Ce livre m'a été mis dans les mains par une amie.
C'est un livre minuscule, tout blanc et très discret, qui, comme pour s'excuser d'être si petit, est interdit à la vente.
"Lire est le propre de l'homme" est un livre de témoignages et de réflexions de cinquante auteurs d'ouvrages pour l'enfance et la jeunesse.
Et, dès ses premières lignes, le lecteur comprend pourquoi l'opuscule ne peut être qu'offert.
Les choses importantes ne sont pas à vendre !
Car, ce petit livre, ouvert, devient un géant.
Ses mots enflent, enflent, enflent encore, jusqu'à devenir émotion et réflexion.
Susie Morgenstern y a dressé un début de liste des raisons qui incitent à lire.
Celle-ci va s'allonger longtemps à travers des milliers de lecteurs, de livres et d'auteurs.
La parole est ici donnée à quelques uns.
Le ton n'est pas dogmatique, ni professoral.
Pour écrire chacun des textes, La plume a été trempée à l'intelligence.
Chacun des textes dégage d'ailleurs de la force et de la sensibilité.
Pourtant, j'ai particulièrement aimé le texte, "j'aime/j'aime pas" de Marie Desplechin qui se sent proche de "ceux qui se sont perdus dans la lecture comme dans une forêt hantée, qui ont emprunté des chemins qui ne menaient nulle part, et qui ont ouvert leur sentier tout seuls, avec un opinel, au risque de mauvaises rencontres, au risque de se faire peur ou de se faire mal, au risque même de tourner en rond" ...
Je me suis un peu reconnu dans sa collégienne qui lit tout ce qui lui tombe sous la main et qui fait le désespoir du conseil de classe !
"Lire est le propre de l'homme", comme pour s'excuser d'être si généreux, ne demande qu'à être offert.
Il m'a été mis dans les mains par une amie, une bonne amie ...
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Sensation de bonheur encore plus fort que la première fois à la relecture de ces témoignages et réflexions de 50 auteurs de livres pour enfants. Magnifique initiative de L'école des loisirs.
Difficile de mettre des mots sur ceux d'auteurs de talent. J'ai posé des citations pour partage de l'amour de la lecture.
Yvette de Malika Ferdjoukh est émouvant. Où comment une gamine va vivre de sa plume grâce une voisine prostituée qui lui achètera et lui donnera le goût des livres.
Calcium de l'âme de Sophie Chérer est percutant. Une colère contre les technologies modernes où elle dit, je cite : Bref, remplacement des humanités par les inhumanités.
Un bijou alimenté de pépites de dessins de Solotareff, Nadja, Ponti, Ramos, etc.
A lire, à relire. A prêter à ceux qui vous demandent pourquoi lisez-vous ?
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Les auteurs (et auteures) ont été des enfants avant de devenir les écrivain(e)s qui offrent les magnifiques textes que nous partageons avec bonheur avec nos petits et à nos jeunes.
Ils nous expliquent le chemin qu'ils ont parcouru et comment ils sont tombés amoureux des mots, des lecteurs, des lectures.
C'est très touchant à la fois en tant que lecteur et en tant que parent, puis grand-parent.
J'adresse de chaleureux remerciements à Gill qui par son magnifique billet a occupé nombre de mes soirées à traquer ce livre .... J'ai finalement eu un exemplaire interdit à la vente dont j'ai demandé (et obtenu le remboursement) et découvert que la version en ligne était accessible librement sur le site de l'Ecole des Loisirs. N'hésitez pas à vous faire plaisir avec ou sans bout'de'choux. C'est un recueil qui vous regonflera à bloc si vous n'avez pas le moral et qui vous fera voir la vie encore plus belle si vous allez bien.
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Les enfants et les adolescents vivent aujourd'hui dans un monde bouleversé, envahi d'images et de sons, d'informations aussi vite commentées qu'oubliées, d'injonctions publicitaires, de violences et de crises, un monde régi par l'instant, l'argent et la vitesse. Et certains sont beaucoup plus vulnérables que d'autres. Plus encore qu'à l'époque où je suis arrivée en France, la lecture, par le silence, la lenteur et la solitude qu'elle impose, vertus exactement inverses à celles du bruit, de la vitesse et des sept cent soixante-six amis sur Facebook, donne les conditions nécessaires à l'élaboration d'une pensée critique, émancipée de toutes les pressions que les individus subissent. (p.173)
Lire, et lire au collège, demeure essentiel. Le livre est une clé ; des portes s'ouvrent à l'intérieur de soi, comme à l'extérieur. C'est donc ensemble, là, maintenant, que, tous, nous devons continuer à encourager ces initiatives, continuer à bâtir, à construire un grand pont fait de livres car on ne peut priver personne de ces échanges, de ces voyages porteurs de fruits..., « les fruits étranges et brillants de l'art », les fruits de la lecture.
Mendès France est resté dans quelques mémoires pour avoir été le doux dingue qui des ordonnait la distribution d'un verre de lait à chaque écolier à la récréation. Son discours extraordinaire de fin de vacances sur le sens de l'école, de l'apprentissage et, par conséquent, de la vie, suffit à montrer qu'il avait l'intention de s'occuper aussi d'une autre sorte de recalcification. Les scientifiques nous l'apprennent : c'est entre trois et quinze ans que l'organisme humain assimile le mieux le calcium. C'est durant cette période de douze ans qu'il se bâtit un squelette, une colonne vertébrale à toute épreuve. Ensuite, il est (un peu) trop tard.
Eh bien, il existe un calcium de l'âme.
Les enfants, au fond d'eux, en sont parfaitement conscients. Ils ont soif de paroles fortes, de lectures nourrissantes, de textes qui ne les laissent pas seuls avec leurs questions, leurs tourments, leurs désirs, leurs angoisses, d'exemples d'adultes qui leur donnent envie de grandir, d'expériences fondatrices qui les animent et les structurent au moment où ils en ont le plus besoin, et où ils sont le plus aptes à les retenir par toutes leurs fibres, à en faire un miel capable de couler leur vie durant.
Alors ne perdons pas une occasion de leur offrir des exemples de beauté, de justesse, de liberté, d'indépendance, de chants d'amour au monde. Les livres en sont pleins. ("Calcium de l'âme", Sophie Chérer, p.126-127)
Pouquoi je lis ? par Susie Morgenstern
1-Je lis parce que je suis souvent amenée à me trouver seule et que lire est l’un des plus grands plaisirs que la solitude puisse m’offrir.
2- Parce que lire me console de ma solitude.
3- Parce que lire me met à distance de moi-même et du monde.
4- Parce que lire me ramène à moi-même et au monde.
5- Je lis parce que je ne connais pas assez de gens et parce que l'amitié est vulnérable et susceptible de disparaître - pour cause d’espace, de temps, d’accords imparfaits et de peines de la vie.
6- je lis, conformément aux instructions de Samuel Johnson, pour prendre la mesure des choses.
6-Je lis pour connaître la différence entre les hommes et les femmes.
7-Je lis pour découvrir ce que ces choses peuvent avoir en commun avec moi et pour éprouver leur proximité.
8-Je lis pour connaître la différence entre les hommes et les femmes, et, pour savoir ce qu’est un homme.
9- Je lis pour me fortifier et apprendre ce qui m’intéresse de façon authentique.
10- Je lis pour mon plaisir, égoïstement, puisque je sais que je ne pourrai améliorer la vie
11- je lis professionnellement aussi, pour m’informer.
12- Je lis pour oublier mon corps.
13- je lis parce que je n’aime que les lecteurs et que je veux figurer parmi eux.
14- je lis pour me cultiver, pour me tenir au courant de ce qui s’écrit et pouvoir recommander des livres aux autres, notamment à mes filles et à mes petits-enfants.
15-Je lis... à cause de Shakespeare - parce que je suis toujours en quête d’un esprit plus original que le mien !
16- Je lis pour déchiffrer des sentiments humains dans la langue des humains.
17- Je lis pour essayer de me connaître mieux.
18- Je lis pour savoir davantage.
19- Je lis pour tomber amoureuse...d’un auteur, d’une phrase, d’une idée.
20- Je lis parce que, contrairement à ce qui se passe dans la vie, si on ne comprend pas une phrase ou un livre, on peut recommencer.
21- Je lis parce que, selon Kafka, « on lit afin de pouvoir poser des questions ».
22- Je lis parce qu’un ami de Kafka a dit : « Je ne crois pas que je pourrais exister sans livres. Pour moi, ils sont le monde entier. »
23- Je lis parce que Kafka répondu : « C’est une erreur. Le livre ne peut pas remplacer le monde. C’est impossible. Dans la vie, tout a un sens et un rôle auxquels rien ne peut se substituer. On ne peut pas, par exemple, confier son vécu à une doublure. Il en va de même du monde et des livres. On tente d’emprisonner la vie dans les livres, comme un oiseau chanteur dans une cage. Mais ça ne marche pas. »
24- Je lis parce que Kafka a dit : « Il me semble qu’on devrait lire que les livres qui vous mordent et vous piquent. Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d’un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire ? Pour qu’il nous rende heureux, comme tu l’écris ? Mon Dieu, nous serions tout aussi heureux si nous n’avions pas de livres, et des livres qui nous rendent heureux, nous pourrions à la rigueur en écrire nous-mêmes.
« En revanche, nous avons besoin de livres qui agissent sur nous comme un malheur dont nous souffririons beaucoup, comme la mort de quelqu’un que nous aimerions plus que nous-mêmes, comme si nous étions proscrits, condamnés à vivre dans des forêts loin de tous les hommes, comme un suicide - un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. »
25- Je lis parce que, dans Mister Pip, Lloyd Jones a écrit : « Tu ne peux pas faire semblant de lire un livre. Tes yeux vont te trahir. Ton souffle aussi. Quelqu’un qui est fasciné par un livre oublie tout bonnement de respirer. La maison peut prendre feu, le lecteur plongé dans un livre ne lèvera pas les yeux avant que le papier peint ne s’enflamme. Pour moi, Latilda, De grandes espérances est ce genre de livre. Il m’a permis de changer ma vie. »
Je ne suis encore qu’au début de ma liste qui, je l’espère, va s’allonger, longtemps, à travers des milliers de livres.
Et vous, vous lisez pourquoi ?
Quand je trouvais un roman qui m’emportait, j’aimais lire lentement, plus lentement encore sur les dernières pages, pour que ça dure encore un petit peu, pour différer le moment où je devrais fermer le livre. J’éprouvais le sentiment délicieux de ma liberté. J’étais à la fois, par ces vies fictives, loin de moi et rendue à moi-même, un moi indépendant des contingences familiales, culturelles, religieuses, politiques.
Il faut donner des livres aux enfants pour leur faire prendre conscience de tout ce qui les contraint, pour alléger leurs souffrances, pour les faire rire, pour les faire rêver, pour les aider à penser, pour les rendre libres.
Leur donner des livres comme il m’en a été donné. Pour les délivrer.
Brigitte Smadja