Le lecteur plonge dans le Japon d'après-guerre.
Tokyo 1947. le Japon est occupé par les forces américaines dirigées par le général MacArthur. Pour beaucoup, cette époque est synonyme de grandes privations et de changements idéologiques. La lutte pour la survie reste un combat quotidien pour de nombreux habitants de Tokyo.
Aya Shimamura est canadienne, elle a passé la plupart des années de guerre emprisonnée dans son pays natal pour la seule raison ses origines japonaises. de retour au Japon avec son père, elle devient la voisine de bureau de Fumi Tanaka au collège. Les deux filles vont nouer des liens d'amitié.
Aya permet au lecteur de cerner la vie des canadiens d'origine japonaise, contraint, après la guerre, d'accepter le rapatriement au Japon. Une forme d'expulsion aux conséquences désastreuses : Aya est considérée comme une paria au collège, elle ne parle que très peu le japonais, ce qui l'isole encore plus.
Afin d'aider sa famille à résister aux privations d'après-guerre, Sumiko, la grande soeur de Fumi, part travailler parmi les GI américains. Son travail n'a rien de louable, la jeune femme frôle la prostitution. Cela fait plusieurs mois qu'elle n'est pas revenue voir sa famille, et Fumi se met en tête qu'elle a disparu. Elle souhaite solliciter l'aide du Général
Douglas MacArthur, la rumeur disant qu'il lit personnellement les milliers de lettres qu'il reçoit de citoyens japonais. Certaines lettres offrent de la gratitude et des éloges. D'autres sont remplies de colère et de plaintes. La plupart demandent quelque chose d'impossible. Fumi est convaincue qu'une lettre pourrait faire des miracles et demande l'aide d'Aya pour rédiger la missive.
C'est là qu'entre en scène Matt
Matsumoto, un Américain d'origine japonaise qui fait partie d'un groupe de militaires américains chargés de traduire les lettres japonaises en anglais.
« Il était convaincu que mieux valait savoir qu'être dans l'ignorance, que la vérité, si laide ou douloureuse fut-elle, était un soulagement. »
Tous ces personnages sont liés d'une manière ou d'une autre.
Même après la disparition des balles et des bombes, le Tokyo d'après-guerre, pris entre l'occupation par l'ennemi et le besoin désespéré de reconstruction, reste un champ de bataille où s'affrontent des cultures et des moeurs divisées. Tout cela prend vie sous la plume de Lynne, sobre et élégante, qui s'avère être une grande conteuse. Elle arrive à la perfection à capter les nuances de la culture japonaise. Elle raconte une histoire peu connue, envoûtante et magnifique, tire sur la corde sensible du lecteur. Elle explore les complexités du coeur humain et le besoin universel d'appartenance. J'ai dévoré ce livre sans même m'en rendre compte, pas le temps de dire « ouf » et la fin s'amorçait déjà. Pourtant, c'est un petit pavé de presque 500 pages.
J'ai apprécié me plonger dans cette période historique assez méconnue pour moi. Certaines choses m'ont choquées, d'autres m'ont émues, l'auteure a très bien réussi à nous plonger dans ce Japon en pleine reconstruction. La position des japonais, des américains, les privations, la pauvreté, la faim. Et ces jeunes femmes n'ayant d'autre choix que de danser pour les GI, devenant bien souvent leurs maîtresses, activité oh combien honteuse, mais pourtant essentielle pour ramener de l'argent à la maison. L'occasion de m'instruire tout en passant un très bon moment de lecture.
Un petit bémol sur le titre, qui induit le lecteur en erreur : le coeur du roman n'est pas du tout le volet traduction des lettres. Il est assez secondaire. L'essence du roman est ces tranches de vie et ces personnages tourmentés. Et une petite critique sur le rythme, avec quelques longueurs, mais ce n'est que mon ressenti personnel. C'est une lecture plutôt calme, loin des page turner que j'ai l'habitude de lire ! Ceci explique très certainement cela.
«
le traducteur des lettres d'amour » est un témoignage émouvant sur la résilience de l'humanité, l'amitié, la famille et un pays en transition, que je vous conseille chaudement.
« Mais en commençant à travailler, il avait compris que les mots n'étaient pas seulement des lettres ou des symboles sur la page. Chacun renfermait une émotion. Il y avait les émotions qu'éprouvaient l'écrivain et le lecteur, mais aussi les siennes, celles du traducteur pris entre les deux, qui liait des secrets entre amants ou d'obscurs aveux. «
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