vient.
Le modernisme a détruit de bien belles coutumes et de vieilles traditions que nous ne retrouverons pas.
J'ai aimé cet humour siglant, et je fus transporté dans la langue des serpents que j'aurais bien aimé apprendre.
La fin est prévisible, MAIS elle est dite dès le début du roman.

Un auteur que je vais continuer à lire !

Extrait :

(note à la fin du livre, tout est dit)
Le roman est surtout une réflexion sur ce que c'est qu'être « le dernier des Mohicans », être en retard sur son temps, être en décalage avec le reste du monde ; réflexion menée, de manière très centre-européenne, par le biais de l'identité, du mode de vie, de la culture, de la langue. 

Bonne lecture !
Lien : https://angelscath.blogspot...
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