Le second tome des mémoires du théologien suisse
Hans Küng est édifiant, mais victime de certaines faiblesses:
-les développements de l'auteur sont parfois un peu abscons, et s'étendent au-delà du raisonnable sur des points de détail.
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Hans Küng se raconte avec une complaisance qui frise l'orgueil déplacé à de très nombreuses reprises. Ainsi apprend-on que tel journal l'a consacré l'un des hommes les plus importants de la planète, que ses conférences étaient prises d'assaut par une jeunesse avide de savoir érudit, qu'on l'y applaudissait à tout rompre dans les années 70. Küng va jusqu'à se comparer à Luther, et pose en champion de la liberté contre l'infâme curie romaine (laquelle n'est effectivement pas un modèle de générosité face à ses opposants de l'intérieur).
-Küng consacre plus de 100 pages de récriminations et de protestations outrées à l'épisode de son interdiction d'enseigner par l'Eglise en 1979. Certes, nous comprenons que cet événement traumatique est central (c'est tout de même son autobiographie, le lieu-même d'en parler). Mais toutes ces dizaines de pages à étaler ses amertumes sur le fait que tel ou tel théologien l'a lâché devant Rome au mauvais moment, c'est un peu forcé. Il semblerait, en réalité, que Küng se soit illustré par un tempérament exécrable face à la curie qui lui demandait simplement plus de modération dans ses théories théologiques audacieuses. Car oui,
Hans Küng est le héros des théologiens catholiques dits progressistes, un véritable opposant de l'intérieur, dont la voix était vraiment précieuse. Pourquoi? Car même dans ses exagérations manifestes, il argumentait avec grande intelligence. Je me souviens par exemple de l'une de ses petites phrases assassines, qui m'avait impressionné: dressé pendant des décennies contre le dogme de l'infaillibilité pontificale, il avait un jour persiflé en substance: oui, l'Eglise est infaillible... Infaillible dans l'erreur.
Hans Küng est un théologien inimitable, aussi excessif que nécessaire à l'Eglise.
Goûtez ses colères, ne vous y arrêtez pas, mais savourez ses raisons.